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07/02/2023 | FRANCE | N°17/02059

France | France, Cour d'appel de Reims, 1ere chambre sect.civile, 07 février 2023, 17/02059


ARRET N°

du 07 février 2023



N° RG 17/02059 - N° Portalis DBVQ-V-B7B-EJYU





La SELARL GRAVE-[U] prise en la personne de Me [O] [U] ès qualité de liquidateur de la société ETABLISSEMENTS

DEBEAUMONT ET FILS

(appelante et intimée)



c/



Association LA SOCIETE DES COURSES DE [Localité 6]

(intimée et appelante)



[T], S.A. GAN ASSURANCES











Formule exécutoire le :

à :



la SCP RAHOLA CREUSAT LEFEVRE



la

SELARL GUYOT - DE CAMPOS



Me Florence SIX



Me Louis-stanislas RAFFIN

COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE CIVILE-1° SECTION

ARRET DU 07 FEVRIER 2023







APPELANTE et INTIMEE :



d'un jugement rendu le 04 juillet ...

ARRET N°

du 07 février 2023

N° RG 17/02059 - N° Portalis DBVQ-V-B7B-EJYU

La SELARL GRAVE-[U] prise en la personne de Me [O] [U] ès qualité de liquidateur de la société ETABLISSEMENTS

DEBEAUMONT ET FILS

(appelante et intimée)

c/

Association LA SOCIETE DES COURSES DE [Localité 6]

(intimée et appelante)

[T], S.A. GAN ASSURANCES

Formule exécutoire le :

à :

la SCP RAHOLA CREUSAT LEFEVRE

la SELARL GUYOT - DE CAMPOS

Me Florence SIX

Me Louis-stanislas RAFFIN

COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE CIVILE-1° SECTION

ARRET DU 07 FEVRIER 2023

APPELANTE et INTIMEE :

d'un jugement rendu le 04 juillet 2017 par le Tribunal de Commerce de REIMS

La SELARL GRAVE-[U] prise en la personne de Me [O] [U] ès qualité de liquidateur de la société ETABLISSEMENTS

DEBEAUMONT ET FILS, désigné à cette fonction suivant Jugement du Tribunal de Commerce de SOISSONS en date du 4 juin 2020,

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentée par Me Stanislas CREUSAT de la SCP RAHOLA CREUSAT LEFEVRE, avocat au barreau de REIMS, avocat postulant, et par Me Michel LEFEVRE-FRANQUET, Avocat au Barreau de SOISSONS, avocat plaidant

INTIMEE et APPELANTE :

Association LA SOCIETE DES COURSES DE [Localité 6]

[Adresse 4]

[Localité 6]

Représentée par Me Carlos DE CAMPOS de la SELARL GUYOT - DE CAMPOS, avocat au barreau de REIMS

PARTIES INTERVENANTES:

Monsieur [N] [T]

[Adresse 5]

[Localité 3]

Intervenant forcé

Représenté par Me Florence SIX de la SCP HERMINE AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de REIMS, avocat postulant et Me Muriel THIBAUT la SELARL MOREL THIBAUT, Avocat au Barreau de REIMS, avocat plaidant

S.A. GAN ASSURANCES immatriculée au RCS de PARIS, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés de droit audit siège.

[Adresse 8]

[Localité 7]

assignée en intervention forcée

Représentée par Me Louis-stanislas RAFFIN de la SELARL RAFFIN ASSOCIES, avocat au barreau de REIMS

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS :

Madame MEHL-JUNGBLUTH présidente de chambre, et Mme PILON conseillère, ont entendu les plaidoiries, les parties ne s'y étant pas opposées. Elles en ont rendu compte à la cour dans son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Madame Elisabeth MEHL-JUNGBLUTH, présidente de chambre

Mme Sandrine PILON, conseillère

Mme Florence MATHIEU, conseillère

GREFFIER :

Madame Yelena MOHAMED-DALLAS, greffière lors des débats et Madame Eva MARTYNIUK greffière lors du prononcé.

DEBATS :

A l'audience publique du 13 décembre 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 07 février 2023,

ARRET :

Contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe le 07 février 2023 et signé par Madame Elisabeth MEHL-JUNGBLUTH présidente de chambre, et Madame Eva MARTYNIUK, greffière, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

L'Association Société des courses de [Localité 6] a fait exécuter des travaux de reconstruction des tribunes de l'hippodrome de la Champagne situé à [Localité 6]. Elle en a confié la maîtrise d''uvre à M. [N] [T], architecte et le lot carrelage a été attribué à la SARL Ets Jean Marie Debeaumont et fils par acte d'engagement du 27 septembre 2013.

Le 27 avril 2016, la SARL Ets Jean Marie Debeaumont et fils a fait assigner l'association Société des courses de [Localité 6] devant le tribunal de commerce de Reims afin de l'entendre condamner à lui payer la somme de 18 141.07 euros TTC pour solde des travaux.

L'association Société des courses de [Localité 6] s'est opposée à cette demande en invoquant l'existence de désordres, pour la réparation desquels elle a sollicité la condamnation de la SARL Ets Jean Marie Debeaumont et fils à lui payer une somme de 26 502 euros HT.

