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28/02/2023 | FRANCE | N°22/00732

France | France, Cour d'appel de Reims, 1ere chambre sect.civile, 28 février 2023, 22/00732


ARRET N°

du 28 février 2023



N° RG 22/00732 - N° Portalis DBVQ-V-B7G-FE5H





[C]





c/



S.C.I. GFT















Formule exécutoire le :

à :



la SCP DELVINCOURT - CAULIER-RICHARD - CASTELLO AVOCATS ASSOCIES



la SCP SOLVEL - BARRUE

COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE CIVILE-1° SECTION

ARRET DU 28 FEVRIER 2023



APPELANT :



d'un jugement rendu le 03 février 2022 par le TJ de CHARLEVILLE ME

ZIERES



Monsieur [E] [C] exerçant sous l'enseigne L.H.ISOL'EX

[Adresse 3]

[Localité 2]



Représenté par Me Mélanie CAULIER-RICHARD de la SCP DELVINCOURT - CAULIER-RICHARD - CASTELLO AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de REIMS, avocat p...

ARRET N°

du 28 février 2023

N° RG 22/00732 - N° Portalis DBVQ-V-B7G-FE5H

[C]

c/

S.C.I. GFT

Formule exécutoire le :

à :

la SCP DELVINCOURT - CAULIER-RICHARD - CASTELLO AVOCATS ASSOCIES

la SCP SOLVEL - BARRUE

COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE CIVILE-1° SECTION

ARRET DU 28 FEVRIER 2023

APPELANT :

d'un jugement rendu le 03 février 2022 par le TJ de CHARLEVILLE MEZIERES

Monsieur [E] [C] exerçant sous l'enseigne L.H.ISOL'EX

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représenté par Me Mélanie CAULIER-RICHARD de la SCP DELVINCOURT - CAULIER-RICHARD - CASTELLO AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de REIMS, avocat postulant, et Me Ahmed HARIR de la SELARL Ahmed HARIR, avocat au barreau des ARDENNES, avocat plaidant

INTIMEE :

S.C.I. GFT

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représentée par Me Emmanuelle SOLVEL de la SCP SOLVEL - BARRUE, avocat au barreau des ARDENNES

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS :

Madame MEHL-JUNGBLUTH, présidente de chambre, et Madame MAUSSIRE, conseillère, ont entendu les plaidoiries, les parties ne s'y étant pas opposées. Elles en ont rendu compte à la cour dans son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Madame Elisabeth MEHL-JUNGBLUTH, présidente de chambre

Madame Véronique MAUSSIRE, conseillère

Madame Florence MATHIEU, conseillère

GREFFIER :

Madame Yelena MOHAMED-DALLAS

DEBATS :

A l'audience publique du 17 janvier 2023, où l'affaire a été mise en délibéré au 28 février 2023,

ARRET :

Contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe le 28 février 2023 et signé par Madame Elisabeth MEHL-JUNGBLUTH, présidente de chambre, et Madame Yelena MOHAMED-DALLAS, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

Suivant devis du 21 octobre 2017, la SCI GFT a confié des travaux sur les façades d'une maison dont elle est propriétaire à M. [E] [C], exerçant sous l'enseigne L.H.ISOL'EX pour un montant de travaux de 11 426,31 euros ttc.

Un acompte de 3 000 euros a été versé le 7 décembre 2017.

M. [C] a effectué les travaux et établi une facture d'un montant de 8 998,31 euros après déduction de l'acompte.

Par procès-verbal dressé le 15 mai 2018, Maître [Z], huissier de justice, a constaté l'existence de nombreuses irrégularités et des mouvements dans le crépi des façades.

La SCI GFT a refusé de payer le solde du prix et a sollicité la reprise des désordres.

M. [C], considérant que ces travaux étaient exempts de toute anomalie, a mis en demeure la SCI GFT de lui payer le solde du prix.

Le 15 juin 2018, la SCI GFT a établi un chèque à l'ordre de la CARPA afin de consigner le solde du prix.

Par ordonnance de référé du 16 octobre 2018, le président du tribunal de grande instance de Charleville-Mézières a ordonné un expertise judiciaire et a commis M. [J] pour y procéder.

