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11/01/2023 | FRANCE | N°21/02228

France | France, Cour d'appel de Reims, Chambre sociale, 11 janvier 2023, 21/02228


Arrêt n°

du 11/01/2023





N° RG 21/02228





CRW/ML









Formule exécutoire le :







à :



COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE SOCIALE

Arrêt du 11 janvier 2023





APPELANT :

d'un jugement rendu le 19 novembre 2021 par le Conseil de Prud'hommes de REIMS, section Industrie (n° F 20/00494)



Monsieur [W] [T]

[Adresse 4]

[Localité 3]



Représenté par la SELARL MCMB, avocats au barreau de REIMS







INTIMÉS :



1) L'UNEDIC DELEGATION AGS CGEA D'AMIENS

[Adresse 1]

[Adresse 1]



2) Maître [K] [J]

en qualité de mandataire liquidateur de SARL DAL'SA 51

[Adresse 2]

[Localité 3]



Représentées par la SELARL RAFFIN ASSOCIES...

Arrêt n°

du 11/01/2023

N° RG 21/02228

CRW/ML

Formule exécutoire le :

à :

COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE SOCIALE

Arrêt du 11 janvier 2023

APPELANT :

d'un jugement rendu le 19 novembre 2021 par le Conseil de Prud'hommes de REIMS, section Industrie (n° F 20/00494)

Monsieur [W] [T]

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représenté par la SELARL MCMB, avocats au barreau de REIMS

INTIMÉS :

1) L'UNEDIC DELEGATION AGS CGEA D'AMIENS

[Adresse 1]

[Adresse 1]

2) Maître [K] [J]

en qualité de mandataire liquidateur de SARL DAL'SA 51

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentées par la SELARL RAFFIN ASSOCIES, avocats au barreau de REIMS

DÉBATS :

En audience publique, en application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 novembre 2022, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Christine ROBERT-WARNET, président de chambre, et Madame Marie-Laure BERTHELOT, conseiller, chargés du rapport, qui en ont rendu compte à la cour dans son délibéré ; elle a été mise en délibéré au 11 janvier 2023.

COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :

Madame Christine ROBERT-WARNET, président

Madame Marie-Lisette SAUTRON, conseiller

Madame Marie-Laure BERTHELOT, conseiller

GREFFIER lors des débats :

Madame Maureen LANGLET, greffier placé

ARRÊT :

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Madame Christine ROBERT-WARNET, président, et Madame Maureen LANGLET, greffier placé, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

[W] [T] a été embauché par la SARL DAL'SA 51 selon contrat à durée indéterminée à compter du 10 janvier 2018 en qualité d'étancheur.

La société a été placée en liquidation judiciaire selon jugement du tribunal de commerce de Reims le 30 juin 2020 et Maître [J] désignée en qualité de mandataire liquidateur.

[W] [T] a été licencié, sur le fondement d'un motif économique, le 30 juillet 2020.

Se prévalant d'une créance salariale au titre des années 2018 et 2019, des mois de juin et juillet 2020, [W] [T] a saisi, par requête enregistrée au greffe le 18 septembre 2020, le conseil de prud'hommes de Reims.

Aux termes de ses dernières prétentions, il sollicitait la fixation de sa créance, sous garantie de l'AGS- CGEA d'Amiens, sous exécution provisoire, pour les sommes suivantes :

- 4296,81 euros à titre de rappel de salaire pour l'année 2018

- 2940,48 euros à titre de rappel de salaire pour l'année 2019

- 1592,54 euros au titre du salaire de juin 2020

- 1592,54 euros au titre du salaire de juillet 2020

- 2000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Il prétendait en outre à la remise de ses bulletins de paie des mois de janvier à juillet 2020 inclus, sous astreinte de 15 euros par jour de retard et par document passé le 15e jour de la notification du jugement, pour le conseil se réserver compétence pour liquider l'astreinte.

Par jugement du 19 novembre 2021, le conseil de prud'hommes de Reims a donné acte à l'AGS-CGEA d'Amiens de son intervention, débouté [W] [T] de l'ensemble de ses demandes et renvoyé les parties à leurs dépens.

[W] [T] a interjeté appel de cette décision le 15 décembre 2021.

