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24/01/2023 | FRANCE | N°19/02140

France | France, Cour d'appel de Reims, 1ere chambre sect.civile, 24 janvier 2023, 19/02140


ARRET N°

du 24 janvier 2023



R.G : N° RG 19/02140 - N° Portalis DBVQ-V-B7D-EYDH





[H]





c/



[T]



















Formule exécutoire le :

à :



la SCP LEJEUNE-THIERRY



Me Pascal GUILLAUME,

COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE CIVILE-1° SECTION

ARRET DU 24 JANVIER 2023



APPELANT :

d'un jugement rendu le 06 septembre 2019 par le Tribunal de Grande Instance de TROYES



Mon

sieur [S] [H]

[Adresse 4]

[Localité 8]

Représenté par Me Christophe LEJEUNE de la SCP LEJEUNE-THIERRY, avocat au barreau de L'AUBE





INTIME :



Monsieur [E] [T]

[Adresse 2]

[Localité 1] / FRANCE

Représenté par Me Pascal GUILLAUME, avocat au barrea...

ARRET N°

du 24 janvier 2023

R.G : N° RG 19/02140 - N° Portalis DBVQ-V-B7D-EYDH

[H]

c/

[T]

Formule exécutoire le :

à :

la SCP LEJEUNE-THIERRY

Me Pascal GUILLAUME,

COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE CIVILE-1° SECTION

ARRET DU 24 JANVIER 2023

APPELANT :

d'un jugement rendu le 06 septembre 2019 par le Tribunal de Grande Instance de TROYES

Monsieur [S] [H]

[Adresse 4]

[Localité 8]

Représenté par Me Christophe LEJEUNE de la SCP LEJEUNE-THIERRY, avocat au barreau de L'AUBE

INTIME :

Monsieur [E] [T]

[Adresse 2]

[Localité 1] / FRANCE

Représenté par Me Pascal GUILLAUME, avocat au barreau de REIMS, avocat postulant et Me Richard HONNET, avocat au barreau de L'AUBE, avocat plaidant

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :

Madame Elisabeth MEHL-JUNGBLUTH présidente de chambre

Monsieur Cédric LECLER, conseiller

Madame Sandrine PILON, conseillère

GREFFIER :

Monsieur Nicolas MUFFAT-GENDET, greffier lors des débats et Madame Yelena MOHAMED-DALLAS, greffier lors du prononcé

DEBATS :

A l'audience publique du 29 novembre 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 24 janvier 2023,

ARRET :

Contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe le 24 janvier 2023 et signé par Madame Elisabeth MEHL-JUNGBLUTH, présidente de chambre, et Madame Yelena MOHAMED-DALLAS, greffière, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

Dans la nuit du 15 au 16 décembre 2012, Monsieur [S] [H], gérant du bar de l'hôtel de ville à [Localité 8], a raccompagné à l'extérieur de son établissement Monsieur [E] [T], qui était fortement alcoolisé.

Monsieur [S] [H] a chuté sur le trottoir, ladite chute entraînant une fracture bimalléolaire de la cheville droite, donnant lieu à un certificat médical faisant état d'une incapacité temporaire de travail d'une durée de 75 jours.

Le 17 décembre 2012, Monsieur [S] [H] a déposé plainte auprès du commissariat de police de [Localité 8].

Le 11 décembre 2014, sa plainte a été classée sans suite, motif pris d'une infraction insuffisamment caractérisée.

Par acte d'huissier en date du 12 décembre 2017, Monsieur [S] [H] a attrait Monsieur [T] devant le tribunal de grande instance de Troyes aux fins de voir indemniser son préjudice.

En dernier lieu, Monsieur [H] a sollicité de:

- déclarer Monsieur [T] entièrement responsable de son préjudice ;

- désigner un expert médical avant dire droit ;

- condamner Monsieur [T] à lui payer une provision d'un montant de 4000 euros ; - condamner Monsieur [T] à lui payer une somme de 4000 euros au titre des frais irrépétibles.

