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19/04/2023 | FRANCE | N°23/00041

France | France, Cour d'appel de Reims, Chambre premier président, 19 avril 2023, 23/00041


ORDONNANCE N°25



du 19/04/2023



DOSSIER N° RG 23/00041 - N° Portalis DBVQ-V-B7H-FKHN

















Monsieur [W] [U]





C/



EPSM DES ARDENNES

Monsieur [Y] [U]













































































O

RDONNANCE DU PREMIER PRÉSIDENT

DE LA COUR D'APPEL DE REIMS

RENDUE EN MATIÈRE DE SOINS PSYCHIATRIQUES



En application du décret n° 2021-537 du 30 avril 2021



Le dix neuf avril deux mille vingt trois





A l'audience publique de la cour d'appel de Reims où était présent et siégeait Madame Claire HERLET, conseiller délégué du premier président, régulièrement désignée par ordonnance, assistée ...

ORDONNANCE N°25

du 19/04/2023

DOSSIER N° RG 23/00041 - N° Portalis DBVQ-V-B7H-FKHN

Monsieur [W] [U]

C/

EPSM DES ARDENNES

Monsieur [Y] [U]

ORDONNANCE DU PREMIER PRÉSIDENT

DE LA COUR D'APPEL DE REIMS

RENDUE EN MATIÈRE DE SOINS PSYCHIATRIQUES

En application du décret n° 2021-537 du 30 avril 2021

Le dix neuf avril deux mille vingt trois

A l'audience publique de la cour d'appel de Reims où était présent et siégeait Madame Claire HERLET, conseiller délégué du premier président, régulièrement désignée par ordonnance, assistée de Madame Eva MARTYNIUK, greffière,

a été rendue l'ordonnance suivante :

ENTRE :

Monsieur [W] [U] - actuellement hospitalisé -

[Adresse 2]

[Localité 1]

Appelant d'une ordonnance en date du 06 avril 2023 rendue par le juge des libertés et de la détention de [Localité 1]

Comparant en personne, assisté de Me Amélie DAILLENCOURT substituée par Me Anne LEY, avocats au barreau de REIMS

ET :

EPSM DES ARDENNES

[Adresse 4]

[Adresse 2]

[Localité 1]

Non comparant, ni représenté

Monsieur [Y] [U]

[Adresse 3]

[Localité 1]

Non comparant, ni représenté

MINISTÈRE PUBLIC :

L'affaire a été communiquée au ministère public, représenté lors des débats par Monsieur Bruno FAYARD, substitut général.

Régulièrement convoqués pour l'audience du 18 avril 2023 à 10:00,

À ladite audience, tenue publiquement, Madame Claire HERLET, conseiller délégué du premier président, assistée de Madame Yelena MOHAMED-DALLAS, greffière, a entendu Monsieur [W] [U] en ses explications et le ministère public en ses observations, Monsieur [W] [U] ayant eu la parole en dernier puis l'affaire a été mise en délibéré au 19 avril 2023.

Et ce jour, a été rendue l'ordonnance suivante, par mise à disposition au greffe de la cour, les parties présentes à l'audience ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et a été signée par Madame Claire HERLET, conseiller délégué du premier président, et Madame Eva MARTYNIUK, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu l'ordonnance en date du 06 avril 2023 rendue par le juge des libertés et de la détention de [Localité 1], qui a maintenu l'hospitalisation complète en soins psychiatriques sans consentement de Monsieur [W] [U],

Vu l'appel interjeté le 12 avril 2023 par Monsieur [W] [U] reçu le 13 avril 2023,

Sur ce :

Vu les dispositions des articles L 3211-12-1 et R 3211-9 et suivants du Code de la santé publique;

Vu la décision d'admission en soins psychiatriques sur demande d'un tiers été prise par le directeur du Centre Hospitalier Bélair le 29 mars 2023 fondé sur le certificat médical établi par le Dr [K] établi le 29 mars 2023 constatant que M. [W] [U] souffrait de troubles anxieux et du comportement le mettant en danger alors qu'il refusait les soins, ces troubles rendant impossible son consentement et nécessitant des soins psychiatriques immédiats;

Vu le certificat médical des 24 heures rédigé le 30 mars 2023 par le Docteur [E] ;

Vu le certificat médical des 72 heures rédigé le 1er avril 2023 par le Docteur [X] ;

Vu l'avis motivé du Docteur [E] en date du 04 avril 2023 ;

Vu l'ordonnance du juge des libertés et de la détention en date du 6 avril 2023 maintenant l'hospitalisation sous contrainte ;

Vu l'appel interjeté par M. [W] [U] le 12 avril 2023  reçu le 13 avril 2023 ;

Lors de l'audience du 18 avril 2023, M. [W] [U] a indiqué qu'il souhaitait poursuivre les soins engagés au cours de son hospitalisation sous contrainte, en ambulatoire. Il admettait avoir eu des tocs consistant à ouvrir et fermer les portes, à se laver les mains sans cesse ou encore à se méfier de tout ce qui venait de l'extérieur mais affirmait qu'ils avaient cessé depuis son hospitalisation sans l'aide d'un traitement médicamenteux mis en place au bout de 8 jours.

