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02/05/2023 | FRANCE | N°22/00661

France | France, Cour d'appel de Reims, 1ère chambre section inst, 02 mai 2023, 22/00661


ARRET N°

du 02 mai 2023



R.G : N° RG 22/00661 - N° Portalis DBVQ-V-B7G-FEX6





S.A.R.L. VOLKSWAGEN BANK GMBH





c/



[B]

[D]











BP







Formule exécutoire le :

à :



Me Karoline DIALLO



Me Magalie MINI



Me Colette HYONNE

COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE CIVILE- SECTION INSTANCE



ARRET DU 02 MAI 2023



APPELANTE :

d'un jugement rendu le 13 septemb

re 2021 par le Juge des contentieux de la protection de Reims



S.A.R.L. VOLKSWAGEN BANK GMBH Société VOLKSWAGEN BANK GMBH, SARL de droit allemand dont le siège est [Adresse 8], prise en son établissement [Adresse 1] pris en ses représentants légaux

[Adresse 8]

[Lo...

ARRET N°

du 02 mai 2023

R.G : N° RG 22/00661 - N° Portalis DBVQ-V-B7G-FEX6

S.A.R.L. VOLKSWAGEN BANK GMBH

c/

[B]

[D]

BP

Formule exécutoire le :

à :

Me Karoline DIALLO

Me Magalie MINI

Me Colette HYONNE

COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE CIVILE- SECTION INSTANCE

ARRET DU 02 MAI 2023

APPELANTE :

d'un jugement rendu le 13 septembre 2021 par le Juge des contentieux de la protection de Reims

S.A.R.L. VOLKSWAGEN BANK GMBH Société VOLKSWAGEN BANK GMBH, SARL de droit allemand dont le siège est [Adresse 8], prise en son établissement [Adresse 1] pris en ses représentants légaux

[Adresse 8]

[Localité 2]

Représentée par Me Karoline DIALLO, avocat au barreau de REIMS, et Me Amaury PAT, avocat au barreau de LILLE

INTIMES :

Monsieur [X] [B]

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représenté par Me Magalie MINI, avocat au barreau de REIMS

Madame [K] [D] épouse [B]

[Adresse 4]

[Localité 5]

Représentée par Me Colette HYONNE de la SCP BADRE HYONNE SENS-SALIS DENIS ROGER DAILLENCOURT, avocat au barreau de REIMS

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :

M. Benoît PETY, président de chambre

Mme Anne LEFEVRE, conseiller

Mme Christel MAGNARD, conseiller

GREFFIER :

Madame Lucie NICLOT, greffier

DEBATS :

A l'audience publique du 14 mars 2023, où l'affaire a été mise en délibéré au 02 mai 2023,

ARRET :

Contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe le 02 mai 2023 et signé par M. Benoît PETY, président de chambre, et Madame Lucie NICLOT, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

La SARL de droit allemand Volkswagen Bank GMBH a accordé le 16 janvier 2017 à M. [X] [B] et à son épouse, Mme [K] [D], qui le conteste comme il sera exposé ci-après, un crédit accessoire à la vente d'un véhicule automobile de marque Volkswagen de type Tiguan immatriculé [Immatriculation 7], le crédit étant d'un montant de 41 700 euros remboursable en 60 mensualités de 828,40 euros chacune, incluant des intérêts au taux nominal de 4,5 % l'an.

Le prêt n'étant plus remboursé, la société prêteuse a adressé aux emprunteurs plusieurs lettres de relance dont une mise en demeure prononçant la déchéance du terme par lettre recommandée avec accusé de réception du 28 septembre 2018.

Par actes d'huissier du 16 juillet 2020, la société Volkswagen Bank GMBH a fait assigner M. [X] [B] et Mme [K] [D] épouse [B] devant le juge des contentieux de la protection au tribunal judiciaire de Reims aux fins de voir condamner les assignés à lui payer le solde du crédit accessoire.

La personne morale poursuivante demandait ainsi au magistrat de':

-Débouter Mme [D] épouse [B] de ses demandes,

-Condamner solidairement M. et Mme [B]-[D] à lui payer la somme de 39'653,78 euros avec intérêts au taux contractuel de 4,50 % depuis le 27 juin 2020,

-Condamner sous la même solidarité les époux [B]-[D] à lui verser une indemnité de procédure de 1'000 euros, sans préjudice des dépens.

