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13/09/2022 | FRANCE | N°21/01697

France | France, Cour d'appel de Reims, 1ère chambre section inst, 13 septembre 2022, 21/01697


ARRET N°

du 13 septembre 2022



R.G : N° RG 21/01697 - N° Portalis DBVQ-V-B7F-FBVN





S.A.S. SOGEFINANCEMENT





c/



[V]











CM







Formule exécutoire le :

à :



Me Dominique ROUSSEL





COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE CIVILE- SECTION INSTANCE



ARRET DU 13 SEPTEMBRE 2022



APPELANTE :

d'un jugement rendu le 10 août 2021 par le Juge des contentieux de la protection de Ch

alons-en-Champagne



S.A.S. SOGEFINANCEMENT

[Adresse 3]

[Localité 4]



Représentée par Me Dominique ROUSSEL, avocat au barreau de REIMS



INTIME :



Monsieur [U] [V]

[Adresse 1]

[Localité 2]



N'ayant pas constitué avocat



COMPOSITION DE LA...

ARRET N°

du 13 septembre 2022

R.G : N° RG 21/01697 - N° Portalis DBVQ-V-B7F-FBVN

S.A.S. SOGEFINANCEMENT

c/

[V]

CM

Formule exécutoire le :

à :

Me Dominique ROUSSEL

COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE CIVILE- SECTION INSTANCE

ARRET DU 13 SEPTEMBRE 2022

APPELANTE :

d'un jugement rendu le 10 août 2021 par le Juge des contentieux de la protection de Chalons-en-Champagne

S.A.S. SOGEFINANCEMENT

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Dominique ROUSSEL, avocat au barreau de REIMS

INTIME :

Monsieur [U] [V]

[Adresse 1]

[Localité 2]

N'ayant pas constitué avocat

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :

M. Benoît PETY, président de chambre

Mme Anne LEFEVRE, conseiller

Mme Christel MAGNARD, conseiller

GREFFIER :

Madame Lucie NICLOT, greffier

DEBATS :

A l'audience publique du 14 juin 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 13 septembre 2022,

ARRET :

Réputé contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe le 13 septembre 2022 et signé par M. Benoît PETY, président de chambre, et Madame Lucie NICLOT, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

Suivant offre préalable de crédit en date du 5 juin 2015, la SAS Sogefinancement a consenti à M. [U] [V] et Mme [C] [D] un prêt personnel d'un montant en capital de 15 000 euros, remboursable en 60 mensualités de 292,82 euros, assurance comprise, incluant les intérêts au taux effectif global de 5,46 % l'an.

Plusieurs échéances n'ayant pas été honorées, la SAS Sogefinancement a prononcé la déchéance du terme suivant lettre recommandée avec avis de réception du 16 juillet 2020.

Puis, par acte d'huissier en date du 27 avril 2021, elle a assigné M. [V] devant le juge des contentieux de la protection de Châlons-en-Champagne aux fin de le voir condamner, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, à lui payer la somme de 7 266,72 euros, dont 512,01 euros d'indemnité de 8 %, au titre du solde du prêt, avec intérêts au taux contractuel sur la somme de 6 754,71 euros à compter du 6 juillet 2020 et jusqu'à parfait paiement, outre 800 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

M. [V] n'a pas comparu à l'audience du 1er juin 2021, à laquelle l'affaire a été appelée et retenue, et ne s'est pas fait représenter.

Par jugement en date du 10 août 2021, le juge des contentieux et de la protection de Châlons-en-Champagne a déclaré recevable l'action formée par la SAS Sogefinancement, a prononcé la déchéance du droit aux intérêts, a condamné M. [V] à lui payer la somme de 3 545,08 euros avec intérêts au taux légal à compter du jugement, a débouté la société du surplus de ses demandes, a dit n'y avoir lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, et a condamné M. [V] aux dépens.

La SAS Sogefinancement a régulièrement interjeté appel de cette décision suivant déclaration du 30 août 2021, recours limité aux dispositions du jugement ayant prononcé la déchéance du droit aux intérêts, ayant condamné M. [V] au paiement de la somme de 3 545,08 euros, ayant rejeté le surplus de ses demandes et dit n'y avoir lieu a application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Suivant conclusions du 6 octobre 2021, la SAS Sogefinancement demande à la cour de la dire recevable dans son appel, de confirmer le jugement en ce qu'il l'a déclarée recevable dans son action, mais de l'infirmer pour le surplus pour, statuant à nouveau, juger que le moyen tenant à la déchéance du droit aux intérêts est prescrit, dire qu'en tout état de cause aucune déchéance du droit aux intérêts ne peut être prononcée, condamner M. [V] à lui payer la somme en principal de 7 266,72 euros outre intérêts au taux contractuel sur la somme de 6 754,71 euros à compter du 6 juillet 2020 et jusqu'à parfait paiement, le condamner à lui payer la somme de 800 euros au titre des frais irrépétibles, et, en tout état de cause à hauteur de cour, de le condamner à lui payer la somme de 1 000 euros sur le fondement des mêmes dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, et aux entiers dépens.

