ARRET N°
du 06 décembre 2022
N° RG 21/01710 - N° Portalis DBVQ-V-B7F-FBWM
[R]
c/
[N]
[N]
[N]
[N]
Formule exécutoire le :
à :
la SELARL RAFFIN ASSOCIES
la SCP DUPUIS LACOURT MIGNE
COUR D'APPEL DE REIMS
CHAMBRE CIVILE-1° SECTION
ARRET DU 06 DECEMBRE 2022
APPELANT :
d'un jugement rendu le 09 juillet 2021 par le TJ de CHARLEVILLE MEZIERES
Monsieur [B] [R]
[Adresse 12]
[Localité 14]
Représenté par Me Louis-Stanislas RAFFIN de la SELARL RAFFIN ASSOCIES, avocat au barreau de REIMS
INTIMES :
Monsieur [L] [N]
[Adresse 11]
[Localité 16]
Représenté par Me Pierre Yves MIGNE de la SCP DUPUIS LACOURT MIGNE, avocat au barreau des ARDENNES
Madame [Z] [N]
[Adresse 1]
[Localité 15]
Représentée par Me Pierre Yves MIGNE de la SCP DUPUIS LACOURT MIGNE, avocat au barreau des ARDENNES
Madame [H] [N]
[Adresse 13]
[Localité 7]
Représentée par Me Pierre Yves MIGNE de la SCP DUPUIS LACOURT MIGNE, avocat au barreau des ARDENNES
Madame [D] [N]
[Adresse 6]
[Localité 10]
Représentée par Me Pierre Yves MIGNE de la SCP DUPUIS LACOURT MIGNE, avocat au barreau des ARDENNES
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :
Madame Elisabeth MEHL-JUNGBLUTH, présidente de chambre
Madame Véronique MAUSSIRE, conseillère
Madame Florence MATHIEU, conseillère
GREFFIER :
Monsieur Nicolas MUFFAT-GENDET, greffier lors des débats et Madame Yelena MOHAMED-DALLAS, greffier lors du prononcé
DEBATS :
A l'audience publique du 24 octobre 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 06 décembre 2022,
ARRET :
Contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe le 06 décembre 2022 et signé par Madame Elisabeth MEHL-JUNGBLUTH, présidente de chambre, et Madame Yelena MOHAMED-DALLAS, greffière, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
* * * * *
EXPOSE DU LITIGE
Monsieur [L] [N] a l'usufruit d'une maison d'habitation située [Adresse 9] à [Localité 17]. Ses filles, Mmes [Z], [H] et [D] [N], en ont la nue-propriété.
M. [B] [R] est propriétaire de la maison contiguë, située [Adresse 8] à [Localité 17].
Par acte d'huissier en date du 5 septembre 2018, Monsieur [L] [N] ainsi que ses filles, Mesdames [Z], [H] et [D] [N], ci-après désignées les consorts [N] ont fait assigner Monsieur [B] [R] devant le tribunal de grande instance de Charleville-Mézières aux fins de voir, avec le bénéfice de l'exécution provisoire':
-juger qu'ils sont devenus copropriétaires indivis sur le sas d'entrée et l'escalier commun à la date du 1er janvier 2014,
-à titre subsidiaire, juger que leur fonds bénéficie d'une servitude de passage par destination du père de famille sur le fonds sis [Adresse 8] à [Localité 17] et portant sur le sas d'entrée desservant les fonds sis [Adresse 8] à [Localité 17], ainsi que l'escalier reliant ledit sas et la porte palière donnant accès au rez-de-jardin du fonds situé au n°6,
- en tout état de cause:
-enjoindre à Monsieur [R] de remettre la situation en l'état antérieur, permettant notamment leur accès aux parties communes constituées du sas d'entrée et de l'escalier commun,
-enjoindre à Monsieur [R] de leur remettre les clés leur permettant d'accéder au sas d'entrée commun des fonds sis [Adresse 8] à [Localité 17] et ce dans un délai de trente jours suivant signification de la décision à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard,
-condamner Monsieur [R] à leur verser':
-une indemnité d'occupation d'un montant mensuel de 150 euros, commençant à courir le 20 octobre 2017 pour prendre terme au jour de restitution de la jouissance indivise des communs, constatée par acte d'huissier,
-la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts,
-la somme de 8.400 euros à titre d'indemnité pour frais irrépétibles.
