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30/11/2022 | FRANCE | N°22/00005

France | France, Cour d'appel de Reims, Chambre sociale, 30 novembre 2022, 22/00005


Arrêt n°

du 30/11/2022





N° RG 22/00005





MLB/FJ









Formule exécutoire le :







à :



COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE SOCIALE

Arrêt du 30 novembre 2022





APPELANTE :

d'un jugement rendu le 15 décembre 2021 par le Conseil de Prud'hommes de REIMS, section Encadrement (n° F 20/00478)



SA VRANKEN POMMERY MONOPOLE

[Adresse 3]

[Localité 6]



Représentée par la SELAS FIDAL, avocats au

barreau de REIMS





INTIMÉ :



Monsieur [E] [G]

[Adresse 2]

[Localité 4]



Représenté par la SELAS AGN AVOCATS REIMS, avocats au barreau de REIMS

DÉBATS :



En audience publique, en application des dispositions des articles 805 e...

Arrêt n°

du 30/11/2022

N° RG 22/00005

MLB/FJ

Formule exécutoire le :

à :

COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE SOCIALE

Arrêt du 30 novembre 2022

APPELANTE :

d'un jugement rendu le 15 décembre 2021 par le Conseil de Prud'hommes de REIMS, section Encadrement (n° F 20/00478)

SA VRANKEN POMMERY MONOPOLE

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représentée par la SELAS FIDAL, avocats au barreau de REIMS

INTIMÉ :

Monsieur [E] [G]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représenté par la SELAS AGN AVOCATS REIMS, avocats au barreau de REIMS

DÉBATS :

En audience publique, en application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 octobre 2022, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Marie-Lisette SAUTRON, conseiller, et Madame Marie-Laure BERTHELOT, conseiller, chargés du rapport, qui en ont rendu compte à la cour dans son délibéré ; elle a été mise en délibéré au 30 novembre 2022.

COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :

Madame Christine ROBERT-WARNET, président

Madame Marie-Lisette SAUTRON, conseiller

Madame Marie-Laure BERTHELOT, conseiller

GREFFIER lors des débats :

Monsieur Francis JOLLY, greffier

ARRÊT :

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Madame Christine ROBERT-WARNET, président, et Monsieur Francis JOLLY, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

Suivant contrat de travail à durée indéterminée en date du 17 juillet 2006, la SA Vranken Pommery Monopole a embauché Monsieur [E] [G] à compter du 1er août 2006, en qualité de responsable de secteur réseau grande distribution, statut cadre, niveau 8A, avec une reprise d'ancienneté au 1er septembre 1988.

L'article 3 du contrat de travail de Monsieur [E] [G] était relatif aux fonctions et l'article 4 au lieu de travail.

La convention collective applicable est celle des Vins et Spiritueux.

Au dernier état de la relation contractuelle, Monsieur [E] [G] exerçait ses fonctions sur les départements 08, 21, 51, 52, 54, 55, 57, 67 et 88.

Par courrier du 22 juin 2020, la SA Vranken Pommery Monopole écrivait à Monsieur [E] [G] qu'elle lui confirmait qu'elle l'attendait sur le poste de responsable de secteur réseau Off Trade PACA, sous un délai maximum d'un mois à compter de la notification dudit courrier, en application des articles 3 et 4 de son contrat de travail.

Par courrier du 21 juillet 2020, Monsieur [E] [G] lui répondait qu'il était 'contraint de lui notifier son refus de changement de secteur/mutation géographique'.

Le 21 juillet 2020, la SA Vranken Pommery Monopole convoquait Monsieur [E] [G] à un entretien préalable à licenciement.

Le 6 août 2020, elle lui notifiait son licenciement pour faute grave, pour avoir refusé sa mobilité sur la région PACA.

Contestant le bien-fondé de son licenciement, le 7 septembre 2020, Monsieur [E] [G] saisissait le conseil de prud'hommes de Reims de demandes à caractère indemnitaire et salarial. Il modifiait par voie d'écritures signifiées le 14 avril 2021 le montant d'une partie des sommes réclamées.

