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25/05/2022 | FRANCE | N°21/00703

France | France, Cour d'appel de Reims, Chambre sociale, 25 mai 2022, 21/00703


Arrêt n°

du 25/05/2022





N° RG 21/00703 - N° Portalis DBVQ-V-B7F-E7NO





MLS / LS









Formule exécutoire le :







à :



SARL BELLEC & ASSOCIES



SCP DUPUIS LACOURT MIGNE

COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE SOCIALE

Arrêt du 25 mai 2022



APPELANTE :

d'un jugement rendu le 19 mars 2021 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CHARLEVILLE-MEZIERES, section Industrie (n° F 19/00002)



S.A.S.U.

LA FOULERIE

2 rue de la Foulerie

08110 CARIGNAN



Représentée par la SARL BELLEC & ASSOCIES prise en la personne de Maître Laurence BELLEC, avocat au barreau de REIMS





INTIMÉ :



Monsieur [J] [C]

19 rue de la Liber...

Arrêt n°

du 25/05/2022

N° RG 21/00703 - N° Portalis DBVQ-V-B7F-E7NO

MLS / LS

Formule exécutoire le :

à :

SARL BELLEC & ASSOCIES

SCP DUPUIS LACOURT MIGNE

COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE SOCIALE

Arrêt du 25 mai 2022

APPELANTE :

d'un jugement rendu le 19 mars 2021 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CHARLEVILLE-MEZIERES, section Industrie (n° F 19/00002)

S.A.S.U. LA FOULERIE

2 rue de la Foulerie

08110 CARIGNAN

Représentée par la SARL BELLEC & ASSOCIES prise en la personne de Maître Laurence BELLEC, avocat au barreau de REIMS

INTIMÉ :

Monsieur [J] [C]

19 rue de la Liberté

08110 CARIGNAN

Représenté par la SCP DUPUIS LACOURT MIGNE prise en la personne de Maître Emeric LACOURT, avocat au barreau des ARDENNES

DÉBATS :

En audience publique, en application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 28 mars 2022, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Marie-Lisette SAUTRON, conseiller, et Monsieur Olivier BECUWE, conseiller, chargés du rapport, qui en ont rendu compte à la cour dans son délibéré ; elle a été mise en délibéré au 25 mai 2022.

COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :

Madame Christine ROBERT-WARNET, président

Madame Marie-Lisette SAUTRON, conseiller

Monsieur Olivier BECUWE, conseiller

GREFFIER lors des débats :

Monsieur Francis JOLLY, greffier

ARRÊT :

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Madame Christine ROBERT-WARNET, président, et Madame Lozie SOKY, greffier placé, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

EXPOSE DES FAITS

Monsieur [J] [C] a été embauché à compter du 2 janvier 1989 par la SAS LA FOULERIE par contrat à durée indéterminée. En dernier lieu, il exerçait les fonctions de tourneur.

Le 11 décembre 2015, le salarié s'est vu notifier une mise à pied disciplinaire de trois jours pour avoir été en salle de pause en dehors des horaires prévus.

Le 21 avril 2017, le salarié s'est vu notifier une mise à pied disciplinaire de trois jours pour avoir volontairement limité sa productivité.

Le 4 janvier 2019, le salarié a saisi le conseil de prud'hommes de Charleville-Mézières de demandes tendant à :

-faire annuler les sanctions disciplinaires des 11 décembre 2015 et 21 avril 2017,

-faire dire que la société employeur s'est rendue coupable de harcèlement moral et de discrimination syndicale,

-faire condamner l'employeur à lui payer les sommes suivantes :

* 2 000,00 euros de dommages-intérêts en réparation des préjudices nés du harcèlement moral,

* 5 000,00 euros de dommages-intérêts en réparation de préjudices nés de la discrimination syndicale,