En dernier lieu, Monsieur [T] a demandé de :

- déclarer Monsieur [H] irrecevable et mal fondé en toutes ses demandes, et l'en débouter ;

- condamner Monsieur [H] aux entiers dépens, avec distraction au profit de son conseil, et à lui payer une somme de 1500 euros au titre des frais irrépétibles.

Par jugement contradictoire en date du 6 septembre 2019, le tribunal de grande instance de Troyes a :

- débouté Monsieur [H] de l'intégralité de ses demandes ;

- dit que chacune des parties conserverait la charge de ses propres dépens ;

- débouté les parties de leurs demandes au titre des frais irrépétibles ;

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Le 18 octobre 2019, Monsieur [H] a relevé appel de ce jugement.

Par arrêt contradictoire en date du 5 janvier 2021, la cour de céans a :

- déclaré recevable l'appel formé par Monsieur [H] ;

- infirmé le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau :

- déclaré Monsieur [T] entièrement responsable des préjudices subis par Monsieur [H] consécutivement aux faits commis par ce dernier le 16 décembre 2012 ;

Avant dire droit,

- ordonné une expertise médicale de Monsieur [H] et commis pour y procéder le docteur [D] [Z], expert inscrit sur la liste de la cour d'appel de Reims, pour évaluer ses postes de préjudice corporel ;

- fait injonction aux parties de mettre en cause les organismes tiers payeurs, avant le 30 mars 2021 et en tout état de cause, d'obtenir de ces derniers un état de leurs débours avant le 30 juin 2021 ;

- condamné Monsieur [T] à payer à Monsieur [H] la somme de 4000 euros à titre de provision à valoir sur la réparation de son préjudice;

- débouté Monsieur [T] de sa demande au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel ;

- condamne Monsieur [T] aux entiers dépens de première instance et d'appel et à payer à Monsieur [H] la somme de 2500 euros au titre des frais irrépétibles des deux instances.

Monsieur [T] a formé un pourvoi en cassation à l'encontre de l'arrêt sus dit.

Le 27 mai 2021, l'expert commis a demandé à être déchargé de sa mission, et il a été désigné en ses lieu et place le docteur [O] [R].

Le 6 avril 2022, ce second expert a déposé son rapport.

Par arrêt en date du 15 septembre 2022, la Cour de cassation a rejeté le pourvoir formé par Monsieur [T].

Le 15 novembre 2022 à 13 heures 23, a été ordonnée la clôture de l'instruction de l'affaire.

Le 15 novembre 2022 à 18 heures 30, Monsieur [T], intimé, a déposé ses écritures.

Par courrier en date du 16 novembre 2022, Monsieur [H] a observé que ces écritures, selon lui déposées après la clôture, devaient être déclarées irrecevables puisque communiquées hors délais.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Pour plus ample exposé, il est expressément renvoyé aux écritures déposées par les parties:

- le 28 octobre 2022 par Monsieur [H], appelant et pour la société à responsabilité limitée Sfk (la société Sfk), se déclarant intervenante volontaire ;

- le 15 novembre 2022 à 18 heures 30 par Monsieur [T], intimé.

Monsieur [H] demande à être reçu en ses demandes, la société Sfk demande à être reçue en son intervention volontaire, et tous deux réclament de voir fixer le préjudice corporel subi par Monsieur [H] du fait de l'agression commis le 15 décembre 2012 à la somme de 19 446,89 euros.

Les intéressés demandent la condamnation de Monsieur [T] au paiement de la somme de 15 446,89 euros, compte tenu de la provision de 4000 euros versée par leur adversaire.

La société Sfk demande la condamnation de Monsieur [T] à lui verser la somme de 12 294,97 euros au titre des sommes exposées pour assurer le remplacement de Monsieur [H] entre le 17 décembre 2012 et le 30 juin 2013 au sein de la société Sfk.

Monsieur [H] demande la condamnation de Monsieur [T] à lui payer la somme de 2000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel.

Les deux intéressés demandent la condamnation de Monsieur [T] aux entiers dépens comprenant le coût de l'expertise judiciaire.

Monsieur [T] a demandé de déclarer irrecevable l'intervention volontaire de la société Sfk, de fixer à 1000 euros l'indemnisation au titre du déficit fonctionnel temporaire, de fixer à 2500 euros l'indemnisation au titre des souffrances endurées, et de débouter Monsieur [H] de ses demandes plus amples ou contraires.

