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09/05/2023 | FRANCE | N°22/00355

France | France, Cour d'appel de Reims, 1ère chambre section inst, 09 mai 2023, 22/00355


R.G. : N° RG 22/00355 - N° Portalis DBVQ-V-B7G-FEDU

ARRÊT N°

du : 09 mai 2023





BP























Formule exécutoire le :

à :



la SELAS DEVARENNE ASSOCIES GRAND EST



la SELARL DEROWSKI & ASSOCIEES





COUR D'APPEL DE REIMS

1ère CHAMBRE CIVILE - SECTION INSTANCE



ARRÊT DU 09 MAI 2023





APPELANTEs :

d'un jugement rendu le 10 août 2021 par le Juge des contentieux de la prot

ection de Chalons-en-Champagne (RG 21/00264)



Madame [B] [D]

[Adresse 2]

[Localité 4]



Représentée par Me Pierre DEVARENNE de la SELAS DEVARENNE ASSOCIES GRAND EST, avocat au barreau de CHALONS-EN-CHAMPAGNE



Association UDAF DE LA MARNE agi...

R.G. : N° RG 22/00355 - N° Portalis DBVQ-V-B7G-FEDU

ARRÊT N°

du : 09 mai 2023

BP

Formule exécutoire le :

à :

la SELAS DEVARENNE ASSOCIES GRAND EST

la SELARL DEROWSKI & ASSOCIEES

COUR D'APPEL DE REIMS

1ère CHAMBRE CIVILE - SECTION INSTANCE

ARRÊT DU 09 MAI 2023

APPELANTEs :

d'un jugement rendu le 10 août 2021 par le Juge des contentieux de la protection de Chalons-en-Champagne (RG 21/00264)

Madame [B] [D]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Pierre DEVARENNE de la SELAS DEVARENNE ASSOCIES GRAND EST, avocat au barreau de CHALONS-EN-CHAMPAGNE

Association UDAF DE LA MARNE agissant en qualité de curateur aux biens et à la personne de Madame [B] [D] (selon jugement de curatelle renforcée rendu le 29 novembre 2018 par le Tribunal d'Instance de CHALONS EN CHAMPAGNE).

[Adresse 5]

[Localité 3]

Représentée par Me Pierre DEVARENNE de la SELAS DEVARENNE ASSOCIES GRAND EST, avocat au barreau de CHALONS-EN-CHAMPAGNE

INTIMÉE :

S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, S.A au capital de 546 601 552,00 €, immatriculée au RCS de PARIS sous le n° 542 097 902, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 6]

Représentée par Me Patrick DEROWSKI de la SELARL DEROWSKI & ASSOCIEES, avocat au barreau de CHALONS-EN-CHAMPAGNE

DÉBATS :

A l'audience publique du 28 mars 2023, où l'affaire a été mise en délibéré au 09 mai 2023, sans opposition de la part des conseils des parties et en application de l'article 805 du code de procédure civile, M. Benoît PETY, président de chambre, a entendu les conseils des parties en leurs conclusions et explications, puis ce magistrat en a rendu compte à la cour dans son délibéré

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

M. Benoît PETY, président de chambre

Mme Anne LEFEVRE, conseiller

Mme Christel MAGNARD, conseiller

GREFFIER D'AUDIENCE :

Madame Lucie NICLOT, greffier

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, signé par M. PETY, Président de chambre, et par Madame NICLOT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

Suivant offre préalable acceptée le 12 avril 2013, la SA BNP Paribas Personal Finance a consenti à Mme [B] [D] un crédit affecté au financement de travaux de rénovation de son habitation principale, d'un montant en capital de 20'500 euros remboursable en 180 mensualités de 185,82 euros chacune (hors assurance) incluant des intérêts au taux débiteur fixe de 6,69 % l'an.

Par jugement du 29 novembre 2018, Mme [D] a fait l'objet de l'ouverture d'une mesure de protection sous forme de curatelle renforcée aux biens et à sa personne, mesure confiée à l'UDAF de la Marne.

Plusieurs échéances du prêt n'ayant pas été honorées, la SA BNP Paribas Personal Finance, par lettre recommandée avec accusé de réception du 12 août 2019, a mis en demeure Mme [D] de régulariser la situation.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 26 octobre 2020, l'établissement prêteur a prononcé la déchéance du terme.

