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29/11/2022 | FRANCE | N°20/01005

France | France, Cour d'appel de Reims, 1ere chambre sect.civile, 29 novembre 2022, 20/01005


ARRET N°

du 29 novembre 2022



R.G : N° RG 20/01005 - N° Portalis DBVQ-V-B7E-E3TB





[S] [K]





c/



[Z]

Société BANQUE POPULAIRE ALSACE LORRAINE CHAMPAGNE



















Formule exécutoire le :

à :



Me Arnaud GERVAIS





COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE CIVILE-1° SECTION

ARRET DU 29 NOVEMBRE 2022



APPELANT :

d'un jugement rendu le 10 janvier 2020 par le TJ hors JAF, JEX,

JLD, J. EXPRO, JCP de REIMS



Monsieur [Y] [S] [K]

[Adresse 6]

[Localité 4]



Représenté par Me Arnaud GERVAIS, avocat au barreau de REIMS



INTIMES :



Monsieur [B] [Z]

[Adresse 2]

[Localité 3]



Non comparant non représenté bien que régulière...

ARRET N°

du 29 novembre 2022

R.G : N° RG 20/01005 - N° Portalis DBVQ-V-B7E-E3TB

[S] [K]

c/

[Z]

Société BANQUE POPULAIRE ALSACE LORRAINE CHAMPAGNE

Formule exécutoire le :

à :

Me Arnaud GERVAIS

COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE CIVILE-1° SECTION

ARRET DU 29 NOVEMBRE 2022

APPELANT :

d'un jugement rendu le 10 janvier 2020 par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de REIMS

Monsieur [Y] [S] [K]

[Adresse 6]

[Localité 4]

Représenté par Me Arnaud GERVAIS, avocat au barreau de REIMS

INTIMES :

Monsieur [B] [Z]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Non comparant non représenté bien que régulièrement assigné

BANQUE POPULAIRE ALSACE LORRAINE CHAMPAGNE à capital variable, inscrite au RCS de METZ sous le N°B356801571 agissant poursuites et diligences des Président et Membres de son Conseil d'Administration domiciliés de droit audit siège

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Mélanie CAULIER-RICHARD de la SCP DELVINCOURT - CAULIER-RICHARD - CASTELLO AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de REIMS

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :

Madame Elisabeth MEHL-JUNGBLUTH, présidente de chambre

Monsieur Cédric LECLER, conseiller

Madame Sandrine PILON, conseiller

GREFFIER :

Madame Yelena MOHAMED-DALLAS, greffier lors des débats et Monsieur MUFFAT-GENDET greffier lors du prononcé

DEBATS :

A l'audience publique du 18 octobre 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 29 novembre 2022,

ARRET :

Réputé contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe le 29 novembre 2022 et signé par Madame Elisabeth MEHL-JUNGBLUTH, présidente de chambre, et Monsieur Nicolas MUFFAT-GENDET, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

Selon offre de prêt valant contrat en date du 2 mars 2011, acceptée le 14 mars 2011, la société anonyme coopérative de banque à capital variable Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne (la banque) a consenti à Monsieur [B] [Z] et à Monsieur [Y] [S] [K] un prêt intégrant un programme financier d'un montant de 205'530 euros au total aux fins d'achat d'un bien immobilier:

- un prêt à taux zéro n° 05645308 de 24'000 euros sur 96 mois, remboursable en 96 échéances mensuelles au taux fixe de 0 % et au taux effectif global annuel de 0,011 %;

- un prêt privilège n° 05645330 9 sur 300 mois, remboursable en 96 échéances mensuelles de 767,38 euros sans assurance groupe, puis en 204 échéances mensuelles de 1019,62 euros sans assurance groupe, au taux fixe de 3,45 % et au taux effectif global annuel de 3,56 %.

Par lettres recommandées en date du 16 décembre 2016, avec avis de réception signés respectivement les 21 et 22 décembre 2016, Monsieur [S] [K] et Monsieur [Z] ont été mis en demeure de régler dans un délai de huit jours sous peine de déchéance du terme les sommes impayées au titre du remboursement des deux prêts susvisés, s'élevant à 3680,89 euros au total.

