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13/09/2022 | FRANCE | N°19/01628

France | France, Cour d'appel de Reims, 1ère chambre section inst, 13 septembre 2022, 19/01628


ARRET N°

du 13 septembre 2022



R.G : N° RG 19/01628 - N° Portalis DBVQ-V-B7D-EW37





S.A. COFIDIS





c/



[E]

[E]

[E]

[E]

[E]

[E]











BP







Formule exécutoire le :

à :



Me Philippe PONCET



la SELARL JACQUEMET SEGOLENE

COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE CIVILE- SECTION INSTANCE



ARRET DU 13 SEPTEMBRE 2022



APPELANTE :

d'un jugement re

ndu le 30 avril 2019 par le tribunal d'instance de Châlons-en-Champagne



SA COFIDIS SA COFIDIS venant aux droits de la SA GROUPE SOFEMO suite à une fusion absorption ayant effet au 1er octobre 2015.

[Adresse 5]

[Adresse 5]



Représentée par Me Philippe PONCET, avocat au barr...

ARRET N°

du 13 septembre 2022

R.G : N° RG 19/01628 - N° Portalis DBVQ-V-B7D-EW37

S.A. COFIDIS

c/

[E]

[E]

[E]

[E]

[E]

[E]

BP

Formule exécutoire le :

à :

Me Philippe PONCET

la SELARL JACQUEMET SEGOLENE

COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE CIVILE- SECTION INSTANCE

ARRET DU 13 SEPTEMBRE 2022

APPELANTE :

d'un jugement rendu le 30 avril 2019 par le tribunal d'instance de Châlons-en-Champagne

SA COFIDIS SA COFIDIS venant aux droits de la SA GROUPE SOFEMO suite à une fusion absorption ayant effet au 1er octobre 2015.

[Adresse 5]

[Adresse 5]

Représentée par Me Philippe PONCET, avocat au barreau de REIMS, et la SELARL HAUSSMAN KAINIC HASCOET HELAIN, avocats au barreau d'EVRY

INTIMES :

Monsieur [J] [E]

décédé

Représenté par Me Ségolène JACQUEMET-POMMERON de la SELARL JACQUEMET SEGOLENE, avocat au barreau de REIMS

PARTIES INTERVENANTES :

Monsieur [C] [E]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Héritier de Monsieur [J] [E]

N'ayant pas constitué avocat

Madame [M] [E]

[Adresse 6]

[Adresse 6]

Héritière de Monsieur [J] [E]

N'ayant pas constitué avocat

Monsieur [K] [E]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Héritier de Monsieur [J] [E]

N'ayant pas constitué avocat

Madame [O] [E]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

Héritière de Monsieur [J] [E]

N'ayant pas constitué avocat

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :

M. Benoît PETY, président de chambre

Mme Anne LEFEVRE, conseiller

Mme Christel MAGNARD, conseiller

GREFFIER :

Madame Lucie NICLOT, greffier

DEBATS :

A l'audience publique du 14 juin 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 13 septembre 2022,

ARRET :

Défaut, prononcé par mise à disposition au greffe le 13 septembre 2022 et signé par M. Benoît PETY, président de chambre, et Madame Lucie NICLOT, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

Exposé du litige, de la procédure et des prétentions des parties:

Suivant offre acceptée le 3 août 2015, la SA Groupe Sofemo a accordé à M. [J] [E] un crédit affecté au financement d'une installation photovoltaïque à son domicile par la société Ecorenove, prêt d'un montant de 19 900 euros remboursable en 144 mensualités successives de 190,91 euros chacune au taux de 4,59 % l'an.

M. [E] a rempli le 19 août 2015 l'attestation de livraison et d'installation des équipements ainsi financés et autorisé l'établissement prêteur à remettre les fonds empruntés au vendeur-prestataire.

Se prévalant du non-remboursement du crédit par M. [E] à compter du mois de décembre 2017, la société Groupe Sofemo, constatant que toutes les démarches amiables étaient restées vaines, a prononcé la déchéance du terme du prêt par lettre de mise en demeure du 21 juin 2018, la somme de 21 606,21 euros restant due selon décompte arrêté à cette date. Aucun versement n'a été opéré ultérieurement.

