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29/11/2022 | FRANCE | N°21/01834

France | France, Cour d'appel de Reims, 1ere chambre sect.civile, 29 novembre 2022, 21/01834


ARRET N°

du 29 novembre 2022



R.G : N° RG 21/01834 - N° Portalis DBVQ-V-B7F-FCBE





S.A. AVIVA ASSURANCES





c/



[B]

S.A.S.U. CNH INDUSTRIAL FRANCE

S.A.S. CNH INDUSTRIAL CAPITAL EUROPE

S.C.P. [S] BARAULT MAIGROT



















Formule exécutoire le :

à :



la SCP HERMINE AVOCATS ASSOCIES



la SELARL PELLETIER ASSOCIES

COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE CIVILE-1° SECTION

ARRET DU 2

9 NOVEMBRE 2022



APPELANTE :

d'un jugement rendu le 21 juin 2021 par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de [Localité 1]



S.A. AVIVA ASSURANCES

[Adresse 4]

[Localité 10]



Représentée par Me Florence SIX de la SCP HERMINE AVOCATS ASS...

ARRET N°

du 29 novembre 2022

R.G : N° RG 21/01834 - N° Portalis DBVQ-V-B7F-FCBE

S.A. AVIVA ASSURANCES

c/

[B]

S.A.S.U. CNH INDUSTRIAL FRANCE

S.A.S. CNH INDUSTRIAL CAPITAL EUROPE

S.C.P. [S] BARAULT MAIGROT

Formule exécutoire le :

à :

la SCP HERMINE AVOCATS ASSOCIES

la SELARL PELLETIER ASSOCIES

COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE CIVILE-1° SECTION

ARRET DU 29 NOVEMBRE 2022

APPELANTE :

d'un jugement rendu le 21 juin 2021 par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de [Localité 1]

S.A. AVIVA ASSURANCES

[Adresse 4]

[Localité 10]

Représentée par Me Florence SIX de la SCP HERMINE AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de REIMS

INTIMES :

Monsieur [K] [B]

[Adresse 7]

[Localité 2]

Représenté par Me Thierry PELLETIER de la SELARL PELLETIER ASSOCIES, avocat au barreau de REIMS

S.A.S.U. CNH INDUSTRIAL FRANCE

[Adresse 5]

[Localité 8]

Représentée par Me Olivier LEROY, avocat au barreau de l'AUBE

S.A.S. CNH INDUSTRIAL CAPITAL EUROPE au capital de 88.482.297 € inscrite au RCS de NANTERRE sous le n° 413 356 353 prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés de droit audit siège

[Adresse 3]

[Localité 9]

Représentée par Me Colette HYONNE de la SCP BADRE HYONNE SENS-SALIS DENIS ROGER DAILLENCOURT, avocat au barreau de REIMS et ayant pour conseil Maître GAZAGNES avocat au barreau de PARIS

( désistement d'appel partiel à son égard constaté par ordonnance du CMEE du 26 avril 2022 )

S.C.P. [S] BARAULT MAIGROT prise en la personne de Me [F] [S], ès qualités de liquidateur judiciaire de la SA HERBELOT AGRICOLE

[Adresse 6]

[Localité 1]

Non comparant non représenté bien que régulièrement assigné

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :

Madame Elisabeth MEHL-JUNGBLUTH, présidente de chambre

Monsieur Cédric LECLER, conseiller

Mme Sandrine PILON, conseiller

GREFFIER :

Madame Yelena MOHAMED-DALLAS, greffier lors des débats et Monsieur MUFFAT-GENDET greffier lors du prononcé

DEBATS :

A l'audience publique du 18 octobre 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 29 novembre 2022,

ARRET :

Réputé contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe le 29 novembre 2022 et signé par Madame Elisabeth MEHL-JUNGBLUTH, présidente de chambre, et Monsieur Nicolas MUFFAT-GENDET, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

Suivant contrat de crédit-bail des 15 et 18 septembre 2011, la SAS CNH Industrial Europe a donné en location à M [K] [B] une presse de marque New Holland, modèle BB9070 (n° de châssis 204896004), qu'elle a acquise auprès de la SA Herbelot Agricole SA, concessionnaire

Les matériels agricoles de marque New Holland sont importés en France par la société CNH Industrial France, qui les distribue grâce à un réseau de concessionnaire, parmi lesquels figure la SA Herbelot Agricole, qui a effectué des prestations de maintenance et d'entretien sur la presse.

La presse a pris feu le 21 juillet 2015.

Après la réalisation d'une expertise confiée en référé à M [H] [U], M [B] a fait assigner devant le tribunal de grande instance de Troyes la société CNH Industrial Europe, la société CNH Industrial France et la société Herbelot, par actes des 21 et 25 septembre 2017 et du 23 octobre 2017, afin d'être indemnisé de ses préjudices, à titre principal sur le fondement de la garantie des vices cachés, subsidiairement sur le fondement de la responsabilité contractuelle et à titre infiniment subsidiaire, sur le fondement de la responsabilité délictuelle.

Le 2 octobre 2018, la société Herbelot Agricole a fait l'objet d'un jugement d'ouverture de liquidation judiciaire, désignant la SCP Crozat-Barault-Maigrot en la personne de Me [F] [S] comme liquidateur.

Le 14 décembre 2018 M [B] a fait assigner en intervention forcée la SA Aviva Assurances, en qualité d'assureur de la société Herbelot et le 15 janvier 2019, il a mis en cause la SCP Crozat-Barault-Maigrot.