Vu les conclusions transmises au greffe par RPVA le 3 mars 2022, auxquelles il est expressément renvoyé pour plus ample informé des moyens de la partie appelante par lesquelles [W] [T], rappelant que ses demandes en paiement de rappel de salaire portent sur la période postérieure à celle durant laquelle il était gérant de la société (sur la période courant du 4 décembre 2017 au 9 mai 2019), alors qu'il est titulaire d'un contrat de travail dont l'AGS- CGEA d'Amiens ne rapporte pas la preuve du caractère fictif, sollicite l'infirmation du jugement pour renouveler l'intégralité des demandes qu'il avait initialement formées, pour les sommes alors sollicitées.

Vu les conclusions transmises au greffe par RPVA le 9 juin 2022, auxquelles il est expressément renvoyé pour plus ample informé des moyens développés par le mandataire liquidateur de la SARL DAL'SA 51 par lesquelles Maître [J], se prévalant du caractère fictif du contrat de travail invoqué par [W] [T], compte tenu de sa qualité d'associé fondateur de la société, dont il a détenu 50 % des parts sociales jusqu'au 6 mai 2019 et dont il a été le gérant de sa constitution jusqu'à cette date, prétend à l'incompétence de la juridiction prud'homale au profit du tribunal de commerce de Reims.

À titre subsidiaire, elle sollicite la confirmation du jugement qui a débouté [W] [T] en l'ensemble de ses demandes et demande qu'il soit débouté en sa demande en paiement d'une indemnité fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Vu les conclusions transmises au greffe par RPVA le 9 juin 2022, auxquelles il est expressément renvoyé pour plus ample informé des moyens par lesquelles l'AGS-CGEA d'Amiens, reprenant les conclusions du mandataire liquidateur, prétend à l'incompétence du conseil de prud'hommes au profit du tribunal de commerce de Reims, subsidiairement, à la confirmation du jugement, rappelant son champ d'application de garanties et ses limites.

Sur ce,

- Sur la qualité de salarié

Il résulte de l'application des dispositions de l'article L.1221-1 du code du travail qu'en présence d'un contrat de travail écrit, il appartient à celui qui en conteste la réalité de rapporter la preuve de son caractère fictif.

Toutefois, indépendamment de la volonté exprimée par les parties et de la dénomination qu'elles ont donnée à leur convention, il importe s'attacher aux conditions dans lesquelles s'exerce l'activité développée par le salarié.

En l'espèce, il est constant que [W] [T] est titulaire d'un contrat de travail à durée indéterminée à effet du 10 janvier 2018, en qualité d'étancheur.

Il est également constant que la SARL DAL'SA 51 a été constituée le 4 décembre 2017.

[W] [T] était l'un des 2 associés de cette entreprise, dont il détenait 50 % des parts sociales. Il en a été également le gérant, du 4 décembre 2017 au 6 mai 2019, date à laquelle il a démissionné de ses fonctions et cédé les parts qu'il détenait dans l'entreprise.

La qualité d'associé n'est pas exclusive de celle de salarié, tandis que celle de gérant apparaît plus délicate.

En effet, dans le cadre de la relation liant les parties, le salarié doit effectuer une prestation de travail en contrepartie d'une rémunération, dans un lien de subordination à l'égard de l'employeur.

Or, en l'espèce, le contrat de travail conclu entre les parties, alors que [W] [T] avait déjà la qualité de gérant de la SARL, mentionne que le contrat doit s'exercer (article 3) « sous le contrôle du gérant de la SARL DAL'SA 51 ».

Dans ces conditions, sauf situation ubuesque, [W] [T] ne saurait, en sa qualité de gérant, se donner des ordres, ou se sanctionner, en qualité de salarié.

Aussi, en l'absence de lien de subordination, pour la période courant jusqu'au 6 mai 2019, la juridiction prud'homale ne pouvait être compétente pour trancher le litige opposant les parties, pour cette compétence relever du tribunal de commerce.

Toutefois, la cour tient des dispositions de l'article 88 du code de procédure civile, la faculté d'évoquer le fond lorsqu'elle est juridiction d'appel relativement à la juridiction qu'elle estime compétente, ce qui est le cas en l'espèce, au regard de la compétence de la cour relativement au tribunal de commerce.

Dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, il y a donc lieu, pour la chambre sociale, de trancher le présent litige, en sa période antérieure au 6 mai 2019.

S'agissant de la période postérieure à cette date, les seules allégations du mandataire liquidateur sont insuffisantes à contester que [W] [T] a travaillé, pour le compte de la SARL DAL'SA 51, en sa qualité d'étancheur, en contrepartie d'une rémunération, sans qu'aucune contestation sérieuse quant à l'existence d'un lien de subordination ne soit développée.

