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03/02/2017 | FRANCE | N°15/01307

France | France, Cour d'appel de reims, 1ère chambre civile - section ii, 03 février 2017, 15/01307


R. G. : 15/ 01307 15/ 02184 (joint) ARRÊT No du : 3 février 2017

A. L.

M. Philippe X...

Mme Chantal Y... épouse X...
Mme Annie Z...
C/
M. Michaël A...
M. Magali B...

Formule exécutoire le :

à :
Me Mélanie Caulier-Richard SCP Genet Me Virginie Bonnerot

COUR D'APPEL DE REIMS 1ère CHAMBRE CIVILE-SECTION II

ARRÊT DU 3 FÉVRIER 2017

APPELANTS : d'un jugement rendu le 3 avril 2015 par le tribunal de grande instance de Charleville-Mézières (RG 12/ 00334)

1o]- M. Philippe X......08330 Vrigne aux Bois


2o]- Mme Chantal Y...épouse X......08330 Vrigne aux Bois

Comparant et concluant par Me Mélanie Caulier-Richard membre de la SCP ...

R. G. : 15/ 01307 15/ 02184 (joint) ARRÊT No du : 3 février 2017

A. L.

M. Philippe X...

Mme Chantal Y... épouse X...
Mme Annie Z...
C/
M. Michaël A...
M. Magali B...

Formule exécutoire le :

à :
Me Mélanie Caulier-Richard SCP Genet Me Virginie Bonnerot

COUR D'APPEL DE REIMS 1ère CHAMBRE CIVILE-SECTION II

ARRÊT DU 3 FÉVRIER 2017

APPELANTS : d'un jugement rendu le 3 avril 2015 par le tribunal de grande instance de Charleville-Mézières (RG 12/ 00334)

1o]- M. Philippe X......08330 Vrigne aux Bois

2o]- Mme Chantal Y...épouse X......08330 Vrigne aux Bois

Comparant et concluant par Me Mélanie Caulier-Richard membre de la SCP Delvincourt-Caulier-Richard, avocat postulant au barreau de Reims, et par Me Emeric Lacourt, membre de la SCP Anthony-Dupuis-Lacourt-Migne-Estieux, avocat au barreau des Ardennes
APPELANTE ET INTIMÉE :
Mme Annie Z......08330 Vrigne aux Bois

Comparant et concluant par Me Agnès Genet, avocat postulant au barreau de Reims, et plaidant par Me Saïda Harir membre de la SELARL Ahmed Harir, avocat au barreau des Ardennes
INTIMÉS au principal et appelants :
1o]- M. Michaël A......08350 Vrigne Meuse

2o]- Monsieur Magali B......08350 Vrigne Meuse

Comparant, concluant et plaidant par Me Virginie Bonnerot, avocat au barreau de Châlons en Champagne
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Mme Lafay, présidente de chambre Mme Lefèvre, conseiller Mme Magnard, conseiller

GREFFIER D'AUDIENCE :
Mme Roullet, greffier lors des débats et du prononcé

DÉBATS :

En audience publique du 8 décembre 2016, le rapport entendu, où l'affaire a été mise en délibéré au 3 février 2017
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, signé par Mme Lafay, présidente de chambre, et par Mme Roullet, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le 10 août 1989, M. Emmanuel X...a acheté une parcelle en nature de pâture sise à Vrigne Meuse (Ardennes), cadastrée lieudit « ... », section ZB no 39, pour 9 ha 11 a 64 ca, pour un prix de 191 500 F.
Par acte notarié du 21 juin 1993, M. Philippe X...et Mme Chantal Y..., son épouse, ont procédé à une donation-partage au profit de leurs deux enfants Emmanuel et Florence X.... Dans cet acte, M. Emmanuel X...reconnaît avoir reçu de ses parents en août 1989, à titre de don manuel et en avancement d'hoirie, la somme de 234 500 F qu'il a employée au paiement du prix et des frais d'acquisition de la parcelle précitée. L'acte comporte une clause prévoyant un droit de retour conventionnel au profit des donateurs.
Le 27 mai 2005 la parcelle concernée a fait l'objet d'une division en deux parcelles cadastrées section ZB no 60 pour 29 a 85 ca et no 61 pour 8 ha 81 a 79 ca.
Le 14 juin 2005, M. Emmanuel X...a vendu à Mme Annie Z...la parcelle section ZB no 60, qui correspond à une bande de terrain longeant l'autre parcelle.
Le 17 décembre 2005, M. Emmanuel X...a épousé Mme Z..., après avoir conclu le 7 novembre 2005 un contrat de séparation de biens.
Le 22 janvier 2007, Mme Z...a fait donation à M. Emmanuel X...de la parcelle section ZB no 60.
Le couple a divorcé le 11 avril 2007.
M. Emmanuel X..., gérant de centre équestre, est décédé le 12 mai 2010 laissant pour seuls héritiers ses parents, M. et Mme Philippe X..., et sa soeur, Florence.
Par lettre recommandée avec demande d'accusé de réception datée du 29 juin 2010, le conseil de Mme Z...a informé Me F..., notaire en charge des opérations de la succession de M. Emmanuel X..., que Mme Z...acceptait le legs particulier que M. Emmanuel X...lui avait consenti par testament olographe du 15 juin 2005, legs portant sur la propriété de la parcelle section ZB no 61, et que la lettre valait demande de délivrance du legs.
Le 9 mars 2011, le notaire a reçu l'acte de constatation de retour conventionnel au profit de M. et Mme Philippe X...par suite du décès du donataire.

