Arrêt n°
du 14/12/2022
N° RG 21/01927
MLS/FJ
Formule exécutoire le :
à :
COUR D'APPEL DE REIMS
CHAMBRE SOCIALE
Arrêt du 14 décembre 2022
APPELANTE :
d'un jugement rendu le 31 décembre 2012 par le Tribunal paritaire des baux ruraux de REIMS (n° 51-09-000017)
SAS BMT VIGNOBLES
[Adresse 11]
[Adresse 11]
[Localité 5]
représentée par la SELARL RAFFIN ASSOCIES, avocats au barreau de REIMS
INTIMÉS :
Monsieur [J] [Y]
[Adresse 2]
[Localité 9]
non comparant
Monsieur [N] [Y]
[Adresse 3]
[Localité 6]
non comparant
Monsieur [I] [X]
[Adresse 7]
[Adresse 7]
[Localité 4]
non comparant
Madame [Z] [Y] épouse [X]
[Adresse 7]
[Adresse 7]
[Localité 4]
non comparante
Monsieur [T] [Y]
[Adresse 2]
[Localité 9]
non comparant
Monsieur [O] [X]
[Adresse 1]
[Localité 10]
non comparant
Madame [H] [Y]
[Adresse 2]
[Localité 9]
non comparante
Madame [M] [E] veuve [Y], décédée
DÉBATS :
A l'audience publique du 24 octobre 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 14 décembre 2022, Madame Marie-Lisette SAUTRON, conseiller, et Madame Isabelle FALEUR, conseiller, chargés d'instruire l'affaire, ont entendu les plaidoiries en application de l'article 945-1 du code de procédure civile, les parties ne s'y étant pas opposées, et en ont rendu compte à la cour dans son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :
Madame Christine ROBERT-WARNET, président
Madame Marie-Lisette SAUTRON, conseiller
Madame Isabelle FALEUR, conseiller
GREFFIER lors des débats :
Monsieur Francis JOLLY, greffier
ARRÊT :
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Madame Christine ROBERT-WARNET, président, et Monsieur Francis JOLLY, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
* * * * *
Exposé des faits :
Par actes notariés des 22 février et 1er mai 1977, le groupement foncier agricole des HURIAUTS a donné à bail à long terme à la société civile BARANCOURT pour une durée de 30 années entières et consécutives ayant commencé à courir le 1er janvier 1977, diverses parcelles de vigne situées sur le terroir de [Localité 9] et de [Localité 8] d'une contenance totale d'environ 3 ha 81 a 59 ca.
Par la suite, les parties ont convenu par actes des 18 et 19 décembre 1978, d'ajouter au bail des 22 février et 1er mars 1977 plusieurs parcelles situées sur le terroir de [Localité 10] et [Localité 12] pour une contenance totale de 3 ha 7 a 67 ca.
Par acte du 14 septembre 1981, le GFA des HURIAUTS a donné à bail à long terme à la société civile BARANCOURT à compter du 1er novembre 1980, des parcelles de terre à vignes situées sur le terroir de [Localité 10] d'une contenance de 19 a 30 centiares, ainsi qu'un chemin desservant des parcelles d'une contenance de 2 a 3 centiares.
La société civile BARANCOURT est devenue la société BMT VIGNOBLES par décision du 2 avril 1993.
À la suite de la dissolution du GFA des HURIAUTS, Monsieur [F] [Y], Madame [M] [E], Monsieur [J] [Y], Monsieur [N] [Y], Monsieur [I] [X], et Madame [Z] [Y] ont conclu entre eux une convention d'indivision portant sur les parcelles louées.
Par exploit du 29 juin 2005, les membres de l'indivision [Y]-[X] ont donné congé à la société BMT VIGNOBLES en vue de leur reprise au profit de [T] [Y] et de [O] [X].
Par arrêt infirmatif du 10 octobre 2007, la cour d'appel de Reims a notamment :
- validé les congés délivrés le 29 juin 2005 pour le 1er janvier 2007 et portant sur une surface totale de 7 ha 4 a 72 centiares,
- dit que dans le mois de la signification de l'arrêt, la société BMT VIGNOBLES serait tenue de délaisser les terres louées, et qu'à défaut elle pourrait être expulsée.
Par ordonnance du 12 juin 2008, le président du tribunal paritaire des baux ruraux, statuant en référé a ordonné une mesure d'expertise à effet notamment de donner un avis sur l'existence d'un préjudice subi par les consorts [Y]-[X] et de proposer une évaluation, de déterminer si des dégradations ont été commises par le preneur, et dans l'affirmative, de chiffrer le coût de remise en état, mais également de décrire les améliorations apportées par le preneur.
