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29/03/2023 | FRANCE | N°22/00481

France | France, Cour d'appel de Reims, Chambre sociale, 29 mars 2023, 22/00481


Arrêt n°

du 29/03/2023





N° RG 22/00481





MLS/FJ









Formule exécutoire le :







à :



COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE SOCIALE

Arrêt du 29 mars 2023





APPELANT :

d'un jugement rendu le 28 janvier 2022 par le Conseil de Prud'hommes de REIMS, section Industrie (n° F 21/00307)



Monsieur [H] [B]

Chez Mme [W] [B] [Adresse 2]

[Localité 3]



Représenté par la SELARL GS AVOCATS, avocats a

u barreau de REIMS





INTIMÉE :



SAS H2O

[Adresse 1]

[Localité 3]



Représentée par Me Julie COUTANT, avocat au barreau de REIMS

DÉBATS :



En audience publique, en application des dispositions des articles 805 et 907 du code de ...

Arrêt n°

du 29/03/2023

N° RG 22/00481

MLS/FJ

Formule exécutoire le :

à :

COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE SOCIALE

Arrêt du 29 mars 2023

APPELANT :

d'un jugement rendu le 28 janvier 2022 par le Conseil de Prud'hommes de REIMS, section Industrie (n° F 21/00307)

Monsieur [H] [B]

Chez Mme [W] [B] [Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par la SELARL GS AVOCATS, avocats au barreau de REIMS

INTIMÉE :

SAS H2O

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Julie COUTANT, avocat au barreau de REIMS

DÉBATS :

En audience publique, en application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 8 février 2023, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Marie-Lisette SAUTRON, conseiller faisant fonction de président, et Madame Marie-Laure BERTHELOT, conseiller, chargés du rapport, qui en ont rendu compte à la cour dans son délibéré ; elle a été mise en délibéré au 29 mars 2023.

COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :

Madame Marie-Lisette SAUTRON, conseiller faisant fonction de président

Madame Marie-Laure BERTHELOT, conseiller

Madame Isabelle FALEUR, conseiller

GREFFIER lors des débats :

Monsieur Francis JOLLY, greffier

ARRÊT :

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Madame Marie-Lisette SAUTRON, conseiller faisant fonction de président, et Monsieur Francis JOLLY, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

Monsieur [H] [B] a été embauché à compter du 1er mars 1996 en qualité de conducteur d'engins, sans contrat de travail écrit, par la SAS H2O.

Le 13 avril 2021, une violente altercation a eu lieu entre Monsieur [H] [B] et son employeur sur un chantier, à la suite de laquelle Monsieur [H] [B] a été placé en arrêt de travail. L'employeur a déclaré l'accident du travail le 15 avril 2021.

Le 14 avril 2021, Monsieur [B] a déposé plainte pour violence à l'encontre de son employeur, plainte qui a abouti, le 11 octobre 2021, à un rappel à la loi après indemnisation du préjudice subi par la victime, évalué à 200,00 euros.

Le 22 avril 2021, le salarié a fait l'objet d'un avertissement pour insubordinations.

Le 13 mai 2021, l'employeur a déposé plainte contre Monsieur [H] [B] pour harcèlement moral.

Par courrier en date du 5 juillet 2021, Monsieur [H] [B] a pris acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de l'employeur pour cause de violences physiques et verbales.

Le même jour, le salarié a saisi le conseil de prud'hommes de Reims de demandes tendant à faire :

- requalifier la prise d'acte de la rupture du contrat de travail en licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- condamner la société H2O à lui payer les sommes suivantes, avec intérêts au taux légal à compter du jour de la prise d'acte :

5 146,08 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

514,61 euros à titre des congés payés afférents,

4 127,54 euros à titre de paiement des congés payés acquis,

19 440,75 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

46 314,72 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice né du licenciement sans cause réelle et sérieuse,

3 500,00 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonner sous astreinte la remise des documents de fin de contrat rectifiés.

En réplique, la société employeur a conclu au débouté du salarié.

Par jugement du 28 janvier 2022, le conseil de prud'hommes a débouté Monsieur [H] [B] de ses demandes et laissé à chacune des parties la charge de ses dépens.

Le 25 février 2022, Monsieur [H] [B] a interjeté appel du jugement en chaque chef de son dispositif.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 19 septembre 2022.