Par jugement rendu le 9 juillet 2021, le tribunal judiciaire de Charleville-Mézières a, avec le bénéfice de l'exécution provisoire':
-dit que le fonds sis [Adresse 9] à [Localité 17] bénéficie d'une servitude de passage par destination du père de famille sur le fonds sis [Adresse 8] à [Localité 17] portant sur:
' le sas d'entrée desservant les fonds sis [Adresse 8] à [Localité 17], cadastré section AH[Cadastre 2] et [Cadastre 5] d'une part et section AH [Cadastre 3] et [Cadastre 4] d'autre part,
' l'escalier reliant ledit sas et la porte palière donnant accès au rez-de-jardin du fonds situé au numéro 6 susvisé;
-condamné Monsieur [B] [R] à permettre Monsieur [L] [N] et Mesdames [Z], [H] et [D] [N] d'exercer leurs droits sur lesdits sas d'entrée et escalier;
-condamné Monsieur [B] [R] à remettre à Monsieur [L] [N] et Mesdames [Z], [H] et [D] [N] la clé permettant d'ouvrir la serrure nouvellement installée sur la porte d'accès au sas d'entrée depuis la rue,
-condamné Monsieur [B] [R] à payer à Monsieur [L] [N] et Mesdames [Z], [H] et [D] [N] la somme mensuelle de 100 euros à titre d'indemnité d'occupation, à compter du 20 octobre 2017 et jusqu'à la remise de la clé,
-débouté Monsieur [L] [N] et Mesdames [Z], [H] et [D] [N] de leur demande en paiement de dommages intérêts,
-débouté Monsieur [B] [R] de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,
-condamné Monsieur [B] [R] à payer à Monsieur [L] [N] et Mesdames [Z], [H] et [D] [N] la somme globale de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Par un acte en date du 1er septembre 2021, Monsieur [B] [R] a interjeté appel de ce jugement.
Par ordonnance du 30 novembre 2021, le conseiller de la mise en état a ordonné une mesure de médiation à laquelle il a été mis fin par décision du 24 mai 2022.
Aux termes de ses dernières écritures notifiées électroniquement le 10 août 2022, Monsieur [B] [R] conclut à l'infirmation partielle du jugement déféré, sauf en ce que les consorts [N] ont été déboutés de leurs demandes en obtention de droits indivis et de dommages et intérêts.
Il demande à la cour de condamner les consorts [N] à lui payer la somme de 8.000 euros à titre d'indemnité pour frais irrépétibles.
Il expose que l'immeuble sis au [Adresse 9] présentait à l'origine une porte d'entrée sur sa façade donnant sur la rue et que celle-ci a été supprimée lorsque les immeubles en cause ont été réunis entre les mains de leur aïeule, l'entrée s'effectuant alors par celle de la maison n°6 grâce à une porte percée dans le mur séparatif de refend.
Il assure que, de même, l'escalier intérieur de la maison du n°4 reliant le rez-de-chaussée au rez-dejardin a été supprimé ultérieurement, le passage entre le rez-de-chaussée et le rez-de-jardin de la maison du n° 4 s'effectuant, en empruntant, là aussi, la porte aménagée dans le mur de refend séparant la maison n° 4 de la maison du n° 6, par l'intermédiaire de l'escalier intérieur de la maison du n°6.
Il soutient que, par application des articles 2258 et 2261 du code civil, il est impossible de prescrire la propriété d'un bien pour se retrouver ensuite en indivision avec le propriétaire évincé.
Il estime en outre que la possession des consorts [N] est entachée du vice d'équivoque dès lors qu'il n'a lui-même jamais été dépossédé de l'entrée et de l'escalier litigieux.
II affirme que c'est par commodité qu'il a permis aux consorts [N] d'utiliser l'entrée de sa maison et l'escalier menant au rez-de-jardin afin de leur offrir un second accès à leur maison côté rue et qu'il a fait part à ceux-ci, par courrier du 20 octobre 2017, de son souhait de revenir sur cette permission, leur laissant un délai pour remettre les lieux en leur état antérieur. Il s'oppose donc à l'usucapion invoquée par les consorts [N] et insiste sur le fait que ce n'est que par simple tolérance que les intimés ont pu user de l'entrée et de l'escalier.
