ARRET N°
du 31 janvier 2023
N° RG 21/01713 - N° Portalis DBVQ-V-B7F-FBWT
SAS EOLFI
c/
S.A.S. TQN WIND ANCIENNE GLOBAL WIND POWER FRANCE
Formule exécutoire le :
à :
la SCP DELVINCOURT - CAULIER-RICHARD - CASTELLO AVOCATS ASSOCIES
Me Pascal GUILLAUME
COUR D'APPEL DE REIMS
CHAMBRE CIVILE-1° SECTION
ARRET DU 31 JANVIER 2023
APPELANTE :
d'un jugement rendu le 08 juillet 2021 par le Tribunal de Commerce de CHALONS-EN-CHAMPAGNE
SAS EOLFI
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représentée par Me Mélanie CAULIER-RICHARD de la SCP DELVINCOURT - CAULIER-RICHARD - CASTELLO AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de REIMS, avocat postulant et Me Karen LECLERC, avocat au barreau de Paris, avocat plaidant
INTIMEE :
S.A.S. TQN WIND anciennement GLOBAL WIND POWER FRANCE
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 6]/FRANCE
Représentée par Me Pascal GUILLAUME, avocat au barreau de REIMS, avocat postulant et Me Dan SHEFET du Cabinet Shefet Selarl, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS :
Madame MEHL-JUNGBLUTH, présidente de chambre, et Madame PILON conseillère, ont entendu les plaidoiries, les parties ne s'y étant pas opposées. Elles en ont rendu compte à la cour dans son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
Madame Elisabeth MEHL-JUNGBLUTH, présidente de chambre
Madame Véronique MAUSSIRE, conseillère
Madame Sandrine PILON, conseillère
GREFFIER :
Madame Yelena MOHAMED-DALLAS, greffière lors des débats et Madame Eva MARTYNIUK greffière lors du prononcé
DEBATS :
A l'audience publique du 06 décembre 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 31 janvier 2023,
ARRET :
Contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe le 31 janvier 2023 et signé par Madame Elisabeth MEHL-JUNGBLUTH, présidente de chambre, et Madame Eva MARTYNIUK, greffière, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
Par arrêt du 13 septembre 2022, auquel il est renvoyé pour l'exposé des faits et de la procédure antérieure, la présente cour d'appel a :
- Dit que la société Eolfi est recevable à solliciter le rejet de la demande de condamnation formulée à son encontre par la société TQN Wind,
Avant dire-droit sur les autres demandes et moyens des parties,
- Ordonné la réouverture des débats,
- Invité la société Eolfi à produire l'acte par lequel elle a cédé la société [Adresse 10],
- Invité les parties à conclure et renvoyer la cause à l'audience de plaidoirie du 6 décembre 2022.
Par conclusions notifiées le 5 décembre 2022, la SAS Eolfi sollicite l'infirmation du jugement rendu par le tribunal de commerce de Châlons-en-Champagne le 8 juillet 2021 en ce qu'il :
- Reçoit la société GWP en ses demandes et la déclare bien fondée,
- Condamne la société Eolfi pour manquement à ses obligations contractuelles à payer à la société GWP la somme de 547 517.66 euros arrêtée au [Cadastre 3] novembre 2020, majorée d'une actualisation complémentaire calculée sur la base du taux légal pour les professionnels avec capitalisation au 1er janvier de chaque année, à compter de ladite date jusqu'au 10 juillet 2021,
- Condamne la société Eolfi à payer à la société GWP la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- Rejette toutes autres demandes, fins et conclusions des parties,
- Ordonne l'exécution provisoire,
- Condamne la société Eolfi aux entiers dépens d'instance liquidés à la somme de 66.70 euros.