En défense, Mme [D] épouse [B] a demandé au juge des contentieux de la protection de':

-Procéder à une vérification de l'écriture et de la signature figurant sur l'acte sous seing privé du 16 janvier 2017,

-Débouter la SARL Volkswagen Bank GMBH de ses demandes à son encontre,

-Condamner cette personne morale à lui verser 5'000 euros de dommages et intérêts,

-La condamner à lui verser aussi une indemnité de procédure de 2'500 euros, outre aux entiers dépens.

Par jugement réputé contradictoire du 13 septembre 2021, le juge des contentieux de la protection au tribunal judiciaire de Reims a notamment:

-constaté la forclusion de l'action en paiement engagée par la SARL Volkswagen Bank GMBH à l'encontre de M. et Mme [B]-[D],

-par conséquent, déclaré irrecevable l'ensemble des demandes formulées par la personne morale poursuivante,

-rejeté la demande en dommages et intérêts de Mme [D] épouse [B],

-condamné la société Volkswagen Bank GMBH à régler les dépens de l'instance, ainsi qu'à verser à Mme [D] épouse [B] une indemnité pour frais irrépétibles de 1'500 euros.

La SARL Volkswagen Bank GMBH a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 11 mars 2022, son recours portant sur la forclusion de son action, l'irrecevabilité de ses demandes, les dépens et les frais irrépétibles.

En l'état de ses écritures signifiées le 20 février 2023, la société appelante demande à la cour de confirmer la décision déférée en ce qu'elle rejette la demande de dommages et intérêts de Mme [D] épouse [B] et, par voie d'infirmation, de':

-La dire recevable et bien-fondée en l'ensemble de ses demandes,

-Condamner solidairement M. et Mme [B]-[D] à lui payer la somme de 39'653,78 euros assortie des intérêts au taux contractuel de 4,50 % l'an courus et à courir à compter du 27 juin 2020 et jusqu'au jour du plus complet paiement,

-Condamner sous la même solidarité les intimés à lui verser la somme de 1'000 euros au visa de l'article 700 du code de procédure civile au titre de ses frais irrépétibles de première instance,

-Les condamner solidairement à lui verser une indemnité pour frais irrépétibles à hauteur de cour de 2 000 euros,

-Les condamner solidairement aux entiers frais et dépens de première instance et d'appel.

Au soutien de ses demandes, la société Volkswagen Bank GMBH expose que':

1. Si le premier incident de paiement non régularisé correspond bien au 5 avril 2018, la forclusion n'était cependant pas du tout acquise à la date de délivrance de l'assignation en paiement le 17 juillet 2020 car il faut tenir compte de l'ordonnance du 25 mars 2020 qui a allongé les délais de deux mois. Ainsi, l'action en paiement de la personne morale poursuivante pouvait être utilement diligentée jusqu'au 23 août 2020 inclus. En assignant le 17 juillet 2020, la société poursuivante a valablement interrompu le délai de forclusion de sorte que son action est bien recevable,

2. Elle a en outre pris le soin de contrôler l'identité des signataires du contrat de prêt, dont Mme [D] épouse [B], une copie de sa carte nationale d'identité ayant été fournie. Il faut ajouter qu'une signature évolue dans le temps. La comparaison de la signature qui lui est attribuée sur le contrat avec celle de sa carte d'identité ne fait pas apparaître de différence flagrante. Aucune mesure d'instruction ne peut être mise en 'uvre pour suppléer la carence d'une partie dans l'administration de la preuve qui lui incombe,

3. Quoiqu'il en soit, chaque époux peut passer seul les contrats qui ont pour objet l'entretien du ménage ou l'éducation des enfants. Tout dette ainsi contractée par l'un oblige l'autre solidairement (article 220 du code civil). Le prêt litigieux a été conclu pendant les effets du mariage. Mme [B] avait pleine connaissance de ce crédit et a pu profiter du véhicule ainsi financé,

4. Dans ces conditions, la demande de dommages et intérêts de Mme [D] épouse [B] pour inscription au FICP n'est pas fondée, une telle mention à ce fichier relevant d'une obligation pour tout organisme prêteur. Le «'défichage'» suppose un paiement intégral des sommes dues, circonstance qui n'est nullement remplie en l'occurrence,

5. Ces dommages et intérêts réclamés par Mme [D] épouse [B] ne sont pas davantage justifiés par un quelconque manquement du prêteur à son devoir de mise en garde de l'emprunteur, devoir qui ne répond à aucune automaticité. Lors de la souscription du prêt litigieux, cette dernière était conseillère bancaire au CIC. En sa qualité d'emprunteuse avertie, elle ne peut prétendre à aucune obligation de mise en garde de la part du prêteur. Elle disposait de 4'600 euros de revenus mensuels, dont des revenus fonciers, pour une charge de remboursements autres de 340 euros par mois. Il n'y avait en cela aucun risque caractérisé de surendettement.