Pour la période postérieure au 6 mai 2019, [W] [T] doit être conforté dans son statut de salarié.

Dans ces conditions, il incombe donc à la cour de trancher l'entier litige opposant les parties.

- Sur les demandes en paiement

Au titre des demandes antérieures au 6 mai 2019, en l'absence d'un quelconque lien de subordination, et donc à défaut de se voir reconnaître, sur la période, la qualité de salarié, [W] [T], auquel incombe alors la charge de la preuve, ne justifie pas du bien-fondé de ses prétentions.

Il en sera donc débouté.

Au vu des bulletins de salaire qu'il produit aux débats, alors que le mandataire liquidateur, pour le compte de l'employeur, ne justifie pas du bien-fondé des absences injustifiées dont il a retenu le paiement, pour la période postérieure au 6 mai 2019. La créance de [W] [T] sera, de ce chef, fixée à la somme de 2229,58 euros au passif de la liquidation judiciaire de la SARL DAL'SA 51.

Le salarié prétend au paiement de la somme de 1592,54 euros au titre du salaire du mois de juin et du mois de juillet 2020.

Or, le mandataire liquidateur justifie que le salarié a effectué, sur la période courant du 23 juin 2020 au 31 juillet 2020, un contrat de travail à durée déterminée au profit de la SARL AHEES-TP, de sorte qu'à défaut pour [W] [T] d'avoir effectué une quelconque prestation de travail pour le compte de la SARL DAL'SA 51, il ne saurait prétendre au bénéfice d'une quelconque contrepartie, sous forme de rémunération.

Il doit donc être débouté en sa demande en paiement formée de ce chef, pour cette période.

En revanche, pour la période antérieure au 23 juin 2020, le mandataire liquidateur ne rapporte pas la preuve de ce que le salarié a été rempli de ses droits.

Sur la base du taux horaire retenu, déterminant un montant de salaire brut mensuel supérieur à celui sollicité par le salarié, sa créance au titre du mois de juin sera retenue pour la somme de 1592,54 euros, à inscrire au passif de la liquidation judiciaire de la SARL DAL'SA 51.

Il y a lieu de préciser que toute condamnation est prononcée sous déduction des éventuelles cotisations sociales salariales applicables.

- Sur les autres demandes

Compte tenu des termes de la présente décision, il y a lieu d'ordonner la remise, par le mandataire liquidateur, à [W] [T] d'un bulletin de salaire reprenant l'ensemble de ces créances, sans qu'il y ait lieu d'assortir cette mesure d'une quelconque astreinte.

Il y a lieu de dire opposable à l'AGS-CGEA d'Amiens la présente décision, qui devra garantie des créances ainsi fixées dans les limites de son champ d'application de garanties, conformément aux textes législatifs et plafonds réglementaires applicables.

Eu égard aux circonstances de la cause, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande en paiement fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, formée par le salarié.

Par ces motifs,

La cour, statuant contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Infirme le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Reims le 19 novembre 2021 ;

Statuant à nouveau et, y ajoutant,

Reconnaît à [W] [T] la qualité de salarié pour la période courant du 6 mai 2019 au 30 juillet 2020 ;

Évoque la totalité du litige, par application des dispositions de l'article 88 du code de procédure civile ;

Fixe comme suit la créance de [W] [T] au passif de la liquidation judiciaire de la SARL DAL'SA 51 :

- 2229,58 euros à titre de rappel de salaire de l'année 2019,

- 1592,54 euros à titre de rappel de salaire du mois de juin 2020 ;

Précise que toutes les condamnations sont prononcées sous réserve de déduire les cotisations salariales ou sociales éventuellement applicables ;

Dit opposable à l'AGS-CGEA d'Amiens la présente décision, qui devra garanti des créances ainsi fixées, dans les limites de son champ d'application de garanties, conformément aux textes législatifs et plafonds réglementaires applicables ;

Ordonne à Maître [J], ès qualités, de remettre à [W] [T] un bulletin de salaire reprenant l'ensemble de ses créances ;

Déboute [W] [T] en ses autres demandes ;

Dit que les dépens seront inscrits en frais privilégiés au passif de la liquidation judiciaire de la SARL DAL'SA 51 ;

LE GREFFIER LE PR''SIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Reims
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21/02228
Date de la décision : 11/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-11;21.02228 ?
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