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11/10/2022 | FRANCE | N°21/00366

France | France, Cour d'appel de Reims, 1ère chambre section inst, 11 octobre 2022, 21/00366


ARRET N°

du 11 octobre 2022



R.G : N° RG 21/00366 - N° Portalis DBVQ-V-B7F-E6SD





[V]

[V]





c/



[O]

[K]











AL







Formule exécutoire le :

à :



Me Nicolas VALLET



la SCP LEDOUX FERRI RIOU-JACQUES TOUCHON MAYOLET

COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE CIVILE- SECTION INSTANCE



ARRET DU 11 OCTOBRE 2022



APPELANTS :

d'un jugement rendu le 09 novembre 2020 par

le tribunal judiciaire de Charleville-Mézières



Madame [H] [V]

[Adresse 5]

[Localité 2]



Représentée par Me Nicolas VALLET, avocat au barreau des ARDENNES



Monsieur [U] [V]

[Adresse 5]

[Localité 2]



Représenté par Me Nicolas VALLET, avocat au barrea...

ARRET N°

du 11 octobre 2022

R.G : N° RG 21/00366 - N° Portalis DBVQ-V-B7F-E6SD

[V]

[V]

c/

[O]

[K]

AL

Formule exécutoire le :

à :

Me Nicolas VALLET

la SCP LEDOUX FERRI RIOU-JACQUES TOUCHON MAYOLET

COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE CIVILE- SECTION INSTANCE

ARRET DU 11 OCTOBRE 2022

APPELANTS :

d'un jugement rendu le 09 novembre 2020 par le tribunal judiciaire de Charleville-Mézières

Madame [H] [V]

[Adresse 5]

[Localité 2]

Représentée par Me Nicolas VALLET, avocat au barreau des ARDENNES

Monsieur [U] [V]

[Adresse 5]

[Localité 2]

Représenté par Me Nicolas VALLET, avocat au barreau des ARDENNES

INTIMES :

Monsieur [P] [O]

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représenté par Me Quentin MAYOLET de la SCP LEDOUX FERRI RIOU-JACQUES TOUCHON MAYOLET, avocat au barreau des ARDENNES

Madame [X] [B] [K]

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représentée par Me Quentin MAYOLET de la SCP LEDOUX FERRI RIOU-JACQUES TOUCHON MAYOLET, avocat au barreau des ARDENNES

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :

M. Benoît PETY, président de chambre

Mme Anne LEFEVRE, conseiller

Mme Christel MAGNARD, conseiller

GREFFIER :

Madame Lucie NICLOT, greffier

DEBATS :

A l'audience publique du 13 septembre 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 11 octobre 2022,

ARRET :

Contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe le 11 octobre 2022 et signé par M. Benoît PETY, président de chambre, et Madame Lucie NICLOT, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

Selon bail verbal à effet du 1er octobre 2012, M. [P] [O] et Mme [X] [K] ont consenti à M. [U] [V] et à Mme [H] [W], son épouse, un bail d'habitation portant sur une maison située [Adresse 3], moyennant un loyer mensuel initial de 750 euros.

Les époux [V] ont donné congé le 15 août 2017 et ont restitué les clés par voie postale le 6 novembre 2017.

Par acte du 1er juin 2018, M. [O] et Mme [K] ont fait assigner M. et Mme [V] devant le tribunal d'instance de Charleville-Mézières en condamnation solidaire au paiement d'une somme de 9 857,36 euros comprenant arriérés de loyer (1 500 euros), charges d'eau impayées (2 378,24 euros), taxe d'enlèvement des ordures ménagères de 2013 à 2017 (1 654 euros), réparations locatives (3 399 euros) et frais d'huissier (926,12 euros). Les bailleurs réclamaient également la condamnation solidaire des ex-locataires aux dépens et au paiement d'une indemnité de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Lors de l'audience du 21 septembre 2020, M. [O] et Mme [K] ont repris leurs demandes. M. et Mme [V] ont sollicité le débouté des réclamations adverses et la condamnation solidaire des bailleurs aux dépens et au paiement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. Ils ont opposé la prescription de l'action en recouvrement des sommes antérieures au 27 mars 2014 et l'absence de justificatifs de certaines charges.