Selon acte des 26 et 27 mai 2011 reçu par Me G..., notaire associé de la SCP H...-I...-G...-F..., M. et Mme Philippe X...ont vendu les deux parcelles cadastrées ZB no 60 et 61 à M. Michaël A...et à Mme Magali B....

Le 25 janvier 2012, Mme Z...a fait assigner M. et Mme Philippe X...devant le tribunal de grande instance de Charleville-Mézières en délivrance du legs particulier de l'ensemble immobilier de Vrigne Meuse figurant au cadastre section ZB no 60 et 61, avec intérêts ou fruits et revenus depuis le 20 juin 2010, date de sa demande en délivrance. Le 3 juillet 2012, Mme Z...a fait assigner M. A...et Mme B...en intervention forcée.
Par jugement du 3 avril 2015, le tribunal de grande instance a :
- débouté Mme Z...de l'ensemble de ses prétentions portant sur la parcelle de Vrigne Meuse cadastrée ZB no 60,- dit que le droit de retour conventionnel de la donation-partage du 21 juin 1993 est inopposable à Mme Z...,- dit que l'acte du 9 mars 2011 contenant constatation du retour conventionnel des parcelles ZB no 60 et 61 au profit de M. et Mme Philippe X...est inopposable à Mme Z...en ses dispositions relatives à la parcelle ZB no 61,- ordonné au profit de Mme Z...la délivrance du legs consenti sur la parcelle ZB no 61 avec les constructions et aménagements y édifiés et tous ses accessoires nécessaires,- débouté Mme Z...de ses autres prétentions,- débouté M. et Mme Philippe X...de leur demande au titre des frais irrépétibles,- condamné Mme Z...à payer à M. A...et Mme B...la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,- condamné Mme Z..., M. et Mme Philippe X...aux dépens.

M. et Mme Philippe X...ont fait appel de cette décision le 22 mai 2015 et Mme Z...en a fait appel le 26 août 2015. Les deux procédures ont été jointes le 4 mars 2016 sous le numéro de rôle 15/ 1307.
Par ordonnance du 20 mai 2016, le conseiller de la mise en état a déclaré l'appel de Mme Z...recevable, a dit irrecevables les écritures de M. A...et Mme B...en leurs demandes dirigées contre M. et Mme Philippe X...et a dit que les dépens de l'incident suivront le sort de la procédure au fond.
Aux termes de leurs conclusions du 5 décembre 2016, M. et Mme Philippe X...demandent à la cour, au visa des articles 738-2, 549, 951, 555, 1351 et 2224 du code civil, d'infirmer le jugement en ce qu'il dit inopposables à Mme Z..., d'une part, le droit de retour conventionnel figurant dans l'acte du 21 juin 1993 et, d'autre part, s'agissant de la parcelle ZB no61, l'acte du 9 mars 2011 constatant le retour conventionnel sur les deux parcelles, en ce qu'il ordonne au profit de Mme Z...la délivrance du legs sur la parcelle ZB no 61 et en ce qu'il condamne M. et Mme Philippe X...aux dépens.
Ils veulent voir dire irrecevables et rejeter toutes les demandes de Mme Z...à leur encontre, qu'elle soit condamnée aux dépens et au paiement d'une somme de 2 000 euros à chacun d'eux au titre des frais irrépétibles.

Ils font valoir notamment qu'ils bénéficient d'un droit de retour légal, opposable à Mme Z..., et que le legs fait par testament du 15 juin 2005 était un avantage matrimonial révoqué de plein droit par le divorce.