Exposé des prétentions et moyens des parties :

Par conclusions notifiées par voie électronique le 5 juillet 2022, auxquelles il sera renvoyé pour plus ample exposé, l'appelant demande à la cour :

- d'infirmer le jugement en toutes ses dispositions ;

- de requalifier la prise d'acte de la rupture du contrat de travail en licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- de condamner la société H2O à lui payer les sommes suivantes, avec intérêts au taux légal à compter du jour de la prise d'acte :

. 5 146,08 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

. 19 440,75 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

. 46 314,72 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice né du licenciement sans cause réelle et sérieuse,

. 50 000,00 euros à titre de dommages-intérêts suite à la rupture du contrat en réparation du préjudice moral, attitude vexatoire et harcèlement caractérisé suite aux blessures non consolidées ;

. 3 500,00 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- d'ordonner sous astreinte la remise des documents de fin de contrat rectifiés et notamment l'attestation de congés payés relative au préavis pour la caisse du BTP.

Au soutien de ses prétentions, il fait valoir qu'il a été agressé par son employeur le 13 avril 2021 entraînant un arrêt maladie et des blessures physiques nécessitant toujours, à la date du 22 mars 2022, des soins. Il ajoute avoir subi des violences psychologiques à la suite de cet accident puisque l'employeur lui a notifié un avertissement, a déposé une plainte à son encontre pour harcèlement et l'a menacé de l'expulser de son logement de fonction s'il ne procédait pas à la destruction des extensions de celui-ci.

S'agissant de l'indemnisation de la rupture de son contrat, il rappelle les dispositions de la convention collective du bâtiment et fait valoir que son état de santé physique et moral, résultant des conditions de son départ, l'empêche de retrouver un travail.

Sur la demande en paiement de 'dommages-intérêts suite à la rupture du contrat en réparation du préjudice moral, attitude vexatoire et harcèlement caractérisé suite aux blessures non consolidées', il affirme avoir été victime de harcèlement moral de la part de son employeur pour le contraindre à quitter l'entreprise engendrant une forte dépression et de graves conséquences psychologiques qui perdurent et qui ont nécessité une hospitalisation récente. Il ajoute que la rupture du contrat de travail a entrainé des blessures d'une gravité telle qu'un an après les faits il est toujours invalide. Il soutient que sa demande étant l'accessoire de la demande de rupture du contrat de travail, elle ne peut être déclarée irrecevable comme le prétend l'intimée. Il soutient encore que la demande relève de la juridiction prud'homale étant une conséquence de la rupture du contrat de travail. Il rappelle que l'obligation de réparation de son préjudice par le gérant de la société ne l'empêche pas de demander réparation à la société employeur sans qu'il n'y ait de cumul d'indemnisation.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 13 septembre 2022, auxquelles il sera renvoyé pour plus ample exposé, l'intimée demande à la cour in limine litis de déclarer irrecevable comme nouvelle à hauteur d'appel la demande en paiement de dommages-intérêts 'suite à la rupture du contrat en réparation du préjudice moral, attitude vexatoire et harcèlement caractérisé suite aux blessures non consolidées' puis de confirmer le jugement et condamner Monsieur [H] [B] au paiement de la somme de 2 000,00 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de ses prétentions sur l'irrecevabilité de la demande de dommages et intérêts 'suite à la rupture du contrat en réparation du préjudice moral, attitude vexatoire et harcèlement caractérisé suite aux blessures non consolidées' , elle fait valoir d'une part, au visa des l'article 564 du code de procédure civile, que la demande en paiement de dommages-intérêts nouvelle formée est distincte de la requalification de la rupture de son contrat de travail, d'autre part que par cette demande Monsieur [H] [B] sollicite en réalité l'indemnisation d'un préjudice qui découlerait de l'accident de travail en date du 13 avril 2021 et enfin qu'il a déjà été indemnisé de ce préjudice dans le cadre du rappel à la loi dont a fait l'objet l'employeur le 11 octobre 2021.

Elle conteste ensuite sur le fond le déroulé des événements du 13 avril 2021 tels que présentés par Monsieur [H] [B] expliquant avoir répondu à des insultes proférées par celui-ci et décrit un comportement violent de la part du salarié.