Le jugement du 9 novembre 2020 du tribunal judiciaire de Charleville-Mézières a, sous exécution provisoire :

- condamné solidairement M. et Mme [V] à payer à M. [O] et Mme [K] la somme de 2 961 euros au titre des réparations locatives et loyers dus, avec intérêts au taux légal à compter de la décision,

- débouté M. [O] et Mme [K] du surplus de leurs demandes,

- condamné in solidum M. et Mme [V] aux dépens et au paiement à M. [O] et Mme [K] de la somme de 300 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

A titre liminaire, le tribunal a écarté des débats la totalité des pièces de M. et Mme [V], au motif qu'elles n'avaient pas été communiquées à M. [O] et Mme [K].

Le 22 février 2021, M. et Mme [V] ont fait appel du jugement en toutes ses dispositions les condamnant à paiement.

Par conclusions du 30 août 2022, M. et Mme [V] demandent à la cour, au visa des articles 15, 16, 132 et 122 du code de procédure civile, 7-1 et 17-1 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, 82 de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015, et de la loi n°2014-366 du 24 mars 2014 :

- in limine litis,

. de constater l'absence de respect du principe du contradictoire devant le premier juge, faute pour eux de pouvoir répondre à un argument soulevé pour la première fois à l'audience, et de prononcer la nullité du jugement,

. d'ordonner le rejet des écritures et pièces communiquées par les intimés le vendredi 26 août 2022, pour une ordonnance de clôture fixée au mardi 30 août 2022, ne laissant aux appelants qu'un jour ouvrable pour répondre,

- de dire M. [O] et Mme [K] prescrits en leurs demandes en paiement parce qu'ils avaient jusqu'au 27 mars 2017 pour solliciter le recouvrement d'arriérés antérieurs au 27 mars 2014, date d'entrée en vigueur de la loi ALUR,

- de dire que M. [O] et Mme [K] ne justifient pas que les factures d'eau et les taxes d'enlèvement des ordures ménagères constituent des accessoires de loyer, récupérables sur justificatifs, et les débouter de leurs demandes à ce titre,

- de dire que l'état des lieux convenu pour le 1er novembre 2017 n'a pu être organisé du fait de M. [O] et Mme [K],

- de dire que les locataires ont quitté les lieux le 1er novembre 2017 et restitué les clés le 6 novembre 2017,

- de dire que les locataires ne sont pas tenus du loyer de novembre 2017,

- de dire que l'état des lieux par procès-verbal de constat d'huissier le 11 décembre 2017 n'est pas contradictoire, que les bailleurs se sont sciemment abstenus de convoquer les locataires à leur nouvelle adresse, pourtant connue des bailleurs,

- de dire en conséquence que les factures de remise en état ne sauraient être imputées à M. et Mme [V] et de débouter M. [O] et Mme [K] de leurs demandes en paiement des frais de remise en état,

- de débouter M. [O] et Mme [K] de toutes leurs autres demandes,

- de les condamner in solidum à payer à M. et Mme [V] une somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles,

- de les condamner in solidum aux dépens de première instance et d'appel.

Selon écritures du 25 août 2021, M. [O] et Mme [K] ont conclu, au visa des articles 74 du code de procédure civile et 82 de la loi n°2015-990 du 6 août 2015 et de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 :

- à l'irrecevabilité et au mal-fondé de l'exception de nullité soulevée par les époux [V],

- à la confirmation du jugement entrepris s'agissant des condamnations solidaires de M. et Mme [V] au paiement de 1 050 euros de loyers dus et des dépens,

- par appel incident, à l'infirmation du jugement pour le surplus,

- à la condamnation solidaire de M. et Mme [V] à leur payer les sommes suivantes :

. 1 654 euros au titre des taxes d'enlèvement des ordures ménagères de 2013 à 2017,

. 2 378,24 euros au titre des factures d'eau impayées du 1er octobre 2012 au '31 novembre' 2017,

. 3 399 euros au titre des travaux de remise en état du logement,

. 926,12 euros au titre des frais d'huissier de justice,

- à la condamnation solidaire de M. et Mme [V] à leur payer une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de première instance,

- à l'application aux sommes dues des intérêts au taux légal à compter du 1er juin 2018,

- à la condamnation solidaire de M. et Mme [V] à leur payer une somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en appel,

- à la condamnation solidaire de M. et Mme [V] aux dépens de première instance et d'appel.