Il affirmait ne pas minimiser ses troubles et avoit la certitude qu'ils étaient apparus à son domicile et qu'ils ne se reproduiraient pas s'il vivait ailleurs que chez sa mère. Il produisait d'ailleurs une attestation de son père s'engageant à l'héberger lors de sa sortie d'hospitalisation.

L'avocat général s'en est rapporté aux conclusions du certificat de situation établi le 14 avril 2023 par le Dr [P] réclamant le maintien de l'hospitalisation complète au motif que la perception de M. [U] de sa pathologie était biaisée par la minimisation de ses troubles et le risque, en cas de retour dans son environnement, de réitération de ses comportements compulsifs afin de tarir une anxiété invalidante nécessitant une prise en chage psychothérapeutique et médicamenteuse.

Il a donc requis la confirmation de la décision déférée.

Le conseil de M. [U] a sollicité la mainlevée de la mesure au motif que les certificats médicaux des 24 heures et des 72 heures suite à son admission n'étaient pas horodatés si bien qu'il était impossible de vérifier la régularité de la procédure, qui, si elle faisait défaut avait portée atteinte aux droits de son client.

Elle a par ailleurs constaté que la notification de la décision administrative de maintien des soins psychiatriques pris par le Directeur du centre hospitalier le 1er avril 2023 avait été faite tardivement le 4 avril 2023 privant ainsi M. [U] de la connaissance de la décision et de ses droits.

Sur le fond, elle a indiqué qu'il y a désormais une adhésion totale aux soins par M. [U] dont les troubles du comportement ont cessé.

MOTIFS

-Sur la recevabilité de l'appel

Aux termes de l'article R3211-18 du code de la santé publique, seules les décisions rendues en première instance par le Juge des libertés et de la détention sont susceptibles d'appel devant le premier président de la Cour d'appel ou son délégué dans un délai de 10 jours à compter de sa notification.

En l'espèce, l'appel interjeté dans les délais et les formes imposés est recevable.

-sur l'absence d'horodatage des certificats médicaux de 24 heures et de 72 heures

L'article L. 3212-3 du code de santé publique (L. no 2011-803 du 5 juill. 2011, art. 2) dispose qu'en cas d'urgence, lorsqu'il existe un risque grave d'atteinte à l'intégrité du malade, le directeur d'un établissement mentionné à l'article L. 3222-1 peut, à titre exceptionnel, prononcer à la demande d'un tiers l'admission en soins psychiatriques d'une personne malade au vu d'un seul certificat médical émanant, le cas échéant, d'un médecin exerçant dans l'établissement. Dans ce cas, les certificats médicaux mentionnés aux deuxième et troisième alinéas de l'article L. 3211-2-2 sont établis par deux psychiatres distincts.

Préalablement à l'admission, le directeur de l'établissement d'accueil vérifie que la demande de soins a été établie conformément au 1o du II de l'article L. 3212-1 et s'assure de l'identité de la personne malade et de celle qui demande les soins. (Ord. no 2020-232 du 11 mars 2020, art. 24) «Si la demande est formulée pour un majeur protégé par la personne chargée d'une mesure de protection juridique à la personne, celle-ci doit fournir à l'appui de sa demande le mandat de protection future visé par le greffier ou un extrait du jugement instaurant la mesure de protection.»

Il ressort de l'article L. 3212-1 du même code que :

I. Une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l'objet de soins psychiatriques sur la décision du directeur d'un établissement mentionné à l'article L. 3222-1 que lorsque les deux conditions suivantes sont réunies:

1° Ses troubles mentaux rendent impossible son consentement;

2° Son état mental impose des soins immédiats assortis soit d'une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit d'une surveillance médicale régulière justifiant une prise en charge sous la forme mentionnée au 2° (L. no 2013-869 du 27 sept. 2013, art. 1er) «du I» de l'article L. 3211-2-1.

En application de l'article L. 3211-2-2 du code de santé publique, lorsqu'une personne est admise en soins psychiatriques en application des chapitres II ou III du présent titre, elle fait l'objet d'une période d'observation et de soins initiale sous la forme d'une hospitalisation complète.