Par actes d'huissier des 10 décembre 2020 et 15 janvier 2021, la SA BNP Paribas Personal Finance a fait assigner Mme [D] et l'UDAF de la Marne, ès qualité de curateur, devant le juge des contentieux de la protection au tribunal judiciaire de Châlons-en-Champagne aux fins de voir cette juridiction notamment':

-Condamner Mme [D] à lui payer la somme de 17 642,64 euros au titre de la clause résolutoire,

-Subsidiairement, prononcer la résolution judiciaire du contrat de crédit affecté,

-Plus subsidiairement, et en cas de déchéance du prêteur du droit aux intérêts, condamner Mme [D] à lui rembourser la somme empruntée après déduction des règlements opérés,

-Condamner Mme [D] à lui verser la somme de 300 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

-Condamner Mme [D] aux entiers dépens de l'instance.

En défense, Mme [D], assistée de l'UDAF de la Marne, a sollicité le prononcé de la nullité du contrat de crédit affecté, la condamnation de la SA BNP Paribas Personal Finance à lui payer la somme de 14'323,80 euros en réparation de sa faute, outre la somme de 5'000 euros au titre de la réparation de son préjudice moral, ainsi qu'une indemnité de procédure de 1'500 euros chacune, sans préjudice des entiers dépens.

Par jugement du 10 août 2021, le juge des contentieux de la protection au tribunal judiciaire de Châlons-en-Champagne a notamment':

-déclaré irrecevable la demande formée par Mme [B] [D] et l'UDAF de la Marne tendant au prononcé de la nullité du contrat de prêt affecté conclu le 12 avril 2013 entre Mme [D] et la SA BNP Paribas Personal Finance,

-déclaré irrecevables les demandes de Mme [D] et de l'UDAF de la Marne ès qualités tendant au prononcé de la nullité et de la résolution judiciaire du contrat de prestations de service conclu le 12 avril 2013 entre Mme [D] et la société Bureau Central de l'Habitat Français,

-débouté Mme [D] et l'UDAF de la Marne ès qualités de l'ensemble de leurs demandes,

-déclaré recevable l'action en paiement formée par la SA BNP Paribas Personal Finance,

-prononcé la déchéance du prêteur du droit aux intérêts,

-condamné Mme [D] à payer à la SA BNP Paribas Personal Finance la somme de 7'647,73 euros avec intérêts au taux légal à compter du jugement,

-débouté la SA BNP Paribas Personal Finance de ses demandes plus amples ou contraires,

-débouté la SA BNP Paribas Personal Finance de sa demande au titre des frais irrépétibles,

-condamné Mme [D] à supporter les dépens de l'instance.

Mme [D], assistée de l'UDAF de la Marne en qualité de curatrice, a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 16 février 2022, son recours portant sur l'entier dispositif de la décision querellée.

Par conclusions signifiées le 23 février 2023, Mme [D] et l'UDAF de la Marne ès qualités demandent par voie d'infirmation à la cour de':

-Prononcer la nullité du contrat de fourniture de prestation de service conclu avec le Bureau Central de l'Habitat Français,

-Prononcer la nullité du contrat de crédit affecté à la fourniture de biens ou de services conclu le 12 avril 2013,

-Dire n'y avoir lieu à restitution des sommes prêtées compte tenu des manquements de la SA BNP Paribas Personal Finance à ses obligations légales,

-Condamner la SA BNP Paribas Personal Finance à la somme de 14'323,80 euros en réparation de sa faute,

-Condamner la SA BNP Paribas Personal Finance à verser à Mme [D] la somme de 5'000 euros au titre de son préjudice moral,

-Condamner la SA BNP Paribas Personal Finance à verser à Mme [D] et à l'UDAF de la Marne ès qualités une somme de 1'500 euros chacune en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

-Condamner la SA BNP Paribas Personal Finance aux entiers dépens.

Au soutien de leurs demandes, les parties appelantes exposent que':

1.Le prêt affecté est nul au visa de l'article L. 122-8 du code de la consommation. En effet, Mme [D] a été démarchée à de multiples reprises par les préposés de la société Bureau Central de l'Habitat Français, personne morale à l'égard de laquelle une information judiciaire a été ouverte pour escroqueries. Les parties appelantes dénoncent des pressions psychologiques sur une personne âgée et isolée. Quatre engagements ont ainsi été souscrits par Mme [D] qui signait les documents pour se débarrasser des démarcheurs. Elle doit rembourser chaque mois un total de mensualités de 652,27 euros alors que sa retraite n'excède pas 929 euros par mois, soit un taux d'endettement de 70,18 %. Au surplus, les travaux de rénovation financés étaient parfaitement inutiles. La société BNP Paribas Personal Finance est citée à plusieurs reprises dans l'ordonnance de non-lieu partiel et de renvoi devant le tribunal correctionnel rendue le 17 août 2022 par le magistrat instructeur au tribunal judiciaire de Dijon. Son implication y est clairement décrite. L'appelante conteste toute prescription de son action en nullité,