Par acte d'huissier du 27 novembre 2018, la SA Cofidis, venant aux droits de la SA Groupe Sofemo, a fait assigner M. [J] [E] devant le tribunal d'instance de Châlons-en-Champagne aux fins de voir cette juridiction condamner l'assigné à payer au prêteur poursuivant la somme de 21 813,92 euros avec intérêts au taux contractuel de 4,59 % l'an à compter de la mise en demeure du 21 juin 2018, outre une indemnité de 800 euros au visa de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 22 février 2019, le tribunal d'instance saisi a ordonné la réouverture des débats et invité la SA Cofidis à faire ses observations quant aux moyens soulevés d'office par la juridiction au sujet de:

-l'application de l'article L. 311-6 du code de la consommation dans sa version en vigueur lors de la conclusion de l'offre de prêt en date du 3 août 2015, et la sanction prévue à l'article L. 311-48 du même code,

-l'application de l'article L. 311-9 du code de la consommation et la sanction prévue à l'article L. 311-48 du même code,

-l'application de l'article L. 311-31 du code de la consommation et la sanction de la faute éventuelle du prêteur.

A l'audience du tribunal d'instance du 19 mars 2019, la société Cofidis a réitéré toutes ses demandes contenues dans l'acte introductif d'instance. Elle indiquait ne pas disposer du justificatif de la consultation du FICP avant l'octroi du prêt litigieux. Elle ajoutait que M. [E] s'était borné à indiquer l'absence de fonctionnement de l'installation sans en rapporter la preuve. Elle se prévalait d'une jurisprudence constante validant l'attestation de livraison émise par la société prestataire de sorte que l'emprunteur était irrecevable à faire échec à ses demandes en paiement à son encontre. Elle soutenait enfin que la juridiction saisie ne pouvait relever d'office la sanction de la privation du droit à restitution du prêteur, s'agissant d'une sanction créée par la jurisprudence et non d'une disposition d'ordre public prévue par le code de la consommation.

Par jugement contradictoire [de fait, la décision aurait dû être qualifiée de réputée contradictoire puisque M. [E] était non-comparant et non représenté en première instance] du 30 avril 2019, le tribunal d'instance de Châlons-en-Champagne a notamment débouté la SA Cofidis de l'intégralité de ses demandes et condamné cette dernière aux entiers dépens de l'instance.

La société Cofidis a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 22 juillet 2019, son recours portant sur l'entier dispositif de la décision attaquée.

M. [J] [E], intimé, est décédé le [Date décès 1] 2020. Par ordonnance du 25 juin 2020, le conseiller de la mise en état a constaté l'interruption de l'instance.

La SA Cofidis a fait assigner en intervention forcée quatre des cinq enfants de M. [E], à savoir:

* [C], le 6 juillet 2021 par acte remis à sa personne,

* [M], le 19 juillet 2021 par acte déposé à l'étude d'huissier,

* [K], le 30 juin 2021 par établissement d'un procès-verbal de recherches infructueuses (article 659 du code de procédure civile),

* [O], le 29 juin 2021 par établissement d'un procès-verbal de recherches infructueuses (article 659 du code de procédure civile).

La société Cofidis ne justifie pas d'un acte d'assignation en intervention forcée délivré à Mme [G] [E]. Elle précise cependant ne plus maintenir aucune demande à l'égard de cette partie, pas plus qu'à l'encontre de M. [C] [E], ces deux enfants ayant renoncé à la succession de leur père.

En l'état de ses écritures n°3 signifiées le 9 juin 2022, la société Cofidis demande par voie d'infirmation à la cour de:

-Dire n'y avoir lieu à déchéance du droit aux intérêts,

-Condamner solidairement Mme [M] [E], M. [K] [E] et Mme [O] [E] à lui payer, en tant que venant aux droits de la SA Groupe Sofemo, la somme de 21 813,92 euros en principal, avec intérêts au taux contractuel de 4,59% l'an à compter de la mise en demeure du 21 juin 2018,

-Ordonner la capitalisation annuelle des intérêts par application de l'article 1343-2 du code civil,

-Condamner solidairement Mme [M] [E], M. [K] [E] et Mme [O] [E] à lui verser une indemnité de procédure de 1 200 euros,

-Les condamner aux entiers dépens d'appel et de première instance.

Aucune des parties assignées en intervention forcée n'a constitué avocat. Il importera en conséquence de statuer en la cause par décision prononcée par défaut.

L'instruction du dossier a été clôturée par ordonnance du 14 juin 2022.