* * * *

Par conclusions signifiées le 14 décembre 2022, Mme [D] sollicite de la juridiction du second degré qu'elle':

-Infirme le jugement déféré, si elle ne faisait pas droit à l'appel principal de la société Volkswagen Bank GMBH, en ce qu'il rejette sa demande en dommages et intérêts, et, statuant à nouveau de ce chef, condamne la personne morale appelante à lui verser la somme de 5'000 euros,

-A défaut, si elle faisait droit à l'appel du prêteur, infirme la décision entreprise en toutes ses dispositions,

-Statuant à nouveau, procède à une vérification d'écriture,

-Déboute la société prêteuse de toutes ses demandes dirigées à son encontre,

-Statue ce que de droit envers M. [B],

-Condamne la SARL Volkswagen Bank GMBH à lui verser la somme de 5'000 euros à titre de dommages et intérêts,

-En tout état de cause, condamne la partie appelante, in solidum avec M. [B], à lui verser la somme de 4'000 euros au visa de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais non répétibles exposés autant en première instance qu'en cause d'appel,

-Condamne la société Volkswagen Bank GMBH aux entiers dépens.

Au soutien de ses prétentions, Mme [D] énonce que':

1. La banque prêteuse ne remet pas en cause la date du 5 avril 2018 comme point de départ du délai de forclusion. Elle invoque certes l'allongement du délai pour raison de pandémie, soit deux mois à compter du 23 juin 2020, ce qui porterait l'expiration du délai de forclusion au 23 août 2020. Il revient à la cour d'apprécier sur ce point la recevabilité de l'action de la banque,

2. Invoquant les dispositions de l'article 1373 du code civil, elle rappelle qu'elle a désavoué dès l'origine (depuis 2018) son écriture et sa signature sur l'offre de prêt litigieuse. Les éléments de comparaison sont au dossier de la cour. Mme [D] maintient qu'elle n'a jamais signé ce prêt. Les époux [B]-[D] sont en instance de divorce. Le bon de commande du véhicule financé a été régularisé exclusivement par M. [B], qui l'a revendu seul et qui a versé le prix de revente sur son compte personnel. Un virement de ce compte vers celui de Mme [D] a permis de régler les impôts, l'autre de 25'520 euros également au compte de cette dernière a donné lieu à un chèque de 25'000 euros libellé au profit de la SARL [B] placée par la suite en liquidation judiciaire. Ces mouvements bancaires sont survenus alors qu'elle n'était plus en poste au CIC mais déjà employée en septembre 2017 à Meilleurs Taux. La mauvaise foi de M. [B] est entière dans ce dossier. L'intimée ajoute qu'elle disposait alors de son propre véhicule. La vérification d'écriture conclura à l'absence de toute signature de sa part du prêt en litige.

3. Par ailleurs, aucune solidarité des époux pour dépense ménagère ne pourra être retenue, l'emprunt de 49'704 euros ne pouvant être qualifié de dépense modeste. Cette dépense n'était du reste pas nécessaire puisqu'elle-même avait son propre véhicule avant de bénéficier d'un véhicule professionnel, de sorte qu'elle a revendu son propre véhicule. M. [B] s'est donc fait plaisir en acquérant ce véhicule,

4. La banque est fautive pour n'avoir pas vérifié son véritable consentement à cette opération, n'étant pas présente pour signer les documents afférents au crédit accessoire. Elle a très tôt signalé la difficulté à la banque qui n'en a rien fait. La fiche de dialogue ne reprend même pas le prêt immobilier contracté le 10 août 2016 avec des mensualités de 1'341,89 euros, sans omettre un prêt CIC avec une échéance mensuelle de 120,20 euros, un prêt BNP Paribas (pour travaux) de 186,67 euros de mensualité et le prêt Volkswagen qu'elle a souscrit avec des mensualités de 336,27 euros. Lors de l'octroi du prêt litigieux, son mari était encore en période d'essai. L'endettement du couple avant prêt litigieux était alors de 56 %. Il atteignait 80 % avec la mensualité du prêt contesté. Le risque d'endettement excessif est clairement démontré, de même que le manquement du prêteur à son devoir de mise en garde,

5. Elle est toujours fichée à la Banque de France. Elle ne peut contracter aucun crédit. Son préjudice est en cela important et justifie une indemnité de 5'000 euros.