La déclaration d'appel et les conclusions ont été signifiées à M. [V] le 12 octobre 2021 à sa personne. Il n'a pas constitué avocat.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 31 mai 2022.

Sur ce, la cour,

I- Sur la demande principale

Le premier juge, en l'absence du débiteur et soulevant d'office ce moyen, a déchu l'organisme prêteur du droit aux intérêts en retenant, par application des dispositions des articles L.341-1, L.312-16 et L.341-2 du code de la consommation :

-que si la SAS Sogefinancement justifiait avoir consulté le fichier prévu par l'article L.751-1 du code de la consommation (FICP) au moment de la signature du contrat de prêt, le document produit ne mentionnait pas la clef, ni le motif de la consultation,

-que la SAS Sogefinancement ne justifiait pas de la remise à l'emprunteur de la notice d'information, au demeurant non produite, comportant les conditions générales de l'assurance, en contravention des dispositions de l'article L.312-29 du code de la consommation.

a) Sur le moyen tiré de la prescription quinquennale

L'appelante fait valoir les dispositions des article 2224 du code civil et L 110-4 du code du commerce, pour considérer que l'action de l'emprunteur, auquel s'est substitué le premier juge dans l'invocation du moyen, est prescrite puisque l'offre de crédit a été acceptée le 5 juin 2015, toute demande relative à la déchéance du droit aux intérêts étant selon elle prescrite depuis le 5 juin 2020.

Toutefois, faire droit au moyen de la société appelante revient à écarter une obligation imposée aux banques et autres organismes de crédit par le code de la consommation, dont l'objet est justement de protéger les emprunteurs, en l'occurrence contre tout risque d'endettement excessif, qu'en d'autres termes, opposer aux magistrats judiciaires chargés d'appliquer les dispositions du code de la consommation une fin de non-recevoir relative à la prescription du moyen soulevé d'office, reviendrait, de fait, à neutraliser l'action du juge et l'application des exigences imposées par le droit de la consommation, droit dont la visée tend à rééquilibrer la situation des parties non avisées dans le rapport juridique et financier avec des prêteurs institutionnels.

La cour considère par conséquent qu'aucune prescription n'est opposable au juge chargé de faire appliquer le droit de la consommation particulièrement en ces dispositions le plus protectrices des consommateurs profanes.

Le moyen tiré de la prescription opposée par la société est ainsi écarté.

b) Sur le fond

-Sur le grief tiré de la consultation du FICP

Compte tenu de la date de conclusion du contrat, soit au 5 juin 2015, le texte applicable est non pas l'article 312-16 du code de la consommation retenu par le premier juge qui n'est entré en vigueur qu'au 1er juillet 2016, mais l'article L 311-9, applicable à cette date, aux termes duquel :

"Avant de conclure le contrat de crédit, le prêteur vérifie la solvabilité de l'emprunteur à partir d'un nombre suffisant d'informations, y compris des informations fournies par ce dernier à la demande du prêteur. Le prêteur consulte le fichier prévu à l'article L. 333-4, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné à l'article L. 333-5, sauf dans le cas d'une opération mentionnée au 1 de l'article L. 511-6 ou au 1 du I de l'article L. 511-7 du code monétaire et financier."

Il résulte par ailleurs, de l'article L 311-48, en sa rédaction applicable à la date de conclusion du contrat que :

"Lorsque le prêteur n'a pas respecté les obligations fixées aux articles L. 311-8 et L. 311-9, il est déchu du droit aux intérêts, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge. La même peine est applicable au prêteur qui n'a pas respecté les obligations fixées à l'article L. 311-21 et aux deuxième et troisième alinéas de l'article L. 311-44 ou lorsque les modalités d'utilisation du crédit fixées au premier alinéa de l'article L. 311-17 et au premier alinéa de l'article L. 311-17-1 n'ont pas été respectées. L'emprunteur n'est tenu qu'au seul remboursement du capital suivant l'échéancier prévu, ainsi que, le cas échéant, au paiement des intérêts dont le prêteur n'a pas été déchu. Les sommes perçues au titre des intérêts, qui sont productives d'intérêts au taux de l'intérêt légal à compter du jour de leur versement, sont restituées par le prêteur ou imputées sur le capital restant dû.

Le prêteur qui n'a pas respecté les formalités prescrites au dernier alinéa de l'article L. 311-46 et à l'article L. 311-47 ne peut réclamer à l'emprunteur les sommes correspondant aux intérêts et frais de toute nature applicables au titre du dépassement."

Aucun formalisme particulier n'est prescrit par ces textes pour justifier de la consultation du FICP, la preuve étant libre à cet égard.

L'appelante produit, en pièce n°1, un document intitulé "résultat interrogation fichage FICP" qui mentionne l'état civil des deux co-emprunteurs, la date d'interrogation du fichier, le numéro du prêt proposé, et énonce "résultat aucun". Aucune disposition légale ou réglementaire n'imposait de mentionner la clef, et le motif de consultation résulte précisément du numéro de prêt mentionné.