MOTIVATION :

Sur la communication, par Monsieur [T], de ses écritures le jour même de l'ordonnance de clôture :

Selon l'article 802 alinéa 1 du code de procédure civile, auquel renvoie l'article 907 du même code, après l'ordonnance de clôture, aucune conclusion ne peut être déposée ni aucune pièce produite aux débats, à peine d'irrecevabilité prononcée d'office.

Mais des écritures déposées le jour même de l'ordonnance de clôture sont réputées l'avoir été avant celle-ci.

Et il appartient souverainement au premier juge de déterminer si des conclusions ont été déposées en temps utile, au sens de l'article 15 du code de procédure civile.

L'article 15 du code de procédure civile fait obligation aux parties de se faire connaître mutuellement les éléments de preuve qu'elles produisent, afin que chacune soit à même d'organiser sa défense.

Le 6 juillet 2022, les parties ont été avisées d'un calendrier de procédure fixant au 8 novembre 2022 la date de clôture, et au 29 novembre la date de plaidoirie.

Le 28 octobre 2022, Monsieur [H] appelant, mais encore la société Sfk, se prévalant de la qualité d'intervenante volontaire, ont déposé leurs écritures et pièces.

Le 7 novembre 2022, Monsieur [T], se prévalant du dépôt récent des écritures et pièces de ses adversaires, a sollicité le report de l'ordonnance de clôture.

Le 8 novembre 2022, la clôture a été repoussée au 15 novembre suivant.

Le 15 novembre 2022 à 13 heures 23, a été ordonnée la clôture de l'instruction de l'affaire.

Le 15 novembre 2022 à 18 heures 30, Monsieur [T] a déposé des écritures, qui sont les premières après le dépôt du rapport d'expertise judiciaire, par lesquelles il a demandé la limitation de l'indemnisation sur certains postes de préjudice de la victime, son débouté pour le surplus, et a sollicité que l'intervention volontaire de la société Sfk soit déclarée irrecevable.

Il a ainsi présenté sur ces points des prétentions et moyens nouveaux, auxquels l'appelant et l'intervenante volontaire alléguée, pour y répondre sans elles-mêmes encourir la sanction de l'irrecevabilité résultant de la clôture, auraient dû répliquer le jour même de celle-ci, soit entre 18 heures 30 et 23 heures 59.

Mais l'intimée, par ces écritures très tardives, n'a pas ainsi ménagé un temps utile pour permettre à ses adversaires d'y répondre.

Il en sera conclu que les écritures déposées le 15 novembre 2022 à 18 heures 30 par Monsieur [T] ne l'ont pas été en temps utile.

Il conviendra donc de déclarer irrecevables les écritures déposées le 15 novembre 2022 à 18 heures 30 par Monsieur [T].

Sur les demandes de Monsieur [H] :

L'expert a retenu une période de déficit fonctionnel temporaire du 15 décembre 2012 au 23 mars 2014, et l'acquisition de la consolidation au 24 mars 2014.

I/ Postes de préjudice patrimoniaux

Sur les postes de préjudice patrimoniaux temporaires :

A/ dépenses de santé actuelles:

Celles-ci correspondent aux frais médicaux, pharmaceutiques et d'hospitalisation déjà exposés par les organismes sociaux et par la victime avant consolidation.

Malgré l'injonction qui lui en a été faite, Monsieur [H] n'a pas produit d'état des débours de la caisse.

Il n'est donc pas possible de fixer l'état des débours de la caisse sur ce poste.

Monsieur [H] indique en outre ne pas avoir de débours demeurés à sa charge.

Il conviendra donc de dire n'y avoir lieu à statuer sur le poste de dépenses de santé actuelles.

B/ pertes de gains professionnels actuels:

Ceux-ci correspondent aux revenus dont la victime a été privée pendant la période d'incapacité temporaire entre la date du dommage et la date de consolidation.

L'évaluation de ce poste doit être appréciée concrètement, au regard de la perte de revenus établie par la victime jusqu'au jour de sa consolidation.