* * * *

Par des écritures signifiées le 9 septembre 2022, M. [B] conclut à la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a relevé la forclusion de l'action en paiement de la banque, le premier incident de paiement non régularisé étant daté du 5 janvier 2018 de sorte que la forclusion était acquise au jour de l'assignation, le 16 juillet 2020. Il conclut encore au débouté de la société Volkswagen Bank GMBH de toute demande. A titre infiniment subsidiaire, il sollicite la condamnation de Mme [D] à le relever indemne de toute condamnation à son encontre. En tout état de cause, il demande à la juridiction du second degré de condamner la banque poursuivante à lui verser la somme de 2'500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

M. [B] fait ainsi valoir que':

1. Le premier incident de paiement non régularisé du prêt litigieux n'est pas daté du 5 avril mais du 5 janvier 2018. Ainsi, l'assignation du 16 juillet 2020 est forcément tardive et l'action de la banque forclose,

2. Le véhicule acquis au moyen du crédit accessoire contesté a été revendu le 5 septembre 2017 au prix de 36'500 euros. Il n'est pas contestable que cette somme n'est pas restée sur son compte. Le virement de 25'520 euros du 11 septembre 2017 est de compte à compte, au CIC où travaillait Mme [D]. M. [B] n'a pas conservé les fonds pour lui. Mme [D] doit garantie du paiement des sommes réclamées par la banque si la forclusion de l'action de cette dernière n'était pas retenue par la cour.

* * * *

L'instruction du dossier a été clôturée par ordonnance du 21 février 2023.

* * * *

Motifs de la décision':

-Sur la recevabilité de l'action du prêteur':

Attendu que l'article R. 312-35 du code de la consommation (dans sa version issue de l'ordonnance du 14 mars 2016 applicable au contrat litigieux) énonce en son premier alinéa que le tribunal d'instance [aujourd'hui le juge des contentieux de la protection] connaît des litiges nés de l'application du présent chapitre. Les actions en paiement engagées devant lui à l'occasion de la défaillance de l'emprunteur doivent être formées dans les deux ans de l'événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion. Cet événement est caractérisé par':

[---],

-le premier incident de paiement non régularisé,

[---]';

Que l'examen de l'historique du prêt (pièce n°4 de la partie appelante) enseigne que si l'échéance de janvier 2018 n'a pas été prélevée à son terme, la mensualité prélevée de février 2018 l'a régularisée, de même que celle de mars 2018 a régularisé celle de février';

Qu'enfin, si le prélèvement d'avril n'a pu être opéré, celui de mai 2018 a été effectif et a permis de régulariser l'échéance de mars de sorte que la première mensualité échue non régularisée correspond bien à celle d'avril 2018, plus aucun règlement n'étant intervenu après celui de mai 2018';

Que M. [B] ne peut dans ce contexte utilement soutenir que le premier incident de paiement non régularisé remonterait à janvier 2018 sauf à faire fi des trois prélèvements effectifs réalisés en février, mars et mai 2018';

Qu'il sera à ce titre rappelé qu'au sens de l'article 1342-10 alinéa 2 du code civil, à défaut d'indication par le débiteur [de celles des dettes qu'il entend acquitter], l'imputation a lieu comme suit': d'abord sur les dettes échues'; parmi celles-ci, sur les dettes que le débiteur avait le plus d'intérêt d'acquitter. A égalité d'intérêt, l'imputation se fait sur la plus ancienne'; toutes choses égales, elle se fait proportionnellement ;

Qu'en l'occurrence, sans précision explicite du débiteur, les échéances du prêt ayant par définition la même valeur à ses yeux, chaque prélèvement est imputé à l'échéance la plus ancienne';

Qu'ainsi, le point de départ du délai biennal de forclusion est le 5 avril 2018, ce qui normalement conduit à une expiration du délai au 5 avril 2020';

