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08/11/2022 | FRANCE | N°21/01895

France | France, Cour d'appel de Reims, 1ère chambre section inst, 08 novembre 2022, 21/01895


R.G. : N° RG 21/01895 - N° Portalis DBVQ-V-B7F-FCF2

ARRÊT N°

du : 08 novembre 2022





AL



















Formule exécutoire le :

à :



la SELAS FIDAL



Me Antoine GINESTRA





COUR D'APPEL DE REIMS

1ère CHAMBRE CIVILE - SECTION INSTANCE



ARRÊT DU 08 NOVEMBRE 2022





APPELANTE :

d'un jugement rendu le 13 septembre 2021 par le Juge des contentieux de la protection de Reims (RG 11-19-1435)
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CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DU NORD EST

[Adresse 1]

[Localité 3]



Représentée par Me Cécile SANIAL de la SELAS FIDAL, avocat au barreau de REIMS



INTIMÉS :



Monsieur [P] [G]

[Adresse 2]

[Localité 4]



Représenté...

R.G. : N° RG 21/01895 - N° Portalis DBVQ-V-B7F-FCF2

ARRÊT N°

du : 08 novembre 2022

AL

Formule exécutoire le :

à :

la SELAS FIDAL

Me Antoine GINESTRA

COUR D'APPEL DE REIMS

1ère CHAMBRE CIVILE - SECTION INSTANCE

ARRÊT DU 08 NOVEMBRE 2022

APPELANTE :

d'un jugement rendu le 13 septembre 2021 par le Juge des contentieux de la protection de Reims (RG 11-19-1435)

CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DU NORD EST

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Cécile SANIAL de la SELAS FIDAL, avocat au barreau de REIMS

INTIMÉS :

Monsieur [P] [G]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représenté par Me Antoine GINESTRA, avocat au barreau de REIMS

Madame [U] [D] épouse [G]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Antoine GINESTRA, avocat au barreau de REIMS

DÉBATS :

A l'audience publique du 27 septembre 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 08 novembre 2022, sans opposition de la part des conseils des parties et en application de l'article 805 du code de procédure civile, Madame Anne LEFEVRE, conseiller, a entendu les conseils des parties en leurs conclusions et explications, puis ce magistrat en a rendu compte à la cour dans son délibéré

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

M. Benoît PETY, président de chambre

Mme Anne LEFEVRE, conseiller

Mme Christel MAGNARD, conseiller

GREFFIER D'AUDIENCE :

Madame Lucie NICLOT, greffier

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, signé par M. PETY, Président de chambre, et par Madame NICLOT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

Selon convention du 28 novembre 2014, M. [P] [G] et Mme [U] [D], son épouse, ont ouvert un compte n° [XXXXXXXXXX05] auprès de la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel du Nord Est, société coopérative de crédit, dite ci-après le Crédit Agricole.

Le 9 octobre 2019, le Crédit Agricole a fait assigner M. et Mme [G] devant le tribunal d'instance de Reims en condamnation au paiement du solde du compte.

Lors de l'audience du 4 juin 2021, le Crédit Agricole a demandé la condamnation solidaire des époux [G] à lui payer la somme de 56 870,65 euros avec intérêts au taux légal à compter du 9 octobre 2019, outre une indemnité de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en sus des dépens.

M. et Mme [G] ont sollicité :

- la condamnation de la banque à fournir, sous astreinte de 50 euros par jour dont le juge se réserverait la liquidation, les conditions générales du compte, les conditions tarifaires, l'intégralité des relevés du compte depuis son ouverture, les récapitulatifs annuels des sommes perçues par la banque pour la gestion d'un compte de dépôt,

- à défaut de production de ces pièces, le rejet des prétentions du Crédit Agricole,

- le débouté de toutes demandes adverses parce que le Crédit Agricole ne dispose d'aucune action en paiement à leur encontre,

- la condamnation de la banque au paiement d'une somme de 1 500 euros à chaque défendeur sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.