Il ressort de l'expertise et des certificats y afférents que Monsieur [H] s'est trouvé en arrêt de travail du 15 décembre 2012 au 30 juin 2013.

L'appelant demande son indemnisation sur ce poste pour la période spécifiée plus haut, d'une durée de 6 mois et 15 jours.

Monsieur [H] est travailleur indépendant, et se trouve gérant du bar de l'Hôtel de Ville à [Localité 8].

Il produit une attestation de la Mutuelle santé des indépendants, certifiant qu'il n'a pas reçu d'indemnités journalières du régime obligatoire suite aux arrêts de travail du 16 décembre 2012 au 18 février 2013.

Mais il n'a produit aucune attestation similaire ni aucun autre élément, justifiant de son absence de perception d'indemnités journalières pour la période du 19 février 2013 au 30 juin 2013.

Ainsi, Monsieur [H] échoue à démontrer l'absence de perte de gains professionnels pour cette dernière période.

Dès lors, la perte alléguée ne pourra être indemnisée que sur la période objet de l'attestation de la caisse, soit du 16 décembre 2012 au 18 février 2013.

Selon son avis d'imposition 2013 sur les revenus de l'année 2012, seule année d'activité complète justifiée avant le fait dommageable, Monsieur [H] a perçu 16 991 euros de revenus professionnels, soit 1416 euros mensuels.

La victime aurait ainsi pu prétendre, pour la période du 16 décembre 2012 au 18 février 2018, à une indemnisation sur ce poste à hauteur de 2926,40 euros.

Mais il n'a demandé qu'une seule somme de 2905,40 euros.

Au regard de la période ouvrant droit à indemnisation, il y aura lieu de dire que le préjudice de Monsieur [H] sur ce poste sera entièrement réparé par une indemnité de 2905,40 euros, conformément à sa demande.

C/ assistance par tierce personne temporaire :

Ce poste vise à indemniser l'aide apportée à la victime incapable d'accomplir seule certains actes essentiels de la vie courante. Ce poste est apprécié en fonction des besoins justifiés, et non pas de la dépense exposée, et ne peut pas être réduit en cas d'assistance bénévole par un proche de la victime.

De même, aucun principe positif de droit français n'impose à la victime de réduire son préjudice dans l'intérêt du responsable, de telle sorte qu'il ne peut pas être imposé à la victime d'assumer la charge d'employeur, et qu'il lui est ainsi loisible de solliciter la réparation sur ce poste sur la base d'un tarif prestataire, plus élevé d'un tarif employeur.

Eu égard à la présence active de la tierce personne, dont le rôle ne se réduit pas à une simple surveillance, comme objectivée par le rapport d'expertise, il y aura lieu de fixer à 20 euros le tarif horaire de l'aide par tierce personne, conformément à la demande de la victime, correspondant à un tarif de prestataire moyen.

L'expert a retenu un besoin d'aide par tierce personne pour ses déplacements et sa non-participation aux travaux domestiques à raison de :

- 3 heures par semaine pendant la période de déficit fonctionnel de type III (période de décharge par cannes anglaises du 19 décembre 2012 au 5 février 2013), soit pendant 6,86 semaines ;

- 2 heures par semaine pendant la période de déficit fonctionnel de type II (période de décharge par canne anglaise du 6 février 2013 au 31 mai 2013), soit pendant 16,43 semaines ;

C'est donc à tort que s'agissant des périodes considérées,Monsieur [H] sollicite son indemnisation sur la base d'un aide par tierce personne respectivement à raison de 3 heures par jour et 2 heures par jour.

Il y aura donc lieu d'allouer à Monsieur [H] sur ce poste les sommes de:

- 411,60 euros pour la période de déficit fonctionnel de type III (20 euros x 3 heures x 6,86 semaines) ;

- 657,20 euros pour la période de déficit fonctionnel de type II (20 euros x 2 heures x 16,43 semaines).

Au regard de ces éléments, le poste d'aide par tierce personne temporaire sera entièrement réparé par une indemnité de 1068,80 euros, qui sera allouée à Monsieur [H].