S'agissant de la démolition des constructions, elle fait valoir qu'il s'agit de constructions érigées illégalement et que par courrier du 26 mai 2021 elle a donné à Monsieur [H] [B] un délai d'un mois, non pas pour quitter les lieux, mais pour les remettre en état.

Elle soutient également qu'elle ne peut être tenue responsable des problèmes de santé de Monsieur [H] [B] ceux-ci étant en réalité la conséquence d'un grave accident de moto survenu en 1986.

Sur l'indemnisation du licenciement, elle fait observer que le salarié sollicite une indemnisation au maximum du plafond légal sans justifier d'un préjudice correspondant et ajoute qu'il n'a subi aucun préjudice financier puisqu'il perçoit les indemnités de sécurité sociale et de prévoyance.

Motivation :

Au préalable, il faut noter que le salarié a interjeté appel de l'intégralité du jugement et donc de sa partie le déboutant de sa demande de condamnation de l'employeur à lui payer la somme de 4 127,54 euros à titre de paiement des congés payés acquis. Toutefois, il ne réitère plus sa demande dans ses dernières écritures de sorte que le jugement sur ce point doit être confirmé.

1 - Sur la recevabilité de la demande de dommages-intérêts, 'suite à la rupture du contrat pour préjudice moral, attitude vexatoire et harcèlement caractérisé suite aux blessures non consolidées'.

Aux termes de l'article 564 du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.

Les articles 565 et 566 du même code précisent que les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent, et que les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire.

En l'espèce, Monsieur [H] [B] sollicite à hauteur d'appel le paiement de 'dommages-intérêts, suite à la rupture du contrat pour préjudice moral, attitude vexatoire et harcèlement caractérisé suite aux blessures non consolidées'.

Au soutien de sa demande, il explique être toujours placé en arrêt de travail depuis son accident du travail du 13 avril 2021, que le harcèlement dont il a été victime de la part de son employeur pour l'inciter à quitter l'entreprise a engendré une forte dépression et des troubles psychologiques qui perdurent et nécessitent toujours des soins et que la rupture du contrat a provoqué des blessures d'une gravité telle qu'un an après il est toujours invalide.

Cette demande de dommages-intérêts tend par conséquent à la réparation à la fois du préjudice né des manquements de l'employeur lors de l'exécution du contrat de travail et d'un préjudice spécifique né de la rupture du contrat de travail.

En première instance, Monsieur [H] [B] avait formulé uniquement des demandes relatives à la rupture du contrat en faisant valoir que sa prise d'acte devait produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Il a sollicité le paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse mais aucun dommages-intérêts en réparation d'un préjudice distinct et spécifique né des conditions de la rupture du contrat de travail.

Aucune demande portant spécifiquement sur des dommages-intérêts au titre du harcèlement moral de l'employeur n'a été formée.

La demande d'indemnisation du préjudice né du harcèlement moral et de l'attitude vexatoire de l'employeur ne tend pas aux mêmes fins que celles présentées devant le conseil de prud'hommes dont l'objet était l'indemnisation de la rupture injustifiée du contrat de travail.

Cette indemnisation n'a pas non plus pour objet d'opposer compensation ni faire écarter les prétentions adverses.

Elle ne résulte pas de l'intervention d'un tiers, de la survenance ou de la réalisation d'un fait inconnu en première instance. En effet, si Monsieur [H] [B] justifie au moyen de pièces médicales de la poursuite de son arrêt de travail postérieurement au jugement de première instance, d'un suivi de soins psychiatriques pour la période courant du 9 mars 2022 au 6 avril 2022 et de la continuité de soins en lien avec son accident du travail, à la date du 3 mars 2022, il s'agit de la continuité de faits existants en première instance et ne constituent donc pas des faits nouveaux au sens de l'article 564 du code de procédure civile.

Cependant, cette demande d'indemnisation doit être considérée comme l'accessoire voire le complément nécessaire de la demande principale dès lors que le salarié soutient que le harcèlement avait pour but et a eu pour effet de faire rompre à son initiative, le contrat de travail.

La demande en paiement de dommages-intérêts doit être considérée comme recevable sur le fondement de l'article 566 du code de procédure civile.