2.Mme [D], assistée de l'UDAF de la Marne ès qualités de curateur, soutient ensuite que le bon de commande conclu avec le Bureau Central de l'Habitat Français ne répond pas aux exigences du formalisme prévu par le code de la consommation dans le contexte d'un contrat établi au cours d'un démarchage à domicile': les conditions d'exécution des prestations et la date d'achèvement ne figurent pas dans le bon, diverses dispositions du code de la consommation n'y sont pas reprises, et le bordereau de rétractation n'est pas conforme aux dispositions légales. Le contrat principal encourt donc la nullité,

3.La nullité du contrat principal entraîne de plein droit celle du contrat de crédit. La société prêteuse doit donc restituer à Mme [D] la somme de 14'323,80 euros,

4.La banque ne produit aucune attestation de fin de travaux, ceux-ci n'ayant jamais été réalisés. La résolution judiciaire du contrat principal s'impose. La banque ne peut revendiquer aucune créance de restitution du capital prêté, compte tenu de sa faute consistant en une libération des fonds au profit du prestataire sans vérification de l'achèvement des travaux,

5.Mme [D] éprouve un préjudice moral qu'elle entend voir indemniser. La procédure a engendré pour elle beaucoup de stress et d'inquiétudes.

* * * *

Par des écritures signifiées le 13 juin 2022, la SA BNP Paribas Personal Finance sollicite de la juridiction du second degré qu'elle':

-Déboute Mme [D] et l'UDAF de la Marne de leur appel,

-La reçoive en son appel incident de la disposition prononçant sa déchéance du droit aux intérêts,

-Condamne Mme [D] à lui payer la somme de 17'642,64 euros, augmentée des intérêts au taux contractuel de 6,90 % l'an,

-Dans l'hypothèse où la cour accorderait des délais de paiement, dise que les sommes restant dues seront réglées par mensualités égales sur une période de 23 mois et le solde à la 24e mensualité,

-Dise qu'à défaut de règlement d'une seule échéance à son terme, l'intégralité des sommes restant dues deviendrait alors immédiatement exigible,

-Dise Mme [D] et l'UDAF de la Marne irrecevables en leurs demandes tendant à voir prononcer la nullité du contrat de prêt en date du 12 avril 2013 et formulées par conclusions du 20 avril 2021, compte tenu de la prescription quinquennale prévue par les dispositions de l'article 2224 du code civil,

-Juge en conséquence que l'action en nullité se trouve prescrite,

-Juge que l'exception de nullité ne peut être invoquée au-delà du délai de prescription lorsque le contrat a été exécuté, ce qui est le cas en l'espèce,

-Juge en conséquence les appelantes irrecevables en leur demande, comme étant prescrite,

-Juge les appelantes irrecevables dans leurs demandes tendant à voir prononcer la nullité du contrat de fourniture de services et de travaux signé avec le Bureau Central de l'Habitat Français, faute de mise en cause de cette société dans le cadre de la présente instance et ce, au visa des articles 14 et 16 du code de procédure civile,

-Subsidiairement et en tant que de besoin, prononce la résolution judiciaire du contrat,

-Condamne en conséquence Mme [D] au paiement des sommes restant dues par application des dispositions de l'article 1224 du code civil,

-Encore plus subsidiairement, si la déchéance du droit aux intérêts était prononcée, condamne Mme [D] au paiement des sommes empruntées sous déduction des règlements opérés,

-Subsidiairement, si par extraordinaire la nullité du contrat de crédit était prononcée, remette les parties dans l'état où elles se trouvaient avant la signature du contrat,

-En conséquence, condamne Mme [D] à lui rembourser le montant du crédit accordé sous déduction des remboursements opérés,

-Déboute Mme [D] et l'UDAF de la Marne ès qualités de leur demande en dommages et intérêts ainsi que de celle fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,

-Subsidiairement, si la cour prononçait la déchéance du prêteur du droit aux intérêts, confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

-Dise le présent arrêt commun et opposable à l'UDAF de la Marne ès qualité de curateur de Mme [D],

-Condamne Mme [D] à lui verser une indemnité de procédure de 2'000 euros, sans préjudice des entiers dépens de l'instance.