Par jugement du 21 juin 2021, le tribunal judiciaire de Troyes a :

déclaré recevables les demandes formées à l'encontre de la SA Herbelot Agricole,

dit n'y avoir lieu à déclarer le jugement opposable à la SAS CNH Industrial Europe,

condamné in solidum la liquidation judiciaire de la SA Herbelot Agricole, la SAS CNH Industrial et la SA Aviva Assurances en qualité d'assureur de la SA Herbelot Agricole à payer la somme de 24 449,80 euros à M [K] [B] en réparation des préjudices subis,

fixé à la somme de 24 449,80 euros la créance de M [K] [B] au passif de la liquidation judiciaire de la SA Herbelot Agricole,

déclaré opposable à M [K] [B] la franchise contractuelle de 500 euros du contrat Vulcain n°72025292 conclu entre la SA Aviva Assurances et la SA Herbelot Agricole,

condamné la liquidation judiciaire de la SA Herbelot Agricole à garantir la SAS CNH Industrial France de l'ensemble des condamnations prononcées à son encontre en principal, frais et accessoires,

fixé à la somme de 24 449,80 euros la créance de la SAS CNH Industrial France au titre de l'appel en garantie au passif de la liquidation judiciaire de la SA Herbelot Agricole,

condamné la SA Aviva Assurances à garantir la SAS CNH Industrial France de l'ensemble des condamnations prononcées à son encontre, y compris les frais au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

condamné in solidum la liquidation de la SA Herbelot Agricole, la SAS CNH Industrial France et la SA Aviva Assurances à verser la somme de 3 000 euros à M [K] [B] au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

fixé à la somme de 2 500 euros la créance de M [K] [B] au titre de l'article 700 du code de procédure civile au passif de la liquidation judiciaire de la SA Herbelot Agricole,

dit que la liquidation judiciaire de la SA Herbelot Agricole garantira la SAS CNH Industrial France à hauteur de 2 500 euros au titre des frais irrépétibles alloués à M [K] [B],

dit que la SA Aviva Assurances garantira la SAS CNH Industrial France à hauteur de 2 500 euros au titre des frais irrépétibles alloués à M [K] [B],

condamné in solidum la liquidation judiciaire de la SA Herbelot Agricole et la SA Aviva Assurances à payer la somme de 2 000 euros à la SAS CNH Industrial France au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

débouté la SAS CNH Industrial Europe de sa demande au titre des frais irrépétibles,

débouté Me [F] [S], es qualités de mandataire judiciaire de la SA Herbelot Agricole, de sa demande au titre des frais irrépétibles,

condamné in solidum la liquidation judiciaire de la SA Herbelot Agricole, la SAS CNH Industrial France et la SA Aviva Assurances aux dépens de l'instance engagée par M [B], comprenant les frais d'expertise, dont distraction au profit des avocats qui le requièrent, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,

dit que la créance de M [B] inscrite au passif de la liquidation judiciaire de la SA Herbelot Agricole comprendra le montant des dépens engagés par l'intéressé dans la cadre de la présente procédure et comprenant les frais d'expertise,

dit que la liquidation judiciaire de la SA Herbelot Agricole garantira la SAS CNH Industrial France à hauteur des dépens engagé par M [B] dans le cadre de la présente procédure et comprenant les frais d'expertise,

condamne in solidum la liquidation judiciaire de la SA Herbelot Agricole et la SA Aviva Assurances aux dépens engagés par la SAS CNH Industrial France dans le cadre de la présente instance,

débouté Me [F] [S], es qualités de mandataire judiciaire de la SA Herbelot Agricole, de sa demande au titre des dépens,

dit que, dans l'instance opposant la SAS CNH Industrial Europe à M [K] [B], chacun conservera la charge de ses propre dépens,

ordonné l'exécution provisoire de la décision,

débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires au dispositif.

Pour statuer ainsi, le tribunal a retenu que :

M [B] et la société CNH Industrial France justifient, chacune, d'une déclaration de créance au passif de la liquidation judiciaire de la société Herbelot Agricole et que la SCP Crozat-Barrault-Maigrot, prise en la personne de Me [F] [S], chargée de cette liquidation judiciaire, a été appelée à l'instance, de sorte que l'instance a valablement repris et que les actions de M [B] et de la société CNH Industrial France sont recevables,

M [B] n'a pas acheté la presse mais a souscrit un contrat de crédit-bail portant sur l'acquisition de cette machine, en exécution duquel il ne serait devenu acheteur qu'en cas de levée de l'option à la fin de la période de location et décidé en conséquence qu'il ne dispose d'aucune action sur le fondement de la garantie des vices cachés,

en l'absence de contrat entre M [B] et la société CNH Industrial France, la responsabilité contractuelle de cette dernière ne saurait être engagée par M [B],

la société Herbelot a livré la presse et effectué des prestations de maintenance et d'entretien sur cette machine, que le rapport d'expertise a mis en évidence un vice existant dès la conception de la machine et le fait que la société Herbelot connaissait ce défaut et est intervenue de nombreuses fois sans jamais avoir résolu la cause du problème ; l'expert retient également que la société Herbelot n'a pas respecté les prescriptions du constructeur ; elle a en outre procédé à un montage technique en méconnaissance des règles édictées par le constructeur ; le tribunal en conclut que la société Herbelot a commis des fautes engageant sa responsabilité contractuelle,