Cette pièce constitue un support durable comme prescrit par l'article 13 de l'arrêté du 26 octobre 2010.

Dans ces conditions, la cour considère que la banque justifie pleinement de la consultation de ce fichier, dans les conditions prévues par les textes alors applicables, de sorte qu'aucune déchéance du droit aux intérêts n'est encourue pour ce motif.

-Sur le grief tiré de l'absence de remise de la note d'information relative à l'assurance

Le texte applicable, eu égard à la date de conclusion du contrat, est non pas l'article L.312-29 du code de la consommation comme retenu par le premier juge, mais l'article L.311-19 alors en vigueur qui prévoit que :

"Lorsque l'offre de contrat de crédit est assortie d'une proposition d'assurance, une notice doit être remise à l'emprunteur, qui comporte les extraits des conditions générales de l'assurance le concernant, notamment les nom et adresse de l'assureur, la durée, les risques couverts et ceux qui sont exclus. Si l'assurance est exigée par le prêteur pour obtenir le financement, la fiche d'informations mentionnée à l'article L. 311-6 et l'offre de contrat de crédit rappellent que l'emprunteur peut souscrire une assurance équivalente auprès de l'assureur de son choix. Si l'assurance est facultative, l'offre de contrat de crédit rappelle les modalités suivant lesquelles l'emprunteur peut ne pas y adhérer".

La sanction de la déchéance du droit aux intérêts en cas de non-respect de cette obligation est prévue à l'article L.311-48 alors en vigueur qui énonce que :

"Le prêteur qui accorde un crédit sans communiquer à l'emprunteur les informations précontractuelles dans les conditions fixées par les articles L. 311-6 ou L. 311-43, sans remettre et faire signer ou valider par voie électronique la fiche mentionnée à l'article L. 311-10, ou sans remettre à l'emprunteur un contrat satisfaisant aux conditions fixées par les articles L. 311-11, L. 311-12, L. 311-16, L. 311-18, L. 311-19, L. 311-29, le dernier alinéa de l'article L. 311-17 et les articles L. 311-43 et L. 311-46, est déchu du droit aux intérêts".

En l'espèce, l'offre de prêt (pièce n°1) contient en page 8 la synthèse des conditions d'assurance et, sous la signature de M. [V], le fait "d'avoir pris connaissance de toutes ces conditions (...) et de la notice d'information relative à l'assurance (...) figurant dans les documents annexés, le tout représentant 11 pages, formant une convention unique et indivisible".

Par ailleurs, la synthèse des garanties d'assurance, produite en pièce n°1.2, signée par M. [V] mentionne encore qu'il reconnaît avoir reçu les conditions d'assurance.

Dans ces conditions, l'appelante justifie suffisamment avoir remis la notice d'assurance et aucun moyen de déchéance du droit aux intérêts n'est fondé à cet égard.

Le jugement est donc infirmé en ce qu'il a prononcé la déchéance du droit aux intérêts.

La créance de la banque s'établit par conséquent, au vu des pièces produites (tableau d'amortissement, lettre de mise en demeure, historique de compte, décompte de créance) à la somme de :

.4 172,46 euros au titre du capital restant dû,

.2 582,25 euros au titre des échéances impayées,

.512,01 euros au titre de l'indemnité conventionnelle,

soit une somme de 7 266,72 euros.

M. [V] est tenu au paiement de cette somme, outre intérêts au taux contractuel sur la somme de 6 754,71 euros à compter du 16 juillet 2020 (mise en demeure produite en pièce n°5).

Le jugement est infirmé en ce sens.

II- Sur les frais irrépétibles et les dépens

M. [V], succombant au fond, est tenu aux dépens d'appel.

Le jugement est confirmé en ce qu'il déboute la requérante de sa demande en frais irrépétibles et il est statué dans le même sens au titre des frais irrépétibles d'appel, aucune considération d'équité ne commandant d'y faire droit.

Par ces motifs,

Infirme le jugement rendu le 10 août 2021 par le juge des contentieux de la protection de Châlons-en-Champagne en ses dispositions ayant :

-prononcé la déchéance du droit aux intérêts,

- condamné M. [V] à payer à la SAS Sogefinancement la somme de 3 545,08 euros avec intérêts au taux légal à compter du jugement,

Statuant à nouveau sur ces points,

Ecarte le moyen de prescription soulevé par la SAS Sogefinancement,

Dit n'y avoir lieu à déchéance du prêteur du droit aux intérêts,

Condamne M. [U] [V] à payer à la SAS Sogefinancement la somme en principal de 7 266,72 euros, outre intérêts au taux contractuel sur la somme de 6 754,71 euros à compter du 16 juillet 2020,

Confirme le jugement pour le surplus des dispositions querellées,

Y ajoutant,

Déboute la SAS Sogefinancement de sa demande en frais irrépétibles,

Condamne M. [U] [V] aux dépens d'appel.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Reims
Formation : 1ère chambre section inst
Numéro d'arrêt : 21/01697
Date de la décision : 13/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-13;21.01697 ?
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