Arrêt n°
du 17/05/2023
N° RG 22/00676
MLB/FJ
Formule exécutoire le :
à :
COUR D'APPEL DE REIMS
CHAMBRE SOCIALE
Arrêt du 17 mai 2023
APPELANTE :
d'un jugement rendu le 13 décembre 2021 par le Conseil de Prud'hommes de CHALONS EN CHAMPAGNE, section Encadrement (n° F 20/00033)
Madame [E] [I]
[Adresse 2]
[Localité 5]
Représentée par la SCP ACG & ASSOCIES, avocat au barreau de REIMS
INTIMÉES :
SELARL [H] [L]
agissant en sa qualité de mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de l'Union Régionale des Associations des Communes Forestières de Champagne Ardennes (URACORFOR)
prise en la personne de son associée, Maître [H] [L]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Sandy HARANT, avocat au barreau de REIMS
L'UNEDIC DELEGATION AGS CGEA D'[Localité 6]
[Adresse 3]
[Localité 6]
Représentée par la SELARL RAFFIN ASSOCIES, avocats au barreau de REIMS
DÉBATS :
En audience publique, en application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 mars 2023, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Marie-Laure BERTHELOT, conseiller, chargé du rapport, qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré ; elle a été mise en délibéré au 17 mai 2023.
COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :
Madame Marie-Lisette SAUTRON, conseiller faisant fonction de président
Madame Marie-Laure BERTHELOT, conseiller
Madame Isabelle FALEUR, conseiller
GREFFIER lors des débats :
Monsieur Francis JOLLY, greffier
ARRÊT :
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Madame Marie-Lisette SAUTRON, conseiller faisant fonction de président, et Monsieur Francis JOLLY, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
* * * * *
Suivant contrat de travail à durée indéterminée, l'Union Régionale des Associations des Communes Forestières de Champagne Ardennes (ci-après l'URACORFOR) a embauché Madame [E] [I] à compter du 1er janvier 2008 en qualité de directrice, statut cadre, à temps complet, avec une reprise d'ancienneté au 1er septembre 2003.
Suivant avenant au contrat de travail en date du 28 décembre 2012, Madame [E] [I] a travaillé à temps partiel à hauteur de 121,33 heures par mois à compter du 1er janvier 2013.
À compter du 20 décembre 2019, Madame [E] [I] a été en arrêt de travail.
Le 14 mai 2020, Madame [E] [I] a saisi le conseil de prud'hommes de Châlons-en-Champagne d'une demande tendant au prononcé de la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur.
Le 27 mai 2020, le médecin du travail a rendu un avis d'inaptitude de Madame [E] [I] à son poste de directrice, indiquant qu'elle était apte à un poste similaire dans un autre établissement.
Par jugement en date du 15 décembre 2020, le tribunal judiciaire de Châlons-en-Champagne a prononcé l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire sous le régime normal à l'égard de l'URACORFOR et a nommé la Selarl [H] [L], prise en la personne de Maître [H] [L], en qualité de liquidateur.
Le 15 décembre 2020, le mandataire liquidateur convoquait Madame [E] [I] à un entretien préalable à un éventuel licenciement pour motif économique le 23 décembre 2020, au cours duquel le document de présentation du contrat de sécurisation professionnelle lui était remis.
Le 28 décembre 2020, le mandataire liquidateur lui indiquait être dans l'obligation de procéder à son licenciement pour cause économique et lui rappelait qu'elle pouvait bénéficier du contrat de sécurisation professionnelle, auquel elle adhérait le 8 janvier 2021.
L'association Unédic délégation AGS CGEA d'[Localité 6] est intervenue à l'instance.
Lors de l'audience de jugement, Madame [E] [I] demandait au conseil de prud'hommes de :
- prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur,
- juger que cette résiliation produit les effets d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse à la date du 13 janvier 2021,
- fixer sa créance au passif de la liquidation judiciaire de l'URACORFOR aux sommes suivantes :
. 161,21 euros au titre du solde de l'indemnité légale de licenciement,
. 8705,01 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, outre la somme de 870,50 euros au titre des congés payés y afférents,
. 34820 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
. 5079,41 euros au titre du remboursement des indemnités journalières non rétrocédées,
. 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- juger la décision opposable à l'Unédic délégation AGS CGEA d'[Localité 6],
- condamner le mandataire liquidateur ès qualités aux dépens.