Par jugement du 4 juillet 2017, le tribunal de commerce de Reims a débouté les parties de toutes leurs demandes, dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile et condamné la SARL Ets Jean Marie Debeaumont et fils aux entiers dépens de l'instance, dont frais de greffe liquidés à la somme de 81.12 euros TTVC dont TVA pour 13.52 euros.

Le tribunal a considéré que la SARL Ets Jean Marie Debeaumont et fils n'apportait pas d'éléments permettant de déterminer si une somme restait due par la Société des courses de [Localité 6] et, dans l'affirmative, de préciser son montant exact, tandis que la Société des Courses de [Localité 6] ne justifiait pas avoir réglé à la SARL Ets Jean Marie Debeaumont et fils l'intégralité des sommes dues, relatives aux situation 1, 2, 3 et 5 et n'apportait pas d'éléments permettant de déterminer le coût de remise en état des carrelages du premier étage.

La SARL Ets Jean Marie Debeaumont et fils a relevé appel total de ce jugement, par déclaration du 24 juillet 2017.

L'association Société des courses de [Localité 6] a également interjeté appel par déclaration du 22 août 2017.

Ces deux procédures ont été jointes par ordonnance du président de la 1ère chambre de cette cour du 7 septembre 2017.

Invoquant l'apparition de nouveau désordres, tenant au décollement des carreaux de la salle du restaurant du 1er étage, la Société des courses de [Localité 6] a saisi le conseiller de la mise en état d'un incident aux fins d'expertise.

Il a été fait droit à cette demande par ordonnance du conseiller de la mise en état du 23 janvier 2018, confiant la mesure à M. [Y].

Par jugement du 4 juin 2020, le tribunal de commerce de Soissons a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de la SARL Ets Jean Marie Debeaumont et fils et a désigné la SARL Grave-[U] en qualité de liquidateur judiciaire. Celle-ci est intervenue volontairement à la procédure par conclusions transmises le 14 septembre 2020.

Le 28 juillet 2020, la Société des courses de [Localité 6] a fait délivrer une assignation en intervention forcée à M. [N] [T] en considération du pré-rapport de l'expert judiciaire, qui imputait une partie des désordres à ce dernier. Les opérations d'expertise lui ont été déclarées opposables.

Par acte du 20 juillet 2021, M. [T] a fait assigner la SA Gan Assurances, en qualité d'assureur responsabilités civile et décennale de la SARL Ets Jean Marie Debeaumont et fils. Les opérations d'expertise ont été déclarées communes et opposables à l'assureur.

L'expert a déposé son rapport le 30 juin 2022.

Par conclusions notifiées le 8 janvier 2018, la SARL Ets Jean Marie Debeaumont et fils demande à la cour d'appel :

D'infirmer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes,

De condamner la Société des courses de [Localité 6] à lui verser la somme de 18 141.07 euros TTC avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation,

De condamner la Société des courses de [Localité 6] à lui verser la somme de 1 500 euros pour résistance abusive,

De confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la Société des courses de [Localité 6] de sa demande reconventionnelle,

De débouter la Société des courses de [Localité 6] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

De condamner la Société des courses de [Localité 6] à lui verser la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens dont recouvrement direct au profit de Mme Michel Lefèvre-Franquet, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Elle s'oppose à l'exception d'inexécution invoquée par la Société des courses de [Localité 6] aux motifs, d'une part, qu'elle ne sollicite par le règlement des travaux du 1er étage et, d'autre part, que celle-ci ne peut se prévaloir des réserves émises à la réception des travaux dès lors qu'aucun délai n'a été convenu entre les parties pour y remédier, ainsi que l'article 1792-6 alinéa 3 du code civil le prévoit, et que la Société des courses de [Localité 6] ne justifie pas d'une mise en demeure qui serait restée infructueuse, comme l'alinéa 4 du texte précité l'impose également.

Elle estime faire la preuve de ce que la somme qu'elle réclame lui reste due, de sorte qu'il appartient à la Société des courses de [Localité 6] de démontrer qu'elle l'aurait réglée, ce qu'elle ne fait pas.

Elle s'oppose à la demande en paiement de la Société des courses de [Localité 6] en contestant fermement les malfaçons invoquées par celle-ci à propos des travaux de carrelage au 1er étage, quand bien même elle a préféré ne pas en solliciter le règlement compte tenu du litige existant.

Par conclusions notifiées le 5 décembre 2022, l'association Société des courses de [Localité 6] sollicite de la cour d'appel :

L'infirmation partielle du jugement en ce qu'il l'a déboutée de toutes ses demandes,

La confirmation de cette décision pour le surplus,

A titre principal,

La fixation de sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la SARL Ets Jean Marie Debeaumont et fils au titre de la responsabilité décennale des constructeurs, à la somme globale de 70 121.46 euros (43 121.46 euros + 17 000 euros + 10 000 euros) ;

La condamnation in solidum de M. [T] et de la société Gan Assurances en sa qualité d'assureur de la SARL Ets Jean Marie Debeaumont et fils, au titre de la responsabilité décennale des constructeurs à lui payer la somme de 70 121.46 euros pour les causes ci-dessus énoncées,

A titre subsidiaire,

La fixation de sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la SARL Ets Jean Marie Debeaumont et fils au titre de la responsabilité contractuelle des constructeurs à la somme globale de 70 121.46 euros (43 121.46 euros + 17 000 euros + 10 000 euros) ;