Par jugement en date du 15 décembre 2021, le conseil de prud'hommes a :

- dit et jugé le licenciement de Monsieur [E] [G] sans cause réelle et sérieuse,

en conséquence,

- condamné la SA Vranken Pommery Monopole à payer à Monsieur [E] [G] les sommes de :

. 69262,80 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

. 48484 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,

. 10389,42 euros au titre de l'indemnité de préavis,

. 1039 euros au titre des congés payés y afférents,

. 4941 euros au titre du rappel de gratification,

. 494 euros au titre des congés payés y afférents,

. 5000 euros à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral,

- ordonné l'exécution provisoire,

- condamné la SA Vranken Pommery Monopole à payer à Monsieur [E] [G] la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la SA Vranken Pommery Monopole à rembourser aux organismes intéressés tout ou partie des indemnités de chômage versées à Monsieur [E] [G], du jour de son licenciement au jour de la décision, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage,

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

- condamné la SA Vranken Pommery Monopole aux dépens y compris les éventuels frais d'exécution visés à l'article 10 du décret du 10 décembre 1996.

La SA Vranken Pommery Monopole a formé une déclaration d'appel le 4 janvier 2022, puis une nouvelle déclaration d'appel le 31 janvier 2022.

Le 6 juillet 2022, les deux affaires ont été jointes.

Dans ses écritures en date du 31 mars 2022, la SA Vranken Pommery Monopole conclut à l'infirmation du jugement sauf en ce qu'il a débouté Monsieur [E] [G] de ses demandes de rappel de salaire sur les trois dernières années de travail et de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement irrégulier. Elle demande à la cour de constater que Monsieur [E] [G] a commis une faute grave justifiant son licenciement, de le débouter de ses demandes et de le condamner à lui payer la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans ses écritures en date du 15 avril 2022, Monsieur [E] [G] demande à la cour :

* à titre principal, de :

- confirmer le jugement sauf en ce qu'il l'a débouté du surplus de ses demandes et sauf en ce qu'il a condamné la SA Vranken Pommery Monopole à lui payer la somme de 1500 euros au titre de l'indemnité de procédure,

- condamner la SA Vranken Pommery Monopole à lui payer les intérêts au taux légal :

. à compter du 6 août 2020 sur le rappel de gratification et les congés payés y afférents, l'indemnité conventionnelle de licenciement et l'indemnité de préavis et les congés payés y afférents,

. à compter de la notification du jugement le 24 décembre 2021 sur les dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- condamner la SA Vranken Pommery à lui payer les sommes de :

. 3796,16 euros à titre de rappel de salaire outre les congés payés y afférents avec intérêts au taux légal à compter du 6 août 2020,

. 3463,14 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement irrégulier avec intérêts au taux légal à compter du 24 décembre 2021,

. 3000 euros au titre de ses frais irrépétibles de première instance,

* à titre subsidiaire, dans l'hypothèse où la cour infirmerait le jugement et dirait son licenciement justifié par une cause réelle et sérieuse mais dépourvu de faute grave :

- de confirmer le jugement du chef des condamnations de la SA Vranken Pommery Monopole au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement, de l'indemnité de préavis et du rappel de gratification, outre les congés payés y afférents et des dommages-intérêts pour préjudice moral, du chef de l'exécution provisoire et de la condamnation de la SA Vranken Pommery Monopole aux dépens,

- d'infirmer le jugement en ce qu'il l'a débouté du surplus de ses demandes et a condamné la SA Vranken Pommery Monopole à lui payer la somme de 1500 euros au titre de l'indemnité de procédure,

- de condamner la SA Vranken Pommery à lui payer les intérêts au taux légal à compter du 6 août 2020 sur le rappel de gratification et les congés payés y afférents, l'indemnité conventionnelle de licenciement et l'indemnité de préavis et les congés payés y afférents,

- de condamner la SA Vranken Pommery Monopole à lui payer la somme de 3796,16 euros à titre de rappel de salaire outre les congés payés y afférents avec intérêts au taux légal à compter du 6 août 2020, la somme de 3463,14 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement irrégulier avec intérêts au taux légal à compter du 24 décembre 2021 et la somme de 3000 euros au titre de ses frais irrépétibles de première instance,