La SAS H2O oppose également à Monsieur [H] [B] que cette demande ne relève pas de la compétence du conseil de prud'hommes mais de celle du juge de la sécurité sociale.

Il est constant que le salarié ne peut former devant la juridiction prud'homale une demande de dommages-intérêts en réparation du préjudice causé par un manquement de l'employeur pour obtenir, en réalité, l'indemnisation des dommages résultant d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, laquelle relève de la compétence exclusive du tribunal des affaires de sécurité sociale.

Si l'indemnisation des dommages résultant d'un accident du travail, qu'il soit ou non la conséquence d'un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité, relève de la compétence exclusive du pôle social du tribunal judiciaire, la juridiction prud'homale est seule compétente pour statuer sur le bien-fondé de la rupture du contrat de travail et pour allouer, le cas échéant, une indemnisation au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ou de manquement de l'employeur à ses obligations contractuelles. C'est donc l'analyse des demandes formées par les parties qui permet de déterminer la juridiction compétente.

En l'espèce, la demande est intitulée 'dommages-intérêts, suite à la rupture du contrat pour préjudice moral, attitude vexatoire et harcèlement caractérisé suite aux blessures non consolidées' et laisse croire à une demande d'indemnisation des conséquences de l'accident du travail, ce que corroborent les écritures du salarié qui prétend que la rupture lui a causé des blessures graves le laissant invalide encore un an après. Or, c'est l'accident du travail dont il a été victime qui lui a occasionné des blessures de sorte que sous le couvert d'une demande indemnitaire fondée sur la rupture du contrat de travail, Monsieur [H] [B] demande en réalité la réparation par l'employeur d'un préjudice né de son accident professionnel de sorte qu'elle relève de la compétence du pôle social du tribunal judiciaire.

En revanche, il fait également état d'une dépression et de graves conséquences psychologiques générées par le harcèlement moral, et l'ayant poussé, par leur gravité à la prise d'acte. Ces préjudices allégués, que le salarié devra prouver, ne se confondent pas avec l'indemnisation de l'accident du travail et l'irrecevabilité ne peut être totalement accueillie.

De même, la condamnation de l'employeur à indemniser le préjudice nés des violences physiques du 13 avril 2021, ne concerne pas le préjudice né du harcèlement moral ou de son attitude vexatoire.

Dans ces conditions, il convient de déclarer recevable la demande de dommages-intérêts , suite à la rupture du contrat pour préjudice moral, attitude vexatoire et harcèlement '.

2 - sur le harcèlement moral

Le salarié qui allègue un harcèlement moral doit, en application des dispositions de l'article L 1154-1 du Code du travail en sa version applicable en l'espèce, présenter des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement, étant rappelé que le harcèlement est défini par l'article L 1152-1 du code précité comme tous agissements répétés qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits et à la dignité du salarié, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. Au vu de ces éléments, il incombe alors à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs de harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Or, si le salarié fait grief à l'employeur de divers manquements ayant justifié la prise d'acte, il ne les reprend pas au titre des faits laissant supposer un harcèlement moral. En développant sa demande de dommages et intérêts, il se contente d'affirmer qu'il a été victime de harcèlement moral sans même mentionner les faits qui, selon lui, seraient susceptibles de faire présumer un harcèlement moral.

De même, il n'explique pas dans ses écritures ce qui caractérise l'attitude vexatoire de l'employeur, indépendamment des griefs ayant justifié la prise d'acte.

Par conséquent sa demande ne peut aboutir et sera rejetée.

3 - Sur la prise d'acte

La prise d'acte ne permet au salarié de rompre le contrat de travail aux torts de l'employeur qu'en cas de manquement de ce dernier à ses obligations, suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail.

Si les griefs invoqués contre l'employeur sont fondés, la prise d'acte produit les effets d'un licenciement abusif. En cas contraire, elle produit les effets d'une démission.

Les manquements de l'employeur susceptibles de justifier la rupture du contrat de travail à ses torts s'apprécient à la date de la prise d'acte de la rupture.

En l'espèce, Monsieur [H] [B] a pris acte de la rupture de son contrat de travail pour causes de violences physiques et verbales et harcèlement moral.

C'est à tort que les premiers juges ont jugé que la prise d'acte devait être analysée en une démission.