Elle demande à la cour d'appel de :
- Débouter la société TQN Wind de l'ensemble de ses demandes,
- La condamner à lui restituer la somme de 556 540.40 euros versée à laquelle il convient d'ajouter les intérêts de retard au taux légal à compter du 29 septembre 2021, date à laquelle elle s'est dessaisie de ladite somme à son profit,
- Condamner la société TQN Wind au paiement de la somme de
10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
Elle estime que le contrat de cession de sa société de projet ne contient aucun élément corroborant la thèse de la société TQN Wind. Elle fait valoir que ce contrat mentionne que la société [Adresse 10] a pour unique activité de réaliser le projet de parc éolien de [Localité 11], composé de 11 éoliennes, que si elle a pu se réserver auprès de l'acquéreur de son ancienne société de projet exclusivement tous nouveaux travaux relatifs à l'extension de sa portion de parc, elle ne pouvait en aucun cas empêcher GWP de procéder de même avec l'acquéreur, distinct, de sa propre société de projet.
Elle conteste que les conditions de la responsabilité contractuelle soient réunies à son encontre.
Elle affirme que la convention de partenariat ne pouvait régir le nouveau projet aux motifs que :
- Cette convention avait pour objectif l'obtention par les sociétés de projet de tous les permis de construire nécessaires à la construction, par chaque société de projet, d'un parc éolien sur le site et qu'elle ne pouvait perdurer au-delà de la cession par TQN Wind et elle de leurs sociétés de projet respectives,
- La société TQN Wind et elle ne tenaient leur présence dans la convention de partenariat que des mandats qui leur étaient conférés.
Elle estime qu'aucune violation de ses obligations contractuelles ne peut donc lui être reprochée pour des événements intervenus postérieurement à la répartition des éoliennes entre les sociétés de projet, à la fin des mandats conférés par ces sociétés à TQN Wind et à elle-même, et à la cession des sociétés de projet.
Elle conteste toute faute de sa part vis-à-vis de la société TQN Wind en soutenant que :
- Elle n'est intervenue auprès d'aucun contractant à propos des parcelles ZI [Cadastre 2] et ZI [Cadastre 3], que la parcelle ZI [Cadastre 2] n'a jamais été visée dans la convention de partenariat comme faisant partie du territoire sur lequel elle s'appliquait et que la société TQN Wind n'est plus titulaire des droits qu'elle invoque pour la parcelle ZI [Cadastre 3], pour les avoir cédés à sa société de projet,
- La société TQN Wind s'est maintenue à l'écart du nouveau projet de son propre fait et en connaissance de cause.
Elle conteste également l'existence d'un lien de causalité entre le préjudice invoqué par la société TQN Wind (perte d'un gain consistant en la moitié de la vente des deux éoliennes) et la faute qu'elle lui impute en ce que seules les sociétés de développement pouvaient bénéficier directement du fruit des développements et que la convention de partenariat, si elle devait s'appliquer, n'aurait pu aboutir à un partage du résultat de la vente entre elle et la société TQN Wind. La société Eolfi affirme que le préjudice excipé par l'intimée est, en réalité, en lien direct avec sa propre faute, consistant à s'être abstenue de négocier avec sa société de projet les modalités financières de son intervention au titre du nouveau projet.
La société Eolfi conteste l'existence du préjudice allégué par la société TQN Wind aux motifs que :
- Aucune vente d'éolienne n'a jamais été réalisée par elle et la société TQN Wind, la seule vente intervenue en lien avec la convention de partenariat étant celle des sociétés de projet, à des conditions librement négociées avec un tiers, de sorte que TQN Wind ne peut souffrir d'aucun préjudice consistant en la moitié du résultat de la vente de deux éoliennes et la convention de partenariat ne prévoyait aucune rémunération de TQN Win et d'elle-même, de sorte que son inexécution ne pourrait en aucun cas aboutir à faire naître un quelconque gain manqué,
- La société TQN Wind ne rapporte pas la preuve de son préjudice, dans son existence et son montant,
- Le quantum du préjudice retenu par le tribunal est erroné car, à le supposer réel, il n'aurait pu s'analyser que comme une perte de chance, parce qu'aucun intérêt de retard n'est dû avant la date du jugement qui l'a condamnée, ni donc aucune capitalisation et parce que le calcul de la capitalisation est erroné.
Par conclusions notifiées le 1er décembre 2022, la société TQN Wind demande à la cour d'appel de :
- Débouter la société Eolfi de son appel et plus généralement de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,
- Confirmer en toutes ses dispositions le jugement du tribunal de commerce de Châlons-en-Champagne,
- Condamner la société Eolfi à lui payer une somme de 10 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- La condamner en tous les frais et dépens de l'instance, ceux d'appel distraits au profit de Me Pascal Guillaume.