* 53,90 euros de prime de douche de décembre 2014,

* 5,39 euros de congés payés afférents,

* 592,41 euros de prime de douche pour 2015,

* 59,24 euros de congés payés afférents,

* 597,86 euros de prime de douche pour 2016,

* 59,78 euros de congés payés afférents,

* 619,12 euros de prime de douche pour 2017,

* 61,91 euros de congés payés afférents,

* 434,68 euros de rappels de salaires sur mise à pied de décembre 2015,

* 43,46 euros de congés payés afférents,

* 434,68 euros de rappels de salaires sur mise à pied d'avril 2017,

* 43,46 euros de congés payés afférents,

* 7,52 euros de reliquat de prime de travail du samedi,

* 2 000,00 euros d'indemnité de l'article 700 du code de procédure civile,

- d'ordonner sous astreinte la remise de bulletin de paie conforme au jugement.

Par jugement du 19 mars 2021 , le conseil de prud'hommes :

- a débouté la SASU LA FOULERIE de sa demande de nullité de la requête,

- a déclaré les demandes recevables et partiellement fondées,

- a annulé les sanctions disciplinaires des 11 décembre 2015 et 21 avril 2017,

- a dit que monsieur [C] n'était victime ni de harcèlement ni de discimination,

- a condamné l'employeur à payer au salarié les sommes suivantes :

* 53,90 euros de prime de douche pour décembre 2014,

* 5,39 euros de congés payés afférents,

* 592,41 euros de prime de douche pour 2015,

* 59,24 euros de congés payés afférents,

* 597, 86 euros de prime de douche pour 2016,

* 59,78 euros de congés payés afférents,

* 619,12 euros de prime de douche pour 2017,

* 61,91 euros de congés payés afférents,

* 434,68 euros de rappel de salaire relatif à la mise à pied de décembre 2015,

* 43,46 euros de congés payés afférents,

* 434,68 euros de rappel de salaire relatif à la mise à pied de décembre 2017,

* 43,46 euros de congés payés afférents,

* 1 000,00 euros d'indemnité de l'article 700 du code de procédure civile,

- a débouté le salarié du surplus de ses demandes,

- a débouté la société employeur de sa demande reconventionnelle,

-a ordonné à l'employeur sous astreinte la remise des bulletins paie rectificatifs pour l'ensemble de la période litigieuse , pour tenir compte des condamnations,

- a condamné l'employeur aux dépens.

Le 8 avril 2021, la SASU LA FOULERIE a régulièrement interjeté appel du jugement sauf des chefs de demandes dont il a débouté le salarié et sauf en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de nullité de la requête.

PRETENTIONS ET MOYENS

Pour plus ample exposé, il sera expressément renvoyé aux écritures déposées par les parties :

- le 23 décembre 2021 pour l'appelante,

- le 4 octobre 2021 pour l'intimé.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 28 février 2022.

L'appelante demande à la cour d'infirmer le jugement sauf en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande au titre du harcèlement moral et de la discrimination, de débouter le salarié de l'ensemble de ses demandes, de le condamner aux dépens ainsi qu'au paiement d'une somme de 2 000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de ses prétentions, elle fait valoir que les sanctions disciplinaires étaient justifiées, et n'ont pas été contestées en leur temps, qu'elles ne peuvent être discutées au moyen d'attestations réalisées deux ans plus tard par des collègues qui n'ont pas le pouvoir d'apprécier le travail du salarié ; que contrairement à ce que soutient le salarié, le règlement intérieur entré en vigueur le 15 août 2011 prévoit dans l'échelle de sanctions une mise à pied disciplinaire de huit jours maximum de sorte que, contrairement ce qui a été jugé, les sanctions sont parfaitement régulières.