Par lettre recommandée en date du 13 février 2017 remis à Monsieur [S] [K] selon accusé de réception du 16 février 2017, la banque a informé ce dernier de la déchéance du terme huit jours après la mise en demeure de payer rester infructueuse, laquelle lui a réclamé la somme de 207'450,99 euros selon décompte arrêté au 13 février 2017.

Également informé de cette déchéance du terme selon les mêmes modalités, Monsieur [Z] n'a pas été destinataire du plis afférent, revenu avec la mention « destinataire inconnu à cette adresse ».

Les 1er et 27 février 2018, la banque a fait assigner Monsieur [S] [K] et Monsieur [Z] devant le tribunal de grande instance de Reims.

En dernier lieu, la banque a demandé de condamner solidairement Monsieur [S] [K] et Monsieur [Z] aux entiers dépens avec distraction au profit de son conseil, et à lui payer les sommes de:

- 183'730,23 euros en principal outre les intérêts au taux annuel conventionnel de 3,45 % à compter du 28 novembre 2017 et jusqu'à la date effective de paiement;

- 1315,69 euros en principal, outre les intérêts au taux légal à compter du 28 novembre 1017 et jusqu'à la date effective de paiement;

- 2500 euros au titre des frais irrépétibles.

La banque a aussi demandé de débouter Monsieur [S] [K] de l'intégralité de ses demandes reconventionnelles, formulées tant à titre principal qu'à titre subsidiaire et infiniment subsidiaire.

À titre subsidiaire, si la juridiction dût estimer qu'elle avait commis une faute contractuelle de nature à engager sa responsabilité, la banque a demandé de fixer les dommages-intérêts réclamés par Monsieur [S] [K] à un montant moindre que celui demandé correspondant au préjudice réellement subi et prouvé.

À titre subsidiaire, si la nature de clause pénale était retenue, la banque a demandé de dire et juger que cette clause ne sût être analysée comme étant excessive, et de dire et juger qu'elle ne sût être rejetée ou même réduite par le juge.

À titre infiniment subsidiaire, si le tribunal estimât que cette clause était une clause pénale et que son montant était excessif, dire et juger qu'elle ne sût être diminuée en deçà de 5 %.

En tout état de cause, la banque a demandé de condamner solidairement Monsieur [S] [K] et Monsieur [Z] aux entiers dépens avec distraction au profit de son conseil, et à lui payer la somme de 2500 euros au titre des frais irrépétibles.

En dernier lieu, Monsieur [S] [K] a demandé de:

- constater que la banque avait manqué à ses obligations de conseil et d'information, de vigilance et de mise en garde son égard dans le cadre de l'octroi des prêts litigieux;

- condamner en conséquence la banque à lui payer une somme équivalente aux sommes qui lui étaient réclamées dans le cadre du présent procès, et ce à titre de dommages-intérêts en réparation des préjudices résultant des manquements de la banque;

- ordonner la compensation pure et simple entre l'indemnité précitée avec les sommes réclamées par la banque;

- débouter par voie de conséquence la banque de l'ensemble de ses demandes plus amples ou contraires dirigées à son encontre;

- condamner la banque à lui payer la somme de 2000 euros au titre des frais irrépétibles.

À titre subsidiaire, Monsieur [S] [K] a demandé de:

- constater que la banque avait manqué à son obligation d'exécution de bonne foi des contrats de prêt concernés en n'apportant pas de réponse aux demandes du concluant visant à favoriser une solution amiable, la banque préférant in fine prononcer la déchéance des termes des prêts avant de poursuivre le recouvrement judiciaire, tous frais, intérêts indemnités en sus à la charge du concluant;

- constater les fautes ainsi commises par la banque et la condamner à lui régler la somme de 50'000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice en ayant résulté.