Dans les vingt-quatre heures suivant l'admission, un médecin réalise un examen somatique complet de la personne et un psychiatre de l'établissement d'accueil établit un certificat médical constatant son état mental et confirmant ou non la nécessité de maintenir les soins psychiatriques au regard des conditions d'admission définies aux articles L. 3212-1 ou L. 3213-1. Ce psychiatre ne peut être l'auteur du certificat médical ou d'un des deux certificats médicaux sur la base desquels la décision d'admission a été prononcée.

Dans les soixante-douze heures suivant l'admission, un nouveau certificat médical est établi dans les mêmes conditions que celles prévues au deuxième alinéa du présent article.

Lorsque les deux certificats médicaux ont conclu à la nécessité de maintenir les soins psychiatriques, le psychiatre propose dans le certificat mentionné au troisième alinéa du présent article la forme de la prise en charge mentionnée aux 1° et 2° du I de l'article L. 3211-2-1 et, le cas échéant, le programme de soins. Cette proposition est motivée au regard de l'état de santé du patient et de l'expression de ses troubles mentaux.

Il résulte donc de l'article L. 3211-2-2 du CSP que, lorsqu'une personne est admise en soins psychiatriques sans consentement, elle fait l'objet d'une période d'observation de 72 heures sous la forme d'une hospitalisation complète.

Cette période a pour objectif de déterminer si, au bout des 72 heures, la mesure continue de se justifier et quelle forme, le cas échéant, elle doit prendre.

Elle donne lieu à l'établissement de deux certificats médicaux, le premier dans les 24 heures, le second dans les 72 heures.

L'article L 3211-2-2 fait partir ces délais de 24 et de 72 heures de «l'admission».

Ces délais étant exprimés en heures et non en jours, ils doivent se calculer d'heure à heure rendant ainsi indispensable l'horodatage des certificats médicaux afin de vérifier le respect des délais et des droits de la personne hospitalisée.

En l'espèce, il ressort de la procédure que la décision d'admission en soins psychiatriques sur demande d'un tiers été prise par le directeur du Centre Hospitalier Bélair le 29 mars 2023 à 12h15.

Le certificat médical de 24 h devait donc être établi avant 12h 15 le 30 mars 2023 et celui des 72 heures avant 12h15 le 1er avril 2023.

Or, force est de constater que ni le certificat médical des 24 heures ni celui des 72 heures n'ont été horodatés si bien que la cour n'est pas en mesure de vérifier le respect des délais imposés par la loi. Dans ces conditions, les certificats médicaux, et notamment celui des 72 heures, ayant possiblement été établis après 12h15, la décision de maintien de la mesure de soins psychiatriques en hospitalisation complète prise par le Directeur du centre hospitalier le 1er avril 2023 n'est pas fondée.

Dans ces conditions, les droits de M. [W] [U] n'ont pas été respectés justifiant ainsi l'infirmation de l'ordonnance déférée et la mainlevée de la mesure d'hospitalisation complète, sans qu'il n'y ait lieu d'examiner les autres moyens soulevés par l'intéressé.

En revanche, compte-tenu de la nécessité évoquée par le Dr [P] dans son certificat de situation établi le 14 avril 2023 de mettre en place un programme de soins éventuellement dans le cadre d'un appartement thérapeutique ou hors de son environnement habituel, il y a lieu de différer l'exécution de la décision de mainlevée dans le délai maximal de 24 heures en application de l'article L3211-12 III alinéa 2 du code de la santé publique.

Il convient, conformément aux dispositions des articles R. 93 et R. 93-2 du code de procédure pénale, de laisser les dépens à la charge de l'Etat.

PAR CES MOTIFS,

Statuant par décision réputée contradictoire, par mise à disposition de notre ordonnance au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées selon les conditions prévues par l'article 450-2 du code de procédure civile,

Déclarons l'appel recevable,

Infirmons, la décision du juge des libertés et de la détention de [Localité 1] en date du 6 avril 2023,

Ordonnons la mainlevée des soins psychiatriques sous la forme de l'hospitalisation complète de M. [W] [U],

Ordonnons que la décision de mainlevée soit différée dans un délai maximal de 24 heures afin de permettre d'organiser la sortie de M. [W] [U] dans le cadre d'un programme de soins,

Laissons les dépens d'appel à la charge du trésor public.

LE GREFFIER LE CONSEILLER


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Reims
Formation : Chambre premier président
Numéro d'arrêt : 23/00041
Date de la décision : 19/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-19;23.00041 ?
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