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17/01/2023 | FRANCE | N°21/01687

France | France, Cour d'appel de Reims, 1ère chambre section inst, 17 janvier 2023, 21/01687


ARRET N°

du 17 janvier 2023



R.G : N° RG 21/01687 - N° Portalis DBVQ-V-B7F-FBUY





[V]





c/



[N]





AL







Formule exécutoire le :

à :



la SCP DELGENES JUSTINE DELGENES





COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE CIVILE- SECTION INSTANCE



ARRET DU 17 JANVIER 2023



APPELANT :

d'un jugement rendu le 27 avril 2020 par le Tribunal judiciaire de Troyes



Monsieur [T] [V]

[Adresse 3

]

[Localité 2]



Représenté par Me Richard DELGENES de la SCP DELGENES JUSTINE DELGENES, avocat au barreau des ARDENNES



INTIME :



Monsieur [B] [N]

[Adresse 4]

[Localité 1]



N'ayant pas constitué avocat



COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DE...

ARRET N°

du 17 janvier 2023

R.G : N° RG 21/01687 - N° Portalis DBVQ-V-B7F-FBUY

[V]

c/

[N]

AL

Formule exécutoire le :

à :

la SCP DELGENES JUSTINE DELGENES

COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE CIVILE- SECTION INSTANCE

ARRET DU 17 JANVIER 2023

APPELANT :

d'un jugement rendu le 27 avril 2020 par le Tribunal judiciaire de Troyes

Monsieur [T] [V]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représenté par Me Richard DELGENES de la SCP DELGENES JUSTINE DELGENES, avocat au barreau des ARDENNES

INTIME :

Monsieur [B] [N]

[Adresse 4]

[Localité 1]

N'ayant pas constitué avocat

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :

M. Benoît PETY, président de chambre

Mme Anne LEFEVRE, conseiller

Mme Christel MAGNARD, conseiller

GREFFIER :

Madame Lucie NICLOT, greffier

DEBATS :

A l'audience publique du 13 décembre 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 17 janvier 2023,

ARRET :

Par défaut, prononcé par mise à disposition au greffe le 17 janvier 2023 et signé par M. Benoît PETY, président de chambre, et Madame Lucie NICLOT, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

Par contrat du 13 juillet 2019, M. [T] [V] a acheté à M. [B] [N] un tractopelle de marque Hymac au prix de 4 000 euros, par l'intermédiaire du site Le Bon Coin, et il a fait acheminer l'engin à son domicile à ses frais.

Par lettre recommandée avec avis de réception du 18 juillet 2019, M. [V] a demandé la résolution de la vente, au visa de l'article 1604 du code civil, pour non-conformité de la chose vendue.

M. [V] a fait procéder à un examen amiable et contradictoire du véhicule vendu. Le technicien a considéré que le matériel était inutilisable dès sa livraison et que l'état de l'hydraulique le rendait dangereux à l'utilisation en raison d'un risque de rupture de flexibles hydrauliques et de la direction.

Le 7 janvier 2020, l'avocat de M. [V] a mis M. [N] en demeure d'accepter la résolution de la vente et la réparation de ses préjudices.

Faute d'issue amiable, M. [V] a saisi le tribunal judiciaire de Troyes, par assignation du 15 avril 2020, pour obtenir :

- la résolution de la vente du tractopelle,

- le remboursement du prix de vente de 4 000 euros, sous astreinte de 150 euros par jour à compter de la signification du jugement et ce pendant 15 jours, passés lesquels il sera à nouveau fait droit aux mêmes conditions,

- la restitution du véhicule après remboursement et ce aux frais du vendeur,

- la condamnation de M. [N] à lui payer les sommes de 500 euros en remboursement de la facture du transporteur et de 1 000 euros au titre des préjudices de jouissance, d'assurance, de l'obligation de conservation,

- la condamnation de M. [N] aux dépens et au paiement d'une somme de 1 000 euros au titre des frais irrépétibles,

- subsidiairement, la désignation d'un expert.

Le jugement du 27 avril 2021 a débouté M. [V] de ses demandes en résolution de la vente, en dommages et intérêts et au titre des frais irrépétibles, et l'a condamné aux dépens.

Le tribunal judiciaire a considéré que le tractopelle était ancien, usagé, et que les dysfonctionnements constatés par l'acquéreur, liés à l'usure, ne présentaient pas le caractère de vice caché, même pour un acheteur profane.

Le 26 août 2021, M. [V] a fait appel du jugement en toutes ses dispositions.