Qu'il ne faut cependant pas omettre, comme le rappelle avec pertinence la SA Volkswagen Bank GMBH, que l'ordonnance n°2020-560 du 13 mai 2020 relative à la période d'urgence sanitaire a instauré une période protégée du 12 mars au 23 juin 2020 et que l'article 2 de l'ordonnance n°2020-306 énonce que ce qui aurait dû être accompli pendant la période mentionnée à l'article 1er sera réputé avoir été fait à temps s'il a été effectué dans un délai qui ne peut excéder, à compter de la fin de cette période, le délai légalement imparti pour agir, dans la limite de deux mois. Il en est de même de tout paiement prescrit par la loi ou le règlement en vue de l'acquisition ou de la conservation d'un droit';

Que le délai de forclusion expirant au cours de la période juridiquement protégée, la SA Volkswagen Bank GMBH bénéficiait d'une prolongation jusqu'au 23 août 2020 pour régulariser l'assignation à délivrer aux emprunteurs de sorte qu'en accomplissant cette formalité dès le 16 juillet 2020, elle a agi utilement sans qu'aucune forclusion lui soit opposable';

Que son action à l'encontre de M. et Mme [B]-[D] est ainsi recevable et le jugement déféré sera de ce chef infirmé';

-Sur la contestation d'écriture par Mme [D]':

Attendu que, conformément aux dispositions de l'article 1373 du code civil qui énonce notamment que la partie à laquelle on l'oppose peut désavouer son écriture ou sa signature, Mme [D] épouse [B] maintient, comme en première instance et comme elle a eu l'occasion de le notifier à la SA Volkswagen Bank GMBH dès le 12 mai 2018, qu'elle n'a jamais signé le contrat conclu entre les époux [B]-[D] et cette personne morale, seul M. [X] [B] étant au fait de cette commande de véhicule dont il a eu seul l'usage';

Attendu que les éléments réunis au dossier de la cour permettent de rapprocher la signature qui apparaît en page 5/5 du contrat de crédit affecté, dans l'encadré réservé au co-emprunteur, juste sous la date du 16 janvier 2017, de la signature de Mme [D] telle qu'elle apparaît à plusieurs endroits sur le contrat de crédit affecté qu'elle a conclu comme seul emprunteur avec ce même prêteur mais le 25 avril 2016 pour financer l'acquisition de son propre véhicule, cette signature figurant à maintes reprises sur l'acte';

Qu'un examen comparatif de ces documents révèle rapidement et de manière parfaitement explicite qu'il ne peut absolument pas s'agir de la même signature, Mme [D] signant habituellement d'un seul trait en employant des lignes courbes assimilables à la lettre majuscule G mais dont elle termine la trajectoire par un retour transversal de la gauche vers la droite';

Que la signature qui apparaît sur le contrat litigieux et qui lui est attribuée prend la forme d'un B majuscule dont la boucle inférieure se termine par un trait légèrement descendant dirigé vers la gauche';

Que cette signature ne permet nullement d'identifier son auteur en la personne de Mme [K] [D] épouse [B], ce que sa comparaison avec la signature de la carte nationale d'identité de l'intéressée pourtant communiquée en photocopie par le prêteur lui-même l'autorisait aisément à relever';

Qu'il s'ensuit que Mme [D] épouse [B] n'est pas partie à ce contrat';

-Sur la solidarité des époux [B]-[D]':

Attendu que l'article 220 du code civil dispose que chacun des époux a pouvoir pour passer seul les contrats qui ont pour objet l'entretien du ménage ou l'éducation des enfants'; toute dette ainsi contractée par l'un oblige l'autre solidairement.

La solidarité n'a pas lieu, néanmoins, pour les dépenses manifestement excessives, eu égard au train de vie du ménage, à l'utilité ou à l'inutilité de l'opération, à la bonne ou mauvaise foi du tiers contractant.