L'expert a déposé son rapport au greffe le 30 juin 2009.
Par ordonnance du 10 décembre 2009, le président du tribunal paritaire des baux ruraux de Reims, statuant en référé, a notamment :
- condamné la société BMT VIGNOBLES à payer à Monsieur [T] [Y] et à Monsieur [O] [X] la somme provisionnelle de 100'000,00 euros au titre du préjudice résultant de la perte de jouissance, augmentée des intérêts au taux légal à compter de la décision,
- rejeté la demande présentée par l'indivision [Y]-[X] au titre de l'indemnisation pour perte de jouissance,
- rejeté la demande présentée par l'indivision [Y]-[X] au titre du défaut de replantation et d'entretien.
Par acte du 7 juillet 2009, les membres de l'indivision [Y]-[X], Monsieur [T] [Y], et Monsieur [O] [X] ont fait assigner la société BMT VIGNOBLES devant le tribunal paritaire des baux ruraux de Reims en vue de la faire condamner à lui payer les sommes suivantes :
. 218'711,00 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 1er janvier 2008,
. 229'150,00 euros au titre de la remise en état du sol, des arrachages et des plantations, augmentés des intérêts au taux légal à compter du 1er janvier 2007,
. 8 000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
En réplique, la société BMT VIGNOBLES a demandé au tribunal d'enjoindre les demandeurs à produire sous astreinte le relevé parcellaire établi par la mutualité sociale agricole de l'exploitation de Monsieur [T] [Y] et de Monsieur [O] [X] pour les années 2008 et 2009, la fiche d'encépagement établie au nom de ladite exploitation pour les années 2008 et 2009 ainsi que les bilans de l'exploitation pour les années 2008 et 2009, outre condamnation à lui payer 1 500,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement du 16 septembre 2010, le tribunal a rejeté la demande de production de pièces renvoyé la cause, et réservé les demandes.
Par acte notarié du 1er avril 2011, Monsieur [F] [Y] et son épouse Madame [M] [E], ont consenti à chacun de leurs petits-enfants, Messieurs [T] [Y] et [O] [X] ainsi que Madame [H] [Y] une donation-partage portant sur la nue-propriété d'une quote part des parcelles indivises.
Monsieur [F] [Y] est décédé le 22 novembre 2011 laissant pour lui succéder son épouse [M] [E] et leurs trois enfants, [J], [N] et [Z] [Y].
Par jugement avant-dire droit du 25 novembre 2011, le tribunal paritaire des baux ruraux :
- a invité les demandeurs à préciser leurs demandes en indiquant pour chacune d'elles en quel nom et quelle qualité elles étaient formées,
- a invité Monsieur [T] [Y] et Monsieur [O] [X] à justifier de leur qualité et de leur intérêt à agir en tant que nu-propriétaires indivis des parcelles de vignes litigieuses et les autres parties à formuler leurs observations sur ce point.
Par conclusions du 18 octobre 2012, Madame [H] [Y] est intervenue volontairement à l'instance en qualité de nue-propriétaire d'une quote-part de l'indivision.
En l'état de leurs dernières écritures Madame [M] [E] veuve [Y], Monsieur [J] [Y], Monsieur [N] [Y], Monsieur [I] [X], Madame [Z] [Y], Monsieur [T] [Y], Monsieur [O] [X], et Madame [H] [Y] ont demandé au tribunal :
- d'écarter des débats les pièces adverses numérotées 35 à 39 communiquées la veille,
- de déclarer irrecevables et subsidiairement mal fondé les prétentions adverses,
- de condamner avec exécution provisoire la SA BMT VIGNOBLES à leur payer, en leur qualité d'indivisaires, les sommes suivantes :
. 218'711,00 euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice de jouissance, outre intérêts au taux légal à compter du 1er janvier 2008,
. 229'150,00 euros de dommages et intérêts au titre de la remise en état du sol et des arrachages et replantation dus contractuellement et légalement par l'ancien preneur, avec intérêts au taux légal à compter du 1er janvier 2007,
- de condamner la SA BMT VIGNOBLES à leur payer la somme de 15'000,00 euros en remboursement de leurs frais irrépétibles.
A titre subsidiaire, ils ont sollicité, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, le paiement à Monsieur [T] [Y] et à Monsieur [O] [X], en qualité de bénéficiaires de la reprise, la somme de 218'711,00 euros de dommages et intérêts en réparation de la perte de jouissance, avec intérêts au taux légal à compter du 1er janvier 2008.