. à titre infiniment subsidiaire, dans l'hypothèse où la cour infirmerait le jugement, dirait son licenciement justifié par une cause réelle et sérieuse et ne ferait pas droit à ses demandes de rappel de salaire :

- de confirmer le jugement du chef de la condamnation de la SA Vranken Pommery Monopole au titre du rappel de gratification et des dommages-intérêts pour préjudice moral, du chef de l'exécution provisoire et de la condamnation de la SA Vranken Pommery Monopole aux dépens,

- d'infirmer le jugement en ce qu'il l'a débouté du surplus de ses demandes et a condamné la SA Vranken Pommery Monopole à lui payer la somme de 1500 euros au titre de l'indemnité de procédure,

- de condamner la SA Vranken Pommery Monopole à lui payer les intérêts au taux légal à compter du 6 août 2020 sur le rappel de gratification et les congés payés y afférents, l'indemnité conventionnelle de licenciement et l'indemnité de préavis et les congés payés y afférents,

- de condamner la SA Vranken Pommery Monopole à lui payer les sommes de 45014 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement avec intérêts au taux légal à compter du 6 août 2020, 9645,87 euros à titre d'indemnité de préavis outre les congés payés y afférents avec intérêts au taux légal à compter du 6 août 2020, 3215,29 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement irrégulier avec intérêts au taux légal à compter du 24 décembre 2021 et 3000 euros au titre de ses frais irrépétibles de première instance,

* en tout état de cause :

- d'ordonner la capitalisation des sommes à compter de la saisine du conseil de prud'hommes,

- de condamner la SA Vranken Pommery Monopole à lui payer la somme de 5000 euros au titre de ses frais irrépétibles d'appel et aux dépens.

Il est renvoyé aux écritures des parties pour un plus ample exposé.

Motifs :

- Sur le rappel de salaire :

Monsieur [E] [G] reprend à hauteur d'appel la demande en paiement de rappel de salaire d'un montant de 3796,16 euros, outre les congés payés, dont il a été débouté en première instance.

Or, c'est à raison que la SA Vranken Pommery Monopole lui oppose qu'il soutient vainement qu'il n'a pas été rempli de ses droits au titre du salaire de juillet 2017 à juillet 2020.

En effet, Monsieur [E] a perçu le salaire minimum auquel il avait droit.

Dès lors que Monsieur [E] [G] était cadre et qu'il bénéficiait d'une convention de forfait en jours, il devait, en application de l'article IV-12.3.2 alinéa 7 de la convention collective applicable, percevoir une rémunération forfaitaire annuelle, toutes majorations comprises au moins égale au salaire minimum de la catégorie majoré de 20%.

La catégorie s'entend en application de l'article VII.1 relatif à la classification des emplois, de celle des cadres. Le salaire minimum de la catégorie des cadres est donc, non pas celui repris à la position 8A, comme le soutient Monsieur [E] [G], mais celui repris à la position 7A.

Il ressort de la comparaison entre les salaires perçus par Monsieur [E] [G] (pièce n°12 de l'intimé) et les minima applicables au titre de la catégorie des cadres -que ce soit même en vertu de la date d'entrée en vigueur des avenants du 15 février 2017, du 7 mars 2018 et du 8 février 2019 et non pas de l'arrêté d'extension- que celui-ci a perçu un salaire supérieur audit minimum.

Dans ces conditions, le jugement doit être confirmé du chef du rejet du rappel de salaire.

- Sur la gratification :

La SA Vranken Pommery Monopole soutient que les premiers juges ont fait droit, à tort, à la demande de Monsieur [E] [G] au titre du rappel de gratification, en application de l'article III.3 de la convention collective applicable.

Or, si c'est à bon droit qu'elle fait valoir que la clause du contrat de travail de Monsieur [E] [G] relative à la rémunération est licite en ce qu'elle prévoit que la rémunération forfaitaire comprend tous les accessoires prévus à la convention collective applicable et intègre toutes les primes et gratifications liées à l'ancienneté, il lui appartient toutefois d'établir qu'elle s'est acquittée de l'obligation mise à sa charge de payer la prime d'ancienneté.