Par jugement en date du 13 décembre 2021, le conseil de prud'hommes a :
- fixé la créance de Madame [E] [I] au passif de la liquidation judiciaire de l'URACORFOR aux sommes de :
. 162,21 euros au titre d'un solde sur l'indemnité de licenciement,
. 5079,41 euros au titre des remboursements des indemnités journalières non rétrocédées,
- débouté Madame [E] [I] de l'ensemble des ses autres demandes,
- donné acte à l'Unédic délégation AGS CGEA d'[Localité 6] de ce qu'elle s'en rapporte aux conclusions prises par le mandataire liquidateur sur les éléments de fait et qu'elle ne pourra être amenée à avancer le montant des condamnations prononcées qu'entre les mains du mandataire liquidateur,
- jugé que la décision est opposable à l'Unédic délégation AGS CGEA d'[Localité 6],
- débouté les parties de toutes leurs autres demandes et surplus,
- condamné Madame [E] [I] aux dépens.
Le 16 mars 2022, Madame [E] [I] a formé appel du jugement en ce qu'il l'a déboutée de l'ensemble de ses autres demandes, a débouté les parties de toutes leurs autres demandes et surplus et l'a condamnée aux dépens.
Dans ses écritures en date du 2 février 2023, Madame [E] [I] demande à la cour d'infirmer le jugement des chefs précités et de le confirmer pour le surplus.
Elle demande à la cour, statuant à nouveau :
* à titre principal, de :
- prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur,
- juger que la résiliation judiciaire produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse à la date du 28 décembre 2020,
- fixer sa créance au passif de la liquidation judiciaire de l'URACORFOR aux sommes de :
. 8705,01 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et 870,50 euros au titre des congés payés y afférents,
. 34820 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
. 4140 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
* à titre subsidiaire, de :
- juger que les fautes commises par l'employeur engagent sa responsabilité contractuelle,
- fixer sa créance au passif de la liquidation judiciaire de l'URACORFOR aux sommes de :
. 34820 euros à titre de dommages-intérêts,
. 4140 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
* en tout état de cause, de :
- débouter le mandataire liquidateur ès qualités de l'ensemble de ses demandes,
- juger que la décision est opposable à l'Unédic délégation AGS GEA d'[Localité 6],
- condamner le mandataire liquidateur ès qualités aux dépens.
Dans ses écritures en date du 21 octobre 2022, la Selarl [H] [L] ès qualités demande à la cour de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté Madame [E] [I] de sa demande de résiliation judiciaire et des demandes financières en découlant et de l'infirmer en ce qu'il a fixé la créance de Madame [E] [I] sur la liquidation judiciaire au titre du solde de l'indemnité de licenciement à la somme de 162,61 euros.
En tout état de cause, elle demande à la cour de :
- fixer la date d'effet de la résiliation judiciaire au 29 décembre 2020, date d'envoi de la notification du licenciement,
- rejeter l'argumentaire de l'Unédic délégation AGS CGEA d'[Localité 6] visant à dénier sa garantie pour les conséquences de la résiliation judiciaire dans la mesure où ce moyen n'est pas repris dans les prétentions figurant dans le dispositif de ses écritures et dans la mesure où, la rupture étant intervenue dans le délai de 15 jours de la liquidation judiciaire, la garantie est due,
- limiter la demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à l'indemnisation minimale prévue à hauteur de trois mois de salaire, soit la somme de 7335,15 euros,
- débouter Madame [E] [I] de sa demande d'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés sur préavis,
- déclarer irrecevable car nouvelle la demande visant à obtenir des dommages-intérêts à hauteur de 34820 euros formée en raison de la responsabilité contractuelle alléguée de l'employeur, et en tout état de cause débouter Madame [E] [I] de sa demande de dommages-intérêts,
- débouter Madame [E] [I] de sa demande au titre des frais irrépétibles et de sa demande de condamnation aux dépens.