La condamnation in solidum de M. [T] et de la société Gan Assurances en sa qualité d'assureur de la SARL Ets Jean Marie Debeaumont et fils, au titre de la responsabilité contractuelle des constructeurs à lui payer la somme de 70 121.46 euros pour les causes ci-dessus énoncées,

En tout état de cause,

Qu'elle déclare recevables les mises en cause de M. [T] et de la société Gan Assurances,

Qu'elle déclare M. [T] irrecevable en sa demande reconventionnelle en paiement d'un prétendu solde d'honoraires,

Le rejet de toutes les demandes de M [T], de la SARL Ets Jean Marie Debeaumont et fils et de la société Gan Assurances,

La condamnation in solidum de M. [T] et de la société Gan Assurances à lui payer la somme de 10 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Leur condamnation in solidum aux entiers dépens, en ce compris les frais d'expertise judiciaire d'un montant de 13 276.32 euros,

La fixation de sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la SARL Ets Jean Marie Debeaumont et fils à la somme globale de 23 276.32 euros au titre des frais irrépétibles et frais d'expertise compris dans les dépens.

A titre liminaire, la Société des courses de [Localité 6] affirme que les mises en cause de M. [T] et de la société Gan Assurances sont recevables au regard de l'article 555 du code de procédure civile, en invoquant l'existence d'éléments nouveaux consistant dans la révélation des désordres dans leur nature exacte et leur ampleur par l'expertise judiciaire ordonnée en appel, ce qui apparaissait pour de simples défauts de planimétrie du carrelage laissant place à un décollement et à des désaffleurements de ce carrelage.

Elle invoque, à titre principal, la garantie décennale des constructeurs en faisant valoir qu'au jour de la réception avec réserves, les désordres consignés dans le rapport d'expertise judiciaire ne pouvaient être connus du maître de l'ouvrage dans leur nature et leur ampleur.

Elle soutient que les désordres en cause rendent les ouvrages impropres à leur destination et en affectent la solidité et rappelle que la responsabilité décennale est de plein droit, de sorte que les constructeurs ne peuvent s'en exonérer en se limitant à prouver leur absence de faute.

Elle argue de l'imputabilité des désordres à la SARL Ets Jean Marie Debeaumont et fils, à qui elle reproche de ne pas avoir respecté les dispositions constructives et normatives imposées par le DTU 52.2, ainsi que les prescriptions techniques d'exécution du CSTB en ne réalisant pas un double encollage, ainsi que des joints de fractionnement ou de dilatation. Elle rappelle que le pré-rapport de l'expert judiciaire retenait également une part d'imputabilité au maître d''uvre et conteste que celui-ci soit totalement dédouané par l'expert dans son rapport final au motif qu'il aurait tout fait pour prévenir la SARL Ets Jean Marie Debeaumont et fils que son travail était pitoyable et qu'il refuserait la prestation réalisée lors de la réception, en faisant valoir que M. [T] assurait une maîtrise d''uvre complète comprenant, notamment, la direction de l'exécution des contrats de travaux et qu'il a laissé les travaux se poursuivre en dépit du constat de leur mauvaise exécution.

Elle se prévaut en outre du devoir de conseil qui pesait sur ce dernier au sujet des conséquences dommageables prévisibles d'une pose défectueuse (décollements et désaffleurements).

L'association Société les courses de [Localité 6] précise que son préjudice est constitué du coût des travaux de reprise (43 121.46 euros TTC), d'une perte d'exploitation sur 5 ans à compter de la date de révélation des désordres dans toute leur ampleur (17 000 euros) et d'un trouble de jouissance sur cette même période (10 000 euros).

Elle conteste la prescription de son action contre la société Gan Assurances, en soutenant que l'action directe du tiers lésé (article L124-3 du code des assurances) trouve son fondement dans le droit de la victime à réparation et se prescrit dans le même délai que son action contre le responsable. Elle en conclut qu'en application de l'article 2224 du code civil, le délai de prescription de son action contre l'assureur a commencé à courir à compter de la date du pré-rapport de l'expert judiciaire, soit le 30 avril 2019, puisque c'est alors qu'elle a pris connaissance de la nature exacte et de l'ampleur des désordres affectant le carrelage.

S'agissant de la demande en paiement de la SARL Ets Jean Marie Debeaumont et fils, elle rappelle que le prix défini entre les parties était global, forfaitaire, ferme et définitif. Elle estime que le décompte final qui fonde cette demande ne pouvait être établi, ainsi que le prévoit le CCAP, puisque des réserves non levées existaient encore. Elle entend en outre opposer une exception d'inexécution à cette prétention compte tenu des graves manquements de la SARL Ets Jean Marie Debeaumont et fils détaillés dans le rapport d'expertise judiciaire.

Quant à la demande reconventionnelle de M. [T], elle estime que celle-ci est irrecevable sur le fondement de l'article 70 du code de procédure civile, faute d'un lien suffisant avec les demandes originaires. Elle ajoute que la note d'honoraire dont il lui est réclamé le paiement est pour le moins douteuse, qu'il n'est pas justifié de ce qu'elle lui a été transmise avant que M [T] ne soit assigné en intervention forcée et se prévaut par ailleurs des dispositions du contrat d'architecte prévoyant des honoraires forfaitaires et du fait que la rémunération du maître d''uvre est établie selon une annexe qui n'est pas versée aux débats. Elle entend en outre opposer à cette demande une exception d'inexécution dès lors que M [T] a, selon elle, manqué à son devoir de surveillance résultant de sa mission de maîtrise d''uvre complète et à son devoir de conseil.

