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21/02/2023 | FRANCE | N°22/00163

France | France, Cour d'appel de Reims, 1ère chambre section inst, 21 février 2023, 22/00163


ARRET N°

du 21 février 2023



R.G : N° RG 22/00163 - N° Portalis DBVQ-V-B7G-FDV2





S.A. CREATIS





c/



[T]

[L]











AL







Formule exécutoire le :

à :



la SELARL DEROWSKI & ASSOCIEES





COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE CIVILE- SECTION INSTANCE



ARRET DU 21 FEVRIER 2023



APPELANTE :

d'un jugement rendu le 17 décembre 2021 par le Juge des contentieux de la prot

ection de Châlons-en-Champagne



S.A. CREATIS SA au capital de 52 900 000 €, immatriculée au RCS de LILLE sous le n° B 419 446 034 agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 6]

[Localité ...

ARRET N°

du 21 février 2023

R.G : N° RG 22/00163 - N° Portalis DBVQ-V-B7G-FDV2

S.A. CREATIS

c/

[T]

[L]

AL

Formule exécutoire le :

à :

la SELARL DEROWSKI & ASSOCIEES

COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE CIVILE- SECTION INSTANCE

ARRET DU 21 FEVRIER 2023

APPELANTE :

d'un jugement rendu le 17 décembre 2021 par le Juge des contentieux de la protection de Châlons-en-Champagne

S.A. CREATIS SA au capital de 52 900 000 €, immatriculée au RCS de LILLE sous le n° B 419 446 034 agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 6]

[Localité 5]

Représentée par Me Patrick DEROWSKI de la SELARL DEROWSKI & ASSOCIEES, avocat au barreau de CHALONS-EN-CHAMPAGNE

INTIMES :

Monsieur [C] [T]

[Adresse 2]

[Localité 4]

N'ayant pas constitué avocat

Madame [E], [W], [U] [L]

[Adresse 1]

[Localité 3]

N'ayant pas constitué avocat

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :

M. Benoît PETY, président de chambre

Mme Anne LEFEVRE, conseiller

Mme Christel MAGNARD, conseiller

GREFFIER :

Madame Lucie NICLOT, greffier

DEBATS :

A l'audience publique du 10 janvier 2023, où l'affaire a été mise en délibéré au 21 février 2023,

ARRET :

Par défaut, prononcé par mise à disposition au greffe le 21 février 2023 et signé par M. Benoît PETY, président de chambre, et Madame Lucie NICLOT, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

Suivant offre préalable acceptée le 10 décembre 2015, la société Creatis, SA, a consenti à M. [C] [T] et Mme [E] [L], son épouse, solidairement un prêt personnel de 62 200 euros destiné à regrouper différents crédits, remboursable en 144 mensualités de 609,23 euros hors assurance incluant les intérêts au taux débiteur fixe de 6,07 %.

La société Creatis a adressé aux emprunteurs, désormais divorcés, des lettres recommandées avec avis de réception du 12 avril 2021, les mettant en demeure de payer la somme de 6 040,96 euros, sous peine de déchéance du terme.

Puis le prêteur leur a adressé des lettres recommandées avec avis de réception du 26 mai 2021 prononçant la déchéance du terme et les sommant de payer l'intégralité des sommes dues.

Les 27 juillet et 5 août 2021, la société Creatis a fait assigner M. [T] et Mme [L] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Châlons-en-Champagne :

à titre principal,

- en condamnation solidaire au paiement de la somme de 51 137,19 euros outre intérêts au taux contractuel de 6,07 % à compter du 28 juin 2021,

- avec règlement en 23 mensualités égales, puis une 24ème égale au solde dû, dans l'hypothèse où des délais de règlement seraient accordés,

à titre subsidiaire,

- en résiliation judiciaire du contrat,

- en condamnation solidaire au paiement des sommes restant dues par application de l'article 1224 du code civil,

en tout état de cause,

en condamnation in solidum au paiement d'une somme de 300 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.

Mme [L] a exposé être au chômage et percevoir 1 500 euros par mois, outre 1 080 euros de prestations sociales, ayant quatre enfants communs avec M. [T]. Elle a dit bénéficier d'un dossier de surendettement déclaré recevable le 15 juillet 2021, dans lequel la créance de la société Creatis ne figurait pas.

M. [T], licencié en 2019, retravaillait depuis juillet 2021, pour une rémunération de 1 800 à 1 900 euros par mois. Il avait trois autres crédits en cours, réglait une pension alimentaire de 160 euros par mois.