L'expert a déposé son rapport le 20 juin 2020.

Par acte d'huissier délivré le 20 octobre 2020, la SCI GFT, se fondant sur l'article 1231-1 du code civil, a assigné M. [C], exerçant sous l'enseigne L.H ISOL'EX devant le tribunal judiciaire de Charleville-Mézières aux fins de voir constater que M. [C] a manqué à son obligation d'information et de conseil en ne lui conseillant pas de procéder à des travaux préalables qui auraient pu éviter les irrégularités de façades, de le voir condamner au paiement d'une somme de 11 998,31 euros correspondant au montant de sa facture puis par compensation, d'ordonner la restitution à la SCI GFT de l'acompte de 3 000 euros versé, outre une somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Les demandes ont été contestées et M. [C] a sollicité le paiement du solde de sa facture.

Par jugement rendu le 3 février 2022, le tribunal a':

- déclaré M. [C], exerçant sous l'enseigne L.H ISOL'EX, responsable du préjudice subi par la SCI GFT,

En conséquence,

- condamné M. [C], exerçant sous l'enseigne L.H ISOL'EX, à payer à la SCI GFT la somme de 1000 euros à titre de dommages et intérêts,

- débouté M. [C], exerçant sous l'enseigne L.H ISOL'EX, de sa demande de paiement du solde de sa facture,

- condamné M. [C], exerçant sous l'enseigne L.H ISOL'EX, aux dépens en ce compris les frais d'expertise avec recouvrement direct,

- condamné M. [C], exerçant sous l'enseigne L.H ISOL'EX, à payer à la SCI GFT une indemnité de 1000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- rappelé que l'exécution provisoire est de droit.

Le premier juge a considéré':

- en reprenant les énonciations du rapport d'expertise qu'en ne précisant pas dans son devis le produit utilisé, en n'informant pas son cocontractant qu'il ne serait pas de nature à corriger les défauts de planéité et en ne procédant pas à une préparation efficace du support, M. [C] avait manqué à son obligation d'information et de conseil et n'avait pas exécuté'les travaux conformément aux règles de l'art';

- que le préjudice était utilement réparé par la somme de 1000 euros à titre de dommages et intérêts,

- que M. [C] devait être débouté de sa demande au titre du paiement du solde de la facture dans la mesure où la prestation exécutée correspondait à un rafraîchissement de façade non à une reprise en profondeur du crépi, de sorte que cette prestation était équitablement rémunérée par le versement de l'acompte.

Par déclaration reçue le 25 mars 2022, M. [C], exerçant sous l'enseigne L.H ISOL'EX, a formé appel de cette décision.

Par conclusions notifiées le 25 novembre 2022, l'appelant demande à la cour de':

Vu la jurisprudence,

Vu les pièces versées aux débats,

- déclarer Monsieur [E] [C] bien fondé en son appel et y faire droit,

- infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Charleville-Mézières le 3 février 2022,

Et statuant à nouveau :

- dire et juger que Monsieur [K] [S], gérant de la SCI GFT n'est pas un maître

d'ouvrage profane,

- dire et juger que la SCI GFT a commandé à Monsieur [E] [C] uniquement des travaux de rafraîchissement de façade et non une reprise intégrale visant au rattrapage de

la planéité des supports,

- dire et juger qu'aucun manquement à l'obligation de conseil ne peut être caractérisé à l'encontre de Monsieur [E] [C],

- dire et juger que les travaux réalisés par Monsieur [E] [C] ne présentent aucun désordre en lien avec sa prestation et ont été réalisés dans les règles de l'art,

Par conséquent,

- déclarer la SCI GFT mal fondée en son appel incident,

- débouter la SCI GFT de l'ensemble de ses demandes,

- condamner la SCI GFT à payer à Monsieur [E] [C] la somme de 8 998,31 euros au titre du solde de travaux réalisés, outre les intérêts au taux légal à compter du 28 mai 2018, date de la mise en demeure,

- condamner la SCI GFT à payer à Monsieur [E] [C] la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la SCI GFT aux entiers dépens comprenant les frais d'expertise judiciaire.