Par conclusions du 7 octobre 2021, M. [V] demande à la cour, au visa des articles 1103 et suivants et 1641 et suivants du code civil et L. 217-8 du code de la consommation, de :

- prononcer la résolution de la vente du tractopelle,

- ordonner le remboursement du prix de vente de 4 000 euros, sous astreinte de 150 euros par jour à compter de la signification de l'arrêt à intervenir et ce pendant 15 jours, passés lesquels il sera à nouveau fait droit aux mêmes conditions,

- ordonner la restitution du véhicule après remboursement et ce aux frais du vendeur,

- condamner M. [N] à lui payer les sommes de 500 euros en remboursement de la facture du transporteur et de 1 000 euros au titre des préjudices de jouissance, d'assurance, de l'obligation de conservation,

- de condamner M. [N] aux dépens et au paiement d'une somme de 1 000 euros au titre des frais irrépétibles,

- subsidiairement, de désigner un expert judiciaire pour décrire les désordres et éventuels vices cachés, préciser s'ils rendent le véhicule impropre à son usage, déterminer les causes des dysfonctionnements et leur date d'apparition, donner un avis sur les responsabilités et préjudices.

Le 29 novembre 2021, M. [V] a tenté de faire signifier à M. [N] la déclaration d'appel, ses conclusions et pièces. Une attestation de non-accomplissement de la signification a été rédigée le 4 mars 2022 en Croatie, indiquant 'destinataire introuvable'.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 29 novembre 2022.

Motifs de la décision :

Sur la demande en résolution de vente et en dommages et intérêts :

Selon l'article 217-8 du code de la consommation, 'L'acheteur est en droit d'exiger la conformité du bien au contrat. Il ne peut cependant contester la conformité en invoquant un défaut qu'il connaissait ou ne pouvait ignorer lorsqu'il a contracté.'

Aux termes de l'article 1641 du code civil, 'le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage, que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus.'

L'article 1644 du code civil donne en ce cas à l'acheteur le choix de rendre la chose et de se faire restituer le prix ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du prix.

L'article 1645 dispose que le vendeur qui connaissait les vices de la chose est tenu, outre la restitution du prix, de tous les dommages et intérêts envers l'acheteur.

M. [V] a envisagé l'achat d'un tractopelle Hymac 370 C proposé sur le site Le Bon Coin par M. [N] au prix de 4 000 euros. L'annonce indiquait 'grosse force hydraulique'.

Interrogé par M. [V], M. [N] répondait par courriel du 6 juillet 2019 : 'pour ma part, il n'a jamais été mis un brin de soudure depuis que je le possède mais cet engin a travaillé et a forcément rencontré des obstacles qui ont été très bien corriger, je ne voie pas du tout si vous l'utiliser dans de bonne condition pourquoi il ne vous rendrais pas les service que vous lui demander, nous sommes bien d'accord que ce véhicule n'est pas neuf, ne convient pas de mètre un ouvrier dessus car les normes ne sont sûrement plus aux normes 2019. Je transmettrai une attestation de vente a votre chauffeur (...) pour les pièces en plus, elles ne font pas partie de la vente je vous les donne ;'

Par courriel du 6 juillet 2019, M. [V] a déclaré confirmer l'achat de l'appareil (pièce n°2). Puis il a mandaté les transports Mustiere Robin pour aller chercher le véhicule dans l'Aube et le ramener chez lui, en Ille-et-Vilaine. Le transport a eu lieu le 12 juillet 2019.

Dès le 15 juillet 2019, M. [V] a exprimé par courriel à M. [N] son mécontentement :

'Certes je ne suis pas venu voir le matériel mais je vous ai fait confiance. Je vous avais questionné en détail sur l'état du tractopelle et me suis appuyé sur vos dires et sur les vidéo que vous aviez envoyées. Vous m'avez bien dit que le matériel est ancien (+ de 30 ans) mais vous avez été formel sur l'état de la direction assistée (important pour moi car j'ai des problèmes d'épaule) et sur le fait que le matériel était propre et qu'il n'avait aucunes fuites d'huile sur les vérins.

A réception du tractopelle, je constate que le tractopelle n'est pas dans l'état que vous m'avez décrit.

. La direction assistée ne fonctionne pas, bien que vous m'aviez dit que vous aviez changé les joints de l'orbitrole. Il est impossible de tourner le volant sans mettre une force importante.

. Il y a une fuite d'huile sur le vérin du chargeur.

. Il y a également une fuite sur le vérin d'orientation de la pelle rétro.

La valeur du bien en l'état n'est certainement pas de 4 000 euros! Tout au plus 2 500 à 3 000 euros. C'est pour toutes ces raisons que je vous demande une ristourne de 1 000 euros sur le prix de vente. Je préférerais régler ce litige à l'amiable.

Dans l'attente de votre facture et de votre remboursement par chèque.'

En l'absence de toute réaction de M. [N], M. [V] lui a adressé une lettre recommandée avec avis de réception distribuée le 20 juillet 2019, dans laquelle il indique :

- le tractopelle n'est pas en état de fonctionnement. Sans remise en état, impossible de manoeuvrer et effectuer les travaux de terrassement courants.