Tous deux ont sollicité des délais de paiement.

Le jugement du 17 décembre 2021, exécutoire par provision, a :

- déclaré recevable l'action formée par la société Creatis,

- prononcé la déchéance du droit aux intérêts conventionnels,

- condamné solidairement Mme [L] et M. [T] à payer à la société Creatis la somme de 29 888,41 euros pour solde du prêt, avec intérêts au taux légal non majoré à compter du jugement,

- débouté la société Creatis du surplus de ses demandes,

- débouté Mme [L] et M. [T] de leurs demandes en délais de paiement,

- condamné in solidum Mme [L] et M. [T] à payer à la société Creatis la somme de 100 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné in solidum Mme [L] et M. [T] aux dépens.

Le 25 janvier 2022, la société Creatis a fait appel du jugement en ce qu'il prononce la déchéance du droit aux intérêts conventionnels, condamne solidairement Mme [L] et M. [T] à lui payer la somme de 29 888,41 euros pour solde du prêt avec intérêts au taux légal non majoré à compter du jugement et déboute la société Creatis du surplus de ses demandes.

Par conclusions du 17 février 2022, la société Creatis sollicite de la cour l'infirmation du jugement afin de :

- dire n'y avoir lieu à déchéance du droit aux intérêts conventionnels,

- dire l'offre de prêt conforme aux dispositions du code de la consommation,

- condamner solidairement Mme [L] et M. [T] à lui payer la somme de 51 137,19 euros avec intérêts au taux contractuel de 6,07 % à compter du 28 juin 2021,

- en cas d'octroi de délais de paiement, dire que les sommes seront réglées en 23 mensualités égales, outre le solde à la 24ème mensualité, avec déchéance du terme en cas de défaut de règlement d'une échéance à sa date,

- subsidiairement, prononcer la résiliation judiciaire du contrat,

- condamner solidairement Mme [L] et M. [T] au paiement des sommes restant dues par application des articles 1224 et 1227 du code civil,

- condamner in solidum les emprunteurs à lui payer une somme de 300 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que les dépens de l'instance.

La société Creatis a fait signifier sa déclaration d'appel et ses conclusions à Mme [L] par acte remis à l'étude le 11 mars 2022, et à M. [T] par acte remis à personne le 4 mars 2022.

Les intimés n'ont pas constitué avocat.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 13 décembre 2022.

Motifs de la décision :

Sur la demande en paiement :

Sur le moyen relatif à la remise du bordereau détachable de rétractation :

L'article L. 311-12 du code de la consommation, dans sa version applicable au litige, précise que l'emprunteur peut se rétracter sans motifs dans un délai de 14 jours calendaires révolus à compter du jour de l'acceptation de l'offre de contrat de crédit comprenant les informations prévues à l'article L. 311-18. Afin de permettre l'exercice de ce droit de rétractation, un formulaire détachable est joint à son exemplaire du contrat de crédit.

L'article L. 311-48 du même code, en sa version en vigueur du 1er mai 2011 au 1er juillet 2016, prévoit : 'Le prêteur qui accorde un crédit sans communiquer à l'emprunteur les informations précontractuelles (...) ou sans remettre à l'emprunteur un contrat satisfaisant aux conditions fixées par les articles L. 311-11, L. 311-12, L. 311-16, L. 311-18, L. 311-19, L. 311-29, le dernier alinéa de l'article L. 311-17 et les articles L. 311-43 et L. 311-46, est déchu du droit aux intérêts.'

La preuve par le prêteur de la communication à l'emprunteur du bordereau détachable de rétractation ne saurait résulter de la seule signature apposée par l'emprunteur sous une clause type par laquelle celui-ci reconnaît cette remise. Une telle circonstance ne constitue qu'un simple indice que le prêteur doit compléter par d'autres éléments pour établir l'exécution de son obligation envers l'emprunteur. A défaut la sanction encourue par le prêteur est la déchéance de son droit aux intérêts.

Le juge des contentieux de la protection a retenu que la société Creatis produisait une offre de crédit dépourvue de bordereau détachable de rétractation, que, si les emprunteurs reconnaissaient, par la signature d'une clause type, être en possession d'un exemplaire du contrat muni d'un formulaire détachable de rétractation, le prêteur ne communiquait aucun élément complémentaire de nature à corroborer la remise effective d'un tel formulaire à M. [T] et Mme [L], qu'en outre la reconnaissance de la détention d'une offre dotée du bordereau de rétractation ne prouvait pas que ce dernier était conforme aux dispositions de l'article 'R. 312-9" (l'article applicable au litige est en réalité l'article R. 311-4, selon lequel le formulaire détachable de rétractation doit être conforme à un modèle type et 'ne peut comporter au verso aucune mention autre que le nom et l'adresse du prêteur').

