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23/05/2023 | FRANCE | N°22/00630

France | France, Cour d'appel de Reims, 1ere chambre sect.civile, 23 mai 2023, 22/00630


ARRET N°

du 23 mai 2023



R.G : N° RG 22/00630 - N° Portalis DBVQ-V-B7G-FEV7





S.A.S. FONCIA LCA





c/



S.C.I. IMOBEL















Formule exécutoire le :

à :



la SCP DELGENES JUSTINE DELGENES



Me Stéphane BLAREAU

COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE CIVILE-1° SECTION

ARRET DU 23 MAI 2023



APPELANTE :



d'un jugement rendu le 21 février 2022 par le Tribunal judiciaire de CHARLEVILLE-MEZI

ERES



S.A.S. FONCIA LCA

[Adresse 3]

[Localité 5]



Représentée par Me Richard DELGENES de la SCP DELGENES JUSTINE DELGENES, avocat au barreau des ARDENNES



INTIMEE :



S.C.I. IMOBEL

[Adresse 2]

[Localité 4]



Représentée par Me St...

ARRET N°

du 23 mai 2023

R.G : N° RG 22/00630 - N° Portalis DBVQ-V-B7G-FEV7

S.A.S. FONCIA LCA

c/

S.C.I. IMOBEL

Formule exécutoire le :

à :

la SCP DELGENES JUSTINE DELGENES

Me Stéphane BLAREAU

COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE CIVILE-1° SECTION

ARRET DU 23 MAI 2023

APPELANTE :

d'un jugement rendu le 21 février 2022 par le Tribunal judiciaire de CHARLEVILLE-MEZIERES

S.A.S. FONCIA LCA

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentée par Me Richard DELGENES de la SCP DELGENES JUSTINE DELGENES, avocat au barreau des ARDENNES

INTIMEE :

S.C.I. IMOBEL

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Stéphane BLAREAU, avocat au barreau de REIMS

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS :

Madame PILON conseiller, a entendu les plaidoiries, les parties ne s'y étant pas opposées. Elle en ont rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Madame Elisabeth JUNGBLUTH, présidente de chambre

Madame MAUSSIRE, conseiller

Madame PILON, conseiller

GREFFIER :

Madame MARTYNIUK, greffier lors des débats et Monsieur MUFFAT-GENDET greffier lors du prononcé ;

DEBATS :

A l'audience publique du 04 avril 2023, où l'affaire a été mise en délibéré au 23 mai 2023,

ARRET :

Contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe le 23 mai 2023 et signé par Madame MAUSSIRE conseiller en remplacement de la présidente de chambre régulièrement empêchée, et Monsieur MUFFAT-GENDET, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

La SCI Imobel est propriétaire du lot n°20 dans un immeuble en copropriété situé [Adresse 1] à [Localité 6].

Le syndic de la copropriété ayant adressé aux copropriétaires une lettre de convocation à une assemblée générale, la SCI Imobel a fait assigner le syndicat des copropriétaires [Adresse 1] le 13 janvier 2021, afin de voir juger que cette convocation n'a pas respecté le délai de 21 jours avant la date de la réunion, que certaines résolutions n'étaient pas urgentes et obtenir leur annulation.

Par jugement du 21 février 2022, le tribunal judiciaire de Charleville-Mézières a :

- Prononcé l'annulation des délibérations n°5, 5.1, 5.2, 5.3, 5.4, 5.5, 5.6, 6, 6.1, 6.2, 6.3, 6.4, 6.5 prises par le syndicat des copropriétaires [Adresse 1], pris en la personne de son syndic Foncia LCA, lors de l'assemblée générale du 20 octobre 2020

- Débouté le syndicat des copropriétaires de l'ensemble de ses demandes,

- Condamné le syndicat des copropriétaires aux entiers dépens de l'instance, dont distraction au profit de Me Stéphane Blareau conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,

- Condamné le syndicat des copropriétaires à payer à la SCI Imobel la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- Rappelé que l'exécution provisoire est de droit conformément à l'article 514 du code civil.

Le tribunal a considéré que le syndic était fondé à provoquer une assemblée générale en urgence et pouvait bénéficier d'un délai abrégé pour faire voter les résolutions 1 à 4.5 incluse concernant les travaux de mise en sécurité de l'immeuble suite à la mise en demeure de péril imminent de la ville de [Localité 6], mais qu'il n'était pas démontré que les travaux dits " de solidité de l'immeuble " et ceux relatifs au tuyau en gré revêtaient le caractère d'urgence permettant de déroger à l'exigence du respect d'un délai de 21 jours entre la convocation et la tenue de l'assemblée générale. Il a relevé en particulier que ces travaux de solidité avaient déjà fait l'objet d'échanges de longue date entre la ville et le syndic, qu'ils devaient faire l'objet de plusieurs devis et qu'il était prévu une assemblée générale avant fin décembre 2020 comme cela était mentionné dans un courrier électronique envoyé par le syndic à la ville le 28 septembre 2020.