Dans ses écritures en date du 12 septembre 2022, l'Unédic délégation AGS CGEA d'[Localité 6] demande à la cour :
- de lui donner acte de ce qu'elle s'en rapporte aux conclusions prises par le mandataire liquidateur sur les éléments de fait,
- d'infirmer le jugement en ce qu'il a fixé la créance de Madame [E] [I] sur la liquidation judiciaire de l'URACORFOR à titre de solde d'indemnité de licenciement à la somme de 162,61 euros,
- de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté Madame [E] [I] de sa demande de résiliation judiciaire et des demandes découlant de la rupture du contrat de travail,
* à titre principal, de débouter Madame [E] [I] de l'ensemble de ses demandes contraires à ses écritures,
* à titre subsidiaire, de fixer la date de résiliation judiciaire au 13 décembre 2021,
* à titre encore plus subsidiaire, fixer la date de résiliation judiciaire au 13 janvier 2021,
* en tout état de cause, de lui donner acte de ce qu'elle ne pourra être amenée à avancer le montant des condamnations éventuellement prononcées par la cour qu'entre les mains du mandataire liquidateur et dans la seule limite des textes légaux et plafonds réglementaires applicables, à l'exclusion de tous intérêts et autres, et de juger que la garantie prévue par les dispositions de l'article L. 3253-6 du code du travail ne peut concerner que les seules sommes dues en exécution du contrat de travail au sens dudit article et de condamner tout autre qu'elle aux dépens.
Motifs :
- Sur la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur :
Madame [E] [I] reproche à l'URACORFOR plusieurs manquements, lesquels sont selon elle, suffisamment graves pour avoir empêché la poursuite du contrat de travail, dans les termes suivants :
- l'absence de réaction face à sa souffrance. Elle soutient que les pièces qu'elle produit établissent qu'elle avait clairement manifesté une situation de souffrance et de stress parce qu'elle était niée, dénigrée et dévalorisée dans son travail, notamment par sa collègue, coordinatrice, et qu'elle n'a bénéficié d'aucun soutien de la part du président de l'URACORFOR, la laissant ainsi en souffrance sans qu'il ne prenne aucun mesure, aboutissant d'ailleurs à ce que le médecin du travail la déclare inapte, ce qui constitue un manquement à son obligation de sécurité, lequel a duré jusqu'à son licenciement.
- l'absence de reprise du paiement du salaire à l'expiration du délai d'un mois suivant l'avis d'inaptitude et ce pendant une durée de 7 mois, aucune régularisation n'étant intervenue avant son licenciement.
- l'absence de versement d'une partie des indemnités journalières perçues dans le cadre de la subrogation, le mandataire liquidateur n'ayant pour sa part procédé qu'à une régularisation partielle après le licenciement.
La Selarl [H] [L] conteste tout manquement de l'employeur à son obligation de sécurité, alors même que Madame [E] [I] n'a a jamais témoigné d'un quelconque malaise auprès de lui et qu'elle ne cesse d'écrire qu'elle a tout gardé pour elle, qu'en toute hypothèse, le président a répondu au courrier de la salariée en date du 26 février 2020, lequel intervient juste après qu'elle n'ait pas obtenu la rupture conventionnelle qu'elle souhaitait, qu'aucun lien n'est établi entre sa dépression et son travail.
Elle ajoute qu'elle a procédé au remboursement des indemnités journalières dues pour la période entre le 25 novembre 2020 et le 15 décembre 2020 dès le 19 janvier 2021, fait des règlements bien avant l'audience de plaidoirie et que s'il reste dû une somme de 5079,41 euros, Madame [E] [I] a laissé cette situation perdurer sans réagir pendant de nombreux mois.
Elle conclut donc à la confirmation du chef du jugement ayant débouté la salariée de sa demande au titre du prononcé de la résiliation judiciaire de son contrat de travail en l'absence de grief suffisamment grave justifiant la rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur.
A titre limininaire, il doit être rappelé que Madame [E] [I] était directrice de l'URACORFOR, laquelle comportait une autre salariée, et que l'Union devait fusionner avec les structures équivalentes de Lorraine et d'Alsace, dans le cadre d'un futur comité grand est, dont Madame [Y] [C], alors directrice des communes forestières de Lorraine, était la coordinatrice.
C'est dans le cadre de cette période transitoire, et à partir du mois d'août 2018, que Madame [E] [I] situe l'apparition d'une souffrance au travail.
Celle-ci est caractérisée à compter du 20 juin 2019 au vu des pièces produites par la salariée.