M [B] n'ayant pas développé le moyen par lequel il invoque à titre très subsidiaire la responsabilité délictuelle de la société CNH Industrial France, le tribunal a estimé qu'il devait être considéré que celui-ci entendait se prévaloir d'une faute contractuelle commise par la société CNH Industrial France dans ses relations avec le concessionnaire Herbelot Agricole afin d'engager la responsabilité délictuelle de cette société, en rappelant que le manquement par un contractant à une obligation contractuelle est de nature à constituer un fait illicite à l'égard d'un tiers au contrat lorsqu'il lui cause un dommage ; il a rappelé que la société CNH Industrial France avait produit puis commercialisé une presse agricole affectée d'un vice de conception, concernant le calibrage en intensité électrique au niveau des ventilateurs,

le préjudice correspondant au montant de la reprise de la presse au jour de la fin de la location n'est pas certain, le crédit-preneur étant libre de lever ou non l'option d'achat à la fin de la période de location et s'analyse donc en une perte de chance d'avoir pu acheter la presse au prix estimé en fin de location, mais M [B] n'ayant formulé aucune demande au titre de la perte de chance et ne justifiant pas de la poursuite du paiement des loyers après l'incendie, il l'a débouté de sa demande de dommages intérêts au titre de la reprise de la presse en fin de location,

M [B] est fondé à solliciter le remboursement de la révision hivernale de 2014 et des réparations de juillet 2015 effectués par la société Herbelot, qui n'ont pas permis de mettre fin aux problèmes de surcharge électrique alors que la société connaissait les dysfonctionnements,

la demande de M [B] au titre des frais exposés pour sous-traité les prestations de pressage de paille de la saison, était fondée,

la société Herbelot était assurée auprès de la SA Aviva Assurances pour les réparations qu'elle a effectuées au profit de M [B] et cet assureur ne démontre pas la réunion des conditions quant à l'exclusion de garantie, de sorte qu'il est tenu à indemniser M [B] des sommes dues par son assuré,

chacun des responsables d'un même dommage doit être condamné à le réparer en totalité sans qu'il y ait lieu de tenir compte du partage de responsabilité auquel il est procédé entre eux et qui n'affecte pas l'étendue de leurs obligations envers la partie lésée et ce, même si chacune des dettes conjointes relève d'un ordre de responsabilité différent,

l'expert estime que la responsabilité la plus importante dans le sinistre est celle du concessionnaire, la société Herbelot et que le défaut d'exécution des travaux impérativement prescrit par le fabricant constitue une faute du concessionnaire constitutive d'une cause d'exonération de la garantie constructeur ; le tribunal en conclut que la liquidation de la société Herbelot doit garantir la société CNH Industrial de l'ensemble des condamnations prononcées à son encontre,

décidé que la société Herbelot, étant appelée à garantir la société CNH Industrial France, tiers lésé, il y a lieu de condamner l'assureur de la société Herbelot à garantir la société CNH Industrial France des condamnations prononcées à son encontre,

décidé que la société CNH Industrial étant exonérée de sa responsabilité en raison de la faute du concessionnaire, il n'y a pas lieu qu'elle garantisse la société Herbelot et son assureur, la société Aviva.

La SA Aviva Assurances a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 4 octobre 2021, en intimant toutes les parties de la première instance, mais par ordonnance du 26 avril 2022, le conseiller de la mise en état a constaté le désistement partiel d'appel de la société Aviva Assurances aujourd'hui dénommée Abeille Assurances à l'égard de la société CNH Industrial Europe et constaté l'extinction de l'instance envers cette partie.

Dans ses dernières conclusions, notifiées le 16 juin 2022, la SA Aviva Assurances, à présent dénommée la SA Abeille Assurances, demande à la cour d'appel d'infirmer le jugement en ce qu'il est entré en voie de condamnation à son encontre au bénéfice de M [B], en principal, intérêts, frais irrépétibles et dépens et, statuant à nouveau, de :

juger opposables les exclusions de garantie que renferme le contrat d'assurance la liant à la société Herbelot Agricole,

en conséquence, la décharger de l'ensemble des condamnations prononcées à son encontre en principal, frais et accessoires, en ce comprise son obligation à garantie envers la SASU CNH Industrial France,

subsidiairement, pour le cas où elle serait jugée tenue de garantir son assurée,

exclure de sa condamnation au profit de M [B] les postes de préjudice relatifs à la révision hivernale et aux réparations et confirmer le jugement en ce qu'il a débouté M [B] de sa demande d'indemnisation à hauteur de 54 000 euros, subsidiairement, réduire celle-ci à raison de l'évaluation qui pourra être faite, en pourcentage, de la perte de chance endurée,

confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré opposable la franchise contractuelle de 500 euros,

l'infirmer en ce qu'il l'a condamnée à garantir la société CNH Industrial France de l'ensemble des condamnations prononcées à son encontre en principal, frais et accessoires,

débouter la société CNH Industrial France de sa demande de garantie,

condamner la société CNH Industrial France à la garantir de toutes les condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre en principal, intérêts, frais et autres accessoires,

très subsidiairement, dans l'hypothèse où la garantie de la société CNH Industrial France à son profit serait écartée,

ordonner un partage de responsabilité, de telle manière que la liquidation judiciaire de la SA Herbelot Agricole assume 20% de la charge définitive de la dette, la société CNH Industrial France étant tenue à raison des 80% restants,

en toute hypothèse,

débouter l'ensemble des parties de toutes demandes plus amples ou contraires et notamment des fins de leurs appels incidents,

la décharger de l'ensemble des condamnations prononcées à son encontre au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens,

condamner tous succombants, le cas échéant in solidum, à lui verser une indemnité de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens, lesquels comprendront les frais d'expertise et pourront être recouvrés dans les conditions prévues à l'article 699 du code de procédure civile.