Devant la cour, la société Creatis communique, en pièce n°34, l'offre de prêt de regroupement de crédits portant le numéro 28950000181303 qu'elle a adressée aux époux [T] le 7 décembre 2015, offre qui comprend les documents à renvoyer au prêteur et les documents à conserver. La page 26/54 de l'offre figurant au sein des documents à conserver contient, en bas de page, le bordereau de rétractation à renseigner pour renoncer à l'offre de crédit n°28950000181303. Ce bordereau est rédigé conformément au modèle-type sus-évoqué. Il apparaît également, à l'examen de la page 25/54, que le formulaire détachable ne comporte en son verso aucune mention. Il respecte donc les dispositions de l'article R. 311-4 précité.

Cette pièce vient compléter utilement l'indice que constituent les signatures par M. [T] et Mme [L] sous la clause type de remise du bordereau (pièce n°1). Il est donc suffisamment démontré que la société Creatis a communiqué aux emprunteurs une offre munie d'un formulaire détachable de rétractation.

Le jugement est dès lors infirmé en ce qu'il a prononcé la déchéance du droit aux intérêts conventionnels pour défaut de remise d'un contrat de crédit satisfaisant aux dispositions de l'article L. 311-12 du code de la consommation.

Sur le montant de la créance du prêteur :

Il résulte des pièces produites (contrat de crédit, tableau d'amortissement, décompte de la créance, lettres recommandées de mise en demeure présentée le 13 avril 2021 au domicile de Mme [L] et reçue le 13 avril 2021 par M. [T] et lettres recommandées du 26 mai 2021 notifiant la déchéance du terme distribuées le 27 mai 2021 à M. [T] et le 4 juin 2021 à Mme [L], historique du compte) que la société Creatis est fondée à obtenir paiement par M. [T] et Mme [L] solidairement des sommes suivantes, étant observé que les dispositions contractuelles laissent l'indemnité de résiliation de 8 % du capital restant dû à l'appréciation du tribunal, selon le paragraphe 'défaillance de l'emprunteur-exigibilité anticipée' de la page 20/54 de l'offre acceptée :

- échéances impayées lors de la déchéance du terme : 6 820,85 euros

- capital restant dû à la déchéance du terme : 40 406,31 euros

- clause pénale de 8 % réduite d'office à 800 euros, comme ayant un caractère manifestement excessif au regard de l'économie globale du crédit, de la durée d'exécution du contrat, du bénéfice déjà retiré par le prêteur et du taux contractuel pratiqué,

total : 48 027,16 euros, à majorer des intérêts au taux contractuel de 6,07 % l'an sur la somme de 47 227,16 euros et au taux légal pour le surplus, à compter du 26 mai 2021.

Le jugement est infirmé en ce sens.

Sur les autres demandes :

M. [T] et Mme [L] succombent et supportent in solidum les dépens d'appel.

L'équité ne commande pas de les condamner en outre à payer à la société Creatis une indemnité au titre des frais irrépétibles exposés en appel.

Par ces motifs,

Statuant dans les limites de l'appel,

Infirme le jugement du juge des contentieux de la protection de Châlons-en-Champagne du 17 décembre 2021,

Dit n'y avoir lieu à déchéance du droit aux intérêts conventionnels pour défaut de remise par la société Creatis aux époux [T] d'une offre de crédit n°28950000181303 munie d'un formulaire détachable de rétractation,

Condamne M. [T] et Mme [L] solidairement, au titre de ladite offre de crédit qu'ils ont acceptée le 10 décembre 2015, à payer à la société Creatis une somme de 48 027,16 euros, à majorer des intérêts au taux contractuel de 6,07 % l'an sur la somme de 47 227,16 euros et au taux légal pour le surplus, à compter du 26 mai 2021,

Y ajoutant,

Déboute la société Creatis de sa demande en paiement au titre des frais irrépétibles exposés en appel,

Condamne in solidum M. [T] et Mme [L] aux dépens d'appel.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Reims
Formation : 1ère chambre section inst
Numéro d'arrêt : 22/00163
Date de la décision : 21/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-21;22.00163 ?
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