A cette date en effet, le président de l'URACORFOR lui adresse une note qui lui a été transférée, adressée aux administrateurs de l'association de Lorraine, dans laquelle la directrice de l'association de Lorraine dresse un état de la situation du comité grand est. Elle indique que 'les dysfonctionnements constatés et dont elle leur avait déjà fait part en 2018, s'amplifient avec une 'agitation champardenaise', qui ne leur permet pas de travailler de façon constructive pour le grand est, qu'ils sont variés et contrarient fortement le bon fonctionnement général, que des tensions internes inutiles peuvent également fragiliser l'équipe en place (...) (Question-constat : qu'a apporté de façon positive et concrète dans la structuration du réseau et de fonctionnement la Champagne Ardenne)'. La directrice de l'association de Lorraine termine sa lettre par quelques exemples parmi ceux vécus, mettant directement en cause Madame [E] [I] dans la remise en cause d'une décision d'annulation d'une réunion ou au titre de l'absence de proposition positive dans le dossier GE voirie.
Le président écrivait alors à Madame [E] [I] qu'il considérait cette note comme une mise en cause directe de l'UR Champagne Ardenne et qu'il allait prendre la décision de quitter la présidence de l'UR. Il demandait à la salariée de garder le silence autour de la note.
Le 21 juin 2019, Madame [E] [I] lui répondait par mail qu'elle était atterrée de ce constat à charge et disait ne pas savoir comment il lui serait possible de travailler dans le 'GR' dans une ambiance aussi méprisante et délétère. Le 1er juillet 2019, elle écrivait au président qu'une telle note signait son 'assassinat professionnel' et adressait aux administrateurs du grand est, dont le président de l'URACORFOR, un mail sur la dégradation de la situation dans le grand est.
Le 29 août 2019, elle écrivait à son homologue lorraine -le mail étant mis en copie au président de l'URACORFOR- lui indiquant que le contenu à charge de la note n'était pas acceptable et que les accusations portées à son encontre et à celles de l'UR Champagne Ardenne étaient graves et infondées, que ni le président ni elle-même n'avaient jamais reçu de notes leur faisant part de son analyse et que son comportement hypocrite et sournois dénotait ainsi la volonté de la discréditer, ce qu'elle ne pouvait tolérer. Elle ajoutait qu'elle ne prendrait pas part aux réunions entre directrices tant qu'elle n'aurait pas reçu d'excuses publiques de sa part, la note ayant été largement diffusée.
Le 21 octobre 2019, elle écrivait au président de l'URACORFOR qu'elle ne pouvait pas continuer à travailler dans ces conditions, où 'le silence méprisant, l'hypocrisie et les faux semblants règnent en maître', indiquant qu'elle souhaitait qu'une rupture professionnelle soit actée à effet au début de l'année 2020.
Le 20 décembre 2019, elle était placée en arrêt-maladie.
Le 11 février 2020, elle écrivait un long courrier au président de l'URACORFOR dans lequel elle revenait sur son état de souffrance, indiquant avoir profondément souffert du silence de sa part qui suivait ses mails de remontées d'informations et d'alertes et de son absence de soutien.
Elle insistait notamment sur les effets de la note reçue qui l'avait 'foudroyée', l'absence de réaction de sa part aux mails envoyés dans son prolongement, à l'origine aussi de son état de souffrance.
Il ressort donc de ces éléments que contrairement à ce que soutient la Selarl [H] [L] ès qualités, Madame [E] [I] avait dénoncé auprès du président, une souffrance au travail, dans le cadre de la création du futur comité grand est, laquelle était avérée, alors même que la violence de la note susvisée conduisait immédiatement le président de l'URACORFOR à envisager de démissionner.
Nonobstant une telle dénonciation, l'URACORFOR n'a pris aucune mesure de soutien ou d'accompagnement en la faveur de Madame [E] [I], ce qui caractérise un manquement à l'obligation de sécurité qui pèse sur elle.
Madame [E] [I] reproche ensuite à raison à son employeur de ne pas l'avoir payée à l'issue du délai d'un mois de l'avis d'inaptitude. Pratiquant en effet la subrogation, il ne lui a pas reversé le montant des indemnités journalières qu'il percevait. Contrairement à ce que la Selarl [H] [L] ès qualités soutient, aucune régularisation ne peut être prise en compte dès lors qu'elle n'a été que partielle -le jugement est définitif du chef de la fixation d'une créance de 5079,41 euros au titre du remboursement d'indemnités journalières non rétrocédées- et surtout postérieure au licenciement de Madame [E] [I].
De tels manquements qui sont relatifs à des obligations essentielles de l'employeur et qui ont perduré dans le temps, et notamment pendant son arrêt-maladie, sont suffisamment graves pour avoir empêché la poursuite du contrat de contrat de travail.