M. [O] et Mme [K] ont notifié de nouvelles écritures le 26 août 2022, écritures identiques aux précédentes mais avec lesquelles étaient communiquées 16 nouvelles pièces (pièces n° 10 à 25) relatives aux charges locatives (avis de taxes foncières, factures d'eau et assainissement).

L'ordonnance de clôture est intervenue le 30 août 2022.

Motifs de la décision :

Sur la demande en nullité du jugement entrepris :

Il résulte du jugement déféré que, lors de l'audience du 21 septembre 2020, M. [O] et Mme [K], représentés par leur avocat, ont soulevé un incident de procédure, indiquant ne pas avoir reçu les pièces des défendeurs et sollicitant qu'elles soient écartées des débats.

Le premier juge, après avoir relevé que M. et Mme [V] ne faisaient pas d'observation et ne produisaient aucun bordereau de communication de pièces, a écarté des débats la totalité de leurs pièces.

M. et Mme [V] font valoir que cet incident de procédure a été évoqué oralement et pour la première fois à l'audience du 21 septembre 2020, après qu'eux-mêmes ont choisi de déposer leur dossier, de sorte qu'aucune discussion contradictoire n'a eu lieu sur ce point, ce qui leur a causé un grief évident.

Cependant, M. [O] et Mme [K] répondent avec pertinence que, selon l'article 562 du code de procédure civile, l'appel ne défère à la cour que la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément ou implicitement et de ceux qui en dépendent, qu'en l'espèce l'appel de M. et Mme [V] ne tendant pas à l'annulation du jugement, la cour n'est pas saisie de ce chef de demande.

Sur la demande en rejet des écritures notifiées le 26 août 2022 par les intimés :

Selon l'article 16 du code de procédure civile, 'le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction. Il ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement (...)'

M. et Mme [V] ne précisent pas si les conclusions notifiées le 26 août 2022 et les pièces communiquées le vendredi 26 août 2022 par M. [O] et Mme [K], alors que l'ordonnance de clôture intervenait le mardi 30 août 2022, appelaient une réponse de leur part. En tout état de cause, eux-mêmes ont de nouveau conclu le 30 août 2022 et n'établissent donc pas de circonstances particulières empêchant le respect de la contradiction. Par suite, ils sont déboutés de leur demande tendant à faire écarter des débats les conclusions et pièces adverses notifiées ou communiquées le 26 août 2022.

Sur la dette de loyers :

Lorsqu'il émane du locataire, le délai de préavis applicable au congé est de trois mois, sauf exceptions. S'il est fait par lettre recommandée avec avis de réception, le délai court à compter du jour de réception de la lettre recommandée. Pendant le délai de préavis, le locataire est redevable du loyer et des charges concernant tout le délai de préavis si c'est lui qui a notifié le congé, sauf si le logement est occupé avant la fin du préavis par un autre locataire en accord avec le bailleur (article 15 I de la loi du 6 juillet 1989).

L'avis de réception de la lettre recommandée adressée par les locataires pour donner congé a été signé le 12 août 2017 par M. [O]. Par suite, le délai de préavis expire le 12 novembre 2017 et les locataires sont débiteurs du loyer de novembre 2017 à concurrence de 12 jours sur 30. L'argumentation de M. et Mme [V] selon laquelle un état des lieux avait été prévu le 1er novembre 2017 et les clés ont été remises au bailleur le 6 novembre 2017, ce qui les dispenserait de tout loyer au titre du dit mois, est inopérante. Dès lors, le jugement doit être confirmé en ce qu'il fixe à la somme de 1 050 euros la dette de loyers.

Sur la demande en paiement des factures d'eau et taxes d'enlèvement des ordures ménagères :

Sur la recevabilité de cette demande :

M. et Mme [V] s'appuient sur l'article 7-1 de la loi du 6 juillet 1989, en sa rédaction résultant de la loi Alur du 24 mars 2014 (entrée en vigueur le 27 mars 2014), selon lequel : 'Toutes les actions dérivant d'un contrat de bail sont prescrites par trois ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer ce droit.', pour opposer aux bailleurs la prescription au 27 mars 2017 de la demande en paiement de factures d'eau et taxes d'enlèvement des ordures ménagères, qu'ils ont introduite par assignation du 1er juin 2018.