D/ frais divers avant consolidation :

Ceux-ci concernent l'ensemble des frais temporaire exposés par la victime avant consolidation et imputables à l'accident origine du dommage; ils s'apprécient en fonction des justificatifs produits.

Si nul ne peut se constituer de titre à lui-même, cette règle ne vaut pas s'agissant de la preuve de simples faits, au nombre desquels figure l'évaluation d'un préjudice, et non son fait générateur.

Monsieur [H] a intégré à ce poste les frais de déplacement à l'occasion de ses diverses hospitalisations et soins occasionnés par l'accident.

Par la production de copies d'écran du site internet www.mappy.com, Monsieur [H] justifie des distances séparant son domicile au [Adresse 3]:

- de la clinique de [Localité 6] à [Localité 8], à raison de 4,6 km aller-retour ;

- de l'institut [5] à [Localité 7], à raison de 13,6 km aller-retour.

Il ressort des commémoratifs de l'expertise et des certificats médicaux y afférents ou extérieurs que Monsieur [H] a consulté en ambulatoire le docteur [I] à la Clinique de [Localité 6] les 15 et 30 janvier 2013, le 5 février 2013, ainsi que le 20 février 2014 pour l'ablation du matériel d'ostéo-synthèse, soit à 4 reprises, justifiant d'autant de trajets.

Il a ainsi accompli un total de 18,4 km entre son domicile et le lieu d'exercice de ce praticien (4 x 4,6 km).

Il ressort de l'expertise et du bulletin de situation y afférent que la victime a fait l'objet d'une hospitalisation de jour au centre de rééducation Institut [5] 5 jours sur 7 du 14 février 2013 au 17 avril 2015, soit pendant 45 jours.

Monsieur [H] justifie ainsi avoir accompli un total de 612 km entre son domicile et son lieu d'hospitalisation de jour (45 x 13,6 km).

Sur la base du barème fiscal de l'année 2013 afférent à un véhicule de 5 chevaux, conformément à la demande de la victime, soit à raison de 0,536 euros du kilomètre, il y aura de dire que le poste des frais divers avant consolidation sera entièrement réparé par une indemnité de 337,89 euros (0,536 x 630,4 km), qui sera allouée à la victime, et le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur les postes de préjudice patrimoniaux permanents:

Il n'existe aucune dépense sur ces postes.

II/ sur les postes de préjudice personnels :

A/ postes de préjudice personnels avant consolidation:

Déficit fonctionnel temporaire :

Ce poste vient indemniser, pour la période antérieure à la consolidation, la perte de qualité de vie et des joies usuelles de la vie courante durant la maladie traumatique, le préjudice temporaire d'agrément, et éventuellement le préjudice sexuel temporaire.

Il sera retenu qu'une journée de déficit fonctionnel total sera indemnisé sur la base de 25 euros, conformément à la demande de la victime.

L'expert a retenu un déficit temporaire total pour les périodes d'hospitalisation ayant eu lieu à compter du 15 décembre 2012 au 18 décembre 2012, puis le 20 février 2014, soit un total de 5 jours.

Ces premières périodes ouvrent droit à une indemnisation de 125 euros (25 euros x 5 jours).

L'expert a retenu un déficit temporaire partiel de type III (50%) pour les périodes de décharge avec deux cannes anglaises du 19 décembre 2012 au 5 février 2013, soit un total de 48 jours.

Cette deuxième période ouvre droit à une indemnisation de 600 euros (50 % x 25 euros x 48 jours).

L'expert a retenu un déficit fonctionnel partiel de type II (25 %) pendant la période de décharge par une canne anglaise du 6 février 2013 au 31 mai 2013, soit pendant 115 jours.

Cette troisième période ouvre droit à une indemnisation de 718,50 euros (25 % x 25 euros x 115 jours).

L'expert a retenu un déficit fonctionnel partiel de type I (10 %) pendant la période courant jusqu'à la veille de l'ablation du matériel d'ostéo-synthèse, soit du 1er juin 2013 au 19 février 2014, puis du 21 février 2014 au 23 mars 2014, veille de la consolidation, soit pendant 272 jours.

Ces quatrièmes périodes ouvrent droit à une indemnisation de 680 euros (10 % x 25 euros x 272 jours).