Elle n'a pas lieu non plus, s'ils n'ont été conclus du consentement des deux époux, pour les achats à tempérament ni pour les emprunts à moins que ces derniers ne portent sur des sommes modestes nécessaires aux besoins de la vie courante et que le montant cumulé de ces sommes, en cas de pluralité d'emprunts, ne soit pas manifestement excessif eu égard au train de vie du ménage';

Attendu que la société Volkswagen Bank GMBH entend invoquer les termes de cet article, au moins le premier alinéa, pour obtenir de la cour qu'elle retienne la solidarité des époux [B]-[D], l'achat financé au moyen du crédit l'ayant été au cours du mariage et l'épouse, qui avait toute connaissance de ce crédit affecté, a pu bénéficier de l'usage du véhicule ainsi financé';

Que Mme [D] épouse [B] réfute catégoriquement de telles assertions en rappelant qu'elle disposait de son véhicule propre, aussi financé auprès du même prêteur, véhicule dont elle s'est séparée début 2018 dans la mesure où un véhicule professionnel avait été mis à sa disposition, ce qui revient à dire que le véhicule Volkswagen Tiguan acquis par son mari ne lui était pas particulièrement utile, contrairement à ce dernier';

Qu'elle ajoute que l'opération litigieuse ainsi financée n'était pas d'un montant modeste, la dépense en principal atteignant 49'704 euros avec les diverses assurances souscrites'par son conjoint';

Que la cour observe en l'état des éléments au dossier que le montant emprunté au titre du crédit litigieux est bien de 41 700 euros même s'il est exact que diverses options choisies par l'acquéreur ont pu porter le coût total de l'opération d'achat à presque 50'000 euros';

Que cette somme de 41'700 euros ne peut sérieusement, en termes de dépenses ménagères, être qualifiée de «'modeste'», les données financières transmises par Mme [D] épouse [B] établissant qu'en janvier 2017, elle travaillait toujours au CIC Est pour un salaire mensuel moyen net imposable de 2'400 euros environ, son mari étant toujours en période d'essai à la société Affutage Marnais pour un salaire mensuel de 1'600 euros, le couple marié sous la séparation de biens bénéficiant aussi de revenus fonciers d'un montant en 2016 de 18'096 euros, soit un apport supplémentaire de gains de 1'508 euros chaque mois';

Que les époux [B]-[D], parents de deux enfants, supportaient, outre les charges courantes, le remboursement de trois prêts (emprunt immobilier, prêt personnel et crédit renouvelable) pour un encours total de mensualités de 1'648,76 euros, Mme [D] remboursant pour sa part un prêt voiture dont la mensualité était de 336,27 euros, soit un total de mensualités de près de 1 984 euros pour un total de revenus de 5 508 euros par mois, soit un taux d'endettement de 36 %, taux déjà légèrement supérieur au seuil critique de 34 % et qui passe à 51 % si l'on prend en compte la mensualité de 828 euros (avec cotisation d'assurance) afférente au prêt affecté litigieux';

Que la situation du couple [B]-[D] n'était donc pas financièrement viable, les données qui apparaissent sur la fiche de dialogue que Mme [D] n'a pas davantage signée que le contrat ne reflétant aucunement cette réalité, les revenus respectifs des époux y étant sensiblement majorés et seule une charge de loyer de 1'000 euros par mois y étant reprise';

Que ces développements conduisent ainsi la cour à considérer que ce cinquième concours financier, souscrit par M. [B] sans son épouse, pour l'acquisition d'un véhicule dont l'utilité n'est du reste pas rapportée - l'acquéreur s'en séparera dès le mois de septembre 2017 au prix de 36'000 euros, a été conclu dans des conditions d'endettement manifestement excessif eu égard au train de vie du ménage';

Qu'il ne peut être question dans ce contexte de retenir la solidarité des époux [B]-[D] au sens du statut fondamental des gens mariés, la personne morale appelante étant en cela déboutée de sa prétention à cette fin';

-Sur la créance de la SA Volkswagen Bank GMBH envers M. [B]':

Attendu qu'au soutien de sa demande en paiement, la société prêteuse, outre les pièces contractuelles, les mises en demeure et l'historique du prêt, produit aux débats un décompte arrêté au 26 juin 2020, et ainsi détaillé':

-mensualités échues impayées (6)': 5'001,42 euros,

-indemnité sur impayés de 8 %': 400,14 euros. Dans la mesure où la société prêteuse entend exiger immédiatement le paiement des sommes au titre du capital restant dû, il ne peut en outre être fait application de cette indemnité de 8 % sur l'arriéré de mensualités échues impayées. Aucune indemnité ne sera ici retenue,