Par conclusions notifiées le 20 novembre 2022, M. [T] demande à la cour d'appel :

A titre principal, de déclarer irrecevable l'association Société des courses de [Localité 6] en son intervention forcée à son encontre,

A titre subsidiaire, de déclarer mal fondées les demandes présentées par l'association à son encontre,

A titre infiniment subsidiaire,

De condamner la SA Gan Assurances en sa qualité d'assureur responsabilité civile et responsabilité civile décennale de la SARL Ets Jean-Marie Debeaumont et fils à le relever et garantir intégralement de toutes les condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre au profit de l'association Société des courses de [Localité 6] ou de toute autre partie en principal, intérêts, frais et accessoires,

De fixer sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la SARL Ets Jean-Marie Debeaumont et fils à la somme globale de 71 680 euros pour les causes ci-dessus énoncées,

De condamner l'association Société des courses de [Localité 6] à lui régler une somme de 11 040 euros TTC avec intérêts moratoires de 3.5 pour 10/000ème du montant HT de la facture par jour calendaire de retard,

De condamner in solidum l'association Société des courses de [Localité 6] et la SA Gan Assurances en sa qualité d'assureur responsabilité civile et responsabilité civile décennale de la SARL Ets Jean-Marie Debeaumont et fils à lui régler une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

De condamner les mêmes in solidum aux entiers dépens de l'instance dont distraction au profit de la SCP Hermine associés.

M. [T] invoque l'article 555 du code de procédure civile et reproche à l'association Société des courses de [Localité 6] de ne pas démontrer une évolution du litige qui justifiait sa mise en cause à hauteur d'appel, dans la mesure où elle avait connaissance, dès la première instance, des désordres qu'elle invoque encore aujourd'hui et qu'elle a néanmoins fait le choix de ne pas l'attraire devant le tribunal judiciaire.

Il demande, à titre subsidiaire, sa mise hors de cause en contestant que les désordres lui soient imputables et en affirmant avoir correctement exécuté sa mission de maîtrise d''uvre, dès lors que les manquements identifiés par l'expert judiciaire trouvent leur cause dans une mauvaise exécution des travaux par l'entrepreneur, qu'il n'était pas tenu à une présence constante sur le chantier et qu'il a rempli son obligation de moyen en avisant régulièrement le carreleur sur le chantier et en formalisant des réserves à la réception des travaux.

A l'appui de son appel en garanti présenté contre la SARL Ets Jean-Marie Debeaumont et fils, il affirme que celle-ci a commis une faute à son égard en manquant à son obligation de résultat de réaliser des prestations, simples, de carrelage.

Il s'oppose par ailleurs à l'indemnisation des préjudices immatériels invoqués par l'association Société des courses de [Localité 6] aux motifs qu'ils n'ont pas été invoqués contradictoirement au cours de l'expertise judiciaire, que la preuve d'un remplissage à 100% de la salle de restauration durant les 17 courses hippiques n'est pas rapportée et paraît peu vraisemblable, que la perte d'exploitation n'est pas indemnisable en tant que telle, seule la perte sur coûts variables pouvant éventuellement l'être et que le préjudice de jouissance n'est pas justifié alors qu'il résulte de l'expertise que la salle de restaurant n'était pas du tout inexploitable.

Il affirme que sa demande reconventionnelle en paiement d'une note d'honoraires est recevable en raison d'un lien direct et donc suffisant avec l'affaire au fond. Il s'oppose à l'exception d'inexécution invoquée par l'association Société des courses de [Localité 6] en soutenant qu'aucun grief ne peut lui être fait dans l'exécution de sa mission de maîtrise d''uvre et parce que, même si cela devait être le cas, il a droit au paiement de ses honoraires pour avoir mené sa mission à son terme.

Par conclusions notifiées le 5 décembre 2022, la SA Gan Assurances demande à la cour d'appel :

A titre principal, de déclarer l'association Société des courses de [Localité 6] irrecevable en ses demandes, fins et conclusions dirigées contre elle,

A titre subsidiaire, de déclarer l'ensemble des parties irrecevables et mal fondées en leurs demandes formées à son encontre,

En conséquence,

De débouter l'ensemble des parties de toutes leurs demandes, fins et conclusions dirigées à son encontre,

De condamner les parties qui succomberont à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.

Elle invoque l'article 555 du code de procédure civile et estime que les demandes de l'association Société des courses de [Localité 6] sont irrecevables dès lors que celle-ci avait parfaitement connaissance et conscience des désordres ayant motivé l'expertise judiciaire et sa mise en cause à hauteur d'appel, de sorte qu'elle ne justifie d'aucune circonstance modifiant les données juridiques du litige qui puisse justifier une intervention forcée à hauteur de cour.