À titre encore subsidiaire, Monsieur [S] [K] a demandé de:

- dire et juger que les clauses contractuelles prévoyant une indemnité contractuelle de 7% procédaient de clauses pénales soumises au pouvoir modérateur du juge;

- constater que ces clauses revêtaient un caractère manifestement excessif au regard de la situation respective des parties;

- dire et juger en conséquence que les sommes réclamées par la demanderesse à ce titre seraient fixées à zéro euro ou à tout le moins réduites à la somme symbolique d'un euro pour chacun des prêts concernés conformément aux dispositions de l'article 1152 alinéa 2 du Code civil;

- dire et juger que la banque ne pourrait exécuter la décision à intervenir durant durée maximale de deux ans jusqu'à la mise en place d'un plan de mesure du prononcé d'un jugement de rétablissement personnel à son profit et qu'elle devrait alors se conformer la décision qui serait alors adoptée;

- débouter la banque de l'ensemble de ses demandes plus amples ou contraires.

- condamner la banque aux dépens avec distraction au profit de son conseil.

Quoique régulièrement assigné, Monsieur [Z] n'a pas constitué avocat.

Par jugement réputé contradictoire en date du 10 janvier 2020, le tribunal judiciaire de Reims a:

- condamné solidairement Monsieur [S] [K] et Monsieur [Z] à payer à la banque la somme de 172'135,71 euros avec intérêts au taux conventionnel de 3,45 % à compter du 28 novembre 2017 et la somme de 7825,69 euros avec intérêts au taux légal à compter du 28 novembre 1017, sous réserve de mesures adoptées dans le cadre de procédures de surendettement des particuliers;

- qualifié la clause d'indemnité conventionnelle en clause pénale et réduit à la somme de zéro euro les sommes sollicitées par la banque à ce titre;

- débouté la banque du surplus de ses demandes;

- débouté Monsieur [S] [K] de ses demandes de dommages-intérêts et du surplus;

- dit n'y avoir lieu à condamnation au titre des frais irrépétibles;

- condamné la banque aux dépens avec distraction au profit du conseil de Monsieur [S] [K].

Le 23 juillet 2020, Monsieur [S] [K] a relevé appel de ce jugement.

Le 21 octobre 2021, Monsieur [S] [K] a signifié sa déclaration d'appel, ses écritures et pièces n°1 à 8 déposées le 17 octobre 2020 à Monsieur [Z] à étude d'huissier.

Le 18 janvier 2021, la banque a signifié ses écritures et pièces déposées le 13 janvier 2021 à Monsieur [Z] à sa personne.

Le 25 avril 2021, a été rendue l'ordonnance de clôture de l'instruction de l'affaire.

Le 25 mai 2021, l'ordonnance de clôture a été révoquée, au visa des conclusions de l'intimée visant à saisir le conseiller de la mise en état.

Par ordonnance d'incident en date du 6 juillet 2021, le conseiller chargé de la mise en état a:

- déclaré irrecevable la réponse de Monsieur [S] [K] à l'appel incident formé par la banque;

- invité en conséquence Monsieur [S] [K] à formaliser de nouvelles conclusions pour tenir compte de l'irrecevabilité de sa réponse à l'appel incident formé par la banque.

Le 20 septembre 2022, a été rendue l'ordonnance de clôture de l'instruction de l'affaire.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES:

Pour plus ample exposé, il sera expressément renvoyé aux écritures déposées:

- le 12 septembre 2022 par Monsieur [S] [K], appelant;

- le 13 septembre 2022 par la banque, intimée.

A titre principal, Monsieur [S] [K] demande l'infirmation du jugement en ce qu'il l'a condamné au titre des principaux des deux prêts outre intérêts, et sa confirmation pour le surplus.

Il réitère sa demande indemnitaire reconventionnelle, dont compensation, sauf à limiter désormais son quantum à 99 % des sommes qui lui sont réclamées par la banque, et à débouter celle-ci de ses demandes plus amples ou contraires.

A titre subsidiaire, il réitère sa demande initiale formée au même titre à titre d'indemnité pour manquement de la banque à son obligation d'exécution de bonne foi des contrats de prêts.