Concernant les primes de douche, elle prétend que le changement de poste du salarié en 2008 pour occuper des fonctions moins salissantes et plus diversifiées justifie qu'il soit mis fin à la prime antérieurement versée ; qu'il ne s'agit pas d'un usage mais d'une erreur consistant à laisser perdurer au service outillage une prime qui n'avait plus lieu d'être ; que l'arrêté du 23 juillet 1947 fixant les conditions dans lesquelles les douches doivent être mises à la disposition du personnel effectuant des travaux insalubres et salissants n'inclut pas les activités exercées par l'entreprise ; que le conseil des prud'hommes ne s'est pas interrogé sur l'applicabilité de cet arrêté à la société employeur de sorte que le jugement doit être infirmé pour cette raison ; qu'une étude du CHSCT permet de se convaincre que le salarié n'exécutait pas des travaux nécessitant un temps consacré à la douche de sorte que la prime correspondante n'est pas justifiée.

Concernant le harcèlement moral , elle fait valoir que les sanctions disciplinaires étaient justifiées au regard du comportement du salarié de même que le retrait des primes de douche ; que le salarié ne saurait se plaindre d'une absence d'augmentation de rémunération ou d'un changement de coefficient, dans la mesure où le changement de coefficient n'implique pas automatiquement l'augmentation de la rémunération et que le salaire perçu par le salarié est supérieur au salaire minimal prévu pour le coefficient auquel il était classifié.

Concernant la discrimination syndicale, force est, selon elle, de constater que les sanctions sont parfaitement justifiées, que l'employeur peut sanctionner différemment des salariés sans commettre de discrimination dans la mesure où il peut être tenu compte de l'ancienneté et des comportements respectifs des intéressés et du dossier disciplinaire notamment ; que les augmentations individuelles de salaire ne sont pas accordées à chaque salarié ; qu'en l'espèce le salarié a bénéficié d'une augmentation de salaire en 2009, puis en 2016.

Le salarié intimé demande à la cour d'infirmer le jugement en ce qu'il l'a débouté de ses demandes liées au harcèlement moral et à la discrimination syndicale, et en ce qu'il l'a débouté du surplus de ses demandes. Il réitère ses demandes de dommages-intérêts à ce titre ainsi que sa demande de reliquat de prime de travail du samedi, outre 2 000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de ses prétentions, il fait valoir que les sanctions disciplinaires sont peu motivées, les griefs ne sont pas justifiés, la sanction est excessive et irrégulière en l'état d'un règlement intérieur qui ne fixe pas de durée de la mise à pied prévue à titre de sanction.

Sur les primes de douche, il prétend qu'elles ont cessé d'être versées à compter de 2009 alors qu'il s'agissait d'un usage dans l'entreprise, que l'employeur s'était engagé par accord du 15 juillet 2005 à maintenir, qu'il a révoqué sans au préalable l'avoir dénoncé ; que l'arrêté du 23 juin 1947 fixe les conditions dans lesquelles les douches doivent être mises à disposition du personnel effectuant des travaux insalubres et salissants et imposent le versement d'une telle prime ; que cette prime a continué à être versée à d'autres salariés violant ainsi le principe 'à travail égal , salaire égal'; que le rapport du CHSCT dont se prévaut l'employeur a omis d'évoquer le meulage des lames qu'il effectuait chaque jour.

Sur la prime de travail du samedi, il expose qu'un accord d'entreprise du 11 juillet 2008 prévoit le versement de cette prime de travail d'un montant de 37,50 euros pour le samedi matin et de 60,00 euros pour le samedi après-midi, montant que l'employeur a unilatéralement modifié en août 2012 ; que s'agissant d'un engagement unilatéral de l'employeur ou à tout le moins d'un usage, le complément doit lui être versé.

Concernant le harcèlement moral, il soutient que celui-ci est caractérisé par des sanctions injustifiées, par la suppression unilatérale des primes de douche, par le refus de la rétablir malgré la demande en justice, par le refus d'exécution du jugement rendu par le conseil de prud'hommes le 19 mars 2021, pourtant revêtu de l'exécution provisoire, par le refus de paiement de la prime du samedi, par l'absence d'augmentation individuelle pendant la procédure prud'homale, et par un changement de coefficient.

Concernant la discrimination syndicale, il affirme que pour des raisons syndicales, il a été l'objet de sanctions rapprochées et qu'il a été exclu des augmentations de salaires.