En effet, il n'est pas contestable que le 13 avril 2021, l'employeur a commis des violences sur la personne de son salarié, faits pour lesquels il a été pénalement condamné.

Le comportement provocateur du salarié ne peut justifier ces violences dès lors que l'employeur insatisfait du comportement d'un salarié, peut exercer son pouvoir disciplinaire pouvant aller jusqu'au licenciement, ce qui exclut la violence.

Ces faits de violence commis le 13 avril 2021 sont suffisamment graves pour justifier que le salarié veuille mettre fin au contrat de travail en juillet 2021, étant observé que le salarié n'a pas repris le travail entre ces deux dates.

Le jugement doit être infirmé en ce qu'il a débouté Monsieur [H] [B] de sa demande de requalification de sa prise d'acte et de ses conséquences indemnitaires.

Le salarié peut donc prétendre :

- à une indemnité compensatrice de préavis, soit la somme au quantum incontesté de 5 146,08 euros,

- à des congés payés afférents, soit la somme de 514,60 euros,

- à une indemnité conventionnelle de licenciement au quantum incontesté de 19 440,75 euros,

- à des dommages et intérêts en réparation des préjudices nés du licenciement sans cause réelle et sérieuse en application des dispositions de l'article L 1235-3 du Code du travail, compris entre 3 et 18 mois de salaire (2 573,00 euros mensuels bruts). Compte tenu de l'âge du salarié, de son ancienneté, de son niveau de salaire, de ses arrêts de travail justifiés jusqu'en juillet 2022, la somme de 40 000,00 euros est de nature à réparer entièrement les préjudices subis.

4 - les autres demandes

- les documents de fin de contrat

L'employeur sera condamné sans astreinte à remettre au salarié les documents de fins de contrat conformes au présent arrêt, à savoir un certificat de travail, une attestation POLE EMPLOI et le document à destination de la caisse de congés payés permettant au salarié de percevoir ses congés payés afférents au préavis.

- les frais irrépétibles et les dépens.

L'employeur condamné à paiement d'indemnités en raison de la rupture abusive du contrat de travail, doit être considéré comme succombant au sens de l'article 696 du Code de procédure civile.

Il doit donc supporter les dépens de première instance et d'appel, par infirmation du jugement.

Il sera donc débouté de sa demande à ce titre et sera condamné à payer au salarié la somme de 3 000,00 euros en remboursement de ses frais irrépétibles de première instance et d'appel.

Par ces motifs :

La cour, statuant contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Confirme le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Reims le 28 janvier 2022 en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande de condamnation de l'employeur à lui payer la somme de 4 127,54 euros au titre des congés payés,

Infirme le surplus des dispositions soumises à la cour,

statuant à nouveau, dans cette limite et y ajoutant,

Déclare recevable la demande en paiement de dommages-intérêts pour préjudice moral, attitude vexatoire et harcèlement caractérisé suite aux blessures non consolidées formée par Monsieur [H] [B] en cause d'appel, et l'en déboute,

Dit que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail a les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Condamne la S.A.S. H2O à payer à Monsieur [H] [B] les sommes suivantes :

- 5 146,08 euros (cinq mille cent quarante six euros et huit centimes) à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 514,60 euros (cinq cent quatorze euros et soixante centimes) de congés payés afférents,

- 19 440,75 euros (dix neuf mille quatre cent quarante euros et soixante quinze centimes) d'indemnité conventionnelle de licenciement,

- 40 000,00 euros (quarante mille euros) de dommages et intérêts en réparation des préjudices nés du licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Dit que les condamnations sont prononcées sous réserve d'y déduire le cas échéant les cotisations sociales et salariales,

Condamne la S.A.S. H2O à remettre à Monsieur [H] [B] :

- un bulletin de paie,

- un certificat de travail,

- une attestation POLE EMPLOI,

- un document à destination de la caisse de congés payés permettant au salarié de perceveoir ses congés payés afférents au préavis,

le tout conformes au présent arrêt,

Déboute la S.A.S H2O de sa demande en paiement d'une indemnité fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SAS H2O à payer à Monsieur [H] [B] la somme de 3 000,00 euros (trois mille euros) au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel,

Condamne la SAS H2O aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER LE CONSEILLER


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Reims
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 22/00481
Date de la décision : 29/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-29;22.00481 ?
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