Elle soutient au fond que sa garantie n'est pas mobilisable :

Au titre de l'assurance de garantie décennale, parce qu'il n'y a pas eu réception dès lors que le lot carrelage a été refusé par le maître d'ouvrage, ce qui ne peut constituer une simple réserve et qu'en tout état de cause, cette garantie ne s'applique pas aux désordres ayant fait l'objet de réserves,

Au titre de l'assurance de responsabilité civile, parce qu'elle est l'assureur à la date de la réclamation et que l'association Société des courses de [Localité 6], qui a la charge de la preuve du contrat d'assurances, ne justifie pas qu'elle était toujours l'assureur de la SARL Ets Jean-Marie Debeaumont et fils à la date de la réclamation de l'association et parce que l'action contre elle est prescrite

MOTIFS

La recevabilité des interventions forcées

Il résulte de l'article 555 du code de procédure civile que les personnes qui n'ont été ni parties, ni représentées en première instance ou qui y ont figuré en une autre qualité peuvent être appelées devant la cour, même aux fins de condamnation, quand l'évolution du litige implique leur mise en cause.

L'évolution du litige impliquant la mise en cause d'un tiers devant la cour d'appel n'est caractérisée que par la révélation d'une circonstance de fait ou de droit, née du jugement ou postérieure à celui-ci et modifiant les données juridiques du litige.

La Société des Courses de [Localité 6] a saisi le tribunal de commerce en se plaignant d'un défaut de planimétrie du carrelage (désaffleurements). Le 27 juillet 2017, soit postérieurement au jugement, elle a fait constater par un huissier de justice une aggravation des désordres se caractérisant par le soulèvement de carreaux.

L'expertise judiciaire ordonnée en appel a confirmé ce phénomène, qui s'est poursuivi pendant les opérations d'expertise, a permis d'en identifier la cause et de préciser le coût des travaux de reprise, évalué à 43 121.46 euros TTC. Les conclusions de l'expert ont en outre conduit la Société des courses de [Localité 6] à invoquer l'impropriété de l'ouvrage à destination et à solliciter indemnisation au titre d'une perte d'exploitation et d'un préjudice de jouissance qui n'étaient pas évoqués jusque-là et qui viennent renchérir le montant de ses demandes.

L'expert a retenu, dans son pré-rapport, une part d'imputabilité des désordres aggravés à la charge de l'architecte, ce qui modifiait les termes du litige et justifiait, avec l'accroissement du préjudice du maître de l'ouvrage, la mise en cause de ce nouveau débiteur.

La mise en cause de la société Gan Assurances n'est pas le fait de la Société des Courses de [Localité 6], mais de M. [T], qui pouvait alors lui-même justifier d'une évolution du litige en ce qu'il se trouvait mis en cause, pour la première fois, à hauteur d'appel et entendait agir en garantie contre l'entrepreneur et son assureur.

Le litige a ainsi connu une évolution qui justifiait la mise en cause de M [T] et de la société Gan Assurances. Tous deux seront donc déboutés de leurs fins de non-recevoir.

Les désordres

Il résulte du rapport d'expertise judiciaire que les désordres concernent le carrelage de la salle de restaurant située à l'étage.

L'expert indique avoir constaté de très nombreux défauts localisés de type désaffleurements de carreaux contigus et quelques joints en creux qui auraient mérité d'être mieux remplis. Il précise que ces désaffleurements ont une valeur largement supérieure à 2mm et qu'ils accrochent la chaussure ou le pied de la chaise.

Le technicien a en outre relevé que les carreaux de la zone centrale de la salle ont explosé et se sont soulevés et, pour certains, fissurés. Il attribue ce désordre à l'absence de joint de fractionnement en rapport avec des joints de fractionnement ou de dilatation du support et de joints périphériques, tels que le prescrit le DTU 52.2 P1.13.

L'expert a encore relevé que, dans la première salle dite « du Comité », la société Debeaumont a mis en 'uvre le carrelage sur le plancher bas et sur sa contremarche, mais que le plancher niveau supérieur a été traité par un revêtement de sol souple, sans qu'aucune prestation n'ait été prévue en nez de marche, ce qui rend la marche dangereuse et coupante et constitue, selon lui, une anomalie de finition.

Les responsabilités

Selon l'article 1792 du code civil, tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination. Une telle responsabilité n'a point lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d'une cause étrangère.

L'article 1792-6 dispose que la réception est l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage avec ou sans réserves.

En l'espèce, les travaux ont fait l'objet d'un procès-verbal de réception du 24 mars 2015, mentionnant que la réception est prononcée avec réserves. Il est précisé, à propos du carrelage décoratif de l'étage : « le sol est refusé, en raison de sa mauvaise planimétrie ». Cette mention du procès-verbal portant sur un poste des travaux objets de la réception ne peut faire conclure à l'absence totale de réception, mais doit s'analyser comme une réception avec réserve, d'autant qu'un délai est stipulé pour la levée des réserves par la titulaire du marché.

Lesdites réserves n'ont pas été levées depuis lors. En conséquence, la Société des courses de [Localité 6] ne peut fonder sa demande en paiement sur la garantie décennale des constructeurs.

L'article 1147 du code civil dans sa version en vigueur à la date de conclusion des contrats entre les parties, prévoit que le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au payement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part.

La réalisation du carrelage ne présentant pas d'aléa, la société Debeaumont était tenue à ce titre d'une obligation de résultat.