Dans ces conditions, la résiliation judiciaire du contrat de travail doit être prononcée aux torts de l'URACORFOR et le jugement doit être infirmé en ce sens.
- Sur les conséquences financières du prononcé de la résiliation judiciaire aux torts de l'employeur :
La résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse à la date d'envoi de la lettre de licenciement, soit le 28 décembre 2020.
Madame [E] [I] est donc bien-fondée en ses demandes de fixation des créances au passif de l'URACORFOR :
- au titre de l'indemnité de préavis -dès lors qu'en l'absence de motif économique de licenciement, la convention de sécurisation professionnelle devient sans cause- correspondant au salaire qu'elle aurait perçu si elle avait continué à travailler pendant 3 mois, soit la somme de 8705,01, outre les congés payés y afférents. Le jugement doit être infirmé en ce sens.
- au titre de l'indemnité de licenciement, sur la base d'un salaire de 2901,67 euros, tel que retenu par la salariée et alors même qu'il est moins favorable que la moyenne des 12 derniers mois de salaire avant l'arrêt-maladie au vu du bulletin de salaire du mois de décembre 2019, la somme de 162,61 euros au titre du solde de l'indemnité de licenciement. Le jugement doit être confirmé de ce chef.
Au titre des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors que Madame [E] [I] avait une ancienneté en années complètes de 17 ans à la date de son licenciement, elle peut prétendre à une indemnité comprise entre 3 et 14 mois de salaire.
Postérieurement à son licenciement, elle établit avoir perçu l'ASP du 14 janvier 2021 au 16 janvier 2022 puis l'ARE à compter du 17 janvier 2022, qu'elle percevait toujours au 31 décembre 2022. Elle a suivi une formation de BTS diététique du 1er septembre 2021 au 31 août 2022 et a obtenu un diplôme de BTS spécialité diététique le 15 novembre 2022.
Elle exerçait aussi une activité de praticienne en médecine chinoise, et a déclaré 13005 euros au titre de prestations BNC au titre de l'année 2021.
En réparation du préjudice subi, la créance de Madame [E] [I], à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, sera fixée à la somme de 25000 euros au passif de la liquidation judiciaire de l'URACORFOR.
Le jugement doit être infirmé en ce sens.
*********
Il y a lieu de dire opposable à l'Unédic délégation AGS CGEA d'[Localité 6] la présente décision, qui devra garantie des créances ainsi fixées entre les mains du liquidateur, dans les limites de son champ d'application de garanties, conformément aux dispositions législatives et plafonds réglementaires applicables.
Le mandataire liquidateur ès qualités doit être condamné aux dépens de première instance et d'appel et condamné en équité à payer à Madame [E] [I] la somme de 3000 euros au titre de ses frais irrépétibles de première instance et d'appel.
Par ces motifs :
La cour, statuant publiquement contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Statuant dans les limites de l'appel ;
Infirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a fixé la créance de Madame [E] [I] au passif de la liquidation judiciaire de l'URACORFOR à la somme de 162,61 euros au titre du solde de l'indemnité de licenciement ;
Le confirme de ce chef ;
Statuant à nouveau dans cette limite et y ajoutant :
Prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail de Madame [E] [I] aux torts de l'URACORFOR ;
Dit que la résiliation judiciaire du contrat de travail produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse au 28 décembre 2020 ;
Fixe les créances de Madame [E] [I] au passif de la liquidation judiciaire de l'URACORFOR aux sommes de :
- 8705,01 euros au titre de l'indemnité de préavis ;
- 870,50 euros au titre des congés payés y afférents ;
- 25000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Dit opposable à l'Unédic délégation AGS CGEA d'[Localité 6] la présente décision, qui devra garantie des créances ainsi fixées entre les mains du liquidateur, dans les limites de son champ d'application de garanties, conformément aux dispositions législatives et plafonds réglementaires applicables ;
Condamne la Selarl [H] [L] ès qualités de mandataire liquidateur de l'URACORFOR à payer à Madame [E] [I] la somme de 3000 euros au titre de ses frais irrépétibles de première instance et d'appel ;
Condamne la Selarl [H] [L] ès qualités de mandataire liquidateur de l'URACORFOR aux dépens de première instance et d'appel.
LE GREFFIER LE CONSEILLER