* * * *

Motifs de la décision:

-Sur l'action principale en paiement de la société Cofidis envers les consorts [E]:

Attendu que l'article L. 311-31 du code de la consommation, dans sa version en vigueur au jour de la signature de l'offre de crédit par M. [J] [E], énonce que les obligations de l'emprunteur, dans le cadre d'un prêt affecté, ne prennent effet qu'à compter de la livraison du bien ou de la fourniture de la prestation; en cas de contrat de vente ou de prestation de services à exécution successive, elles prennent effet à compter du début de la livraison ou de la fourniture et cessent en cas d'interruption de celle-ci. [---];

Attendu que, pour rejeter la demande principale en paiement de la société Cofidis, le premier juge a considéré que l'action du prêteur ne pouvait prospérer dès lors que le contrat dont elle sollicitait l'exécution n'avait pas pris effet, faute pour lui d'avoir respecté son obligation de s'assurer de la livraison du bien financé avant la délivrance des fonds, ce que la personne morale appelante conteste catégoriquement;

Attendu qu'il s'évince des pièces transmises par la société Cofidis, et notamment de l'historique du prêt (pièce n°8), que la société prêteuse s'est libérée des fonds empruntés en faveur de la société Ecorenove le 26 août 2015;

Qu'au soutien de sa demande principale en paiement, la personne morale appelante communique l'offre de prêt dûment signée par M. [J] [E], ainsi que la fiche de dialogue et la fiche d'informations précontractuelles européennes normalisées en matière de crédit aux consommateurs (FIPEN), le tableau d'amortissement et les lettres recommandées avec demande d'avis de réception valant mise en demeure de payer et prononçant la déchéance du terme;

Qu'il est par ailleurs transmis par le prêteur sous sa pièce n°6 l'attestation de livraison et demande de financement complétée de manière manuscrite par M. [E], datée et signée par lui le 19 août 2015, la formule rédigée de sa main étant la suivante: 'Je confirme avoir obtenu et accepter sans réserve la livraison des marchandises. Je constate expressément que tous les travaux et prestations qui devaient être effectués à ce titre ont été pleinement réalisés. En conséquence, je demande à Sofémo de bien vouloir procéder au décaissement du solde de ce crédit et de verser ce montant directement entre les mains de la société Ecorenove (adhérent)';

Qu'il n'est au demeurant pas discutable que M. [J] [E] a commencé à rembourser le crédit affecté à cette vente avec prestation de services puisqu'il s'est enquis du paiement des mensualités de ce prêt de septembre 2016 à novembre 2017, le premier incident de paiement non régularisé correspondant à l'échéance de décembre 2017;

Que le bon de commande initial n'est pas produit aux débats de sorte que la cour ignore si l'installation photovoltaïque mentionnée sur le contrat de prêt comme objet du financement était destinée à l'autoconsommation ou à la revente d'énergie à ERDF;

Qu'il faut donc considérer en l'état de ces données que le bien vendu a été livré et monté au domicile de l'acquéreur, comme ce dernier l'atteste aux termes de la pièce n°6 visée ci-dessus, l'obligation de l'emprunteur de rembourser le crédit affecté étant juridiquement établie, obligation que l'intéressé avait du reste mise à exécution dès septembre 2016;

Que la décision déférée doit donc être infirmée en ce qu'elle déboute la SA Cofidis de sa demande principale en paiement du chef du prêt affecté;

-Sur la créance du prêteur des suites de la déchéance du terme du prêt affecté:

Attendu que la SA Cofidis justifie de la mise en demeure adressée le 11 juin 2018 à M. [J] [E] suite à sa défaillance dans le remboursement des échéances du prêt à compter du mois de décembre 2017, mise en demeure suivie le 21 juin 2018 d'une nouvelle lettre recommandée avec accusé de réception, avis dûment signé par le destinataire du courrier, par laquelle elle a prononcé la déchéance du terme conformément aux conditions générales du contrat;

Attendu, sur la question du droit aux intérêts, que le premier juge, par jugement du 22 février 2019, a d'office soulevé deux moyens de déchéance du prêteur du droit aux intérêts tenant au défaut de justification du respect des dispositions de l'article L. 311-6 du code de la consommation relatif à l'information pré-contractuelle de l'emprunteur et de l'article L. 311-9 du même code sur la vérification de la solvabilité de l'emprunteur avant la conclusion du contrat de crédit;