Le jugement du 13 septembre 2021, assorti de l'exécution provisoire, a :

- rejeté la demande de M. et Mme [G] d'enjoindre au Crédit Agricole la production sous astreinte des pièces énumérées,

- rejeté la demande en paiement du Crédit Agricole au titre du solde débiteur du compte,

- rejeté les autres demandes,

- 'condamné le Crédit Agricole'.

Le 12 octobre 2021, le Crédit Agricole a fait appel du jugement en ce qu'il rejette sa demande en paiement du solde débiteur du compte, rejette les autres demandes et le 'condamne'.

Par conclusions du 7 juillet 2022, le Crédit Agricole demande à la cour de :

- débouter M. et Mme [G] de toutes leurs prétentions,

- confirmer le jugement en ce qu'il rejette la demande en production de pièces de M. et Mme [G],

- l'infirmer en ce qu'il rejette l'ensemble de ses demandes,

- condamner solidairement M. et Mme [G] à lui payer la somme de 49 800,02 euros au titre du solde débiteur du compte n° [XXXXXXXXXX05], avec intérêts au taux légal à compter de la notification de ses conclusions intervenue le 10 janvier 2022,

- condamner in solidum M. et Mme [G] au paiement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- les condamner in solidum aux dépens.

Selon écritures du 4 septembre 2022, M. et Mme [G] concluent :

- au constat de ce que le Crédit Agricole n'a communiqué qu'un unique document qu'il qualifie de 'convention de compte de dépôt à vue',

- à ce qu'il soit ordonné au Crédit Agricole de fournir sous astreinte de 50 euros par jour :

. les conditions générales du compte,

. les conditions tarifaires,

. les récapitulatifs annuels des sommes perçues par la banque pour la gestion d'un compte de dépôt,

. les justificatifs des informations précontractuelles,

- à la liquidation de l'astreinte par la cour,

- à défaut de déférer à la communication de pièces, au rejet des demandes de la banque,

- au constat de ce que la banque ne dispose d'aucune action en paiement contre M. et Mme [G], faute d'avoir dénoncé le compte bancaire,

- au débouté de toutes demandes de la banque,

- à sa condamnation au paiement à chaque intimé d'une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- à sa condamnation aux dépens.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 6 septembre 2022.

Motifs de la décision :

Il convient de rectifier l'erreur matérielle affectant le jugement, en ce que, après avoir en sa motivation dit que 'le Crédit Agricole, partie perdante, supportera la charge des dépens', le dispositif de la décision dit simplement : 'Condamne la Caisse régionale de Crédit Agricole Mutuel Nord Est', en omettant de préciser 'aux dépens'.

Sur la demande en production de documents :

Devant la cour, le Crédit Agricole produit une convention d'ouverture d'un 'compte de dépôt à vue particulier'signée par M. et Mme [G] le 28 novembre 2014 ainsi que l'intégralité des relevés du compte depuis son ouverture.

Les époux [G] réclament toujours la production des conditions générales du compte, des conditions tarifaires, des récapitulatifs annuels des sommes perçues par la banque pour la gestion d'un compte de dépôt, et ajoutent devant la cour une demande en communication des justificatifs des informations précontractuelles.

Le premier juge a exactement apprécié que, si les document sollicités sont indispensables au succès des demandes de la banque adverses, 'les prétentions du Crédit Agricole seront simplement rejetées' et qu'en conséquence, la production des pièces sus-énumérées n'a pas d'intérêt pour la résolution du litige, de sorte que la demande en injonction de verser des pièces complémentaires doit être rejetée. Le jugement est confirmé de ce chef.

La même analyse conduit à débouter M. et Mme [G] de leur demande nouvelle tendant à ordonner à la Caisse régionale de Crédit Agricole mutuel du Nord Est de produire, sous astreinte, les justificatifs des informations précontractuelles.