Les désordres constatés par l'expert constituent un manquement de ce constructeur à cette obligation et engage sa responsabilité envers le maître de l'ouvrage.

S'agissant du maître d''uvre, sa responsabilité ne peut être retenue que pour faute prouvée.

Le contrat d'architecte conclu entre la Société des courses de [Localité 6] et M [T] investit celui-ci d'une mission de direction de l'exécution des contrats de travaux, définie en ces termes : « L'architecte rédige et signe les ordres de service pour l'exécution des travaux des différents corps d'état. Il organise et dirige les réunions de chantier et en rédige les comptes rendus, qu'il diffuse à tous les intéressés, vérifie l'avancement des travaux et leur conformité avec les pièces du marché, vérifie les situations de l'entrepreneur dans un délai de 21 jours à compter de leur réception et établit les propositions de paiement, vérifie les mémoires établis par les entreprises dans un délai de 45 jours à compter de leur réception, établit le décompte définitif en fin de chantier et propose le règlement pour solde ».

Contrairement à ce que soutient la Société des courses de [Localité 6], la mission de M. [T] n'était pas complète, puisqu'il est stipulé au contrat d'architecture que le maître d''uvre n'est pas chargé de la surveillance du chantier, mais de la direction des travaux et qu'il ne peut, même subsidiairement, être rendu responsable des fautes d'exécution de l'entreprise (article 6.2.4).

Dès lors qu'il n'entrait pas dans la mission de M. [T] de surveiller l'exécution des travaux, la Société des courses de [Localité 6] ne caractérise pas une faute de celui-ci dans l'exécution de cette mission à raison des désordres relevés par l'expert judiciaire, qui sont imputables au non-respect par l'entrepreneur du DTU (soulèvement et bris des carreaux) ou des règles de l'art (désaffleurements).

Bien que la surveillance des travaux ne relevait pas de sa mission, l'architecte a mis en garde l'entrepreneur quant à la mauvaise qualité de la pose du carrelage et il a indiqué dans le compte rendu de chantier du 17 mars 2015 que le sol était refusé en raison de sa mauvaise planimétrie. Et la société des courses de [Localité 6] a refusé l'ouvrage pour ce même motif, ce qui démontre que M. [T] a accompli son devoir de conseil, s'agissant du défaut qu'il avait pu constater. L'expert indiquant que le soulèvement du carrelage trouve sa cause dans l'absence de réalisation d'un joint de fractionnement, il ne peut être reproché à l'architecte de ne pas avoir en outre informé le maître de l'ouvrage de telles conséquences dommageables alors qu'il n'était pas tenu à la surveillance du chantier et qu'il n'avait relevé qu'un défaut de planimétrie.

En conséquence, la Société des courses de [Localité 6] sera déboutée de l'ensemble de ses demandes présentée contre M. [T].

Sur la garantie de l'assureur

L'assureur

Il résulte de l'article L124-3 du code des assurances que le tiers lésé dispose d'un droit d'action directe à l'encontre de l'assureur garantissant la responsabilité civile de la personne responsable.

Selon l'article L124-5, la garantie est, selon le choix des parties, déclenchée soit par le fait dommageable, soit par la réclamation. La garantie déclenchée par la réclamation couvre l'assuré contre les conséquences pécuniaires des sinistres, dès lors que le fait dommageable est antérieur à la date de résiliation ou d'expiration de la garantie, et que la première réclamation est adressée à l'assuré ou à son assureur entre la prise d'effet initiale de la garantie et l'expiration d'un délai subséquent à sa date de résiliation ou d'expiration mentionné par le contrat, quelle que soit la date des autres éléments constitutifs des sinistres. Le délai subséquent des garanties déclenchées par la réclamation ne peut être inférieur à cinq ans.

La Société des courses de [Localité 6] produit des attestations d'assurance Gan Construction pour les années 2013 et 2014, dont il ressort que la société Debeaumont était titulaire d'un contrat d'assurance responsabilité civile pour les réclamations intervenant entre le 1er janvier 2013 et le 31 décembre 2014.

La Société des courses de [Localité 6] ne peut donc valablement arguer de ce que les travaux de la société Debeaumont ont débuté et ont été exécutés durant cette période, puisque la garantie en cause relève du système dit "base réclamation" et non du système dit « base fait dommageable ».

La Société des courses de [Localité 6] ne justifie pas avoir émis sa réclamation en paiement contre la société Debeaumont avant que celle-ci n'agisse en paiement contre elle par assignation du 27 avril 2016.

Les attestations d'assurance versées aux débats ne précisent pas la durée du délai subséquent prévu par l'article L124-5 du code des assurances et il ne peut qu'être constaté que la réclamation de la Société des courses de [Localité 6] est intervenue dans le délai minimal de 5 ans prévu par la loi à compter de la date de résiliation ou d'expiration mentionnée par le contrat, tandis que le fait dommageable est antérieur à la date de résiliation ou d'expiration de la garantie.

En conséquence, la réclamation de la Société des courses de [Localité 6] a valablement déclenché la garantie de la société Gan Assurances.