En réplique, la SA BMT VIGNOBLES a demandé au tribunal :
- de se déclarer incompétent au profit du tribunal de Grande instance de Reims pour connaître de la demande de Monsieur [T] [Y] et de Monsieur [O] [X] en qualité de bénéficiaires de la reprise et en indemnisation d'une perte de jouissance,
- de déclarer irrecevables les demandes des indivisaires,
- de les en débouter en tout état de cause.
A titre reconventionnel, elle a demandé condamnation de Madame [M] [E], de Monsieur [J] [Y], de Monsieur [N] [Y], de Monsieur [I] [X], de Madame [Z] [Y], en qualité d'indivisaires, à lui payer les sommes suivantes :
- 999'392,55 euros de dommages et intérêts au titre de la perte de revenus subis par elle pendant les années de renouvellement du bail dont elle a été privée,
- 90'958,92 euros d'indemnité au titre des améliorations apportées au fond soit :
. 77'581,99 euros au titre des plantations,
. 8 457,96 euros au titre des fumures et arrière fumures,
. 4 918,97 euros au titre des fils de pied,
- 3 000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement du 16 décembre 2010, le tribunal a rejeté la demande de production de pièces par la société BMT VIGNOBLES, a renvoyé la cause et a réservé les demandes de l'indivision [Y]-[X], de Monsieur [T] [X] et de [O] [X] à l'encontre de la société BMT VIGNOBLES.
Par jugement du 31 décembre 2012, le tribunal paritaire des baux ruraux :
- a écarté des débats les pièces présentées par la SA BMT VIGNOBLES sous les numéros 35 à 39,
- a déclaré la SA BMT VIGNOBLES recevable en son exception d'incompétence,
- a rejeté l'exception d'incompétence,
- a déclaré Monsieur [T] [Y], Monsieur [O] [X] et Madame [H] [Y] irrecevables en leurs demandes en indemnisation d'une perte de jouissance formée en qualité de nu-propriétaires,
- a déclaré Madame [M] [E], Monsieur [J] [Y], Monsieur [N] [Y], Monsieur [I] [X], Madame [Z] [Y], Monsieur [T] [Y], et Monsieur [O] [X] recevables pour le surplus de leurs demandes,
- a déclaré la SA BMT VIGNOBLES recevable en ses demandes reconventionnelles,
- a condamné la SA BMT VIGNOBLES à payer avec intérêts au taux légal à compter du jugement :
. à Monsieur [T] [Y] et à Monsieur [O] [X] la somme de 153'097,70 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice de jouissance,
. à Madame [M] [E], Monsieur [J] [Y], Monsieur [N] [Y], Monsieur [I] [X], Madame [Z] [Y], Monsieur [T] [Y], et Monsieur [O] [X] la somme de 3 197,00 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de la dégradation causée au sol de l'une des parcelles,
- a condamné Madame [M] [E], Monsieur [J] [Y], Monsieur [N] [Y], Monsieur [I] [X], Madame [Z] [Y] in solidum à payer à la SA BMT VIGNOBLES la somme de 63'181,00 euros à titre d'indemnité aux preneurs sortants, avec intérêts au taux légal à compter du jugement,
- a fait masse des dépens,
- a dit qu'ils seront supportés par moitié par les demandeurs, et par moitié par la défenderesse,
- a dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- a rejeté le surplus des demandes.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 5 février 2013, Madame [M] [E], Monsieur [J] [Y], Monsieur [N] [Y], Monsieur [I] [X], Madame [Z] [Y], Monsieur [T] [Y], Monsieur [O] [X], Madame [H] [Y] ont interjeté appel du jugement du 31 décembre 2012 les opposant à la SAS BMT VIGNOBLES. L'affaire a été enrôlée, puis retirée du rôle et réenrôlée à plusieurs reprises, et dernièrement sous le numéro 20-1065, également retirée du rôle.
Le 1er février 2013, la société BMT VIGNOBLES a interjeté appel des jugements du 16 septembre 2010 et du 31 décembre 2012. L'affaire a été enrôlée puis retirée du rôle et réenrôlée à plusieurs reprises, et dernièrement sous le numéro 20-1067, également retirée du rôle.
Le 1er juillet 2013, la société BMT VIGNOBLES a interjeté appel du jugement du 31 décembre 2012. L'affaire a été enrôlée, puis retirée du rôle et réenrôlée à plusieurs reprises, et dernièrement sous le numéro 20-1066, également retirée du rôle.