Par conclusions notifiées le 6 septembre 2022, la SCI GFT, formant appel incident, demande à la cour de':

- confirmer la décision en ce qu'elle a déclaré M. [C], exerçant sous l'enseigne L.H ISOL'EX responsable du préjudice subi par la SCI GFT,

- infirmer la décision sur le montant des condamnations allouées,

Puis, statuant à nouveau,

- condamner M. [C] au paiement d'une somme de 11 998, 31 euros correspondant au montant de sa facture,

Puis par compensation,

- ordonner la restitution de l'acompte de 3 000 euros versé préalablement aux travaux,

- condamner M. [C] au paiement d'une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [C] aux dépens en ce compris les frais d'expertise avec recouvrement direct.

MOTIFS DE LA DECISION':

Il convient, pour trancher le litige soumis à la cour et dans un souci de cohérence, d'examiner en premier lieu la demande formée par M. [C], exerçant sous l'enseigne L.H. ISOLEL'EX au titre du paiement de sa facture avant d'aborder la question de la réparation du préjudice invoqué par la SCI GFT.

1° Le paiement de la facture de M. [C] (exerçant sous l'enseigne L.H ISOL'EX)':

Aux termes de l'article 1353 du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.

Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

Il ressort du rapport d'expertise judiciaire de M.[J] dressé le 20 juin 2020 dont la cour s'appropriera les termes que le produit utilisé par M. [C] pour le ravalement de façade ne permettait pas de corriger les défauts de planéité des supports sur sa totalité et que seul un dressage préalable des supports de nature à avoir une surface parfaitement plane, aurait pu le faire mais avec un coût nettement majoré.

Il est permis de déduire des énonciations expertales que les travaux réalisés par M. [C] objet du devis accepté en date du 21 octobre 2017, compte tenu du produit utilisé, ont été accomplis dans les règles de l'art puisque M. [J] précise dans son rapport que le produit mis en 'uvre ne pouvait pas corriger les défauts de planéité des supports.

Il précise au surplus que les irrégularités constatées ne sont pas dues à l'absence de nettoyage des façades ni aux mauvaises conditions climatiques lors de l'application.

Les travaux s'analysent par conséquent, compte tenu de leur coût, en des travaux de rafraîchissement de façades et non en des travaux approfondis sur les façades.

Il ressort de ces éléments que M. [C] est en droit d'obtenir le paiement du solde de sa facture pour le travail réalisé qui a été accompli dans les règles de l'art avec le produit qu'il a utilisé (seul un acompte de 3 000 euros lui a été versé).

La décision sera par conséquent infirmée en ce que le premier juge a considéré que l'acompte était satisfactoire et la SCI GFT sera condamnée à payer à M. [C], exerçant sous l'enseigne L.H ISOL'EX, la somme de 8 998, 31 euros ttc au titre du solde de la facture du 27 mai 2018.

Les intérêts au taux légal courront à compter du 30 mai 2018, date à laquelle la SCI GFT a accusé réception de la lettre de mise en demeure.

2° La responsabilité de M. [C] :

Aux termes de l'article 1231-1 du code civil, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, s'il ne justifie pas que l'exécution a été empêchée par la force majeure.

Dans ce cadre, l'entrepreneur a un devoir de conseil à l'égard du client profane.

M. [C] soutient que M. [S], gérant de la SCI GFT, n'est pas un profane car c'est un retraité de la profession du bâtiment'; qu'il a demandé uniquement un rafraîchissement de façade, ce qui correspond aux travaux qu'il a effectués; que la réalisation d'un rattrapage total du support aurait porté le devis au double de son montant initial, ce que M. [S] ne pouvait ignorer en sa qualité d'ancien professionnel du bâtiment'; que les parties n'ont jamais convenu que le support devait être rattrapé mais seulement que la façade devait être rafraîchie.

Il appartient à celui qui soutient que son cocontractant n'est pas un profane de le démontrer.

A défaut, il est considéré comme étant un client non averti.

Force est de constater que M. [C] ne produit aucune document démontrant que M. [S], gérant de la SCI GFT, est un ancien professionnel du bâtiment comme il l'allègue.