- la direction assistée ne fonctionne pas.

- il y a des fuites d'huile sur un vérin du chargeur et sur le vérin d'orientation de la pelle rétro. Une fuite provoque des giclées d'huile lors de l'utilisation, ce qui présente un danger pour les personnes autour sur le chantier.

- deux flexibles sont rouillés sur la pelle rétro arrière dont un est dangereux.

- le chargeur monte difficilement (à partir des 3/4 de la hauteur), il saccade même à vide.

- le niveau d'huile était sous le minima.

- la roue avant gauche était crevée.

- il ne nous a pas été remis de certificat de vente.

M. [V] sollicitait le remboursement de son achat pour non conformité de la chose, en application de l'article 1604 du code civil.

M. [V] a fait procéder à un examen de l'engin par l'expert de son assureur protection juridique, M. [L] [X]. Celui-ci a convoqué M. [N] par courriel et par une lettre recommandée avec avis de réception retournée le 26 août 2019 avec la mention 'pli avisé non réclamé'. Cet examen aboutit aux conclusions suivantes datées du 29 août 2019 :

'L'historique montre que le matériel a été inutilisable dès sa livraison.

Les constatations techniques montrent que le matériel est usagé dans son ensemble.

L'état de l'hydraulique rend le matériel dangereux à l'utilisation, avec un risque d'une rupture d'un flexible hydraulique d'une part et de la direction d'autre part.

Au regard de l'état général du matériel, nous considérons que ce dernier ne pouvait pas être vendu pour un usage normal, au mieux pour pièces ou pour destruction.

En conséquence, il apparaît que la réclamation de M. [V] en résolution de la vente est fondée.'

Les démarches par lettres recommandées avec avis de réception engagées par l'assureur protection juridique de M. [V] le 4 octobre 2019, puis par son avocat le 7 janvier 2020, n'ont eu aucun effet, M. [N], bien qu'avisé des courriers, ne les réclamant pas.

Il résulte des constats clairs, précis et non contestés, immédiatement opérés par l'acheteur, et des conclusions de l'examen amiable d'août 2019 que le véhicule, acheté comme usagé, s'est révélé lors de son utilisation une épave, dangereuse d'utilisation. Les dysfonctionnements importants relevés sont antérieurs à la vente, inconnus de l'acheteur et non décelables pour lui, et rendent l'engin impropre à l'utilisation normale attendue, d'autant que l'annonce indiquait 'grosse force hydraulique'.

En conséquence, M. [V] est fondé à obtenir la résolution de la vente sur le fondement de l'article 1644 du code civil, étant observé qu'en l'absence de tout contrat ou facture remis par le vendeur, aucune convention n'est susceptible de limiter cette garantie.

D'après l'article 1645 précité, le vendeur qui connaissait les vices de la chose est tenu, outre la restitution du prix, de tous les dommages et intérêts envers l'acheteur.

Or M. [N] ne pouvait ignorer les défauts de l'engin dont il disposait jusqu'à sa vente et qu'il avait jusqu'alors utilisé, ainsi que le confirment ses déclarations sur les défauts et qualités de l'appareil dans son courriel du 6 juillet 2019.

M. [V] est ainsi également fondé à obtenir l'indemnisation du transport de l'engin à hauteur de 500 euros et du préjudice résultant de l'immobilisation du véhicule, de la perte de jouissance occasionnée, de l'assurance du véhicule, de l'absence de résolution amiable, pour un montant de 500 euros également.

Le jugement est réformé de ces chefs.

Sur les autres demandes :

M. [N] succombe et supporte les dépens de première instance et d'appel, la décision combattue étant infirmée sur ce point.

L'équité commande de le condamner en outre à payer à M. [V] une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ces motifs,

Infirme le jugement du tribunal judiciaire de Troyes du 27 avril 2021,

Statuant à nouveau,

Prononce la résolution du contrat de vente du tractopelle Hymac 370 C par M. [N] à M. [V] en juillet 2019,

Ordonne le remboursement du prix de vente de 4 000 euros par M. [N] à M. [V], sous astreinte de 20 euros par jour de retard à compter de la signification du présent arrêt,

Ordonne la restitution du tractopelle par M. [V] à M. [N], après remboursement de la chose, et dit que la restitution se fera aux frais du vendeur,

Condamne M. [N] à payer à M. [V] les sommes de 500 euros au titre des frais de transport assumés et de 500 euros également au titre du préjudice d'immobilisation, de jouissance et d'assurance,

Condamne M. [N] à payer à M. [V] une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [N] aux dépens de première instance et d'appel.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Reims
Formation : 1ère chambre section inst
Numéro d'arrêt : 21/01687
Date de la décision : 17/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-17;21.01687 ?
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