Cependant le régime transitoire de la loi Alur posait le principe que les contrats de location en cours au 27 mars 2014 étaient soumis aux dispositions de la loi du 6 juillet 1989 dans leur rédaction applicable au jour de la formation du contrat, sauf quelques exceptions.

La loi n°2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, en vigueur depuis le 8 août 2015, a simplifié les modalités d'application dans le temps des dispositions de la loi Alur pour unifier à court terme le régime des baux d'habitation. Elle a ainsi prévu l'application de la loi Alur aux baux en cours s'agissant du délai de prescription de l'article 7-1 de la loi de 1989, dans les conditions fixées par l'article 2222 du code civil.

L'article 2222 du code civil dispose : 'En cas de réduction de la durée du délai de prescription (...), ce nouveau délai court à compter du jour de l'entrée en vigueur de la loi nouvelle, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.'

Lorsque le bail du 1er octobre 2012 a été conclu, le délai de prescription était de cinq années. Le délai de prescription de trois ans est devenu applicable le 8 août 2015 (et non le 27 mars 2014), sans que la durée totale du délai puisse dépasser cinq années.

Par suite, l'assignation intervenue le 1er juin 2018 n'entraîne la prescription que des créances antérieures au 1er juin 2013.

Sur le montant des charges dues à ces titres :

Il résulte clairement du courriel daté du 4 septembre 2012 adressé par M. [O] à Mme [V] (pièces n°1) que le bail a été conclu moyennant un loyer de 750 euros hors charges et que l'eau, l'électricité, le gaz, la taxe d'habitation seraient facturés en sus. Les locataires étaient donc informés de ce que les charges seraient facturées indépendamment du loyer et en plus de celui-ci, comme l'analyse exactement le premier juge.

En l'absence d'appel de provision sur charges, celles-ci ne peuvent être réclamées au locataire qu'après paiement des factures par le propriétaire.

La taxe foncière 2013 intègre une 'taxe ordures ménagères' de 314 euros. Cette taxe foncière ayant été établie le 6 septembre 2013, elle n'est pas atteinte de prescription. M. [O] et Mme [K] communiquent les taxes foncières de 2013 à 2017 et justifient ainsi d'une créance de 1 652 euros contre les locataires. En effet, la taxe d'enlèvement des ordures ménagères de 2017 est de 332 euros et non 334 euros comme repris dans le décompte en pièce n°9.

Les plus anciennes factures d'eau produites concernent la consommation des locataires du 1er octobre 2012 au 6 novembre 2012. La facture au profit de 'Eau et Force' est datée du 4 février 2013 et payable au plus tard le 19 février 2013, la facture au profit de la communauté d'agglomération de [Localité 6] est datée du 3 juillet 2013 et devait être réglée 'sous 30 jours à réception'. Il n'est pas justifié de ce que la première facture a été payée après le 1er juin 2013, la mention 'réglé le 24 janvier 2014" suivie d'une signature, portée par le bailleur, n'ayant pas de valeur probante. Par suite, la demande en paiement d'une somme de 8,71 euros de ce chef est tenue pour prescrite. S'agissant de la seconde facture, aucun paiement n'a pu intervenir avant le 3 juillet 2013, de sorte qu'aucune prescription n'est encourue.

M. [O] et Mme [K] produisent les autres factures d'eau et assainissement intervenues jusqu'au 28 novembre 2017 (pièces n°15 à 25). Ils justifient ainsi d'une créance de 2 369,53 euros à l'encontre de leurs locataires.

En conséquence, M. et Mme [V] sont condamnés à payer à M. [O] et Mme [K] les sommes de 1 652 euros au titre de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères de 2013 à 2017 et de 2 369,53 euros au titre des factures d'eau d'octobre 2012 à novembre 2017. Le jugement entrepris est réformé en ce sens.