Or, une telle preuve ne peut résulter du seul fait que le salaire effectif était supérieur au salaire minimum conventionnel augmenté de la prime d'ancienneté, comme elle l'invoque tout au plus.

Dans ces conditions, le jugement doit être confirmé du chef de la condamnation de la SA Vranken Pommery Monopole au titre du rappel de gratification, outre les congés payés y afférents, sauf à condamner en outre la SA Vranken Pommery Monopole à payer à Monsieur [E] [G] les intérêts au taux légal sur ces sommes à compter du 10 septembre 2020, date de réception par la SA Vranken Pommery Monopole de la convocation devant le conseil de prud'hommes.

- Sur la faute grave :

La SA Vranken Pommery Monopole reproche aux premiers juges d'avoir retenu que le licenciement de Monsieur [E] [G] était dépourvu de cause réelle et sérieuse. Elle soutient en effet que le refus opposé par ce dernier à sa mutation est constitutif d'une faute grave dès lors que la clause de mobilité insérée au contrat de travail est valable et qu'elle l'a mise en oeuvre de façon licite et de bonne foi.

Monsieur [E] [G] demande à la cour de confirmer le jugement de ce chef au motif que la clause de mobilité n'est pas licite, que de surcroît sa mutation géographique en région PACA aurait eu des conséquences excessives et disproportionnées sur sa vie personnelle et familiale, qu'il ne lui a été fourni aucun élément d'information concernant son nouveau poste en région PACA en dépit de ses demandes, que la SA Vranken Pommery Monopole a refusé de prendre en charge les frais afférents au déménagement et que la faute grave n'est pas caractérisée.

Une clause de mobilité doit, pour être valable, définir de façon précise sa zone géographique d'application.

L'article 3 du contrat de travail intitulé 'fonctions' de Monsieur [E] [G] est ainsi rédigé :

'Les fonctions de Responsable de Secteur Réseau Grande Distribution confiées à Monsieur [E] [G] consistent notamment à la gestion et au développement sur son secteur de la diffusion et du négoce des vins de Champagne, vins et spiritueux, produits sous les marques appartenant à la Société ou à ses filiales, ou appartenant à des tiers et distribuées par elle ou par le Groupe VRANKEN POMMERY.

La zone géographique au sein de laquelle Monsieur [E] [G] exercera son activité s'étendra sur le secteur EST et plus particulièrement les départements suivants : 08-51-54-57 et 67.

En fonction des nécessités de la politique commerciale qu'elle définit, la Société VRANKEN POMMERY MONOPOLE aura toujours la possibilité d'apporter des modifications dans les fonctions confiées à Monsieur [E] [G], dans les produits distribués voire dans le secteur d'intervention de celui-ci, et ce, tant en ce qui concerne les responsabilités confiées, l'identité de la clientèle visée qu'en ce qui concerne la délimitation du secteur géographique qui lui est attribué.

Monsieur [E] [G] déclare avoir eu connaissance qu'il devait être libre géographiquement et qu'en conséquence, il ne pourrait refuser une mutation géographique qui serait justifiée par les activités de la Société, et ce, sans qu'aucun frais ne soit mis à la charge de la Société VRANKEN POMMERY MONOPOLE pour une telle mutation.

Aussi, dès lors que la Société maintiendra intégralement la rémunération de Monsieur [E] [G], ce dernier ne pourra refuser les modifications décrites ci-avant au titre des modalités d'exécution de son contrat de travail, sans que la rupture du contrat, résultant de ce refus, lui soit imputable.

(....).'

L'article 4 du contrat de travail de Monsieur [E] [G], intitulé lieu de travail, est ainsi rédigé :

'Pour information, Monsieur [E] [G] sera rattaché à l'établissement situé [Adresse 1].

Toutefois, il est bien entendu que pour des raisons touchant à l'organisation et au bon fonctionnement de l'entreprise, la Société VRANKEN POMMERY MONOPOLE pourra être amenée à modifier le lieu de travail de Monsieur [E] [G].

Monsieur [E] [G] pourra ainsi être transféré dans l'un quelconque des établissements de la Société notamment sur [Localité 6], et dont Monsieur [E] [G] considère, dès à présent, comme étant à une distance raisonnable.