Il demande enfin la condamnation de la banque à lui payer la somme de 2500 euros au titre des frais irrépétibles des deux instances.

La banque demande de déclarer irrecevable et d'écarter des débats la pièce n°21 adverse.

Elle demande la confirmation du jugement en ce qu'il a porté condamnation de Monsieur [S] [K] et de Monsieur [Z] à lui payer des sommes dont intérêts conventionnels au titre des deux prêts, sous réserve des mesures adoptées dans le cadre des procédures de surendettement en cours, et en ce qu'il a débouté Monsieur [S] [K] de ses demandes de dommages-intérêts et du surplus.

Elle demande l'infirmation du jugement en ce qu'il a qualifié de clause pénale les indemnités contractuelles prévues s'agissant des deux prêts, demande la condamnation des deux co-emprunteurs à ce titre à lui payer les sommes respectives de 11 494,52 euros et 490 euros, et réitère dans cet ordre ses demandes initiales subsidiaires, encore subsidiaires, et à titre infiniment subsidiaire.

En tout état de cause, elle demande de débouter Monsieur [S] [K] et Monsieur [Z] de toutes leurs autres demandes plus amples ou contraires, et de les condamner solidairement aux dépens des deux instances d'appel avec distraction au profit de son conseil, et à lui payer la somme de 3000 euros au titre des frais irrépétibles des deux instances.

MOTIVATION:

Sur la recevabilité de la pièce n°21 présentée par Monsieur [S] [K]:

Selon l'article 914 alinéa dernier du code de procédure civile,

Les ordonnances du conseiller de la mise en état statuant sur une fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité de l'appel, sur la caducité de celui-ci ou sur l'irrecevabilité des conclusions les actes de procédure en application des articles 909,910, et 930-1 ont autorité de la chose jugée au principal.

Selon l'article 135 du même code, le juge peut écarter des débats les pièces qui n'ont pas été communiquées en temps utile.

Il ressort de l'ordonnance d'incident rendue le 6 juillet 2021 par le conseiller de la mise en état que:

- le 17 octobre 2020, Monsieur [S] [K], appelant, a conclu au fond;

- le 13 janvier 2021, la banque a formé appel par conclusions du même jour de la disposition du jugement l'ayant déboutée de sa demande de condamnation au titre de la clause d'indemnité contractuelle;

- c'était au 13 avril 2021 qu'expirait le délai imparti à l'intimée à l'appel incident, c'est-à-dire à Monsieur [S] [K], pour répondre à cet appel incident, au regard de l'article 910 du code de procédure civile, selon lequel l'intimé un appel incident ou un appel provoqué dispose, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, d'un délai de trois mois à compter de la notification qui lui en est faite pour remettre ses conclusions au greffe;

- c'est le 24 mai 2021 que Monsieur [S] [K] a répliqué par des conclusions du même jour, soit au-delà du délai prévu;

- qu'il y avait donc lieu de déclarer irrecevable la réponse de Monsieur [S] [K] à l'appel incident de la banque, et non pas ses conclusions dans leur ensemble;

- qu'il y avait lieu d'inviter en conséquence Monsieur [S] [K] à formaliser de nouvelles conclusions pour tenir compte de l'irrecevabilité de sa réponse à l'appel incident formé par la banque.

La banque demande de voir écarter des débats la pièce n°21 produite par Monsieur [S] [K] avec ses dernières conclusions du 12 septembre 2022, car ces conclusions font état du rejet par le tribunal des demandes de la banque au titre des clauses pénales figurant au contrat en visant la pièce n°21 constituée par les dernières conclusions déposées par Monsieur [S] [K] devant le premier juge.

Elle estime que la communication par son adversaire de ses écritures devant le premier juge, auxquelles il fait référence dans ses dernières conclusions d'appel, revient à conclure sur son propre appel incident, et ainsi à contourner l'irrecevabilité de sa réponse à son propre appel incident prononcée par le conseiller de la mise en état.

Il y a lieu d'observer l'exactitude des constations matérielles de la banque.