La prescription de l'action directe contre l'assureur

L'article 2224 du code civil prévoit que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

Il résulte de l'article L114-1 du code des assurances que toutes actions dérivant d'un contrat d'assurance sont prescrites par deux ans à compter de l'événement qui y donne naissance et que lorsque l'action de l'assuré contre l'assureur a pour cause le recours d'un tiers, le délai de la prescription ne court que du jour où ce tiers a exercé une action en justice contre l'assuré ou a été indemnisé par ce dernier.

L'action du maître l'ouvrage contre l'assureur d'un locateur d'ouvrage, qui trouve son fondement dans le droit à la réparation du préjudice causé par le désordre dont l'assuré est reconnu responsable, se prescrit par le délai prévu pour l'action de la victime contre le locateur d'ouvrage lui-même, donc par l'article 2224 du code civil en présence d'une réception avec réserves (Civ 3, 19 mars 2020 P n°19-13.459). Elle ne peut être exercée au-delà de ce délai que tant que l'assureur reste exposé au recours de son assuré en application du second texte (Civ3, 4 mars 2021, P n°19-23.415).

La Société des courses de [Localité 6] a connaissance du défaut de planimétrie du sol depuis le 24 mars 2015, date du procès-verbal mentionnant son refus des travaux de réalisation du carrelage pour ce motif.

Le soulèvement de plusieurs carreaux ressort du procès-verbal de constat d'huissier du 27 juillet 2017, que la société des courses de [Localité 6] a invoqué au soutien de sa demande d'expertise présentée au conseiller de la mise en état. Elle avait donc, dès cette date, connaissance des faits qui fondent à présent sa demande en réparation au titre de ce désordre.

Or le premier acte interruptif de prescription accompli par la Société des courses de [Localité 6] à l'égard de la Société Gan Assurances est intervenu le 14 novembre 2022, date de notification de ses conclusions contenant pour la première fois une demande de condamnation de l'assureur à son profit.

A cette date, il s'était écoulé plus de cinq ans depuis qu'elle avait eu connaissance des désordres fondant ses demandes de réparations et plus de deux ans depuis que la société Debeaumont, assuré, avait été assignée en réparation.

En conséquence, la Société des courses de [Localité 6] est prescrite en son action directe contre la société Gan Assurances.

Sur le coût des réparations

La société des courses de [Localité 6] demande l'allocation du coût des travaux de réfection du carrelage de la salle de restaurant, selon devis de 43 121.46 euros TTC, retenu par l'expert judiciaire.

L'éclatement du carrelage et la nécessité de réaliser un joint de fractionnement impose une telle réfection, dont il convient de mettre le coût à la charge de la société Debeaumont à qui ce désordre est imputable.

La perte de jouissance correspondant à l'impossibilité d'utiliser la salle de restaurant, englobe nécessairement la perte d'exploitation, invoquée distinctement par la société des courses de [Localité 6]. Celle-ci évalue sa perte d'exploitation pour une période de 5 ans, ce qui est justifié puisque les désordres qui la prive de la jouissance d'une partie de la salle ont fait l'objet d'un constat d'huissier le 27 juillet 2017. Elle limite la partie de la salle ne pouvant être exploitée à 8 couverts d'une valeur unitaire de 25 euros et justifie du déroulement de 17 courses hippiques par an. La probabilité que ces 8 repas auraient été servis à l'occasion de toutes les courses hippiques, chaque année de la période considérée n'étant pas de 100%, le préjudice de la société des courses de [Localité 6] s'analyse en une perte de chance de percevoir le prix de ces repas, laquelle sera évaluée à 70%. Il convient en outre de tenir compte de l'atteinte portée à la possibilité de donner la salle en location, au prix de 720 euros par jour ou 1 200 euros pour un week-end.

Ainsi évalué, le préjudice de jouissance subi par la société des courses de [Localité 6] sera entièrement réparé par l'allocation d'une somme de 20 000 euros, en ce compris la perte d'exploitation, à laquelle il convient donc de fixer la créance de la société des courses de [Localité 6] à inscrire au passif de la liquidation judiciaire de la société Debeaumont. Le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur la demande en paiement de la société Debeaumont

L'article 1134 alinéa 1er du code civil, dans sa version en vigueur à la date de l'acte d'engagement de la société Debeaumont, prévoit que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

Il résulte de l'article 1353 du même code que celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver et que, réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

La société des courses de [Localité 6], qui a obtenu l'allocation des sommes nécessaires à la reprise des désordres établies contre la société Debeaumont, ne peut en outre invoquer une exception d'inexécution à raison des mêmes désordres pour s'opposer à la demande de cette dernière en paiement du solde des travaux. Elle n'est pas non plus fondée, pour le même motif, à invoquer le cahier des clauses administratives particulières pour soutenir que l'existence de réserves non levées ne permettrait pas d'établir le décompte général établi par l'entrepreneur.

La société des courses de [Localité 6] ne conteste pas que les travaux dont il est demandé paiement ont été exécutés, fût-ce mal, par la société Debeaumont. Elle ne justifie pas avoir payé la somme qui lui est réclamée à ce titre. En conséquence, elle doit être condamnée à payer à la société Debeaumont la somme de 18 141.07 euros, outre intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 27 avril 2016 et le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur la demande en paiement de M. [T]

Il résulte de l'article 70 du code de procédure civile que les demandes reconventionnelles ne sont recevables que si elles se rattachent aux prétentions originaires par un lien suffisant.