Elle invoque la responsabilité contractuelle de la société Eolfi et reproche à celle-ci d'avoir manqué à ses obligations contractuelles de répartition équitable des éoliennes, de non-concurrence et de bonne foi en l'évinçant entièrement du bénéfice de l'implantation des deux nouvelles éoliennes.
Contrairement à ce que soutient la société Eolfi, elle affirme que les acteurs et auteurs de la réalisation du parc étaient la société Eolfi et elle-même, les sociétés de projet n'étant pas les sujets de la convention de partenariat, mais les moyens de sa réalisation, les sociétés créatrices du parc devant dégager la rentabilité de leur opération par la cession clés en mains desdites sociétés de projet.
Elle affirme également que la convention de partenariat avait pour objectif l'aménagement du parc par les parties qui l'avaient initiées et pas uniquement l'obtention par les sociétés de projet de tous les permis de construire nécessaires à la construction, par chaque société de projet, d'un parc éolien sur le site.
Elle soutient encore qu'une éventuelle possibilité d'extension était envisagée par les parties dans la mesure où elle s'avérerait possible dans la suite de l'aménagement initial, les autorisations additionnelles devant, selon elle, être réparties de manière égale.
Elle fait valoir que la convention de partenariat avait été conclue pour une durée de 5 années, soit jusqu'au 9 octobre 2014 et conteste donc que la vente des sociétés de projet y ait mis un terme
Elle fait valoir que les deux éoliennes litigieuses font partie du projet contractuel initial et qu'elles doivent être implantées sur la partie du parc qui lui était initialement réservé et sur des parcelles dont les droits initiaux avaient été acquis par elle.
Elle explique que la société Eolfi a poursuivi son action en tant que mandataire de son ancienne société de projet et a réalisé toutes les opérations pour pouvoir implanter les deux éoliennes complémentaires, dont elle a obtenu la valorisation complémentaire auprès du cessionnaire.
Elle indique que son préjudice consiste dans le gain dont elle a été privée, générés par l'aménagement des deux éoliennes complémentaires.
La société TQN Wind estime que la contestation par la société Eolfi du quantum de la réparation qu'elle sollicite constitue une prétention nouvelle en cause d'appel, par ailleurs non reprise au dispositif de ses conclusions et qui n'a donc pas été régulièrement dévolue à l'examen de la cour.
MOTIFS
Sur la responsabilité de la société Eolfi
Selon l'article 1147 du code civil, dans sa version applicable à la date de la convention de partenariat, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au payement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part.
La convention de partenariat signée le 9 octobre 2009 par la SA Eolfi, la SARL Vent Invest (TQN Wind), la SAS [Adresse 10] et la SAS Sepev stipule en son article 1 qu'elle a pour objet de définir les conditions et modalités de la collaboration entre les parties en vue de la réalisation du Projet.
Ce projet porte sur la réalisation d'un parc éolien situé sur le territoire des communes de [Localité 11], Togny-aux-B'ufs, [Localité 9], [Localité 8] et [Localité 7], dans le département de la Marne, le site concerné étant décrit en Annexe 3.
Les sociétés de projet créées par les sociétés Eolfi et TQN Wind ont reçu, avant leur cession, les permis de construire, promesses de baux, études et autorisation nécessaires à l'implantation de 11 éoliennes chacune. Les parties s'opposent sur l'implantation de deux éoliennes supplémentaires.
Le contrat du 26 octobre 2012 par lequel la société Eolfi a cédé les titres de sa société de projet, la société [Adresse 10], prévoit qu'elle peut décider, à sa discrétion et s'agissant d'une extension du projet comportant jusqu'à trois turbines représentant une puissance totale installée de 6 mégawatts et un poste de livraison, d'effectuer les démarches nécessaires à l'obtention des études, titres, accords et autorisations nécessaires et stipule que le cessionnaire devra verser au cédant un complément de prix en contrepartie de la valeur de l'extension, y compris s'il décide de ne pas construire et exploiter l'extension.