Monsieur [E] [G] sera informé de cette décision de mutation dans un délai d'un mois avant sa prise d'effet.

Dans le cas où Monsieur [E] [G] refuserait d'accepter cette décision, la rupture du contrat de travail qui pourrait s'en suivre lui serait alors imputable et Monsieur [E] [G] ne pourrait du fait de cette rupture prétendre à aucune indemnité.

(...)'.

La SA Vranken Pommery Monopole explique qu'il résulte de ces deux articles deux notions différentes :

- la première relative au lieu de travail qui s'entend de l'établissement de rattachement du contrat de travail de Monsieur [E] [G], en l'espèce l'établissement de [Localité 5] s'agissant des commerciaux,

- la deuxième notion est relative à la clause de mobilité qui précise la possibilité de changer de secteur,

et que c'est en vertu de cette clause qu'elle a décidé de muter Monsieur [E] [G].

Monsieur [E] [G] lui oppose alors, à raison, qu'une telle clause est nulle dès lors qu'elle ne comporte aucune définition précise de sa zone géographique d'application, puisqu'il est tout au plus indiqué que l'employeur peut modifier son secteur d'intervention, sans en délimiter le champ.

Dans ces conditions, dès lors que la la clause de mobilité est nulle, Monsieur [E] [G] n'a commis aucune faute en refusant la mutation qui lui était demandée.

Le licenciement de Monsieur [E] [G] est donc dépourvu de cause réelle et sérieuse, et le jugement doit être confirmé de ce chef.

- Sur les conséquences financières :

. Sur l'indemnité de licenciement :

Les premiers juges ont fait droit à la demande de Monsieur [E] [G] au titre de l'indemnité de licenciement en intégrant le salaire de base revalorisé qu'ils avaient toutefois -et à juste titre- écarté.

Dans ces conditions, et sur la base d'un salaire de 3215,29 euros sur lequel les parties s'accordent à titre subsidiaire, le montant de l'indemnité de licenciement de Monsieur [E] [G] doit être arrêté en application de l'article III.23.2 de la convention collective à la somme de 45014 euros.

La SA Vranken Pommery Monopole sera donc condamnée à lui payer cette somme avec intérêts au taux légal à compter du 10 septembre 2020, date de réception de la convocation devant le conseil de prud'hommes sur la somme de 35791,56 euros et à compter du 14 avril 2021, date de la signification des écritures pour le surplus.

Le jugement doit être infirmé en ce sens.

. Sur l'indemnité de préavis :

Les premiers juges ont accueilli Monsieur [E] [G] en sa demande au titre de l'indemnité de préavis.

Or, en application de l'article L.1234-5 du code du travail, l'indemnité compensatrice de préavis correspond aux salaires et avantages, y compris l'indemnité de congés payés, qu'aurait perçus le salarié s'il avait travaillé pendant cette période.

Sur la base d'un salaire de 3215,29 euros et d'un préavis d'une durée de 3 mois, la SA Vranken Pommery Monopole doit être condamnée à payer à Monsieur [E] [G] la somme de 9645,87 euros, outre les congés payés y afférents, avec intérêts au taux légal à compter du 10 septembre 2020, date de réception de la convocation devant le conseil de prud'hommes, sur la somme de 9688,04 euros et à compter du 14 avril 2021, date de la signification des écritures pour le surplus.

Le jugement doit être infirmé en ce sens.

. Sur les dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse :

Les premiers juges ont accueilli la demande de Monsieur [E] [G] au titre des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, soit la somme de 69262,80 euros.

Or, dès lors qu'ils ont retenu à tort le salaire revalorisé, ils ont excédé l'indemnité maximale prévue à l'article L.1235-3 du code du travail qui est de 64305,80 euros (3215,29 euros x 20 mois).

Monsieur [E] [G] était âgé de 57 ans lors du licenciement. Il a retrouvé au mois de mai 2021 un emploi au sein d'une société en qualité de chef de secteur GMS pour la région Est avec un niveau de rémunération -fixe et variable- et avantage en nature proches de ceux qui étaient les siens précédemment.