Sur la demande en paiement du solde débiteur du compte n° [XXXXXXXXXX05] :

Le Crédit Agricole produit, en pièce n°1, une convention de compte de dépôt à vue particulier signée le 28 novembre 2014 à [Localité 6], pour l'ouverture d'un compte joint, avec remise d'un chéquier et d'une carte bancaire Gold débit différé. Le contrat mentionne que les titulaires peuvent, sous réserve de l'acceptation de la Caisse régionale, se voir accorder une autorisation de découvert de moins de trois mois, dont les modalités d'ouverture et d'utilisation seront fixées par un contrat distinct. La convention précise également que le taux maximum des intérêts débiteurs pour un découvert non convenu est de 20,08 % l'an au jour du contrat, qu'il s'agit d'un taux variable et que cette information n'équivaut pas à un droit à découvert.

Le compte de dépôt est un compte ouvert dans les livres d'un établissement bancaire, destiné à accueillir des dépôts de fonds de la part de clients particuliers. L'argent peut être retiré à tout moment par le déposant, dans la limite de la capacité de la banque au regard de sa liquidité et de sa solvabilité. Le compte de dépôt donne accès aux services de règlement proposés par l'établissement bancaire. Les approvisionnements (salaires) ou prélèvements réguliers (loyer, abonnements...) y sont contractualisés. Ce compte est parfois assorti d'une autorisation de découvert permettant que son solde soit temporairement négatif à concurrence d'un plafond de débit autorisé en contrepartie de l'application d'un taux d'intérêt.

Il ne doit pas être confondu avec le compte courant, qui n'est réglementé par aucun texte et est plutôt destiné aux personnes morales. Ce dernier suppose la réciprocité des remises ; le teneur de compte est présumé autoriser les paiements allant au-delà de la provision du compte dans la limite de cette réciprocité. Le compte courant suggère ainsi une certaine opposabilité des autorisations de découvert, intéressant les commerçants ou entreprises qui doivent pouvoir compter sur des facilités de caisse.

Les précisions énoncées par la convention de compte n° [XXXXXXXXXX05] du 28 novembre 2014 et citées ci-dessus font apparaître qu'elle n'a pas les caractéristiques d'un compte courant. Le jugement doit donc être approuvé en ce qu'il retient la qualification de compte de dépôt et, en l'absence d'autorisation de découvert, applique au solde débiteur du compte les règles relatives au dépassement prévues par le code de la consommation.

Selon l'article L. 312-93 du code de la consommation, 'Lorsque le dépassement se prolonge au-delà de trois mois, le prêteur propose sans délai à l'emprunteur un autre type d'opération de crédit au sens du 4° de l'article L. 311-1, dans les conditions régies par les dispositions du présent chapître.' Cet article s'applique aux opérations de crédit consenties sous la forme d'un dépassement mentionné au 11° de l'article L. 311-1.

Pour sanction du non-respect des formalités de l'article L. 312-93, le prêteur ne peut réclamer à l'emprunteur les sommes correspondant aux intérêts et frais de toute nature applicables au titre du dépassement (article L. 341-9 du code de la consommation).

L'intégralité des relevés du compte joint n° [XXXXXXXXXX05] est communiquée. Elle révèle que le compte s'est trouvé, pour la première fois, en position débitrice pendant une durée supérieure à trois mois de juin à août 2015, de sorte que le Crédit Agricole aurait dû transmettre à M. et Mme [G], dès septembre 2015, une offre préalable de crédit et qu'à défaut de l'avoir fait, il est déchu de son droit aux intérêts et aux frais, ce que le prêteur reconnaît.

L'article R. 312-35 du code de la consommation prévoit : 'Le tribunal judiciaire connaît des litiges nés de l'application des disppositions du présent chapitre. Les actions en paiement engagées devant lui à l'occasion de la défaillance de l'emprunteur doivent être formées dans les deux ans de l'événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion. Cet événement est caractérisé par :

- le non-paiement des sommes dues à la suite de la résiliation du contrat ou de son terme ;

- ou le premier incident de paiement non régularisé ;

- ou le dépassement non régularisé du montant total du crédit consenti dans le cadre d'un contrat de crédit renouvelable ;

- ou le dépassement, au sens du 13° de l'article L. 311-1, non régularisé à l'issue du délai prévu à l'article L. 312-93 (...).'