Quant à l'existence d'une servitude de passage par destination du père de famille invoquée subsidiairement par les intimés, Monsieur [R] prétend qu'une servitude discontinue par destination du père de famille n'est valable que si son existence n'est pas niée dans un acte de division postérieur et fait valoir que l'acte de donation-partage de 1983 stipule que les immeubles donnés ne sont, à la connaissance des donateurs, grevés d'aucune autre servitude que celles pouvant résulter de la situation naturelle des lieux, de loi ou de l'urbanisme, ce qui signifie qu'aucune autre servitude, comme une servitude de passage par destination du père de famille, n'a jamais été crée de leur fait, à l'exclusion de celles résultant de l'acte de donation-partage du 31 décembre 1983.
Il précise qu'en tout état de cause, à supposer la servitude de passage par destination du père de famille avérée, l'acte de donation partage du 31 décembre 1983 attribue au fonds des consorts [N] une servitude de passage sur le fonds de Madame [V] [W]-[R] côté jardin et considère que cette servitude de passage nie l'existence d'une servitude de passage intra-muros dans l'entrée de sa maison.
Il ajoute que les consorts [N] ne produisent pas l'acte ayant opéré la séparation des deux héritages et insiste sur le fait qu'il existait sur la façade de la maison des intimés une porte ouvrant sur la rue.
Aux termes de leurs dernières écritures notifiées électroniquement le 17 octobre 2022, les consorts [N] concluent à l'infirmation partielle du jugement déféré en ce qu'ils ont été déboutés de leur demande en paiement de dommages et intérêts ainsi que de leur demande tendant à se voir reconnaître copropriétaires indivis sur le sas d'entrée et l'escalier commun à compter du 1er janvier 2014 et demandent à la cour de confirmer le jugement pour le surplus et de':
-juger qu'ils sont devenus copropriétaires indivis avec Monsieur [R] sur':
' le sas d'entrée desservant les fonds sis [Adresse 8] à [Localité 17], cadastré section AH[Cadastre 2] et [Cadastre 5] d'une part et section AH [Cadastre 3] et [Cadastre 4] d'autre part,
' l'escalier reliant ledit sas et la porte palière donnant accès au rez-de-jardin du fonds situé au numéro 6 susvisé
-condamner Monsieur [R] à leur payer les sommes de 8.000 euros à titre de dommages et intérêts et de 7.200 euros à titre d'indemnité pour frais irrépétibles.
Ils exposent que les deux immeubles ont été édifiés, au début du 20ème siècle, par un aïeul de M. [B] [R] et de sa soeur Mmc [J] [R] [N], épouse de M. [L] [N] et mère de Mmes [Z], [H] et [D] [N], laquelle est aujourd'hui décédée, et dont ceux-ci tiennent leurs droits sur le bien litigieux.
Ils ajoutent que Monsieur [R] et Madame [J] [R] [N] tenaient eux-mêmes leurs droits sur les immeubles en cause d'un acte de donation partage consenti par leurs parents le 31 décembre 1983.
Ils précisent que l'immeuble situé au [Adresse 9] a été construit en premier lieu, puis que l'immeuble situé au n°6, à usage commercial, a été construit à côté, de sorte que le sas d'entrée de l'immeuble situé au n°4 s'est trouvé «encastré» dans le nouvel immeuble situé au n°6 et que cette entrée commune permet également d'accéder à l'escalier d'accès au jardin qui se trouve à présent « encastré» sous le local commercial.
Ils ajoutent qu'à la suite d'un différend familial, M. [R] a émis le souhait de mettre un terme à la copropriété du sas d'entrée et de l'escalier et demandé à Mmc [J] [R]-[N] de faire réaliser des travaux en conséquence et qu'en 2017, il les a informés de ce qu'il entendait leur interdire l'accès aux parties litigieuses et que, pour ce faire, il a fait changer la serrure de la porte du sas d'entrée et obstruer l'accès au sous-sol par l'escalier.
Les consorts [N] expliquent qu'ils sont titulaires d'un droit de propriété sur la quote-part indivise portant sur le sas d'entrée et l'escalier commun par usucapion et invoquent en ce sens les articles 2258, 2261 et 2272 du code civil. Ils soutiennent que s'il est constant que la conception traditionnelle de la possession impose la preuve de la volonté du possesseur de se comporter en propriétaire exclusif du bien, la jurisprudence considère unanimement que l'usucapion est possible s'agissant de la quote-part flottante portant sur un bien indivis.