MOTIFS DE LA DECISION

Au préalable, il sera fait observer que l'employeur n'a pas formé appel du dispositif du jugement rejetant sa demande tendant à la nullité de sa requête.

1- les sanctions disciplinaires

C'est à raison que le conseil de prud'hommes a annulé les sanctions disciplinaires de 2015 et 2017, dès lors que le règlement intérieur déposé auprès de l'inspection du travail date de 2002 et prévoit la possibilité d'une mise à pied sans en fixer la durée maximale. En revanche, il ne ressort pas des pièces du dossier que le règlement intérieur modifié en 2011 pour notamment fixer la durée des sanctions disciplinaires, ait été déposé auprès de l'autorité administrative compétente, tel que cela ressort du courrier du 13 novembre 2017 de l'inspection du travail.

De plus, la preuve des griefs faits au salarié n'est pas établie par l'employeur. En effet, la fiche de signalement effectuée en 2017 est accompagnée d'un tableau qui laisse apparaître une baisse de productivité sans qu'il ne soit possible de l'imputer à une action volontaire du salarié. Seul Monsieur [F] vient l'affirmer dans une attestation non conforme, faute de pièce d'identité jointe, mais il est contredit par diverses attestations de collègues qui affirment que Monsieur [C] a toujours fait son travail correctement. Par ailleurs, les griefs de 2015 ne sont étayés par aucune pièce.

Aussi, il faut confirmer le jugement en ce qu'il a annulé les sanctions disciplinaires et condamné l'employeur à restituer les salaires retenus pendant cette période.

2- les primes de douche

Pour faire droit aux demandes du salarié, le conseil de prud'hommes s'est fondé sur l'article R 3121-1 du code du travail relatif à la rémunération des temps de douche, à l'arrêté du 23 juillet 1947 déterminant les travaux salissants justifiant la mise à disposition des salariés de douches, sur l'accord du 15 juillet 2005 relatif au temps de travail.

Or, le salarié ne réclame pas paiement de la rémunération d'un temps de douche comme temps de travail effectif, mais d'une prime octroyée selon un usage qu'il lui appartient de prouver.

Le salarié prétend et justifie que la prime était payée jusqu'en 2009, ce que ne conteste pas l'employeur, et caractérise le critère de constance de son versement.

Les bulletins de paie des mois de décembre 2008, janvier et février 2009 permettent de constater que la prime était d'un taux de 2,812 ce qui permet d'établir son caractère de fixité.

En outre, dans l'accord d'entreprise du 15 juillet 2005, la prime de douche est mentionnée comme bénéficiant à certains postes. Or, dans le procès verbal du 30 janvier 2019 de désaccord sur les négociations collectives annuelles, il est indiqué que les négociations se terminaient sur un désaccord, mais également que la direction, unilatéralement, a décidé de mettre en place une prime d'habillage pour le personnel du secteur production, maintenance et outillage ayant une prime de douche. Il faut donc en déduire que certains salariés du service outillage auquel était affecté monsieur [C] bénéficiaient de cette prime.

Par ailleurs, le CHSCT a été consulté sur la prime de douche pour les postes du service outillage non bénéficiaires de ladite prime, et, après analyse des critères de l'arrêté de 1947 précité, a visé les postes susceptibles d'exposer les salariés à des salissures et qui seraient susceptibles d'être concernés par la prime.

Il ressort de ces divers éléments que l'usage est donc bien démontré pour une catégorie de salariés à laquelle appartient monsieur [C], lequel en a bénéficié jusqu'en 2009.

L'employeur prétend sans en justifier que le salarié a changé de poste en 2008 et que la prime lui a été maintenue par erreur. Or, aucune pièce ne vient éclairer la cour sur les postes bénéficiaires de ladite prime ni sur les tâches effectivement accomplies par le salarié aux dates concernées, la fiche de poste d'outilleur étant insuffisante à cet égard.

Dans ces conditions, c'est à raison que le salarié vient affirmer que l'employeur a mis fin à un usage de manière illicite faute de l'avoir dénoncé dans les formes légales.