Le solde du compte n° [XXXXXXXXXX05] est redevenu débiteur au 29 novembre 2017, suite au rejet à cette date d'un chèque de 30 636,45 euros, et il est resté débiteur par la suite. Le dépassement non régularisé à l'issue du délai de trois mois, soit au 28 février 2018, caractérise l'événement qui a donné naissance à l'action en paiement. L'assignation délivrée à M. et Mme [G] étant intervenue le 9 octobre 2019, l'action en paiement a été engagée avant l'expiration du délai de forclusion de deux années de l'article R. 312-35 précité et se trouve recevable.

Lors de la mise en demeure délivrée à chacun des époux [G] le 25 mai 2019, le montant du solde débiteur du compte de dépôt s'élevait à 59 538,38 euros. Selon l'exact calcul repris avec précision dans les écritures de la banque, une somme de 9 738,10 euros correspondant au cumul des frais et intérêts échus de septembre 2015 à mai 2019, doit être déduite du montant du solde débiteur du compte, faute de justifier de l'existence d'une offre préalable de crédit ainsi que déjà exposé.

Ainsi le Crédit Agricole est fondé en sa demande en paiement du solde débiteur du compte à hauteur de la somme de 49 800,02 euros, avec intérêts au taux légal à compter de la notification des conclusions de l'appelant du 10 janvier 2022 et jusqu'à parfait règlement. En conséquence, M. et Mme [G] sont condamnés solidairement au paiement des dites sommes et intérêts.

La décision combattue est réformée en ce sens.

Sur les autres demandes :

Le Crédit Agricole est reconnu fondé pour l'essentiel en ses prétentions. Par suite, M. et Mme [G] sont condamnés in solidum aux dépens de première instance et d'appel.

L'équité commande d'accueillir la demande du Crédit Agricole sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur de 700 euros.

M. et Mme [G] sont déboutés de leurs prétentions au même titre.

Par ces motifs,

Rectifie l'erreur matérielle affectant le jugement du 13 septembre 2021 du juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Reims et dit que, dans son dispositif, au lieu de lire 'Condamne la Caisse régionale de Crédit Agricole Mutuel Nord Est', il faut lire : 'Condamne la Caisse régionale de Crédit Agricole Mutuel Nord Est aux dépens',

Confirme le jugement en ce qu'il rejette la demande des époux [G] d'enjoindre à la Caisse régionale de Crédit Agricole mutuel du Nord Est de produire sous astreinte les conditions générales du compte, les conditions tarifaires, les récapitulatifs annuels des sommes perçues par la banque pour la gestion d'un compte de dépôt,

Y ajoutant,

Déboute M. et Mme [G] de leur demande tendant à ordonner à la Caisse régionale de Crédit Agricole mutuel du Nord Est de produire, sous astreinte, les justificatifs des informations précontractuelles,

Infirme le jugement pour le surplus,

Statuant à nouveau,

Condamne solidairement M. et Mme [G] à payer à la Caisse régionale de Crédit Agricole mutuel du Nord Est, au titre du solde débiteur du compte de dépôt n°[XXXXXXXXXX05], la somme de 49 800,02 euros, avec intérêts au taux légal à compter de la notification des conclusions d'appelant du 10 janvier 2022 et jusqu'à parfait règlement,

Condamne in solidum M. et Mme [G] à payer à la Caisse régionale de Crédit Agricole mutuel du Nord Est la somme de 700 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute M. et Mme [G] de leur demande pareillement fondée,

Condamne in solidum M. et Mme [G] aux dépens de première instance et d'appel, avec pour ces derniers possibilité de recouvrement direct au profit de la SELAS FIDAL, avocats, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Reims
Formation : 1ère chambre section inst
Numéro d'arrêt : 21/01895
Date de la décision : 08/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-08;21.01895 ?
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