Au vu de ces éléments, la SA Vranken Pommery Monopole sera condamnée à payer à Monsieur [E] [G] la somme de 49500 euros qui apparaît de nature à réparer le préjudice subi, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt, en application de l'article 1231-7 du code civil.

Le jugement doit être infirmé en ce sens.

. Sur les dommages-intérêts pour licenciement irrégulier :

Le jugement doit être confirmé du chef du rejet de la demande de Monsieur [E] [G] au titre des dommages-intérêts pour irrégularité de la procédure, dès lors que, même à la supposer établie, elle n'est pas cumulable avec des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

- Sur les dommages-intérêts pour préjudice moral :

La SA Vranken Pommery Monopole n'a pas exécuté de façon loyale le contrat de travail en persistant à mettre en oeuvre la clause de mobilité alors que le salarié avait souligné dès le 21 juillet 2020 son imprécision géographique.

En réparation du préjudice moral subi à ce titre et sans qu'il soit établi au vu du seul avis d'arrêt de travail en date du 7 août 2020 que celui-ci soit en lien avec le comportement de l'employeur, la SA Vranken Pommery Monopole sera condamnée à payer à Monsieur [E] [G] la somme de 1000 euros à titre de dommages-intérêts, les premiers juges ayant surévalué le préjudice subi.

Le jugement doit être infirmé en ce sens.

********

Il y a lieu de dire que les condamnations sont prononcées sous déduction des éventuelles cotisations sociales salariales applicables.

Le jugement doit être confirmé du chef de l'application des dispositions de l'article L.1235-4 du code du travail.

Il y a lieu d'ordonner la capitalisation des intérêts suivant les modalités reprises au dispositif de la présente décision.

Partie succombante, la SA Vranken Pommery Monopole doit être condamnée aux dépens de première instance et d'appel, déboutée de sa demande d'indemnité de procédure au titre des deux instances et condamnée en équité à payer à Monsieur [E] [G] la somme de 1500 euros au titre de ses frais irrépétibles d'appel, en sus de l'indemnité allouée en première instance.

Par ces motifs :

La cour, statuant contradictoirement et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Confirme le jugement déféré en ce qu'il a dit et jugé le licenciement de Monsieur [E] [G] sans cause réelle et sérieuse, débouté Monsieur [E] [G] de sa demande au titre du rappel de salaire et des congés payés y afférents, débouté Monsieur [E] [G] de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement irrégulier, condamné la SA Vranken Pommery Monopole à payer à Monsieur [E] [G] la somme de 4941 euros au titre du rappel de gratification et 494 euros au titre des congés payés y afférents -sauf à y ajouter la condamnation à des intérêts au taux légal à compter du 10 septembre 2020-, fait application de l'article L.1235-4 du code du travail, condamné la SA Vranken Pommery Monopole au paiement d'une indemnité de procédure, débouté la SA Vranken Pommery Monopole de sa demande d'indemnité de procédure et condamné la SA Vranken Pommery Monopole aux dépens ;

L'infirme pour le surplus ;

Statuant à nouveau dans cette limite et y ajoutant :

Condamne la SA Vranken Pommery Monopole à payer à Monsieur [E] [G] les sommes de :

- 49500 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;

- 45014 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement, avec intérêts au taux légal à compter du 10 septembre 2020 sur la somme de 35791,56 euros et à compter du 14 avril 2021 pour le surplus ;

- 9645,87 euros au titre de l'indemnité de préavis et 964,58 euros au titre des congés payés y afférents, avec intérêts au taux légal à compter du 10 septembre 2020 sur la somme de 9688,04 euros et à compter du 14 avril 2021 pour le surplus ;

- 1000 euros à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral ;

Ordonne la capitalisation des intérêts dus au moins pour une année entière ;

Dit que les condamnations sont prononcées sous déduction des éventuelles cotisations sociales salariales applicables ;

Condamne la SA Vranken Pommery Monopole à payer Monsieur [E] [G] la somme de 1500 euros au titre de ses frais irrépétibles d'appel ;

Déboute la SA Vranken Pommery Monopole de sa demande d'indemnité de procédure ;

Condamne la SA Vranken Pommery Monopole aux dépens d'appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Reims
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 22/00005
Date de la décision : 30/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-30;22.00005 ?
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