Sur les frais de remise en état :

L'article 7 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 précise que le locataire est obligé (...) c) de répondre des dégradations et pertes qui surviennent pendant la durée du contrat dans les locaux dont il a la jouissance exclusive, à moins qu'il ne prouve qu'elles ont eu lieu par cas de force majeure, par la faute du bailleur ou par le fait d'un tiers qu'il n'a pas introduit dans le logement,

d) de prendre à sa charge l'entretien courant du logement, des équipements mentionnés au contrat et les menues réparations ainsi que l'ensemble des réparations locatives sauf si elles sont occasionnées par vétusté, malfaçon, vice de construction, cas fortuit ou force majeure.

C'est en comparant l'état des lieux d'entrée et l'état des lieux de sortie que sont établis les manquements reprochés au locataire.

M. et Mme [V] exposent que les parties avaient convenu de procéder à l'état des lieux de sortie le 1er novembre 2017 à 16h30, mais que les propriétaires ne sont pas venus. Les locataires leur ont alors envoyé les clés par lettre recommandée avec avis de réception distribuée le 6 novembre 2017. Les propriétaires ont fait citer les locataires par huissier de justice le 29 novembre 2017 pour établir un état des lieux le 11 décembre 2017. Cependant, l'huissier a tenté de citer M. et Mme [V] à l'adresse du logement qu'ils avaient quitté. Ils n'ont donc pas été informés de cette convocation, alors que le bailleur disposait de leur nouvelle adresse, indiquée sur la lettre recommandée de transmission des clés reçue le 6 novembre 2017. Ils en déduisent que le procès-verbal d'état des lieux de sortie ne leur est pas opposable, et ce d'autant qu'il a été réalisé plus d'un mois et demi après leur départ.

Toutefois, d'une part, M. et Mme [V] ne justifient pas de ce que les bailleurs avaient accepté la date du 1er novembre 2017 pour un état des lieux contradictoire. D'autre part, M. [O] et Mme [K] versent aux débats le courriel envoyé à l'huissier par M. [V] le 2 décembre 2017, par lequel il s'étonne de ce que l'huissier ait pu adresser un courrier à la nouvelle adresse des locataires dès le 30 novembre 2017, alors que, la veille, la tentative de convocation (transformée en procès-verbal de recherches infructueuses) à leur ancien logement les tenait pour partis sans laisser d'adresse. Ce courriel démontre que le 2 décembre 2017, M. et Mme [V] étaient informés de la date prévue pour l'état des lieux de sortie.

Par suite, le premier juge a pertinemment considéré qu'il pouvait se prononcer par comparaison entre les états des lieux d'entrée et de sortie, ce dernier ayant été établi par huissier et contradictoirement débattu devant le tribunal.

De même, ce magistrat a relevé avec justesse que les époux [V] ne formulaient aucune observation sur les réparations locatives mises à leur charge, alors que toutes les pièces nécessaires avaient été versées aux débats. Devant la cour, M. et Mme [V] ne donnent pas plus d'indications sur les postes d'indemnisation qui seraient critiquables.

M. [O] et Mme [K] sollicitent, quant à eux, la réformation du jugement afin que les travaux de remise en état soient chiffrés à 3 399 euros au lieu des 1 911 euros retenus par le premier juge, les 3 399 euros correspondant au devis des travaux de rénovation établi le 5 février 2018 par l'EURL Les Compagnons Peintres Champenois.

Par comparaison des états des lieux des 30 septembre 2012 et 11 décembre 2017, et compte tenu d'une occupation de 5 années, les travaux de remise en état ci-après doivent être retenus.

pièce d'entrée :

remplacement de la tapisserie déchirée : 81 euros (abattement de 70 %)

remplacement des plinthes endommagées : 175 euros

tablettes des fenêtres : 50 euros

cuisine :

remplacement des plinthes endommagées : 165 euros

remplacement d'une poignée de volet roulant et de son support : 40 euros

remplacement des boutons de la plaque de gaz : 60 euros

remise en place de la baguette d'angle du mur des toilettes : 30 euros

séjour :

remplacement des plinthes endommagées : 175 euros

remise en état de la tablette du radiateur : 20 euros

bureau :

remise en place d'une prise électrique : 82,50 euros

remplacement des portes de placard : 415 euros

chambre n°1 :

remplacement des enrouleurs de volets roulants : 40 euros

chambre n°2 :

remplacement de la tapisserie déchirée : 270 euros

salle de bains :

remplacement des portes de placard : 350 euros

lessivage du sol PVC avec un produit spécial : 120 euros

cabinet de toilettes :

remplacement du revêtement du sol : 150 euros (taux d'abattement de 40 %)

Pour un total hors taxe de 2 223,50 euros, soit, avec TVA à 10 %, un montant de 2 445,85 euros.