-capital restant dû': 29'121,47 euros,

-indemnité sur capital de 8 %': 2'329,72 euros,

-intérêts de retard à 4,50 % sur la créance totale de 36'852,75 euros du 28 septembre 2018 au 26 juin 2020': la banque poursuivante sollicite à ce titre la somme de 2'801,03 euros mais son calcul suppose qu'elle applique le taux contractuel à la totalité de la créance, c'est-à-dire aussi à l'indemnité conventionnelle de 8 %, ce qui n'est juridiquement pas admissible, une telle indemnité ne pouvant engendrer d'intérêts de retard que calculés au seul taux légal';

Qu'ainsi, il y a lieu de condamner M. [X] [B] à payer à la SARL Volkswagen Bank GMBH la somme de 36'452,61 euros augmentée des intérêts au taux contractuel de 4,50 % l'an sur la somme de 34'122,89 euros et des intérêts au taux légal sur le surplus, le tout à compter du 28 septembre 2018,'et ce jusqu'à parfait paiement';

-Sur la garantie réclamée par M. [B] à l'encontre de son épouse':

Attendu que M. [B] expose, au soutien de sa demande de garantie dirigée contre Mme [D], que le prix de revente du véhicule financé par le prêt litigieux, soit 36'000 euros, a été versé sur son compte mais dont il a aussitôt viré 25'520 et 7'033 vers le compte personnel de son épouse, ce qui lui fait dire qu'elle a bien bénéficié de l'opération et qu'elle doit à ce titre garantir le paiement du solde du prêt à la société Volkswagen Bank';

Que Mme [D] épouse [B] justifie pour sa part qu'elle a tiré le 11 septembre 2017, soit deux jours après les virements de son mari, sur son compte personnel un chèque de 25'000 euros libellé à l'ordre du Pub le Galway, débit de boissons que son mari a géré jusqu'en juillet 2018 avant que ce fonds ne soit mis en liquidation judiciaire en novembre 2018';

Qu'elle précise que la somme de 7'033 euros correspondait à la part de son mari dans les impôts du couple, ceux-ci étant prélevés sur son compte personnel';

Que ces renseignements ne peuvent aucunement justifier un quelconque principe de garantie en faveur de M. [B] au titre du paiement du solde d'un concours bancaire qu'il est seul à avoir contracté, l'intéressé omettant au surplus d'expliciter le fondement juridique d'une telle garantie';

Que la question des écritures passées de compte à compte pourrait au mieux donner lieu, le cas échéant, à l'établissement d'un compte entre les parties dans le contexte de la liquidation de leur régime matrimonial';

Que M. [B] sera débouté de sa demande'de garantie';

-Sur les dommages et intérêts sollicités par Mme [D]':

Attendu que Mme [D] épouse [B] entend voir condamner la SARL Volkswagen Bank à lui verser à titre de dommages et intérêts la somme de 5'000 euros en réparation de son préjudice lié à un risque d'endettement excessif suite à ce crédit affecté litigieux et au titre duquel le prêteur n'a selon elle pas respecté son devoir de mise en garde, l'intimée déplorant par ailleurs le fait qu'elle soit toujours mentionnée au FICP de la Banque de France, ce qui lui interdit tout accès au crédit';

Que la personne morale appelante s'oppose à une telle prétention indemnitaire de la part de Mme [D] en ce qu'elle n'était tenue envers cette dernière d'aucun devoir de mise en garde puisque l'intéressée travaillait au CIC Est en qualité de conseillère et était donc une emprunteuse avertie';

Que d'autre part, l'inscription au FICP est automatique à l'égard d'emprunteurs qui ne respectent pas leur obligation de rembourser, seul le paiement intégral de sa créance étant de nature à permettre un retrait du fichier de la Banque de France';

Que la cour considère que, Mme [D] n'étant pas retenue dans les termes de la condamnation au paiement en faveur de l'établissement prêteur, sa qualité d'emprunteuse n'étant pas retenue pas plus que la solidarité entre époux, elle ne subit aucun préjudice de ce chef et doit être déboutée de sa demande indemnitaire à ce titre';

Que, par ailleurs, s'il est exact que son inscription au FICP est assurément la conséquence d'une négligence de la banque qui n'a pas vérifié l'authenticité de sa signature sur le contrat alors qu'elle en avait les moyens (photocopie de carte nationale d'identité transmise à son dossier), Mme [D] n'établit pas qu'elle ait projeté récemment de recourir à l'emprunt, étant précisé que sa mise hors de cause du prêt litigieux ne pourra que provoquer le retrait de son fichage en Banque de France';