Le 22 mai 2021, un protocole d'accord a été signé entre la SAS BMT VIGNOBLES, Madame [S] [U] épouse [D], Monsieur [J] [Y], Madame [R] [Y], Monsieur [T] [Y], Madame [H] [Y], Madame [C] [D], Monsieur [A] [D] et la SA CHAMPAGNE ROEDERER.
Le 25 mai 2022, la SAS BMT VIGNOBLES a demandé l'homologation du protocole d'accord du 22 mai 2021.
L'affaire 20-1065 a été réenrôlée sous le numéro 21-2021.
L'affaire 20-1066 a été réenrôlée sous le n° 21-1927.
L'affaire 20-1067 a été réenrôlée sous le n° 21-2022.
Par actes du 12 et 14 octobre 2022, la SAS BMT VIGNOBLES a fait assigner Monsieur [J] [Y], Monsieur [N] [Y], Monsieur [I] [X], Madame [Z] [Y], Monsieur [T] [Y], Monsieur [O] [X] et Madame [H] [Y] aux fins d'homologation de l'accord.
Madame [M] [E], Monsieur [J] [Y], Monsieur [N] [Y], Monsieur [I] [X], Madame [Z] [Y], Monsieur [T] [Y], Monsieur [O] [X] et Madame [H] [Y] n'ont pas comparu. Par lettre du 21 octobre 2022, leur avocat a fait savoir qu'il ne se déplacerait pas et que ses clients ne souhaitaient pas mandater un confrère pour les représenter.
Motifs de la décision :
Au préalable, il convient de joindre sous le numéro unique 21-1927, les dossiers enrôlés distinctement sous les numéros 21-1927, 21-2021 et 21-2022.
L'accord des parties ne peut être homologué en l'état dès lors que toutes les parties signataires ne sont pas parties au présent litige.
Or, selon le médiateur, le litige opposant la société BMT VIGNOBLES aux consorts [Y] est imbriqué à celui opposant la société BMT VIGNOBLES aux consorts [D] de sorte qu'une homologation partielle n'est pas envisageable sans connaître la position de chacune des parties signataires notamment sur les concessions qui ont été consenties de part et d'autres et sur leur interdépendance.
Aussi, il apparaît nécessaire de faire application combinée des dispositions des articles 555 et 332 du Code de procédure civile, qui autorise le juge à inviter les parties à appeler des tiers en la cause quand l'évolution du litige le commande.
L'affaire sera donc renvoyée à l'audience du mercredi 8 mars 2023 à 9 heures.
A cette occasion, les consorts [Y]-[X] devront donc justifier du décès de Madame [M] [E], évoqué dans le protocole et désigner ceux d'entre eux qui sont habilités à reprendre l'instance en ses lieu et place.
Enfin, toutes les parties, également celles qui n'ont pas été partie au protocole, devront préciser le sort qu'elles entendent réserver au présent litige, en se désistant le cas échéant, comme indiqué dans le protocole d'accord.
A défaut, l'affaire pourrait être radiée.
Les frais irrépétibles et les dépens seront réservés en fin de cause.
Par ces motifs :
La cour statuant publiquement, par décision contradictoire et après en avoir délibéré conformément à la loi,
Ordonne la jonction sous le numéro unqiue 21-1927, des dossiers enrôlés distinctement sous les numéros 21-1927, 21-2021 et 21-2022,
Ordonne la réouverture des débats,
Renvoie l'affaire à l'audience du mercredi 8 mars 2023 à 9 heures ;
Invite la SAS BMT VIGNOBLES à appeler en la cause Madame [S] [U] épouse [D], Madame [C] [D], Monsieur [A] [D] et la SA CHAMPAGNE LOUIS ROEDERER ;
Invite Monsieur [J] [Y], Monsieur [N] [Y], Monsieur [I] [X], Madame [Z] [Y], Monsieur [T] [Y], Monsieur [O] [X] et Madame [H] [Y] à justifier du décès de Madame [M] [E], et à désigner ceux d'entre eux qui sont habilités à poursuivre l'instance en ses lieu et place ;
Invite chaque partie à conclure sur le sort qu'elles entendent réserver à la procédure contentieuse ;
Dit qu'à défaut de satisfaction aux demandes de la cour, l'affaire pourrait être radiée ;
Réserve en fin de cause les frais irrépétibles et les dépens.
LE GREFFIER LE PRESIDENT