Ils contestent que M. [R] leur ait jamais consenti une quelconque tolérance, affirment que le sas d'entrée et l'escalier ont toujours été considérés comme des propriétés communes, que l'unique accès normal à leur bien a toujours été le sas litigieux et que Mmc [J] [N] n'aurait jamais accepté ledit bien si cet accès n'avait pu se faire que par le jardin arrière ou une fenêtre.
Ils affirment que la transformation d'une des fenêtres de la façade de leur immeuble en porte d'accès, comme M; [R] le demande, serait coûteuse et techniquement complexe et qu'il n'est pas possible de créer un escalier intérieur pour accéder au jardin.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 18 octobre 2022.
MOTIFS DE LA DECISION
*Sur l'usucapion
Aux termes de l'article 2258 du code civil, la prescription acquisitive est un moyen d'acquérir un bien ou un droit par l'effet de la possession sans que celui qui l'allègue soit obligé d'en rapporter un titre ou qu'on puisse lui opposer l'exception déduite de la mauvaise foi.
L'article 2261 du même code dispose que pour pouvoir prescrire, il faut une possession continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque et à titre de propriétaire et l'article 2272 énonce que le délai de prescription requis pour acquérir la propriété immobilière est de trente ans.
Les consorts [N] prétendent avoir acquis par la prescription des droits de propriété indivis sur le sas d'entrée.
Il résulte des articles susvisés que le droit de copropriété peut s'acquérir par prescription et qu'un droit de jouissance privatif sur des parties communes est un droit réel et perpétuel qui peut s'acquérir par usucapion.
Les juges du fond ont un pouvoir souverain pour caractériser les faits de possession invoqués en vue de prescription.
En l'espèce, la cour comme le tribunal, relève que les consorts [N] affirment, sans être contredits par M. [R], qu'ils ont disposé des clés de la porte d'entrée (jusqu'au changement de serrure en 2017 par Monsieur [R]) et que Mme [J] [N] et son mari en ont assuré l'entretien, ainsi que l'alimentation en électricité, comme celle de l'escalier prenant naissance dans le sas d'entrée, dont il est établi qu'ils assument la charge puisque l'installation est reliée à leur compteur électrique.
Cependant, les actes matériels précités ne traduisent pas spécifiquement l'exercice d'un droit de propriété, fût-il indivis, sur le sas d'entrée et l'escalier et peuvent tout aussi bien correspondre à l'exercice d'un autre droit, tel une servitude de passage, étant précisé que lorsque les époux [N], dans les années 70, ont fait installer l'éclairage dans l'escalier situé dans le sas d'entrée et menant dans le jardin, les deux maisons appartenaient toujours à la même personne (Madame [A] [R]-[T]) et les époux [N] étaient uniquement des occupants à titre précaire.
En effet, le fait que dans les courriers qu'elle a adressés à son frère les 12 janvier 1988 et 7 janvier 1989, Mme [J] [N] évoque «l'entrée commune» à leurs deux maisons, ne suffit pas à caractériser une possession à titre de copropriétaire. De plus, il est constant que les taxes et l'électricité de la maison située au n°6 dans lequel se situe le sas d'entrée sont acquittées par Monsieur [R].
Dans ces conditions, la cour estime qu'il n'est pas justifié par les consorts [N] d'une possession continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque, et à titre de propriétaire.
Par conséquent, il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté les consorts [N] de leur demande fondée sur l'usucapion.
*Sur la servitude par destination du père de famille
Aux termes de l'article 693 du code civil, il n'y a destination du père de famille que lorsqu'il est prouvé que les deux fonds actuellement divisés ont appartenu au même propriétaire, et que c'est par lui que les choses ont été mises dans l'état duquel résulte la servitude.
Aux termes de l'article 694 du même code, si le propriétaire de deux héritages entre lesquels existe un signe apparent de servitude, dispose de l'un des héritages sans que le contrat contienne aucune convention relative à la servitude, elle continue d'exister activement ou passivement en faveur du fonds aliéné ou sur le fonds aliéné.
Les conditions d'application de l'article 693 implique que la constitution de la servitude par destination du père de famille suppose un aménagement du fait du propriétaire d'origine ainsi que la volonté de créer un véritable service foncier à l'exclusion d'une simple commodité personnelle.