La SCI GFT est par conséquent un client non averti en matière de construction.

En revanche, celui qui est tenu d'une obligation de conseil doit rapporter la preuve de l'exécution de cette obligation.

Il ressort des pièces versées aux débats et plus particulièrement des termes de l'expertise que M. [C] aurait dû alerter son client sur le fait que le produit mis en 'uvre ne pouvait pas corriger les défauts de planéité des supports et lui proposer un dressage préalable des supports, seule opération permettant ensuite d'avoir une superficie de façade parfaitement plane.

M. [C], qui ne justifie pas l'avoir fait, a manqué à son devoir de conseil et d'information à ce titre et est responsable des conséquences générées par ce manquement.

3° L'indemnisation du préjudice subi par la SCI GFT'':

Sur appel incident, la SCI GFT soutient que'le premier juge, dans l'évaluation du préjudice, n'a pas pris en compte la nécessité de réaliser des travaux de reprise pour un montant de 20 000 euros ht, de sorte qu'il y a lieu de condamner M. [C] à payer le montant de sa facture puis par compensation, d'ordonner la restitution de l'acompte de 3 000 euros qu'elle a versé.

M. [J] relève que l'irrégularité des façades ressort exclusivement par soleil rasant et que ces désordres sont uniquement d'ordre esthétique.

Au surplus, ils n'apparaissent pas lorsque le temps est nuageux et ne se révèlent que sur certaines parties extérieures de l'habitation.

Compte tenu des désordres qui peuvent être objectivement qualifiés de mineurs dans une région où ne règne pas un ensoleillement excessif, il n'y a pas lieu à réaliser des travaux réparatoires que M. [J] ne préconise d'ailleurs pas.

Le préjudice subi par la SCI GFT s'analyse en une perte de chance, par le manquement de M. [C] à son obligation de conseil, de se voir proposer une prestation qui aurait permis une planéité parfaite des façades de l'immeuble.

Compte tenu du surcoût très important généré par la dépense qui a été fixée par l'expert à 20 000 euros ht environ, soit le double du montant de la prestation effectivement réalisée, la perte de chance sera évaluée à un quart de cette somme, soit 5 000 euros.

M. [C], exerçant sous l'enseigne L.H ISOL'EX, sera condamné à payer à la SCI GFT la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts.

La décision sera par conséquent également infirmée de ce chef.

4° L'article 700 du code de procédure civile':

La décision sera infirmée.

En équité, chaque partie gardera à sa charge les frais qu'elle a exposés à ce titre.

5° Les dépens':

La décision sera infirmée.

Les dépens, en ce compris les frais d'expertise judiciaire, seront partagés par moitié entre les parties, avec pour ceux mis à la charge de M.[E] [C], exerçant sous l'enseigne L.H ISOL'EX, recouvrement direct au profit de la SCP Dombek.

PAR CES MOTIFS':

Statuant publiquement et par arrêt contradictoire';

Infirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 3 février 2022 par le tribunal judiciaire de Charleville-Mézières sauf en ce qu'il a déclaré M. [E] [C], exerçant sous l'enseigne L.H ISOL'EX, responsable du préjudice subi par la SCI GFT.

Statuant à nouveau';

Condamne la SCI GFT à payer à M. [E] [C], exerçant sous l'enseigne L.H ISOL'EX, la somme de 8 998, 31 euros ttc au titre du solde de la facture du 27 mai 2018 et ce avec intérêts au taux légal à compter du 30 mai 2018.

Condamne M. [E] [C], exerçant sous l'enseigne L.H ISOL'EX, à payer à la SCI GFT la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi pour manquement au devoir de conseil de l'entrepreneur.

Déboute les parties de leur demande formée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne chacune des parties aux dépens par moitié, en ce compris les frais d'expertise judiciaire, avec pour ceux mis à la charge de M.[E] [C], exerçant sous l'enseigne L.H ISOL'EX, recouvrement direct au profit de la SCP Dombek.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Reims
Formation : 1ere chambre sect.civile
Numéro d'arrêt : 22/00732
Date de la décision : 28/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-28;22.00732 ?
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