La banque intimée énonce au soutien de ses demandes que':

1.Son action est recevable puisque le premier incident de paiement non régularisé remonte au 1er mars 2019,

2.Le contrat de crédit affecté est parfaitement valide en ce qu'il fait apparaître toutes les mentions prescrites par les articles L. 312-12 et suivants du code de la consommation, un formulaire détachable de rétractation étant bien joint au contrat. Le fait pour Mme [D] d'avoir commencé à régler les échéances du crédit montre implicitement qu'elle a renoncé à se prévaloir de son droit à rétractation,

3.La banque estime qu'elle est encore fondée à solliciter la résiliation judiciaire du contrat de crédit compte tenu de la défaillance de l'emprunteuse dans l'exécution de ses obligations. Mme [D] serait alors tenue au remboursement des sommes restant dues,

4.La demande de nullité du crédit daté du 12 avril 2013 est prescrite conformément aux dispositions de l'article 2224 du code civil. En effet, les griefs invoqués par Mme [D] sont survenus dès la signature du contrat de sorte que l'action en nullité aurait dû être engagée avant le 12 avril 2018. En outre, l'exception de nullité n'est pas perpétuelle lorsque le contrat a été comme en l'espèce exécuté,

5.La demande de nullité du contrat principal n'est pas recevable, faute d'avoir appelé en la cause la société prestataire, partie à ce contrat,

6.La banque n'a commis aucune faute en ce qu'elle n'est pas intervenue dans l'élaboration du bon de commande de travaux,

7.Aucune déchéance du droit aux intérêts ne lui est opposable, Mme [D] ayant reconnu que la FIPEN lui avait été remise,

8.La banque ne saurait être tenue à verser des dommages et intérêts à Mme [D] qui se dit victime de pressions psychologiques l'ayant contrainte à contracter des engagements portant sur la réalisation de travaux inutiles. Le prêteur est totalement étranger à la relation contractuelle entre Mme [D] et le prestataire de travaux. Aucune man'uvre dolosive ne peut être démontrée à son encontre.

* * * *

L'instruction du dossier a été clôturée par ordonnance du 14 mars 2023.

* * * *

Motifs de la décision':

-Sur la nullité du contrat de crédit affecté pour motif d'abus de faiblesse':

Attendu que Mme [D], assistée de l'UDAF de la Marne, son curateur, sollicite l'annulation du contrat de crédit souscrit le 12 avril 2013 auprès de la SA BNP Paribas Personal Finance sur le fondement des dispositions de l'article L. 122-8 [de fait L. 121-8] du code de la consommation, l'article L. 132-13 édictant que le contrat conclu à la suite d'un abus de faiblesse est nul et de nul effet, disposition qui reprend en cela l'alinéa 5 de l'article L. 122-8 ancien du code de la consommation en sa formulation applicable à la date du contrat litigieux';

Que la SA BNP Paribas Personal Finance soulève la prescription de la demande en nullité formée par l'intimée par voie d'exception, opposant le fait que Mme [D] a exécuté le contrat de crédit en remboursant un certain nombre de mensualités jusqu'en mars 2019, le délai de cinq ans commençant à courir au jour du contrat, les pressions psychologiques dénoncées par l'emprunteuse étant concomitantes à la signature du crédit affecté';

Attendu qu'il est constant au sens des dispositions de l'article 2224 du code civil que l'action en nullité d'un acte juridique tel qu'un contrat de crédit se prescrit par cinq ans, le point de départ de ce délai coïncidant avec le jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer';

Que Mme [D] invoque ici l'abus de son état de faiblesse par les démarcheurs qui l'ont contrainte à conclure le prêt litigieux, l'intimée exposant qu'elle a fini par signer pour se débarrasser d'eux';

Qu'il s'ensuit que l'intéressée était recevable à solliciter la nullité du contrat litigieux dans les cinq ans à compter du 12 avril 2013, soit jusqu'au 12 avril 2018';

Que ce n'est que bien postérieurement à cette date que Mme [D] a sollicité la nullité de ce contrat, une fois attraite devant la juridiction de [Localité 3], c'est-à-dire à compter du 10 décembre 2020, le délai de prescription quinquennale étant déjà expiré';