Mais cependant, en ce que l'autorité de la chose jugée par le conseiller de la mise en état s'impose à toutes les parties, ainsi qu'à la cour, en raison de l'irrecevabilité de la réponse de l'appelant principal à l'appel incident de la banque, la cour ne pourra pas examiner les éventuelles prétentions et moyens de Monsieur [S] [K] ayant trait aux dispositions du jugement ayant rejeté les demandes de la banque au titre des clauses d'indemnité conventionnelles.

Dès lors, il importe peu que l'intéressé ait produit ses écritures de première instance.

Enfin, l'existence et la teneur de la demande de la banque y afférente montre que cette communication, à laquelle la banque a été mise en mesure de répondre, n'est pas tardive, ce que la banque ne vient même pas alléguer.

Il conviendra donc de rejeter la demande de la banque tendant à voir dire irrecevable et à écarter des débats la pièce n°21 produite par Monsieur [S] [K].

Sur les demandes principales de la banque:

Les conditions générales du prêt immobilier du 14 mars 2011 présentement litigieux, auquel renvoie l'article 8 des conditions spécifiques du prêt à taux zéro, prévoient, s'agissant de la défaillance et de l'exigibilité des sommes dues que:

- en cas de défaillance de l'emprunteur et si la banque exige le remboursement immédiat du capital restant dû et des intérêts échus, les sommes restant dues jusqu'à la date du règlement effectif produisent des intérêts de retard à un taux égal à celui du prêt; en outre, sauf dans le cas de décès ou d'incendie, stipulés ci-après, la banque peut demander une indemnité dont le montant est fixé à 7 % des sommes dues au titre du capital restant dû, des intérêts échus et non versés et, le cas échéant, des intérêts de retard;

- Si la banque n'exige pas le remboursement immédiat du capital restant dû, elle peut majorer de trois points le taux du prêt indiqué dans les conditions particulières, jusqu'à ce que l'emprunteur ait repris le cours normal de ses échéances contractuelles; aucune somme, autres que celles mentionnées ci-dessus, ne pourraient être réclamées à l'emprunteur à l'exception cependant, en cas de défaillance de celui-ci, des frais entraînés par cette défaillance, ainsi que des sommes allouées par le tribunal au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile;

- Par ailleurs, la totalité des sommes dues en principal intérêts et frais et accessoires au titre du prêt objet d'une offre deviendra de plein droit immédiatement exigible sans qu'il soit besoin d'une mise en demeure préalable et aucun autre déblocage de fonds ne pourrait être sollicité par l'emprunteur, en cas de non-respect des engagements l'emprunteur.

Par lettre recommandée en date du 13 février 2017, la banque a prononcé la déchéance du terme huit jours après une précédente mise en demeure restée infructueuse, soit au 26 décembre 2016, en raison de l'absence de régularisation par les emprunteurs du paiement des échéances impayées.

Et les sommes dues au titre de ses échéances impayées et intérêts échus ne sont pas remises en cause par l'emprunteur à hauteur d'appel.

Il y aura donc lieu de condamner solidairement Monsieur [S] [K] et Monsieur [Z] à payer à la banque la somme de 172'135,71 euros avec intérêts au taux conventionnel de 3,45 % à compter du 28 novembre 2017 et la somme de 7825,69 euros avec intérêts au taux légal à compter du 28 novembre 1017, sous réserve de mesures adoptées dans le cadre de procédures de surendettement des particuliers, et le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur les demandes de la banque au titre des indemnités conventionnelles:

Eu égard à la décision susdite du conseiller de la mise en état, il sera rappelé que cette demande sera examinée exclusivement au regard des prétentions et moyens soulevés par la banque.

Selon l'article 1152 du Code civil, dans sa version antérieure au 1er octobre 2016, applicable au litige, eu égard à la date de formation du contrat,

Lorsque la convention porte que celui qui manquera d'exécuter payera une certaine somme à titre de dommages-intérêts, il ne peut être alloué à l'autre partie une somme plus forte, ni moindre.