Il conviendra donc de dire que le préjudice de Monsieur [H] au titre du déficit fonctionnel temporaire sera entièrement réparé par l'allocation d'une somme de 2123,50 euros, qui lui sera allouée.

Sur les souffrances physiques et morales:

Ce poste a vocation à réparer les souffrances tant physiques que morales endurées par la victime du fait des atteintes à son intégrité, sa dignité, son intimité, et des traitements, interventions, hospitalisations, qu'elle a subies depuis l'accident jusqu'à la consolidation.

L'expert les a évaluées à 3/7, en considération des 5 jours d'hospitalisation, des 2 interventions chirurgicales pour retirer le matériel d'ostéo-synthèse, ainsi que de la période d'hospitalisation de jour en rééducation du 14 février 2013 au 17 avril 2013.

Il conviendra d'y ajouter les douleurs post-opératoires, ayant conduit à la prise de doliprane du 16 au 26 décembre 2012, ainsi que des difficultés de déplacement avec deux béquilles pendant près de 8 semaines, et avec une béquille pendant encore 5 semaines supplémentaires.

Eu égard à ces éléments, il conviendra de dire que le préjudice de Monsieur [H] de ce chef sera entièrement réparé par une somme de 6000 euros, qui lui sera allouée.

B/ postes de préjudice personnels après consolidation:

Préjudice esthétique permanent :

Ce poste a vocation à réparer l'altération définitive de l'apparence physique de la victime.

L'indemnisation d'un dommage n'est pas fonction de la représentation que s'en fait la victime, mais de sa constatation objective par les juges (Cas. 2e civ., 22 février 1995, n°92-18.731).

L'expert judiciaire a évalué ce poste à 0,5/7, en prenant en compte l'existence des 2 cicatrices discrètes de la cheville, résultant des opérations imputables à l'accident.

Il y aura donc lieu de dire que le préjudice esthétique permanent de Monsieur [H] sera entièrement réparé par une indemnité de 2000 euros.

III/ récapitulatif des sommes allouées à la victime directe :

Il vient d'être alloué à la victime directe les sommes de :

- 2905,40 euros au titre de la perte de gains professionnels actuels ;

- 1068,80 euros au titre de l'aide par tierce personne temporaire ;

- 337,89 euros au titre de frais divers avant consolidation ;

- 2123,50 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire ;

- 6000 euros au titre des souffrances endurées ;

- 2000 euros au titre du préjudice esthétique permanent.

Il y aura donc lieu de fixer à la somme de 14 435,59 euros les divers postes de préjudice corporel de Monsieur [H] consécutivement aux faits commis par Monsieur [T] le 16 décembre 2012.

Il y aura lieu de condamner Monsieur [T] à payer à Monsieur [H] la somme de 14 435,59 euros en réparation des divers postes de préjudice corporel de Monsieur [H] consécutivement aux faits commis par Monsieur [T] le 16 décembre 2012.

Il sera précisé que la provision de 4000 euros, déjà versée par Monsieur [T] à Monsieur [H], viendra en déduction de la somme susdite.

Sur les demandes de la société Slk:

Selon l'article 125 du code de procédure civile,

Les fins de non-recevoir doivent être relevées d'office lorsqu'elles ont un caractère d'ordre public, notamment lorsqu'elles résultent de l'inobservation des délais dans lesquels doivent être exercées des voies de recours, ou de l'absence d'ouverture d'une voie de recours.

Le juge peut relever d'office la fin de non-recevoir tiré du défaut d'intérêt, du défaut de qualité ou de la chose jugée.

Selon l'article 554 du code de procédure civile, peuvent intervenir en cause d'appel, dès lors qu'elles y ont intérêt les personnes qui n'ont été ni parties, ni représentées en première instance ou qui y ont figuré en une autre qualité.

Ces personnes peuvent intervenir en cause d'appel dès lors qu'elles y ont intérêt, à condition de ne pas soumettre à la cour un litige nouveau n'ayant pas subi l'épreuve du premier degré de juridiction, et de se rattacher par un lien suffisant aux prétentions originaires.