M. [T] réclame le paiement du solde de ses honoraires pour la réalisation de la mission qui lui a été confiée par le contrat d'architecte signé par la société des courses de [Localité 6]. Il a été mis en cause dans la présente instance par cette dernière, qui recherchait sa responsabilité à raison d'une mauvaise exécution de ladite mission.

La demande reconventionnelle de l'architecte, tendant à obtenir le complet paiement de ses honoraires pour l'exécution de cette mission se rattache donc aux prétentions originaires par un lien suffisant et se trouve donc recevable.

Le contrat d'architecte prévoit que la rémunération est établie entre les parties selon une annexe.

M. [T] produit une annexe reprenant les mêmes montant que ceux figurant sur la note qu'il produit pour justifier du solde de ses honoraires restant dû, à l'exception du poste « PRO », supérieure de 50 euros dans la note d'honoraires et la ligne « total HT avec BET Tramier/arcabois », qui ne correspond à aucun poste de l'annexe.

L'annexe prévoit une rémunération totale HT de 210 030 euros. La note d'honoraires mentionne une note précédente, à déduire, de 209 373 euros. Le montant total HT restant dû est donc de 657 euros, soit 788.40 euros TTC.

En conséquence, la société des courses de [Localité 6] sera condamnée à payer à M. [T] la somme de 788.40 euros, outre l'indemnité de retard de 3.5/10 000ème du montant HT par jour calendaire stipulée par la convention d'architecte.

Sur les autres demandes

La société Debeaumont ne rapporte pas la preuve de l'existence d'une faute de la société des courses de [Localité 6] qui aurait fait dégénérer en abus le droit dont celle-ci dispose de se défendre en justice. Elle sera donc déboutée de sa demande en paiement de dommages intérêts pour résistance abusive.

La société Debeaumont, partie condamnée, doit supporter la charge des dépens de première instance et d'appel, à l'exception pour ceux-ci des dépens exposés par et contre la société Gan Assurances, qui seront mis à la charge de M [T]. Le jugement sera donc confirmé de ce chef.

La demande de la société Debaumont au titre de ses frais irrépétibles sera, par conséquent, rejetée.

La créance de la société des courses de [Localité 6] au titre de ses frais irrépétibles, à inscrire au passif de la liquidation de la société Debeaumont sera fixée à la somme de 2 000 euros.

M. [T] sera condamné à payer à la société Gan Assurances la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Il sera débouté de sa propre demande en paiement au titre de ses frais irrépétibles dès lors qu'elle est présentée contre des parties qui ne sont pas tenues aux dépens.

La SCP Hermine Associés seront autorisés à recouvrer les dépens dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement rendu le 4 juillet 2017 par le tribunal de commerce de Reims en ce qu'il condamne la SARL Ets Jean Marie Debeaumont et fils aux entiers dépens de l'instance, dont frais de greffe liquidés à la somme de 81.12 euros TTVC dont TVA pour 13.52 euros,

L'infirme pour le surplus,

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

Déclare recevables les mises en cause de M. [N] [T] et de la SA Gan Assurances,

Déboute l'association Société des courses de [Localité 6] de l'ensemble de ses demandes présentées contre M. [N] [T],

Déclare l'association Société des courses de [Localité 6] prescrite en son action directe contre la SA Gan Assurances,

Fixe à la somme de 43 121.46 euros TTC la créance de l'association Société des courses de [Localité 6] au titre du coût des travaux de réparation à inscrire au passif de la liquidation judiciaire de la SARL Ets Jean Marie Debeaumont et Fils,

Fixe à la somme de 20 000 euros la créance de l'association Société des courses de [Localité 6] au titre du préjudice de jouissance, incluant la perte d'exploitation, à inscrire au passif de la liquidation judiciaire de la SARL Ets Jean Marie Debeaumont et Fils,

Condamne l'association Société des courses de [Localité 6] à payer à la SARL Ets Jean Marie Debeaumont et Fils la somme de 18 141.07 euros pour solde de travaux, outre intérêts au taux légal à compter du 27 avril 2016,

Condamne l'association Société des courses de [Localité 6] à payer à M. [N] [T] la somme de 788.40 euros, pour solde d'honoraires outre 3.5/10 000ème du montant HT par jour calendaire au titre de l'indemnité de retard,

Déboute la SARL Ets Jean Marie Debeaumont et Fils de ses demandes en paiement pour résistance abusive et pour frais irrépétibles,

Fixe à la somme de 2 000 euros la créance de l'association Société des courses de [Localité 6] au titre de ses frais irrépétibles à inscrire au passif de la liquidation de la SARL Ets Jean Marie Debeaumont,

Condamne M. [N] [T] à payer à la SA Gan Assurances la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute M. [N] [T] de demande en paiement au titre de ses frais irrépétibles,

Dit que la SARL Ets Jean Marie Debeaumont et Fils supportera la charge des dépens d'appel, qui seront fixés au passif de sa liquidation judiciaire, à l'exception de ceux exposés par et contre la SA Gan Assurances, qui seront supportés par M. [N] [T],

Autorise la SCP Hermine Associés à recouvrer les dépens dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Reims
Formation : 1ere chambre sect.civile
Numéro d'arrêt : 17/02059
Date de la décision : 07/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-07;17.02059 ?
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