M [K] [B], par conclusions notifiées le 16 septembre 2022, sollicite la confirmation du jugement en ce qu'il déclare recevables et bien fondées les demandes formées à l'encontre de la société Abeille Assurances es qualités d'assureur de la société Herbelot Agricole et de la société CNH Industrial France et de l'infirmer sur le quantum de l'indemnisation qui lui a été allouée.

Il demande à la cour, statuant à nouveau, de :

déclarer ses demandes recevables et bien fondées et en conséquence, de déclarer responsables la société Herbelot Agricole et la société CNH Industrial France, à titre principal, sur le fondement de la garantie des vices cachés, subsidiairement, sur celui de la responsabilité contractuelle et à titre infiniment subsidiaire, sur le fondement de la responsabilité délictuelle,

par conséquent et en tout état de cause,

condamner in solidum la société CNH Industrial France et la société Abeille Assurances es qualités d'assureur de la société Herbelot Agricole à lui verser :

54 000 euros TTC au titre de la perte de chance de lever l'option sur la presse dans le cadre du crédit-bail,

6 257,21 euros TTC au titre du remboursement de la révision hivernale,

2 130,38 euros TTC au titre du remboursement des réparations intervenues en juillet 2015,

16 062,21 euros TTC au titre du remboursement des prestations de pressage de paille,

15 261,61 euros au titre des loyers versés malgré la destruction de la presse,

fixer à la somme de 93 811,20 euros TTC sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la SA Herbelot Agricole,

débouter la société Abeille Assurances, la liquidation judiciaire de la SA Herbelot Agricole, la société CNH Industrial France et la CNH Industrial Europe de toutes leurs demandes, fins ou prétentions contraires aux présentes,

condamner in solidum la société Abeille Assurances et la société CNH Industrial France à lui verser 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

fixer à la somme de 5 000 euros sa créance au titre de l'article 700 du code de procédure civile au passif de la liquidation judiciaire de la SA Herbelot Agricole,

condamner in solidum la société Abeille Assurances et la société CNH Industrial France aux dépens de l'instance, lesquels comprendront les frais d'expertise,

dire que sa créance inscrite au passif de la liquidation judiciaire de la SA Herbelot Agricole comprendra le montant des dépens qu'il a engagés dans le cadre de la présent procédure et comprenant les frais d'expertise.

Par conclusions notifiées le 2 septembre 2022, la SASU CNH Industrial France demande à la cour d'appel de :

à titre principal,

infirmer le jugement en ce qu'il a jugé qu'elle avait engagé sa responsabilité délictuelle à l'égard de M [B],

en conséquence,

infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée à payer la somme de 24 449,80 euros à M [B] en réparation des préjudices subis,

infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée à payer la somme de 3 000 euros à M [B] au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

l'infirmer en ce qu'il l'a condamnée aux dépens de l'instance, comprenant les frais d'expertise judiciaire,

confirmer le jugement en toutes ses autres dispositions,

débouter la société Abeille Assurances de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions à son encontre,

à titre subsidiaire, débouter M [B] de sa demande tendant à voir les sociétés CNH Industrial France et Aviva Assurances devenue la société Abeille Assurances condamnées in solidum à lui payer les sommes suivantes :

54 000 euros au titre de la perte de chance de lever l'option sur la presse,

8 387,59 euros au titre des frais d'entretien et de réparation de la presse,

16 062,20 euros TTC au titre de la prise en charge des factures de pressage de paille,

15 261,61 euros au titre des loyers et mensualités d'assurance versées en 2015,

en tout état de cause,

confirmer le jugement en ce qu'il a condamné in solidum Me [S] et la société Aviva Assurances devenue la société Abeille Assurances à la garantir contre toutes éventuelles condamnations qui pourraient être mise à sa charge,

fixer sa créance au passif de la société Herbelot Agricole à hauteur de la somme de 86'807,87 euros,

condamner tout succombant à lui payer la somme de 4 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

La SA Herbelot n'a pas constitué avocat. La déclaration d'appel lui a été signifiée, le 18 novembre 2021, au siège de la SCP Crozat-Barault-Mairot. L'arrêt sera donc rendu par défaut.

MOTIFS

Sur l'appel incident de M [B]

La SASU CNH Industrial France invoque la jurisprudence de la cour de cassation en ce qu'elle décide qu'il résulte des articles 542 et 954 du code de procédure civile que lorsque l'appelant ne demande, dans le dispositif de ses conclusions, ni l'infirmation, ni l'annulation du jugement, la cour d'appel ne peut que confirmer le jugement, qu'il s'agisse d'un appel principal ou à titre incident (Cass. Civ. 2ème, 17 septembre 2020, n°18-23.626 et 1er juillet 2021, n°20-10.694).

La circonstance que les premières conclusions de M [B] devant la cour d'appel ne comportent pas dans leur intitulé la notion d'appel incident est sans emport, l'article 954 n'imposant pas une telle mention en tête des conclusions.

Contrairement à ce que soutient la SASU CNH Industrial France, ces premières conclusions comporte une demande d'infirmation partielle, «'sur le quantum de l'indemnisation'» qui lui a été allouée.