L'irrecevabilité d'une demande présentée en appel contre une personne qui n'a été ni partie ni représentée en première instance n'est pas d'ordre public, alors même que sa mise en cause n'est pas impliquée par l'évolution du litige (Cass. 2e civ., 23 octobre 1991, n°90-12.150, Bull. 1991, II, n° 278).

Il s'en déduira que l'irrecevabilité d'une demande présentée en appel par une personne qui n'a été ni partie ni représentée en première instance n'est pas d'ordre public.

La société Slk demande le remboursement du coût afférent à l'embauche de deux salariés destinés à pallier l'absence de Monsieur [H] durant sa période d'incapacité temporaire de travail, et ce du 17 décembre 2012 au 30 juin 2013.

La société Slk entend ainsi exercer un droit qui lui est propre, et qui se rattache par un lien suffisant aux prétentions originaires de Monsieur [H] tendant à la réparation du préjudice personnel de ce dernier.

Mais en réclamant la réparation de son propre préjudice, la société Slk, qui n'était pas partie au litige en première instance, soumet ainsi à la cour un litige qui n'a pas été examiné au fond par le premier juge.

Cependant, le moyen tiré de l'irrecevabilité d'une telle demande, qui n'est pas d'ordre public, ne peut pas être soulevé d'office, alors que la cour a retenu l'irrecevabilité des conclusions déposées par Monsieur [T].

Il conviendra donc de déclarer recevable l'intervention volontaire de la société Slk.

L'intervenante volontaire fait ainsi observer que son gérant Monsieur [H] assurait en soirée l'activité de son établissement, notamment en en assurant la fermeture à 3 heures du matin, et qu'il avait dû être remplacé jusqu'à son retour en activité le 1er juillet 2013.

La société Slk réclame ainsi les sommes de :

- 11 430,79 euros, représentant les salaires bruts versés à Monsieur [V], en sa qualité de serveur à compter du 17 décembre 2012 et jusqu'au 30 juin 2013 ;

- 864,18 euros représentant les salaires bruts versés à Monsieur [C] du 2 mars 2013 au 30 juin 2013, pour faire fonction de vigile.

Elle précise bien ne pas réclamer l'indemnisation d'une perte de chiffre d'affaires.

Mais la société Slk n'apporte aucun élément sur le coût représentant les sommes qu'elle aurait dû verser à Monsieur [H] en rémunération de ses prestations pendant la période courant du jour de l'accident à sa reprise d'activité, qu'elle aurait été ainsi amenée à lui verser si le fait accidentel ne s'était pas produit.

Ainsi, elle défaille à démontrer que l'embauche des deux salariés susdits pendant la période considérée aurait généré de son chef une dépense supérieure à la seule rémunération de Monsieur [H].

La société Slk échoue ainsi à rapporter la preuve de son propre préjudice.

La société Slk sera donc déboutée de ses demandes.

Monsieur [T] sera en outre condamné aux dépens d'appel comprenant les frais de l'expertise judiciaire, et à payer à Monsieur [H] la somme de 2000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Déclare irrecevables les écritures déposées le 15 novembre 2022 à 18 heures 30 par Monsieur [E] [T] ;

Déclare recevable l'intervention volontaire de la société à responsabilité limitée Slk;

Fixe à hauteur de 14 435,59 euros les divers postes de préjudice corporel de Monsieur [S] [H] consécutivement aux faits commis par Monsieur [E] [T] le 16 décembre 2012 ;

Condamne Monsieur [E] [T] à payer à Monsieur [S] [H] la somme de 14 435,59 euros en réparation de ses divers postes de préjudice corporel;

Précise que la provision de 4000 euros, déjà versée par Monsieur [E] [T] à Monsieur [S] [H], viendra en déduction de la somme susdite ;

Déboute la société à responsabilité limitée Slk de l'intégralité de ses prétentions ;

Condamne Monsieur [E] [T] aux entiers dépens d'appel comprenant les frais de l'expertise judiciaire, et à payer à Monsieur [S] [H] la somme de 2000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Reims
Formation : 1ere chambre sect.civile
Numéro d'arrêt : 19/02140
Date de la décision : 24/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-24;19.02140 ?
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