Attendu que Mme [D] prétend cependant soulever la nullité du contrat de crédit affecté par voie d'exception, une fois attraite en justice par la banque prêteuse qui entend obtenir l'exécution du crédit et sa condamnation en paiement du solde des sommes dues';

Que cette demande n'est toutefois pas plus recevable, l'article 1185 du code civil énonçant que l'exception de nullité ne se prescrit pas si elle se rapporte à un contrat qui n'a reçu aucune exécution';

Que telle n'est pas l'occurrence présente puisque Mme [D] ne peut nier qu'elle a exécuté le contrat de crédit affecté pour en avoir remboursé sans le moindre retard les mensualités de décembre 2013 à février 2019, ce que confirme une simple lecture de l'historique des règlements produit sous sa pièce n°20 par la banque appelante';

Qu'en définitive, Mme [D] est irrecevable à opposer à la SA BNP Paribas Personal Finance la nullité du contrat pour motif d'abus de faiblesse, sa demande en ce sens étant prescrite';

Que le jugement déféré sera en cela confirmé';

-Sur la nullité du contrat principal de prestation de travaux et celle de plein droit du crédit accessoire':

Attendu que Mme [D], assistée de son curateur, réitère devant la cour sa demande d'annulation du bon de commande conclu le 12 avril 2013 avec le Bureau Central de l'Habitat Français pour non-respect du formalisme imposé par les articles L. 221-8, L. 221-5, L. 111-1 et L. 111-2 du code de la consommation en matière d'actes conclus hors établissement';

Que le premier juge n'a pas fait droit à cette demande du consommateur, considérant que sa prétention était même irrecevable en l'absence d'appel en la cause de la société prestataire, cocontractante';

Que, de fait, devant la cour, la société Bureau Central de l'Habitat Français n'est pas davantage comparante, Mme [D] ne justifiant d'aucune formalité aux fins d'appeler en la cause cette partie, voire le cas échéant un mandataire judiciaire si cette personne morale n'était plus in bonis';

Qu'au sens des articles 14 et 16 du code de procédure civile dûment visés par le premier juge, il ne peut être question d'examiner des prétentions dirigées contre une personne qui n'a pas été mise en cause et dûment appelée à comparaître devant la juridiction';

Que la décision entreprise sera en conséquence confirmée en ce qu'elle déclare Mme [D] dûment assistée de son curateur irrecevable en ses demandes en nullité tant du contrat principal que du crédit affecté, l'effet de nullité de plein droit mentionné à l'article L. 311-32 ancien du code de la consommation (aujourd'hui l'article L. 312-55) n'ayant pas vocation à s'appliquer';

-Sur la déchéance du prêteur du droit aux intérêts':

Attendu que pour déchoir totalement la société BNP Paribas Personal Finance du droit aux intérêts, le premier juge a retenu que la banque ne justifiait pas de la remise à Mme [D], avant la conclusion du contrat de crédit, d'une fiche d'informations précontractuelles européennes normalisées (ou FIPEN) ni d'une notice d'information comportant les conditions générales de l'assurance';

Que la banque intimée le conteste, évoquant les termes de la fiche explicative et de la page 4 de l'offre de crédit que Mme [D] a signées et aux termes desquelles cette dernière reconnaît avoir pris connaissance de la notice comportant les extraits des conditions générales de l'assurance, rester en possession d'un exemplaire de l'offre de prêt doté de la notice d'information d'assurance ainsi que de la fiche d'informations précontractuelles européennes normalisées en matière de crédit aux particuliers';

Que ces mentions reprises sur l'offre et la fiche explicative constituent autant d'indices de ce que Mme [D] s'est vu remettre lesdites fiche et notice mais il revient au prêteur de le corroborer par des éléments extérieurs';

Que la société BNP Paribas Personal Finance ne produit aucune liasse contractuelle de telle sorte que la cour n'est pas en mesure de vérifier le contenu de la notice d'assurance et de la FIPEN, la reconnaissance par l'emprunteuse de la remise de ces documents n'étant pas confirmée par d'autres éléments concordants';

Que l'établissement prêteur n'étant pas à même de conforter les données littérales sur l'exécution de ses obligations légales envers le consommateur, c'est à bon droit que le premier juge a prononcé à son encontre la sanction de la déchéance totale du droit aux intérêts, sa décision étant en cela confirmée';

-Sur la créance principale du prêteur':

Attendu qu'en considération de la déchéance du prêteur du droit aux intérêts, sa créance se résume au capital emprunté dont à déduire les versements opérés par l'emprunteuse, soit': 20'500 ' [250,77 + (203,25 x 62)] = 7'647,73 euros, montant augmenté des intérêts au taux légal à compter du jugement dont appel';