La SAS Foncia LCA es qualités a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 9 mars 2022.

Dans ses dernières conclusions, notifiées le 14 septembre 2022, elle demande à la cour d'appel d'infirmer le jugement en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau, de :

- Débouter la SCI Imobel en toutes ses demandes, fins et conclusions,

- Condamner la SCI Imobel à lui payer es qualités une somme de 2 000 euros à titre de dommages intérêts pour procédure abusive et injustifiée, outre celle de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamner la SCI Imobel aux entiers dépens d'instance, dont distraction au profit de la SCP Delgenes Vaucois Justine Delgenes.

Elle explique que si le devis des travaux en cause date du mois d'avril 2020, la ville de [Localité 6] a visité les lieux le 28 septembre suivant et adressé au syndicat des copropriétaires une mise en demeure de réaliser lesdits travaux, faute de quoi un arrêté de péril serait pris sous 8 jours, de sorte que la copropriété ne disposait plus de latitude pour les organiser comme elle l'avait envisagé initialement. Elle souligne le fait que les travaux en cause sont relatifs à la solidité de l'immeuble et qu'il s'agit donc de résolutions indispensables.

Par conclusions notifiées le 2 août 2022, la SCI Imobel demande à la cour de :

- Confirmer la décision du tribunal judiciaire de Charleville-Mézières,

- Condamner le syndicat des copropriétaires [Adresse 1] à [Localité 6] à lui payer la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Le condamner aux entiers dépens de l'instance, dont distraction requise au bénéfice de Me Stéphane Blareau.

Elle estime que la condition d'urgence nécessaire à un délai de convocation abrégé n'est pas remplie pour les résolutions en cause et soutient que le délai de 21 jours doit être respecté lorsque l'assemblée est appelée à se prononcer à la fois sur des questions urgentes et sur d'autres qui ne le sont pas.

MOTIFS

Sur la demande d'annulation

Il résulte de l'article 9 du décret n°67-223 du 17 mars 1967 pris pour l'application de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, que la convocation de l'assemblée générale des copropriétaires est, sauf urgence, notifiée au moins vingt et un jours avant la date de la réunion, à moins que le règlement de copropriété n'ait prévu un délai plus long.

Selon l'article 13, l'assemblée générale ne prend de décision valide que sur les questions inscrites à l'ordre du jour et dans la mesure où les notifications ont été faites conformément aux dispositions de l'article 9, notamment.

Ces textes étant d'ordre public, la nullité prévue est de droit et le demandeur n'a donc pas à justifier l'existence d'un préjudice personnel ou d'un préjudice au détriment d'autres propriétaires résultant de la tardiveté de la convocation.

L'article 64 du décret précité prévoit : " Toutes les notifications et mises en demeure prévues par la loi du 10 juillet 1965 susvisée et le présent décret sont valablement faites par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. Le délai qu'elles font, le cas échéant, courir a pour point de départ le lendemain du jour de la première présentation de la lettre recommandée au domicile du destinataire.

Toutefois, la notification des convocations prévues au présent décret ainsi que celle de l'avis mentionné à l'article 59 ci-dessus peuvent valablement résulter d'une remise contre récépissé ou émargement ".

Les parties ne soutiennent pas que le règlement de copropriété prévoit un délai minimal de convocation plus long que celui prévu par l'article 9.

La société Foncia justifie de ce que la lettre de convocation adressée à la SCI Imobel par courrier recommandé avec demande d'avis de réception a été présentée pour la première fois au domicile de celle-ci le 9 octobre 2020.

Le délai de 21 jours a donc commencé à courir le 10 octobre 2020, pour s'achever le 31 octobre suivant, à 24 heures.

L'assemblée générale des copropriétaires s'est tenue le 20 octobre 2020, donc avant l'expiration du délai minimal.

La société Foncia excipe du caractère urgent des résolutions figurant à l'ordre du jour de cette assemblée.

L'assemblée générale litigieuse a eu à se prononcer sur trois types de travaux :

- Travaux de mise en sécurité de l'immeuble 'suite à la mise en demeure de péril imminent de la ville de [Localité 6]' (résolutions n°4 et suivantes), un devis de 5 394 euros étant joint à la convocation, portant sur un étaiement de sécurité de la structure support de la verrière dans le magasin,

- Travaux 'de solidité de l'immeuble' (résolutions n°5 et suivantes), le devis joint, de 94 199.86 euros, est relatif aux désordres sur le mur de façade sur cour intérieure, gros 'uvre, reprise en sous-'uvre,

- Travaux de réfection du tuyau en gré commun se situant dans la cave du local commercial (résolution n°6 et suivantes), le devis joint, de 1 350 euros, évoque une fuite dans le mur.

Le contenu du devis pour les travaux de solidité de l'immeuble révèle que la réparation de la fuite était un préalable à la réalisation de ces travaux.