Par substitution de motifs, le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné l'employeur à paiement.

3- les primes pour travail du samedi

C'est à tort que le conseil de prud'hommes a rejeté la demande, après avoir considéré que l'accord sur lequel se fondait le salarié était un accord d'entreprise, sans analyser la question de l'usage revendiqué par le salarié. En effet, le salarié vient soutenir, à raison, qu'à défaut de pouvoir considérer qu'il s'agit d'un accord d'entreprise, la prime de travail du samedi était à tout le moins un usage. En effet, le document intitulé 'accord' rappelle que la prime pour le travail du samedi matin est de 37,50 euros et la prime pour le travail du samedi après-midi était de 60 euros. Dès lors que cette prime est d'un montant fixe, généralement versé à tous les salariés travaillant le samedi, et constamment versée bien avant 2008, l'usage est caractérisé.

Dès lors, l'employeur ne pouvait, comme il l'a fait par note du 30 août 2012, modifier le taux de cette prime sans l'avoir régulièrement dénoncé au préalable.

Par infirmation du jugement, il faut donc faire droit à la demande.

4- le harcèlement moral

Le salarié qui allègue un harcèlement moral doit, en application des dispositions de l'article L 1154-1 du Code du travail en sa version applicable en l'espèce, présenter des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement, étant rappelé que le harcèlement est défini par l'article L 1152-1 du Code précité comme tous agissements répétés qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits et à la dignité du salarié, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. Au vu de ces éléments, il incombe alors à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs de harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Le salarié évoque les sanctions injustifiées, la suppression unilatérale des primes de douche, et le refus de la rétablir malgré la demande en justice, par le refus d'exécution du jugement rendu par le conseil de prud'hommes le 19 mars 2021, pourtant revêtu de l'exécution provisoire, par le refus de paiement de la prime du samedi, par l'absence d'augmentation individuelle pendant la procédure prud'homale, et par un changement de classification sans augmentation de sa rémunération.

Les sanctions injustifiées, le non-paiement des primes de douches et des primes de travail du samedi ont été admis plus haut.

La modification d'échelon en mars 2019 a été accompagnée d'une augmentation du taux salarial et donc de la rémunération de base.

Pour le surplus, l'employeur ne conteste pas l'absence d'exécution du jugement, l'absence d'augmentation individuelle.

Hormis les sanctions injustifiées espacées dans le temps, et la modification des primes de travail du samedi qui concernait tous les salariés, l'ensemble des éléments établis plus haut et non contestés par l'employeur apparaissent de nature à laisser présumer un harcèlement moral au sens où il s'agit d'agissements répétés qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits et à la dignité du salarié, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

L'employeur prétend que le salarié a été affecté sur un poste non salissant justifiant la suppression de la prime sans toutefois le justifier, alors qu'il est établi que d'autres salariés dans le même service bénéficient de ladite prime.

Par ailleurs, l'employeur ne s'explique pas sur l'absence d'exécution du jugement assorti de l'exécution provisoire alors qu'il ne ressort pas du dossier qu'une suspension ou un arrêt de l'exécution provisoire aient été demandés au premier président de la présente cour.

Enfin, l'absence d'augmentation individuelle après 2016 n'est pas justifiée dès lors que les pièces du dossier de l'employeur ne permettent pas de connaître les critères d'attribution de telles augmentations.

Dès lors, le conseil de prud'hommes ne pouvait considérer que le salarié n'apportait aucun élément de nature à faire présumer le harcèlement moral et ne pouvait, sans renverser la charge de la preuve, relever que le salarié n'apportait pas la preuve que les agissements de l'employeur ne relevait pas de l'exercice normal de son pouvoir de direction.

En présence d'un ensemble d'éléments laissant présumer un harcèlement moral, non justifiés par l'employeur, le harcèlement moral apparaît caractérisé de sorte que le jugement sera infirmé sur ce point.