Le même jour, la société [Adresse 10] a donné mandat à la société Eolfi de déposer toute demande de permis de construire relatif à la construction de 3 éoliennes maximum du même type que celles du projet de [Localité 11] comprenant 11 éoliennes et d'accomplir les démarches nécessaires.
Il résulte de l'autorisation accordée le 21 février 2014 par le préfet de la Marne à la SAS [Adresse 10] de la voie Romaine, d'implanter et d'exploiter deux éoliennes supplémentaires au c'ur du parc dit " La Guenelle " sur le territoire de la commune de Togny aux B'ufs, que ces appareils doivent être situés sur le territoire de la commune de Togny aux B'ufs.
Un plan joint au dossier de permis de construire de janvier 2013 permet de préciser qu'ils doivent être construits sur les parcelles cadastrées ZI [Cadastre 2] et ZI [Cadastre 3] de ladite commune.
Or l'annexe 3 de la convention de partenariat, qui décrit le site sur lequel le projet de parc éolien doit être développé, n'inclut pas la parcelle ZI [Cadastre 2]. Il en résulte que cette parcelle est extérieure au projet dont la convention de partenariat a pour objet de préciser les conditions de réalisation et qu'elle se trouve donc en dehors du champ d'application de ladite convention et la circonstance que la société TQN Wind avait obtenu du propriétaire de ladite parcelle un engagement de conclure un contrat de bail d'une durée de 25 ans ne saurait obliger la société Eolfi à respecter les termes de la convention de partenariat de 2009 pour cette parcelle.
En outre, et comme la société Eolfi le fait valoir, cette parcelle ne figure pas non plus dans le tableau des promesses de baux emphytéotiques annexée à la convention de partenariat, de sorte qu'il n'est pas même établi que celle-ci avait connaissance des droits de la société TQN Wind sur ce fonds.
En conséquence, la société TQN Wind n'est pas fondée à invoquer un quelconque manquement de la société Eolfi à ses obligations résultant de la convention de partenariat du 9 octobre 2009 à raison du développement d'un projet d'implantation d'une éolienne sur la parcelle ZI [Cadastre 2] de la commune de Togny aux B'ufs.
La parcelle ZI [Cadastre 3] et le projet d'implantation d'une éolienne sur ce fonds entrent bien, en revanche, dans le domaine d'application de la convention de partenariat.
Le préambule de cette convention expose que les parties se sont rapprochées afin de mettre en commun leurs compétences et leurs études en vue de l'obtention par les sociétés de projet de tous les permis de construire nécessaires à la construction, par chaque société de projet, d'un parc éolien sur le site. Dès obtention des permis de construire, les sociétés de projet sont convenues de se répartir de manière équitable les permis de construire obtenus par chacune d'elles, les promesses Eolfi et les promesses TQN Wind, étant précisé que l'équité qui doit présider à cette répartition est un élément déterminant du consentement de chacune des parties.
L'article 1er rappelle que l'objectif présidant à la répartition est que chaque société de projet obtienne, dans toute la mesure du possible, le même nombre de turbines/éoliennes et un productible équivalent.
L'article 14 de la convention prévoit que pendant toute la durée de la convention, chaque partie s'interdit expressément de faire concurrence aux autres parties sur le site, sans leur accord exprès, préalable et écrit.
L'article 10 stipule, au titre des obligations générales et réciproques des parties : " Pendant toute la durée des présentes, les parties s'engagent à exécuter de bonne foi leurs obligations ".
Il est précisé à l'article 16 que la convention est conclue pour une durée de 5 ans à compter de sa date de signature.
L'affirmation de la société TQN Wind selon laquelle la société Eolfi a négocié auprès du groupe Leonidas, cessionnaire de sa société de projet, un aménagement de productible de quatorze éoliennes, finalement ramené à 13 et non seulement 11 ne se vérifie pas pleinement à la lecture de l'extrait de l'acte par lequel la société Eolfi a cédé la société [Adresse 10] de la voie romaine.