Que la décision dont appel est donc confirmée en ce qu'elle déboute Mme [D] épouse [B] de sa demande indemnitaire reconventionnelle';

-Sur les dépens et les frais irrépétibles':

Attendu que l'issue de l'instance d'appel et le sens du présent arrêt conduisent à mettre à la charge de la SARL Volkswagen Bank GMBH et de M. [B] les dépens d'appel et ceux de première instance dans les proportions qui suivent':

-1/3 pour la SARL Volkswagen Bank GMBH,

-2/3 pour M. [X] [B]';

Que l'équité justifie l'indemnité de procédure de 1'500 euros mise par le premier juge à la charge de la société Volkswagen Bank GMBH en faveur de Mme [D] épouse [B], le jugement entrepris étant en cela confirmé';

Qu'il n'y a pas lieu en équité de mettre en première instance à la charge de M. [B] une indemnité de procédure en faveur de la personne morale poursuivante'qui en sera déboutée';

Que cette même considération commande d'arrêter à hauteur de cour en faveur de Mme [D] épouse [B] une indemnité pour frais irrépétibles de 2 000 euros à la charge de la personne morale appelante, et en faveur de cette dernière une indemnité de 1'500 euros qui lui sera versée par M. [B], lequel est débouté de l'intégralité de ses prétentions exprimées au visa de l'article 700 du code de procédure civile';

Par ces motifs,

La cour, statuant publiquement et contradictoirement,

-Confirme le jugement déféré en ses dispositions déboutant Mme [K] [D] épouse [B] de sa demande de dommages et intérêts et condamnant la SARL Volkswagen Bank GMBH à lui verser une indemnité de procédure de 1'500 euros';

Infirmant et prononçant à nouveau sur le surplus,

-Déclare la SARL Volkswagen Bank GMBH recevable en son action à l'égard de M. [X] [B] et de Mme [K] [D] épouse [B]';

-Dit que Mme [K] [D] épouse [B] n'est pas signataire du contrat de crédit affecté du 16 janvier 2017';

-Dit n'y avoir lieu à solidarité entre les époux [B]-[D] au titre de la souscription de ce concours bancaire';

-En conséquence, déboute la SARL Volkswagen Bank GMBH de l'intégralité de ses demandes dirigées contre Mme [K] [D] épouse [B]';

-Condamne M. [X] [B] à payer à la SARL Volkswagen Bank GMBH, au titre du crédit affecté n°17448918CRE0-VWB-01 daté du 16 janvier 2017, d'un montant de 41 700 euros, la somme de 36'452,61 euros augmentée des intérêts au taux contractuel de 4,50 % l'an sur la somme de 34'122,89 euros et des intérêts au taux légal sur le surplus, le tout à compter du 28 septembre 2018,'et ce jusqu'à parfait paiement';

-Déboute M. [X] [B] de sa demande de garantie dirigée contre Mme [K] [D] épouse [B]';

-Condamne dans les proportions suivantes la SARL Volkswagen Bank et M. [X] [B] aux dépens de première instance et d'appel':

*1/3 pour la société Volkswagen Bank GMBH et

* 2/3 pour M. [X] [B]';

-Déboute la SARL Volkswagen Bank GMBH de sa demande d'indemnisation de ses frais irrépétibles de première instance dirigée à l'encontre de M. [X] [B]';

-Condamne la SARL Volkswagen Bank GMBH à verser à hauteur de cour à Mme [K] [D] épouse [B] une indemnité pour frais irrépétibles de 2 000 euros';

-Condamne M. [X] [B] à verser à hauteur de cour à la SARL Volkswagen Bank GMBH une indemnité pour frais irrépétibles de 1'500 euros';

-Déboute M. [X] [B] de sa demande indemnitaire exprimée à hauteur de cour au visa de l'article 700 du code de procédure civile';

-Dit que Me Karoline Diallo, conseil de la société Volkswagen Bank GMBH, pourra, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, et dans la proportion rappelée ci-dessus, recouvrer à l'encontre de M. [X] [B] ceux des dépens dont elle aurait fait l'avance sans avoir préalablement reçu de provision.

Le Greffier. Le Président.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Reims
Formation : 1ère chambre section inst
Numéro d'arrêt : 22/00661
Date de la décision : 02/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-02;22.00661 ?
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