L'employeur sera donc, par infirmation du jugement, condamné à payer au salarié la somme réclamée de 2 000,00 euros, qui apparaît de nature à réparer intégralement le préjudice moral subséquent.

5- la discrimination et l'égalité de traitement

Le salarié se prévaut d'une discrimination directe et formelle de sorte qu'il lui appartient, selon l'article L 1134-1 du Code du travail, de présenter des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations.

Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

En droit, la discrimination directe existe quand, pour des raisons d'origine, de sexe, de moeurs, d'orientation sexuelle, d'identité de genre, d'âge, de situation familiale, de grossesse, de caractéristiques génétiques, de particulière vulnérabilité résultant de la situation économique, de l'appartenance ou non à une ethnie, une nation ou une prétendue race, d'opinions politiques, d'activités syndicales ou mutualistes, de l'exercice d'un mandat électif, de convictions religieuses, d'apparence physique, de nom de famille, de lieux de résidence ou de domiciliation bancaire, d'état de santé, de perte d'autonomie, de handicap, de capacité à s'exprimer dans une langue autre que le français, une personne est traitée de manière moins favorable qu'un autre ne l'est, ne l'a été ou ne l'aura été.

La discriminatioçn formelle consiste à traiter differémment et de manière arbitraire des situations semblables.

Il est établi au dossier que monsieur [C] a été l'objet de deux sanctions disciplinaires en 1 an et 4 mois ce qui ne permet pas d'affirmer, comme le fait le salarié, qu'il s'agit de sanctions rapprochées.

Il est également avéré que Monsieur [C] a été exclu des augmentations de salaire depuis 2016, et que depuis 2015, il n'était plus délégué syndical.

Ces éléments ne suffisent pas à faire présumer la discrimination de sorte que le jugement sera donc confirmé sur ce point .

6- les autres demandes

Le jugement sera infirmé sur la remise des bulletins de salaire rectifiés. La remise d'un bulletin de salaire conforme au présent arrêt sera ordonnée sans astreinte.

Succombant au sens de l'article 700 du Code de procédure civile, l'employeur sera condamné aux dépens et aux frais irrépétibles de première instance par confirmation du jugement.

En appel, il sera condamné aux dépens, débouté de ses demandes de remboursement de ses frais irrépétibles et condamné à payer au salarié la somme de 1 500,00 euros.

PAR CES MOTIFS

la cour statuant publiquement, par décision contradictoire et après en avoir délibéré conformément à la loi,

statuant dans les limites de l'appel,

infirme le jugement rendu le 19 mars 2021 par le conseil de prud'hommes de Charleville Mézières en ce qu'il a rejeté la demande de complément de prime de travail du samedi, en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande de dommages et intérêts en réparation des préjudices nés du harcèlement moral et en ce qu'il a condamné sous astreinte l'employeur à la remise de bulletins de paie rectifiés,

statuant à nouveau et dans cette limite,

condamne la S.A.S. LA FOULERIE à payer à Monsieur [J] [C] les sommes suivantes :

- 7,50 euros (sept euros et cinquante centimes) au titre du complément de primes pour travail du samedi,

- 2 000,00 euros (deux mille euros) en réparation des préjudices nés du harcèlement moral,

dit que les condamnations sont prononcées sous réserve d'y déduire le cas échéant, les charges sociales et salariales ;

condamne la S.A.S. LA FOULERIE à remettre à Monsieur [J] [C] un bulletin de salaire conforme au présent arrêt ;

confirme le surplus de l'arrêt déféré,

y ajoutant,

déboute la S.A.S. LA FOULERIE.de sa demande de remboursement de ses frais irrépétibles d'appel,

condamne la S.A.S. LA FOULERIE à payer à Monsieur [J] [C] la somme de1 500,00 euros (mille cinq cents euros) en remboursement de ses frais irrépétibles d'appel,

condamne la S.A.S. LA FOULERIE aux dépens de l'instance d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Reims
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21/00703
Date de la décision : 25/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-25;21.00703 ?
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