Néanmoins, le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la peine qui avait été convenue, si elle est manifestement excessive ou dérisoire. Toute stipulation contraire sera réputée en écrite.

Selon l'article 1226 du même code dans la même version,

La clause pénale est celle par laquelle une personne, pour assurer l'exécution d'une convention, s'engage à quelque chose en cas d'inexécution.

Selon l'article 1129 du même code dans la même version,

La clause pénale est la compensation des dommages et intérêts que le créancier souffre de l'inexécution de l'obligation principale.

Il ne peut demander en même temps le principal et de la peine, à moins qu'elle n'ait été stipulée pour le simple retard.

Constitue une clause pénale la clause d'un contrat par laquelle les parties évaluent forfaitairement et d'avance l'indemnité à laquelle donnera lieu l'inexécution de l'obligation contractée.

Constitue une clause pénale la stipulation selon laquelle le taux sera majoré en cas de défaillance de l'emprunteur.

Une clause pénale revêt un caractère comminatoire, comme ayant pour objet de faire assurer par l'une des parties l'exécution de son obligation.

Les stipulations contractuelles susdites ont prévu, s'agissant des deux prêts, qu'en cas de défaillance de l'emprunteur et en cas de prononcé de la déchéance du terme par la banque, cette dernière peut demander une indemnité dont le montant est fixé à 7 % des sommes dues au titre du capital restant dû, des intérêts échus et non versés et, le cas échéant, des intérêts de retard.

Cette clause n'est pas la contrepartie d'un coût supplémentaire susceptible d'être assumé par la banque, et ne trouve pas sa cause dans un quelconque bouleversement de l'économie du contrat alors que la défaillance éventuelle des emprunteurs est entrée dans le champ contractuel, elle ne vient donc indemniser son préjudice résultant de l'inexécution contractuelle, et se trouve aussi destinée à contraindre les emprunteurs à s'exécuter.

Elle constitue donc une clause pénale: le jugement sera confirmé pour avoir qualifié la clause d'indemnité conventionnelle en clause pénale.

Les montants sollicités, de 11 494,52 euros pour le prêt principal, d'une durée de 300 mois, avec des échéances courant du 1er mai 2011 jusqu'au 1er avril 2036, et de 490 euros pour le prêt à taux zéro, d'une durée de 96 mois, avec des échéances courant du 29 avril 2011 au 29 mars 2019, selon les tableaux d'amortissement y afférents, n'apparaissent pas manifestement excessifs au regard du préjudice subi de la banque afférent à la défaillance des emprunteurs, notamment en contemplation de la durée des prêts, alors que les emprunteurs se trouvent en défaut de paiement dès l'été 2016, ainsi qu'il en ressort des courriers de la banque des 16 décembre 2016 et 13 février 2017.

Et les éléments issus des plans de surendettement, pour lesquels la banque a donné son accord le 4 juillet 2017, et prévoyant, pour Monsieur [S] [K], un remboursement du prêt à taux zéro sur une durée de 144 mois par échéances mensuelles de 57,48 euros, et un remboursement du prêt principal sur une durée de 286 mois par échéances mensuelles de 380 euros pendant 144 mois, puis de 939,80 euros pendant 142 mois, ne sont pas de nature à infléchir cette appréciation.

Au surplus, il sera observé que le plan de surendettement de Monsieur [Z], établi le 9 novembre 2017, avait prévu le gel de tout remboursement des deux prêts pendant une période de 2 ans.

Il y aura donc lieu de condamner solidairement Monsieur [S] [K] et Monsieur [Z] à payer à la banque les sommes de:

- 11 494,52 euros au titre de l'indemnité contractuelle prévue dans le cadre du prêt privilège;

- 490 euros au titre de l'indemnité contractuelle prévue dans le cadre du prêt à taux zéro.

Il sera rappelé qu'aucune voie d'exécution forcée ne sera engagée tant que les mesures recommandées par la commission de surendettement seront respectées.

Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a réduit à 0 les sommes sollicitées par la banque au titre de la clause d'indemnité conventionnelle des deux prêts susdits.