Que la décision déférée sera aussi confirmée en ce qu'elle condamne Mme [D], assistée de son curateur, au paiement de cette somme et déboute la banque de ses autres prétentions';

-Sur les demandes de Mme [D] aux fins de non-restitution du capital à la banque et de condamnation de cette dernière au paiement de la somme de 14'323,80 euros en raison de sa faute':

Attendu que ces prétentions de Mme [D] ne se comprennent que dans la perspective d'une annulation du contrat de crédit affecté, ce qui n'est nullement prononcé par la cour qui, au contraire, confirme de ce chef notamment l'irrecevabilité de toute demande de nullité du crédit affecté comme il a été précédemment développé';

Que c'est ainsi à raison que le premier juge a débouté Mme [D] de ses prétentions, le jugement dont appel étant également confirmé de ces chefs'qui s'avèrent sans objet';

-Sur la demande en dommages et intérêts de Mme [D]':

Attendu que Mme [D], qui se présente comme une personne âgée et isolée, et donc particulièrement vulnérable, expose qu'elle a subi des pressions psychologiques évidentes pour la forcer à contracter des engagements pour la réalisation de travaux dont elle n'avait nullement besoin, la présente procédure ayant engendré pour elle beaucoup de stress et d'inquiétudes';

Qu'elle entend en cela voir indemniser son préjudice moral à la somme indemnitaire de 5'000 euros';

Que la SA BNP Paribas Personal Finance s'oppose à une telle prétention de l'intimée, faisant valoir qu'elle est totalement étrangère à la relation contractuelle qui s'est instaurée entre Mme [D] et le prestataire de travaux';

Attendu que la demande indemnitaire dirigée par Mme [D] en direction de la banque prêteuse suppose la démonstration contre cette dernière d'un comportement fautif et d'un préjudice en lien avec cette faute';

Que, lors du démarchage à son domicile, Mme [D] n'a eu affaire qu'aux préposés de la société Bureau Central de l'Habitat Français, nullement au personnel de la SA BNP Paribas Personal Finance,'de sorte que les pressions psychologiques dénoncées par l'emprunteuse ne peuvent être le fait de la banque';

Qu'en outre, la société Bureau Central de l'Habitat Français n'est pas en la cause de sorte que Mme [D] ne pourrait former contre cette personne morale aucune prétention recevable';

Qu'en définitive, la décision entreprise sera aussi confirmée en ce qu'elle déboute Mme [D] de sa demande en dommages et intérêts dirigée contre la banque';

-Sur les dépens et les frais irrépétibles':

Attendu que l'issue de l'instance d'appel et le sens du présent arrêt conduisent à laisser à la charge exclusive de Mme [D], dûment assistée de son curateur, les entiers dépens d'appel, le jugement entrepris étant confirmé en ce qu'il la condamne à supporter les dépens de première instance';

Que si l'équité ne commandait pas qu'il soit fait droit à la demande d'indemnité de procédure exprimée en première instance par la banque poursuivante, la décision entreprise étant en cela confirmée, cette considération commande que Mme [D], dûment assistée de son curateur, soit condamnée à verser à la SA BNP Paribas Personal Finance la somme de 500 euros au visa de l'article 700 du code de procédure civile, la débitrice de cette indemnité étant elle-même déboutée de sa propre prétention formée sur ce fondement juridique, ce qui sera aussi le sort de la prétention formée par l'UDAF de la Marne';

* * * *

Par ces motifs,

La cour, statuant publiquement et contradictoirement,

-Confirme en toutes ses dispositions la décision entreprise';

-Condamne Mme [B] [D], assistée de son curateur, l'UDAF de la Marne, aux entiers dépens d'appel ainsi qu'à verser à hauteur de cour à la SA BNP Paribas Personal Finance une indemnité pour frais irrépétibles de 500 euros';

-Déboute Mme [B] [D], dûment assistée de son curateur, ainsi que l'UDAF de la Marne de leurs demandes indemnitaires exprimées au visa de l'article 700 du code de procédure civile';

-Déclare le présent arrêt commun à l'UDAF de la Marne, ès qualité de curateur de Mme [B] [D].

Le Greffier. Le Président.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Reims
Formation : 1ère chambre section inst
Numéro d'arrêt : 22/00355
Date de la décision : 09/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-09;22.00355 ?
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