La société Eolfi, a effectivement convenu avec le cessionnaire qu'elle se réservait la possibilité d'entreprendre les démarches nécessaires pour permettre à son ancienne société de projet de réaliser une telle implantation supplémentaire et a reçu mandat de cette dernière pour accomplir lesdites démarches en son nom, en prévoyant une rémunération complémentaire à son profit.
Cependant, l'acte de cession mentionne que la société [Adresse 10] est une société dont l'unique activité consiste à réaliser le projet de parc éolien de [Localité 11], composé de 11 éoliennes de 2 MW chacune.
La société Eolfi n'a donc pas cédé une société de projet d'ores et déjà dotée des autorisations, permis, études, promesses nécessaires à l'implantation de 2 turbines supplémentaires par rapport à la dotation de la société de projet de la société TQN Wind. En ce sens, il peut encore être relevé que l'autorisation préfectorale déjà citée d'implanter et d'exploiter deux éoliennes supplémentaires sur le territoire de la commune de Togny aux B'ufs a été accordée à la société [Adresse 10] de la voie romaine le 21 février 2014, soit bien postérieurement à la cession de cette dernière par la société Eolfi.
Ainsi, même si un complément de rémunération était dû par le cessionnaire, quand bien même celui-ci ne donnait pas suite au projet, il appartenait encore à la société Eolfi de réaliser le travail nécessaire à l'obtention de toutes les autorisations nécessaires à l'implantation effective des éoliennes supplémentaires avant de pouvoir obtenir une telle rémunération.
Or rien n'interdisait à ce stade à la société TQN Wind de faire de même, puisque, comme la société Eolfi le souligne, les sociétés cessionnaires des sociétés de projet sont distinctes.
La société TQN Wind affirme que les études réalisées par elle portaient précisément sur le secteur concerné par l'implantation de deux éoliennes complémentaires, parce que ces deux éoliennes sont situées dans le territoire géographique du parc de " La Guenelle " qu'elle a aménagé.
Pour autant, il n'est pas établi que la société Eolfi aurait usé de ces études pour développer le projet des deux éoliennes supplémentaires au nom de son ancienne société de projet.
En revanche, s'il n'est pas démontré que la société Eolfi a agi de façon à réserver le bénéfice de l'implantation des deux nouvelles éoliennes à son ancienne société de projet, en excluant donc la société TQN Wind, force est de constater qu'elle a enfreint la clause de non concurrence stipulée à l'article 14 de la convention de partenariat, en développant une activité de recueil des études, autorisations, permis et promesses de baux nécessaires à l'implantation d'une éolienne supplémentaire, dont elle ne cesse d'ailleurs d'affirmer dans ses conclusions qu'elle aurait pu également être menée par la société TQN Wind.
La société Eolfi ne peut valablement soutenir que la convention de partenariat ne pouvait régir le développement du projet d'implantation d'une éolienne supplémentaire au motif qu'elle ne pouvait perdurer au-delà de la cession des sociétés de projet dès lors que toutes les obligations souscrites ne perdaient pas leur objet avec cette cession. Il en va particulièrement ainsi de l'obligation de non concurrence, libellée de façon générale pour toute la durée du contrat, fixée à 5 ans à compter de la signature de la convention et non pour le temps précédant ladite cession.
La société Eolfi ne peut pas invoquer utilement une possible renonciation de la société TQN Wind dès lors que la convention de partenariat fait interdiction aux parties de se faire concurrence " sans leur accord exprès, préalable et écrit " et qu'elle ne justifie aucunement d'une telle autorisation.
En conséquence, la société Eolfi a engagé sa responsabilité contractuelle envers la société TQN Wind à raison du développement d'un projet d'implantation d'une éolienne supplémentaire sur le site relevant de la convention de partenariat.
Sur le préjudice de la société TQN Wind
La contestation du quantum de la réparation sollicitée par la partie adverse ne constitue pas une prétention, mais un simple moyen de défense et ne peut donc être déclarée irrecevable pour être nouvelle à hauteur d'appel. Il suffit qu'elle soit développée dans le corps des conclusions pour que la cour en soit valablement saisie, comme c'est le cas en l'espèce.