Sur les demandes indemnitaires reconventionnelles de l'emprunteur:

Sur le manquement au devoir de mise en garde:

La banque est tenue à un devoir de mise en garde à l'égard d'un emprunteur consommateur lorsque, au jour de son engagement, il existe un risque d'endettement né de l'octroi du prêt garanti, lequel résulte de l'inadaptation du prêt aux capacités financières de l'emprunteur.

La banque n'est pas tenue à un devoir de mise en garde en l'absence de risque.

Cette inadaptation ou ce risque doit s'apprécier à la date de l'engagement de l'emprunteur.

La charge de la preuve de cette inadaptation ou de ce risque appartient à l'emprunteur qui l'invoque.

Les capacités financières de l'emprunteur s'entendent en ce qu'elles portent à la fois sur les revenus et le patrimoine.

Le caractère adapté d'un prêt doit s'apprécier au regard des capacités de remboursement globales

de co-emprunteurs solidaires (Cass. 1ère civ., 10 septembre 2015, n°14-18.851, Bull. 2015, I, n°205).

Monsieur [S] [K] fait observer, exactement au regard de ses avis d'impositions, qu'il touchait un revenu net imposable de 22 457 euros en 2010 (soit 1874,41 euros mensuels) et de 25 971 euros en 2011 (soit 2164,25 euros).

Il fait en outre observer, exactement qu'avec Monsieur [Z], la banque leur avait en outre consenti le 3 mai 2011 un troisième prêt d'un montant en principal de 21 000 euros, au taux de 3,95 %, remboursable en 25 ans par mensualités de 115,69 euros comprenant capital, intérêts assurances et accessoires.

Il en conclut que le montant cumulé des échéances de ces 3 prêts s'élève à une somme de plus de 1130 euros mensuel, supérieure à plus de la moitié de ses propres revenus, et aboutissant ainsi à un taux d'endettement de 52 %.

Toutefois, l'invocation du taux d'endettement résultant de ce troisième prêt souscrit le 3 mai 2011 est sans emport quant à l'appréciation du caractère inadapté ou du risque découlant des deux premiers prêts, souscrits les 14 mars 2011: car c'est à cette dernière date qu'il convient de se placer pour apprécier ce risque ou ce caractère inadapté de ces deux premiers prêts.

C'est dès lors de manière inopérante que Monsieur [S] [K] entend se prévaloir de l'autorité de la chose jugée d'un jugement rendu le 14 novembre 2019 par le tribunal de grande instance de Reims, qui, dans un litige l'opposant, seul, à la banque, et portant sur le troisième et dernier contrat de prêt du 3 mai 2011, a condamné reconventionnellement la banque à lui payer la somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts pour manquement à son devoir de mise en garde.

Par la production d'extrait du site internet Copains d'avant, la banque observe qu'au jour de la souscription des deux prêts, Monsieur [Z] occupait un emploi de délégué médical.

Or, Monsieur [S] [K] n'a présenté aucun élément sur les ressources de son concubin Monsieur [Z] au moment de la souscription des deux prêts litigieux.

En ce que la charge de la preuve lui incombe, il ne peut pas faire grief à la banque de n'avoir produit aucun élément établissant qu'elle aurait dû elle-même procéder à une vérification de l'absence de surendettement des deux emprunteurs résultant de la souscription des prêts.

Au surplus, il sera observé que l'appelant n'a produit aucun élément sur le patrimoine de Monsieur [Z], ou le sien propre, au jour de la souscription des deux prêts litigieux.

Par-là même, Monsieur [S] [K] échoue dans l'administration de la preuve qui lui incombe tendant à l'inadaptation du prêt aux capacités financières des co-emprunteurs ou à l'existence d'un risque d'endettement.

L'action de Monsieur [S] [K] ne peut donc pas prospérer sur la base d'un manquement de la banque à son obligation de mise en garde.

Sur le manquement de la banque à son obligation de bonne foi.

Les contrats doivent s'exécuter de bonne foi.