Il appartient à celui qui invoque l'existence d'une servitude discontinue constituée par destination du père de famille de produire l'acte par lequel s'est opérée la séparation des deux héritages et d'établir qu'il ne contient aucune disposition contraire à l'existence de cette servitude.
En l'espèce, contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, et ce que soutiennent les consorts [N], Monsieur [I] [T] n'est pas à l'origine de la construction des maisons ni le propriétaire d'origine. En effet, il résulte de l'extrait du contrat de mariage entre Monsieur [I] [T] et Madame [X] [O] que les époux [T]-[O] ont d'abord occupé les lieux à titre de simples locataires et que le magasin d'épicerie et de mercerie (actuelle maison située au n°6) existait déjà.
Par ailleurs, il y a lieu de relever que l'acte visé par l'article 694 du code civil est celui qui opère la division des fonds et que dès lors ne peuvent être retenues les énonciations de l'acte opérant le transfert du fonds déjà divisé. Or, au cas présent, l'acte de donation-partage dressé le 31 décembre 1983 ne peut être considéré comme l'acte visé par l'article 694 puisqu'il n'est pas l'acte procédant à la première séparation des deux fonds, Monsieur [R] prouvant que les fonds ont été divisés au moins une autre fois lors du décès de Madame [X] [O] survenu le 21 novembre 1928.
Force est donc de constater que les consorts [N] ne peuvent pas démontrer que l'acte par lequel s'est opérée la séparation des deux héritages ne contient aucune disposition contraire à l'existence de la servitude invoquée.
Au surplus, à hauteur de cour, il convient de souligner que Monsieur [R] produit l'avis technique de Monsieur [S] [M], architecte et expert près la cour d'appel de Paris qui clichés et esquisses à l'appui s'agissant de la façade de la maison sise au n°4 écrit':'
«'L'examen de cette baie permet de faire les constats suivants':
(...)L'appui de fenêtre s'interrompt au droit du tableau, alors qu'il devrait déborder et supporter celui-ci.
La comparaison entre les 2 fenêtres est éloquente.
Conclusion': Suite à l'examen des lieux, il semble incontestable qu'il existait une porte en lieu et place de la fenêtre de droite'».
Il en résulte que Monsieur [R] prouve qu'il existait sur la façade de la maison sise au n°4 (appartenant désormais aux consorts [N]) une ouverture indépendante donnant sur la rue.
Dans ces conditions, il convient de débouter les consorts [N] de leur demande tendant à bénéficier d'une servitude par destination du père de famille pour l'usage du sas d'entrée et de l'escalier intérieur pemettant l'accès au jardin depuis l'intérieur de la maison et par conséquent, d'infirmer le jugement déféré de ce chef ainsi que corrélativement au paiement d'une indemnité d'occupation.
*Sur les autres demandes
Conformément à l'article 696 du code de procédure civile, les consorts [N] succombant, ils seront tenus in solidum aux dépens de première instance et d'appel et ne peuvent voir prospérer leur demande en paiement à titre d'indemnité pour frais irrépétibles. Le jugement entrepris sera, par conséquent, infirmé de ces chefs.
Les circonstances de l'espèce commandent de condamner in solidum les consorts [N] à payer à Monsieur [B] [R] la somme de 3.000 euros à titre d'indemnité pour frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement et contradictoirement,
Infirme le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Charleville-Mézières le 9 juillet 2021, sauf en ce qu'il a débouté Monsieur [L] [N] ainsi que ses filles, Mesdames [Z], [H] et [D] [N] de leurs demandes en prescription acquisitive et en paiement de dommages et intérêts,
Et statuant à nouveau,
Déboute Monsieur [L] [N] ainsi que ses filles, Mesdames [Z], [H] et [D] [N] de leurs demandes aux fins de reconnaissance d'une servitude de passage par destination du père de famille, en paiement d'indemnité d'occupation ainsi que d'indemnité pour frais irrépétibles,
Condamne in solidum Monsieur [L] [N] ainsi que ses filles, Mesdames [Z], [H] et [D] [N] à payer à Monsieur [B] [R] la somme de 3.000 euros à titre d'indemnité pour frais irrépétibles,
Condamne in solidum Monsieur [L] [N] ainsi que ses filles, Mesdames [Z], [H] et [D] [N] aux dépens de première instance et d'appel.
LE GREFFIER LA PRESIDENTE