Il résulte de l'article 1149 ancien du code civil que les dommages et intérêts dus au créancier sont, en général, de la perte qu'il a faite et du gain dont il a été privé.
Le respect de la clause de non-concurrence imposait à la société Eolfi, à défaut de justifier d'une autorisation expresse de la société TQN Wind, de conduire son projet de nouvelle éolienne en partenariat avec cette dernière en exécution de la convention de 2009, qui était toujours en cours, puisque l'implantation devait se faire sur une parcelle incluse dans le site faisant l'objet de ladite convention.
La société Eolfi soutient que seules les sociétés de projet pouvaient bénéficier directement du fruit des développements sans que ce produit ne transite jamais par elle et TQN Wind. Il n'en demeure pas moins qu'un complément de rémunération lui a été promis par la société Leonidas 3 pour le développement des éoliennes supplémentaires. Le préjudice de la société TQN Wind consiste donc dans la privation de la moitié de ce complément de rémunération pour l'éolienne qui devait être implantée sur la parcelle ZI [Cadastre 3].
La mention de cette rémunération est masquée sur l'extrait produit par la société Eolfi. Les seules indications subsistantes permettent néanmoins de comprendre que cette rémunération est fonction du nombre de mégawatts supplémentaires.
La société TQN Wind propose pour sa part d'évaluer son préjudice en fonction du prix de cession de sa société de projet pour 11 éoliennes, en 2012, pour parvenir à une somme de 259 252.47 euros pour un mégawatt, étant relevé qu'il n'est pas contesté que les éoliennes en cause dans le présent litige correspondent chacune à une capacité de 2 mégawatts.
La société Eolfi ne justifiant pas du montant précis qu'elle a perçu en complément de rémunération et ne proposant aucun autre élément d'appréciation qui permette de remettre en cause le calcul proposé par la société TQN Wind, il convient d'évaluer le préjudice subi par la société TQN Wind à la somme de 259 252.47 euros.
Le principe de réparation intégrale commande d'actualiser ce montant au jour du jugement, selon la formule proposée par la société TQN Wind, soit l'application du taux légal pour les professionnels avec capitalisation semestrielle à compter du 31 août 2013, compte tenu des délais prévus à l'acte de cession de la société [Adresse 10] de la voie romaine pour que le cessionnaire fasse connaître sa position et verse le complément de rémunération.
Le jugement sera donc infirmé du chef du quantum alloué.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
Le premier juge a exactement statué sur le sort des dépens et les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile dont il a fait une équitable application.
La société Eolfi, partie condamnée, est tenue aux dépens d'appel. Sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile doit donc être rejetée.
Il est équitable d'allouer à la société TQN Wind la somme de 5 000 euros pour ses frais irrépétibles d'appel.
Me Pascal Guillaume sera autorisé à recouvrer les dépens d'appel dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement et par arrêt contradictoire,
Infirme le jugement rendu le 8 juillet 2021 par le tribunal de commerce de Châlons-en-Champagne en ce qu'il condamne la société Eolfi à payer à la société Global Wind Power France (TQN Wind) la somme de 547 517.66 euros arrêtée au [Cadastre 3] novembre 2020 et majorée d'une actualisation complémentaire calculée sur la base du taux légal pour les professionnels avec capitalisation au 1er janvier de chaque année à compter de ladite date jusqu'au 10 juillet 2021,
Statuant à nouveau de ce seul chef,
Condamne la SAS TQN Wind (anciennement Global Wind Power France) à payer à la SAS Eolfi la somme de 259 252.47 euros à titre de dommages intérêts ;
Dit que cette somme sera actualisée par application du taux légal pour les professionnels avec capitalisation semestrielle à compter du 31 août 2013 et jusqu'au 8 juillet 2021 ;
Confirme le jugement pour le surplus ;
Y ajoutant,
Condamne la SAS TQN Wind (anciennement Global Wind Power France) à payer à la SAS Eolfi la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Déboute la SAS Eolfi de sa demande en paiement pour frais irrépétibles ;
Condamne la SAS Eolfi aux dépens d'appel, dont distraction au profit de Me Pascal Guillaume.
LE GREFFIER LA PRESIDENTE