Le dispositif du jugement ne comportant pas de chefs rejetant sa demande fondée sur la garantie des vices cachées ou celle fondée sur la responsabilité contractuelle, il ne peut être reproché à M [B] de ne pas en avoir demandé l'infirmation, d'autant que sont en cause des moyens et non des prétentions.

M [B] a donc valablement formé appel incident et peut, pour obtenir confirmation de la condamnation de la société Abeille Assurances et de la SASU CNH Industrial France, invoquer les moyens pris de la garantie des vices cachés et de la responsabilité contractuelle.

Sur la recevabilité de l'action de M [B]

Selon l'article 32 du code de procédure civile, est irrecevable toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d'agir.

Il est constant que, dans les chaînes de contrats acquisitives de propriété, le sous-acquéreur, jouit de tous les droits et actions attachés à la chose qui appartenait à son auteur (Ass. plén., 7 février 1986, pourvoi n° 83-14.631).

M [B] est crédit-preneur de la presse sinistrée. Un tel contrat n'est pas, avant la levée éventuelle de l'option d'achat par le locataire, translatif de propriété.

Cependant, le contrat conclu entre M [B] et la SAS CNH Capital Euros stipule en son article 5: «'Le bailleur a accompli l'essentiel de ses obligations en passant commande au fournisseur ; il est convenu que le locataire renonce à tout recours contre le bailleur en cas de défaillance ou de vices cachés affectant le matériel loué ou de défaut de garanties, que ce soit pour obtenir des dommages et intérêts ou la résiliation du contrat. En contrepartie de cette renonciation, le locataire exerce pendant toute la durée du contrat, en vertu d'une stipulation pour autrui expresse, tous droits et action en garantie vis-à-vis du constructeur ou du fournisseur du matériel loué, notamment annulation de la commande, récupération des acomptes versés, mise en jeu des garanties légales et/ou conventionnelles pour lesquelles le bailleur lui donne en tant que de besoin mandat d'ester, (à condition d'avoir été appelé à la cause').

Cette stipulation pour autrui a pour effet de faire naître, au profit du locataire, un droit direct contre le vendeur, lui permettant d'agir contre celui-ci sur le fondement de la garantie des vices cachés ou la responsabilité contractuelle du vendeur pour obtenir paiement de dommages intérêts, ainsi que M [B] entend le faire.

Cependant, cette stipulation prend fin avec le contrat et le crédit-preneur n'a plus alors qualité pour agir en garantie des vices cachés contre le fournisseur.

L'article 8 prévoit que, sans qu'il y ait besoin d'aucune formalité judiciaire, le locataire reconnaissant avoir été mis en demeure par les présentes, le contrat peut être résilié de plein droit, si bon semble au bailleur, dans cas suivants : (') modification concernant le matériel loué et notamment détérioration, destruction ou aliénation du matériel loué.

Il résulte du rapport de l'expert judiciaire que la presse a été entièrement détruite par l'incendie.

Pour autant, le contrat de crédit-bail ne s'en trouve pas résilié de plein droit, compte tenu des stipulations précédemment rappelées, qui prévoient que cette résiliation peut intervenir, si bon semble au bailleur.

M [B] justifie du paiement du dernier loyer avant le sinistre, mais les pièces versées aux débats ne permettent pas de s'assurer que le crédit-bailleur n'a pas résilié le contrat après la destruction de la presse et donc que M [B] peut encore valablement se prévaloir de la stipulation pour autrui.

M [B], qui l'invoque, a la charge de prouver que les conditions de mise en 'uvre de la stipulation pour autrui sont réunies. A défaut de rapporter cette preuve, il ne peut se prévaloir de la stipulation pour autrui pour agir sur le fondement de la garantie des vices cachés et de la responsabilité contractuelle de la SASU CNH Industrial France.

Le mandat d'ester en justice ne peut davantage lui permettre d'obtenir le paiement à son profit des sommes qu'il réclame.

En revanche, la SA Herbelot Agricole est intervenue à plusieurs reprises entre 2011 et 2015 et encore le jour même du sinistre, pour effectuer la maintenance de la presse et la réparer.

M [B] est donc recevable à invoquer la responsabilité de cette société dans l'exécution des contrats d'entreprise ainsi conclus avec elle.

Le tiers à un contrat peut invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, un manquement contractuel dès lors que ce manquement lui a causé un dommage (Ass. plén., 6 octobre 2006, pourvoi n° 05-13.255).

M [B] est donc également recevable à invoquer la responsabilité délictuelle de la SASU CNH Industrial France au titre d'un manquement contractuel.

Sur le désordre et sa cause

L'expert judiciaire indique que l'incendie de la presse a été causé par un court-circuit électrique, lequel est la conséquence d'une surcharge en intensité électrique au niveau des ventilateurs des noueurs. Plus précisément, il a relevé une dégradation thermique de l'isolant du câble de raccordement des moteurs de ventilation, soumis à une température excessive pendant une longue période, cette température élevée étant due à une intensité trop importante circulant dans les câbles.

La société CNH Industrial France affirme qu'une nouvelle configuration des protections du circuit électrique de l'alimentation des ventilateurs de noueurs a été introduite en production sur la presse litigieuse et qu'un fusible F2 de 20A a été monté en production au lieu d'un fusible de 30A. L'expert indique cependant que cette baisse de calibrage est insuffisante compte tenu de la section des câbles et que même le fusible de 20A entraîne une densité de courant un peu trop élevée.