En observant, exactement, que la banque n'a pas donné suite à ses propositions de règlement amiable, pour préférer prononcer la déchéance du terme, Monsieur [S] [K] fait grief à celle-ci de sa mauvaise foi dans l'exécution contractuelle.

Il soutient en particulier qu'il avait trouvé un autre établissement bancaire, susceptible de racheter les crédits souscrits auprès de la banque, et de désintéresser ainsi totalement cette dernière, à condition d'une désolidarisation de ceux-ci à l'égard de Monsieur [Z], celle-ci devant être prononcée par la banque.

Mais alors que sa liberté contractuelle offrait à la banque la faculté de ne donner aucune suite aux propositions amiables présentées par Monsieur [S] [K], et que le prononcé de la déchéance du terme par la banque procède très exactement des termes contractuels sur lesquels s'est rencontrée la volonté des parties, aucune mauvaise foi de la banque n'est caractérisée.

L'action de Monsieur [S] [K] ne peut donc pas prospérer sur la base d'un manquement de la banque à son obligation de bonne foi.

Monsieur [S] [K] sera donc débouté de ses demandes de dommages-intérêts à l'égard de la banque et du surplus de ses demandes, et le jugement sera confirmé de ce chef.

* * * * *

Le présent arrêt vaudra titre de restitution des sommes versées en exécution du jugement déféré.

Le jugement sera infirmé pour avoir dit n'y avoir lieu à condamnation au titre des frais irrépétibles de première instance, et pour avoir condamné la banque, triomphante en l'essentiel de sa prétention, aux dépens de première instance.

Monsieur [S] [K] sera débouté de ses demandes au titre des frais irrépétibles des deux instances, et sera condamné in solidum avec Monsieur [Z] à payer au même titre à la banque la somme de 3000 euros.

Monsieur [S] [K] et Monsieur [Z] seront condamnés in solidum aux entiers dépens des deux instances, avec distraction au profit du conseil de la banque.

PAR CES MOTIFS:

La cour, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt réputé contradictoire, et après en avoir délibéré conformément à la loi,

Rejette la demande de la société anonyme coopérative de banque à capital variable Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne tendant à déclarer irrecevable et à écarter des débats la pièce n°21 présentée par Monsieur [Y] [S] [K];

Confirme le jugement en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a:

- réduit à zéro les sommes sollicitées par la Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne au titre des indemnités conventionnelles;

- dit n'y avoir lieu à condamnation au titre des frais irrépétibles;

- condamné la Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne aux dépens avec distraction avec faculté de recouvrement au profit de Maître Arnaud Gervais;

Infirme le jugement de ces seuls derniers chefs;

Statuant à nouveau dans cette limite et y ajoutant:

Condamne solidairement Monsieur [Y] [S] [K] et Monsieur [B] [Z] à payer à la société anonyme coopérative de banque à capital variable Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne les sommes de:

- 11 494,52 euros au titre de l'indemnité contractuelle prévue dans le cadre du prêt privilège;

- 490 euros au titre de l'indemnité contractuelle prévue dans le cadre du prêt à taux zéro;

Rappelle qu'aucune voie d'exécution forcée ne sera engagée tant que les mesures recommandées par la commission de surendettement seront respectées;

Déboute Monsieur [Y] [S] [K] de ses demandes au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel;

Condamne in solidum Monsieur [Y] [S] [K] et Monsieur [B] [Z] à payer à la société anonyme coopérative de banque à capital variable Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne la somme de 3000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel;

Condamne in solidum Monsieur [Y] [S] [K] et Monsieur [B] [Z] aux entiers dépens de première instance et d'appel, avec distraction au profit de la Scp Delvincourt Caulier-Richard Castello, conseil de la société anonyme coopérative de banque coopérative à capital variable Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne, de ceux des dépens de première instance et d'appel dont elle a fait l'avance sans en avoir reçu provision;

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Le greffier La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Reims
Formation : 1ere chambre sect.civile
Numéro d'arrêt : 20/01005
Date de la décision : 29/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-29;20.01005 ?
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