La SCI Imobel ne conteste tout caractère d'urgence qu'aux résolutions qui concernent les travaux de solidité de l'immeuble et le tuyau en gré.

Le 28 septembre 2020, les services de la ville de [Localité 6] ont contacté la société Foncia suite au signalement d'un occupant de l'immeuble en indiquant que la situation était préoccupante au vue des dégradations constatées le long des murs de pièces donnant sur la cour intérieure, notamment, qu'il semblait urgent d'entreprendre des démarches sur cette situation et que la collectivité devrait prendre les mesures nécessaires de procédure de péril sur l'immeuble, dans un délai d'une semaine, si aucune démarche d'expert n'était engagée par le syndic.

En réponse, la société Foncia a indiqué, le même jour, qu'un rapport sur la solidité de l'immeuble avait déjà eu lieu, qu'un devis d'entreprise avait été établi, d'autres étant attendus et qu'une assemblée générale devait se tenir avant fin décembre ou plus tôt, si un deuxième devis était reçu. Des documents étaient joints par le syndic pour justifier de ces démarches.

Au vu de ces documents, la ville a, le 29 septembre 2020, envoyé un nouveau courrier électronique soulignant le fait que le rapport d'expertise n'indiquait pas si des mesures conservatoires étaient ou non nécessaires et interrogeant la société Foncia sur la nécessité ou non d'effectuer de telles mesures avant l'assemblée générale prévue à la fin du mois de décembre. Une réponse était attendue dans la semaine, à défaut de quoi la ville indiquait qu'elle serait dans l'obligation de lancer une procédure de péril imminent.

Ainsi, l'urgence portait alors sur d'éventuels travaux conservatoires.

Le 29 septembre 2020, la société Foncia a interrogé l'auteur du rapport d'expertise précité, lequel a répondu le jour même : " en aucun cas il ne faut imaginer pouvoir prendre du délai quant au renforcement de la structure existante qui a été renforcée sans respect des règles de l'art. Comme stipulé dans notre rapport (') 'la contrainte est largement dépassée' entraînant un risque de rupture et d'effondrement = les coefficients de sécurité sont en deçà de 50%. Il est donc essentiel pour le bien et la sécurité des biens et des personnes, d'entreprendre au plus vite et sans délai, les renforcements nécessaires comme indiqué dans nos conclusions ".

L'expert soulignait ainsi l'urgence de réaliser les travaux définitifs de renforcement préconisés en conclusion de son rapport, lequel n'évoque pas de mesures conservatoires.

Les services municipaux se sont alors interrogés sur le caractère suffisant des mesures conservatoires pour lever les risques d'effondrement et maintenir les occupants dans leur logement (message électronique du mercredi 30 septembre 2020). En tout état de cause, ils ont indiqué qu'une procédure de péril imminent serait lancée dès le lundi suivant si ces mesures n'étaient pas mises en place.

S'il est ainsi justifié de l'urgence de soumettre à l'assemblée générale la réalisation des travaux de réalisation des mesures conservatoires, compte tenu de la menace d'une procédure de péril imminent, la société Foncia ne justifie pas du caractère également urgent d'un vote sur les travaux définitifs, dès lors qu'elle ne fait pas la preuve de l'insuffisance des mesures conservatoires, dont elle a décidé de soumettre le principe aux copropriétaires. Et elle ne justifie donc pas non plus du caractère urgent des travaux préalables d'intervention sur le tuyau en gré.

En conséquence, aucune urgence ne justifie la convocation tardive de l'assemblée générale du 20 octobre 2020 pour voter sur les résolutions 5 à 6.5, qui doivent donc être annulées. Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur la demande indemnitaire pour procédure abusive et injustifiée

Compte tenu de ce qui précède, la société Foncia doit être déboutée de sa demande de condamnation de la société Imobel pour procédure abusive et injustifiée.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Le premier juge a exactement statué sur le sort des dépens et les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile dont il a fait une équitable application et le jugement sera confirmé de ces chefs.

La société Foncia es qualités, qui succombe en son appel, est tenue aux dépens de cette instance et sa demande en paiement au titre de ses frais irrépétibles doit être rejetée.

Il est équitable d'allouer à la SCI Imobel la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Me [K] [P] sera autorisé à recouvrer les dépens d'appel dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et par arrêt contradictoire,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 21 février 2022 par le tribunal judiciaire de Charleville-Mézières,

Y ajoutant,

Condamne le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] à [Localité 6] à payer à la SCI Imobel la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] à [Localité 6] de sa propre demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] à [Localité 6] aux dépens, dont distraction au profit de Me Stéphane Blareau.

Le greffier Le conseiller en remplacement de la présidente de chambre


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Reims
Formation : 1ere chambre sect.civile
Numéro d'arrêt : 22/00630
Date de la décision : 23/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-23;22.00630 ?
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