Selon l'expert, il est incontestable que l'alimentation électrique des ventilateurs de noueurs est un point sensible sur le modèle de presse en cause et que le constructeur CNH en porte une responsabilité en tant que concepteur et fabricant.

Ayant consulté les archives de la base Asist, qui permet un échange direct entre le constructeur et un de ses concessionnaires, il a relevé que dans un rapport du 1er août 2011, le concessionnaire Herbelot explique qu'il lui est impossible de remplacer le fusible F2 par un 20 ampères comme le conseille le bulletin de service, celui-ci grillant très rapidement et que le constructeur lui a alors recommandé de contrôler les intensités des moteurs et de passer éventuellement à un fusible 25 ampères.

L'expert en déduit l'existence d'une défaillance électrique avant même la mise en service de la presse, impliquant un problème de surconsommation d'un ou plusieurs moteurs dès leur fabrication, l'utilisation de la machine ayant ensuite vraisemblablement conduit à une augmentation supplémentaire de cette consommation.

Il indique que le constructeur CNH a donné à ses concessionnaires des consignes qui permettent de vérifier, voire de remplacer les moteurs et câbles, avant de rencontrer de graves problèmes et que le concessionnaire Herbelot a ignoré ces consignes et ne s'est intéressé qu'au symptôme (la fusion des fusibles), sans jamais s'attaquer à la cause du problème (moteur ou câble défectueux).

Sur les responsabilités

L'article 1147 du code civil, dans sa version en vigueur à la date de conclusion du contrat de vente de la presse par la SASU CNH Industrial France à la SA Herbelot Agricole et des contrats d'entreprise conclus entre cette dernière et M [B], dispose que le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au payement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part.

L'article 1382 ancien prévoit que tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à la réparer.

Le problème de surconsommation d'un ou plusieurs moteurs de ventilateurs dès leur fabrication évoqué par l'expert est nécessairement antérieur à la vente de la presse par la SASU CNH Industrial France à la SA Herbelot Agricole. Et la nouvelle configuration des protections du circuit électrique de l'alimentation des ventilateurs introduite en production sur la presse ne suffisait pas à protéger les circuits d'alimentation des ventilateurs de cette surcharge, puisque le fusible de 20A laissait encore passer une densité de courant un peu trop élevée.

La presse vendue par la SASU CNH Industrial France à la SA Herbelot Agricole présentait donc un défaut, qui ne consiste pas uniquement dans un problème de calibrage ayant pour seule conséquence que le fusible du circuit électrique de l'alimentation des ventilateurs avait tendance à disjoncter trop souvent, comme la société CNH le soutient.

La vente d'une presse présentant un tel défaut est de nature à caractériser un manquement de la société CNH à ses obligations résultant du contrat de vente.

Ce manquement ayant causé un préjudice à M [B] dès lors que le défaut en cause est à l'origine de l'incendie qui a détruit de la presse, celui-ci est fondé à invoquer la responsabilité délictuelle de la société CNH Industrial France

Pour sa part, la SA Herbelot Agricole, qui était tenue d'une obligation de résultat dans l'exécution de son contrat d'entreprise, n'est pas parvenue à résoudre le problème de la surcharge électrique des circuits d'alimentation des ventilateurs, puisque celle-ci à perduré jusqu'à endommager les câbles au point de créer un court-circuit et un incendie.

Sa responsabilité est donc également engagée à l'égard de M [B].

Sur la réparation des préjudices et l'obligation au paiement de la dette

La perte de chance de lever l'option et de céder la presse à un prix avantageux :

Pour justifier d'un tel préjudice, M [B] doit démontrer qu'il existait une chance de lever l'option et qu'il puisse faire une plus-value en vendant ensuite la presse .

Il se prévaut de l'avis de l'expert judiciaire sur la valeur de la presse, juste avant l'incendie, fixée à 60 000 euros HT.

Il est cependant nécessaire, pour déterminer la chance de réaliser une plus-value, de connaître la valeur qu'aurait eue la presse à la fin de la période de location, soit le 18 juillet 2018. La presse ayant pris feu le 21 juillet 2015, l'évaluation de l'expert ne permet pas de déterminer la valeur que la presse aurait eue à la date de la possible levée d'option, trois ans plus tard.

Les annonces produites par M [B] datent du mois de septembre 2015, de sorte que les prix demandés par les vendeurs qui les ont diffusées ne permettent pas davantage d'établir la valeur de la presse au mois de juillet 2018.

M [B] ne justifie donc pas d'une chance de réaliser une plus-value en revendant la presse après levée de l'option d'achat.

Il ne peut donc qu'être débouté de sa demande indemnitaire fondée sur la perte de cette chance et le jugement sera confirmé de ce chef.

Le remboursement de la révision hivernale de 2014

M [B] demande le remboursement de trois factures. Il ne peut être fait droit à cette demande que si la société Herbelot n'a pas exécuté les obligations du contrat d'entreprise passé avec M [B] et donc que les travaux qui en sont l'objet n'ont pas été correctement réalisés.

M [B] entend manifestement faire la preuve de ce manquement contractuel par la survenue de l'incendie. Il est donc nécessaire de déterminer, pour chaque facture, si les travaux en cause se rapportent ou non aux défauts précédemment identifiés comme causes de l'incendie.