Que si la FIPEN est bien communiquée aux débats par la société appelante sous sa pièce n°5 avec mention du numéro de dossier et les données personnalisées du prêt affecté souscrit par M. [J] [E], lequel reconnaît dans l'offre qu'il a signée que ce document lui a effectivement été remis, il n'est toutefois pas justifié par la partie appelante de ce qu'elle a consulté le fichier national tenu par la Banque de France et recensant les informations sur les incidents de paiement caractérisés liés aux crédits accordés aux personnes physiques pour des besoins non professionnels (article L. 333-4 du code de la consommation);

Que, conformément à l'article L. 311-48 alinéa 2 du code de la consommation, la déchéance du prêteur du droit aux intérêts est en cela encourue, s'agissant d'une déchéance que la cour précise totale compte tenu de la carence manifeste du prêteur dans la justification d'une de ses obligations essentielles;

Qu'ainsi, la société COFIDIS ne peut exiger, suite à la déchéance du terme du prêt litigieux, que le remboursement du capital dont il sera déduit toutes les sommes que M. [J] [E] a pu lui verser en exécution de ses obligations d'emprunteur;

Que l'historique du prêt communiqué par la partie appelante enseigne qu'entre septembre 2016 et novembre 2017 (inclus), l'emprunteur lui a versé la somme totale de 2 994,70 euros, ce qui doit être soustrait du montant prêté, soit 19 900 euros, ce qui fait apparaître en faveur de la société Cofidis une créance de 16 905,30 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du prononcé de la déchéance du terme le 21 juin 2018 comme requis par le prêteur, aucune autre somme ne lui étant due au titre de ce crédit;

Que M. [K] [E] et Mmes [M] et [O] [E] seront en conséquence condamnés solidairement à payer cette somme à la SA Cofidis;

-Sur la demande de capitalisation des intérêts:

Attendu que l'article 1343-2 du code civil dispose que les intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produisent intérêt si le contrat l'a prévu ou si une décision de justice le précise;

Attendu que le principe même de la capitalisation des intérêts n'est pas mentionné dans le contrat de prêt conclu initialement entre la SA Groupe Sofemo et M. [J] [E];

Qu'en considération de la défaillance de l'emprunteur dans le remboursement du crédit affecté, il importe de faire prévaloir les dispositions de l'article L. 311-23 alinéa 1 du code de la consommation applicable en la cause compte tenu de la date de conclusion du prêt, dispositions selon lesquelles aucune autre indemnité ni aucuns frais autres que ceux mentionnés aux article L. 311-24 et L. 311-25 ne peuvent être mis à la charge de l'emprunteur dans les cas de défaillance prévus par ces articles;

Que l'article L. 311-24 vise à ce titre le capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés, outre les intérêts de retard produits jusqu'à la date de leur règlement effectif par les sommes restant dues, sans préjudice de l'indemnité légale;

Qu'il n'est donc pas justifié d'y ajouter les intérêts capitalisés qui accroissent la dette en principal de l'emprunteur et conduisent de fait à neutraliser les effets de la déchéance du prêteur du droit aux intérêts conventionnels;

Qu'il ne sera donc pas fait droit à cette prétention annexe du prêteur;

-Sur les dépens et les frais irrépétibles:

Attendu que le sens du présent arrêt justifie de mettre à la charge des défendeurs appelés en intervention forcée et qui ont accepté la succession de M. [J] [E] les entiers dépens tant de première instance que d'appel;

Que l'équité commande par ailleurs de mettre à leur charge le versement à la SA Cofidis d'une indemnité de procédure de 900 euros conformément aux dispositions de l'article 700 du code de procédure civile;

* * * *

Par ces motifs,

La cour, statuant publiquement, par décision prononcée par défaut,

-Infirme en toutes ses dispositions le jugement déféré;

Prononçant à nouveau,

-Prononce la déchéance totale de la SA Cofidis du droit aux intérêts;

-Condamne solidairement M. [K] [E] ainsi que Mmes [M] et [O] [E] à payer à la SA Cofidis, au titre du crédit affecté de 19 900 euros souscrit le 3 août 2015 par M. [J] [E] auprès de la SA Groupe Sofemo, la somme de 16 905,30 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 21 juin 2018;

-Dit n'y avoir lieu à capitalisation des intérêts;

-Condamne in solidum M. [K] [E] ainsi que Mmes [M] et [O] [E] aux entiers dépens de première instance comme d'appel ainsi qu'à verser à la SA Cofidis une indemnité de procédure de 900 euros conformément aux dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier. Le Président.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Reims
Formation : 1ère chambre section inst
Numéro d'arrêt : 19/01628
Date de la décision : 13/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-13;19.01628 ?
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