Le jugement est donc réformé afin que M. et Mme [V] soient condamnés solidairement à payer à M. [O] et Mme [K] une somme de 2 445,85 euros au titre des travaux de remise en état du logement.

Sur les autres demandes :

Les bailleurs sollicitent la condamnation des locataires à leur payer une somme de 926,12 euros au titre des frais d'huissier. Le premier juge, déjà saisi d'une telle demande, n'y a pas répondu.

M. [O] et Mme [K] font état d'un acte d'huissier du 10 septembre 2015 d'un coût de 437 euros, mais n'en justifient pas. Ils produisent l'acte du 30 septembre 2015 de signification aux époux [V] des copies des factures d'eau avec demande de leur payer une somme de 254,83 euros sous huitaine (coût de 163,16 euros), ainsi que les notifications de convocation à l'état des lieux de sortie et le procès-verbal d'état des lieux de sortie du 11 décembre 2017 (coût de 325,96 euros).

M. [O] et Mme [K] sont fondés à obtenir paiement de la somme de 163,16 euros, au titre de l'acte du 30 septembre 2015, puisqu'il est fait droit à leur demande en paiement des charges, ainsi que de la moitié du coût de l'état des lieux de sortie de 325,96 euros, par application de l'article 3-2 alinéa 2 de la loi du 6 juillet 1989. M. et Mme [V] sont donc condamnés solidairement à leur payer la somme de 326,14 euros en indemnisation des frais d'huissier exposés par les bailleurs pour obtenir remboursement des charges acquittées ou pour faire établir un état des lieux.

Les condamnations prononcées portent intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 1er juin 2018, qui en réclamait déjà paiement et vaut mise en demeure, en vertu de l'article 1231-6 du code civil. La décision querellée est réformée de ce chef.

Le sens du présent arrêt conduit à confirmer le jugement en ce qu'il condamne in solidum M. et Mme [V] aux dépens de première instance et au paiement par équité d'une indemnité de 300 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

M. et Mme [V] succombent pour l'essentiel en leur recours, ce qui entraîne leur condamnation in solidum aux dépens d'appel. L'équité commande de les condamner sous la même solidarité à payer en outre à leurs anciens bailleurs une indemnité de 1 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés par ces derniers devant la cour, eux-mêmes étant déboutés de leurs prétentions sur ledit fondement.

Par ces motifs,

Déboute M. et Mme [V] de leur demande tendant à faire écarter des débats les conclusions et pièces adverses notifiées ou communiquées le 26 août 2022,

Confirme le jugement du juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Charleville-Mézières en ce qu'il condamne solidairement M. et Mme [V] à payer à M. [O] et Mme [K] la somme de 1 050 euros au titre des loyers dus et la somme de 300 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens de l'instance,

Infirme le jugement pour le surplus,

Statuant à nouveau,

Condamne solidairement M. et Mme [V] à payer à M. [O] et Mme [K] les sommes ci-après :

- 1 652 euros au titre de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères de 2013 à 2017,

- 2 369,53 euros au titre des charges (factures d'eau) d'octobre 2012 à novembre 2017,

- 2 445,85 au titre des travaux de remise en état du logement,

- 326,14 euros au titre des frais d'huissier de justice,

Dit que les condamnations prononcées, y compris celle au titre de l'arriéré de loyers confirmée par la cour, portent intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 1er juin 2018,

Y ajoutant,

Condamne in solidum M. et Mme [V] à payer à M. [O] et Mme [K] une somme globale de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne in solidum M. et Mme [V] aux dépens d'appel, avec possibilité de recouvrement direct au profit de la SCP Ledoux Ferri Riou-Jacques Touchon Mayolet, avocats, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Reims
Formation : 1ère chambre section inst
Numéro d'arrêt : 21/00366
Date de la décision : 11/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-11;21.00366 ?
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