La facture n°214400 du 31 octobre 2014 a pour objet la dépose de la transmission secondaire, le contrôle de l'état du palier et du roulement. La transmission n'étant pas en cause dans la survenue de l'incendie, il n'est pas justifié d'un manquement de la SA Herbelot dans la réalisation de la prestation ainsi facturée. Aucune somme ne sera donc allouée du chef de cette facture.

La facture n°214398 du 31 octobre 2014 porte sur le pick-up, lequel n'est pas en cause dans la survenue de l'incendie. Il n'est donc pas démontré que cette prestation aurait été défectueuse.

La facture n° 214399 du 31 octobre 2014, d'un montant de 1 314,77 euros TTC porte sur une recherche de panne sur circuit électrique, dépose de carte de puissance et contrôle de tensions, notamment. A l'évidence, elle se rapporte donc à une prestation destinée à remédier aux défauts qui ont conduit à l'incendie de la presse. L'expert judiciaire ayant indiqué que la société Herbelot n'est pas parvenue à résoudre ces défauts, la prestation ainsi facturée a été défaillante et caractérise un manquement de cette société à son obligation de résultat. La société Herbelot est donc tenue de la rembourser.

Le remboursement de cette facture ne tend par à réparer un préjudice causé par l'incendie de la presse mais est la conséquence d'une résiliation du contrat d'entreprise passé entre M [B] et la société Herbelot en raison de la mauvaise exécution par celle-ci de ses obligations.

La société CNH Industrial France, tiers à ce contrat, ne saurait donc être condamnée à ce titre.

Le jugement sera infirmé sur ce chef de préjudice.

Le remboursement des réparations intervenues en juillet 2015

M [B] demande le remboursement de cinq factures du 30 juillet 2015.

Comme précédemment, il est nécessaire de déterminer si les travaux facturés ont ou non porté sur les défauts qui sont la cause de l'incendie.

La facture n°216065, de 34,80 euros, porte sur le remplacement du porte fusible sur circuit électrique ventilateur. La facture n°216067, de 815,05 euros porte sur le contrôle du faisceau électrique sur moteur du ventilateur. Elle correspond à une intervention le jour même de l'incendie.

Ces deux factures se rapportent au défaut en cause dans l'incendie et donc à des prestations défectueuses de la société Herbelot, qui est tenue de les rembourser.

La société CNH Industrial France, tiers au contrat d'entreprise en cause, ne peut être condamnée au paiement de ces sommes.

Il n'est pas démontré que les trois autres factures, relatives au remplacement du capteur de vitesse de rotation, au contrôle du liage et au remplacement de la chaîne d'empaqueteur, se rapportent au défaut en cause dans l'incendie. M [B], sur qui pèse la charge de la preuve, sera donc débouté de sa demande en paiement au titre desdites factures.

Le jugement sera infirmé sur ce chef de préjudice.

Le remboursement des loyers versés malgré la destruction de la presse et des prestations de pressage de paille

M [B] demande le remboursement du loyer annuel qu'il a payé le 15 juin 2015. Il sollicite en outre une indemnité au titre des prestations de pressage de paille qu'il a dû acquitter selon trois factures datées des 25 novembre, 16 et 30 décembre 2015, pour un montant total hors taxes de 16'062,20 euros.

Les sociétés Herbelot et CNH Industrial France doivent indemniser M [B] des prestations de pressage de paille dans la mesure où ces prestations ont été rendues nécessaires par la privation de la presse détruite par l'incendie qui leur est imputable.

M [B] aurait dû payer le montant des loyers pour pouvoir disposer, en 2015, de la presse dont la privation a rendu nécessaire le paiement des prestations précitées.

Dès lors, les sociétés Herbelot et CNH Industrial France seront condamnées in solidum à indemniser M [B] du montant des trois factures de prestations de pressage de paille, soit 16'062,20 euros et le jugement sera confirmé de ce chef, mais M [B] sera débouté de sa demande au titre des loyers.

Sur la garantie de la SA Abeille Assurances

L'opposabilité des conditions générales invoquées par la SA Abeille Assurances est conditionnée par la connaissance que la société Herbelot en a eue et leur acceptation par celle-ci.

Ces conditions générales figurent dans un document annexe distinct des conditions particulières signées par la société Herbelot. Ces dernières comportent une mention faisant référence aux conditions générales. Et il est stipulé dans les conditions particulières, par des mentions précédant la signature de l'assuré, que celui-ci reconnaît avoir préalablement reçu les conditions générales.

Ces conditions étant en outre lisibles, il est ainsi établi que la société Herbelot a eu connaissance des conditions générales.

Il ne résulte d'aucune mention des conditions particulières, qui seules portent la signature de l'assuré, que celui-ci a accepté les conditions générales.

La société Abeille Assurances ne développe aucun moyen pour démontrer une telle acceptation, fût-elle tacite.

Il n'est donc pas établi que les conditions générales invoquées par l'assureur ont été acceptées par l'assuré. Les clauses d'exclusion de garanties incluses dans lesdites conditions sont donc inopposables à la société Herbelot et, partant, à M [B] agissant au titre de l'action directe du tiers lésé prévue par l'article L124-3 du code des assurances.

La société Abeille Assurances ne conteste pas l'application de la garantie «'dommages survenus après livraison'» que M [B] invoque et qui est prévue par les conditions particulières du contrat d'assurance de la société Herbelot. Elle invoque uniquement l'application de la franchise de 500 euros qui est effectivement stipulée par les mêmes conditions particulières et qui est donc opposable à M [B].

En conséquence, la société Abeille Assurances est tenue de garantir la société Herbelot de l'ensemble des condamnations prononcées contre elle au profit de M [B], sous réserve de la franchise précitée de 500 euros. Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur la contribution à la dette de réparation

Pour justifier d'une faute de la société Herbelot à son égard et obtenir que celle-ci la garantisse des condamnations prononcées à son encontre, la SASU CNH Industrial France invoque un contrat de concession conclu entre la société Herbelot et la SA New Holland.

Si la procédure exposée par le constructeur dans le bulletin de service n°2011-007, que la société CNH reproche à la SA Herbelot de ne pas avoir respectée, et consistant dans le remplacement du fusible 20A par un fusible 25A, pouvait remédier à une fusion trop fréquente du fusible, elle n'était pas de nature à protéger le circuit de la surconsommation du ou des ventilateurs, bien au contraire.

En revanche, la SA Herbelot a commis une faute envers la société CNH Industrial France, dont elle était concessionnaire, en ne suivant pas les recommandations du constructeur, qui demandaient de vérifier l'intensité consommée par les ventilateurs, ainsi que cela résulte du rapport d'expertise judiciaire, de vérifier le câblage, de ne pas dépasser 20 ou 25A pour le fusible F2 et d'informer l'utilisateur par mise à jour du manuel.

En outre, l'expert judiciaire a relevé que la société Herbelot avait modifié la presse, hors le contrôle du constructeur en ce sens que l'alimentation ne passait plus par la platine électronique, la protection étant assurée par un fusible «'gros modèle'» de calibre 30A, monté sur un support lié directement au câble. La justification de ce montage était d'éviter qu'un courant important traverse la carte électronique et détériore cette dernière. L'installation d'un fusible de calibre 30A n'a pu que diminuer la protection du circuit électrique contre la surcharge qui est à l'origine de l'incendie.

Cette modification, réalisée sans l'accord du constructeur et même contre ses prescriptions, constitue une faute de la société Herbelot envers la société CNH Industrial France.

Ces fautes ne sauraient exonérer totalement la société CNH Industrial France de toute responsabilité envers la société Herbelot, à qui elle a vendu la presse atteinte du défaut de conception auquel la société Herbelot n'est ensuite pas parvenue à remédier.

Inversement, la faute de la société CNH Industrial France ne peut exonérer la société Herbelot de sa propre responsabilité envers cette dernière, de sorte que la demande de la SA Abeille Assurances tendant à être garantie intégralement par celle-ci de toutes les condamnations prononcées à son encontre doit être rejetée.

La gravité de leurs fautes respectives justifie de procéder à un partage de responsabilité entre ces deux sociétés de telle sorte que la SA Herbelot Agricole supporte 60% de la charge finale de la dette de réparation et la société CNH Industrial France, 40% de cette dette.

Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il condamne la liquidation judiciaire de la société Herbelot à garantir la SAS CNH Industrial France de l'ensemble des condamnations prononcées à son encontre et en ce qu'il condamne la SA Aviva Assurances, devenue société Abeille Assurances, à garantir la SAS CNH Industrial France de l'ensemble des condamnations prononcées à son encontre.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Le jugement est infirmé dans la plupart de ses dispositions. Les chefs statuant sur les dépens et frais irrépétibles le seront également.

Les sociétés Herbelot, CNH Industrial France et Abeille Assurances, parties condamnées, sont tenues aux dépens de première instance et d'appel et leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile seront rejetées.

Il est équitable d'allouer à M [B] la somme de 3 000 euros pour ses frais irrépétibles de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et par arrêt rendu par réputé contradictoire,

Confirme le jugement rendu le 21 juin 2021 par le tribunal judiciaire de Châlons-en-Champagne en ce qu'il déclare opposable à M [K] [B] la franchise contractuelle de 500 euros du contrat Vulcain n°72025292 conclu entre la SA Aviva Assurances et la SA Herbelot Agricole,

L'infirme pour le surplus de ses dispositions contestées,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne la SASU CNH Industrial France à payer à M [K] [B] les sommes suivantes':

16 062,20 euros correspondant aux prestations de pressage de paille,

3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Fixe la créance de M [K] [B] au passif de la SA Herbelot Agricole à la somme totale de 22'896,78 euros, de décomposant comme suit':

849,85 euros correspondant au titre des réparations intervenues en juillet 2015,

1 314,77 euros au titre de la révision hivernale de 2014,

16 062,20 euros correspondant aux prestations de pressage de paille,

3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit que cette créance est due in solidum avec la SASU CNH Industrial France à concurrence de 19'062,20 euros,

Condamne la SA Abeille Assurances à garantir la SA Herbelot Agricole de la totalité des sommes fixées au passif de sa liquidation au profit de M [K] [B], dont à déduire la franchise contractuelle de 500 euros,

Dit que dans les rapports entre co-obligés, le partage de responsabilité s'effectuera de la manière suivante :

SA Herbelot Agricole': 60%,

SASU CNH Industrial France': 40 %,

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

Condamne in solidum la SASU CNH Industrial France et la SA Abeille Assurances aux dépens de première instance et d'appel,

Dit que la SA Herbelot Agricole est tenu in solidum avec la SASU CNH Industrial France et la SA Abeille Assurances aux dépens de première instance et d'appel, qui seront inscrits au passif de sa liquidation judiciaire.

Le greffier La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Reims
Formation : 1ere chambre sect.civile
Numéro d'arrêt : 21/01834
Date de la décision : 29/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-29;21.01834 ?
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