Selon écritures du 30 novembre 2016, Mme Z...conclut au débouté de l'appel de M. et Mme Philippe X...et forme appel incident.
Elle demande à la cour de :
- dire que le droit de retour conventionnel de l'acte du 21 juin 1993 n'a pas fait l'objet d'une publicité foncière pour la parcelle de Vrigne Meuse cadastrée ZB no 39 et qu'il lui est donc inopposable,- dire qu'elle est fondée, en vertu de l'article 1014 du code civil, à prétendre au droit sur la chose léguée par M. Emmanuel X..., à savoir l'ensemble immobilier cadastré ZB no 39 et correspondant aux parcelles ZB no 60 et 61, à compter du jour du décès de ce dernier,- dire que l'acte constatant le retour conventionnel ne s'applique pas à l'ensemble immobilier, la donation ayant été consentie sur une somme d'argent,- dire que la vente des 26 et 27 mai 2011 est nulle,- dire Mme Z...fondée en sa demande de délivrance du legs particulier portant sur l'ensemble immobilier sis à Vrigne Meuse incluant constructions et aménagements et accessoires nécessaires, selon leur désignation cadastrale,- dire que M. A...et Mme B...doivent lui restituer l'ensemble immobilier,- dire que Mme Z...est fondée à percevoir les intérêts, fruits et revenus du bien légué, et ce à compter de sa demande en délivrance du legs du 20 juin 2010,- fixer le montant de ces intérêts, fruits et revenus à 1 200 euros par mois du jour de la demande jusqu'à la prise de possession de la chose léguée,- condamner solidairement M. et Mme Philippe X..., M. A...et Mme B...à lui payer la somme de 1 200 euros par mois à compter du 20 juin 2010,- ordonner l'expulsion de M. A...et Mme B...et de tous occupants de leur chef des lieux dont s'agit, sous astreinte de 500 euros par jour de retard,- condamner solidairement M. et Mme Philippe X...à lui payer une somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice causé par leur mauvaise foi avérée,- de dire irrecevables selon l'article 564 du code de procédure civile et mal fondés M. A...et Mme B...en leurs demandes formulées pour la première fois devant la cour d'appel et tendant à la condamner au paiement d'une somme exorbitante de 740 686, 60 euros représentant les coûts d'acquisition, dépenses réalisées, plus value et perte de clientèle, outre 50 000 euros de provision ad litem et 127 500 euros de dommages et intérêts pour un prétendu préjudice moral,- subsidiairement, s'il n'était pas fait droit à ses demandes en revendication du bien immobilier, de dire qu'elle est propriétaire des constructions édifiées sur les parcelles ZB no 60 et 61 et dispose d'un droit de superficie sur ces parcelles et de condamner solidairement M. et Mme Philippe X..., M. A...et Mme B...à lui payer en application de l'article 555 du code civil la somme de 217 837, 83 euros correspondant au montant des travaux et constructions effectuées sur les deux parcelles,- en tout état de cause, de condamner solidairement M. et Mme Philippe X..., M. A...et Mme B...aux dépens et au paiement sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile d'une somme de 5 000 euros par M. et Mme Philippe X...solidairement et d'une somme de 5 000 euros par M. A...et Mme B...solidairement.

Par conclusions du 6 décembre 2016, M. A...et Mme B..., par appel incident, demandent à la cour de :

- dire que M. et Mme Philippe X...bénéficient du droit de retour et étaient en droit de disposer librement des parcelles cadastrées ZB no 60 et 61, et donc de confirmer le jugement en ce qu'il valide la vente à leur profit et rejette les actions en revendication et en nullité de Mme Z...,- débouter Mme Z...de sa demande subsidiaire en condamnation solidaire au titre des travaux et constructions alléguées sur les parcelles litigieuses,- subsidiairement, dire la demande de Mme Z...au titre des fruits et revenus infondée sur la période allant du 10 juin 2010 au 3 juillet 2012 et la rejeter pour la période courant à partir du 3 juillet 2012,- en tout état de cause, rejeter la demande d'expulsion à leur encontre,- subsidiairement, ordonner une expertise pour établir les comptes entre les parties au titre des entretiens, améliorations, frais et coûts exposés sur les parcelles dont ils seraient évincés, outre la valeur du bien et l'éventuelle plus-value depuis la vente des 26 et 27 mai 2011 et condamner Mme Z...à leur payer une provision ad litem de 50 000 euros,- en tout état de cause, condamner Mme Z...à leur payer à titre de dommages et intérêts la somme de 100 euros par jour depuis leur mise en cause, soit 127 500 euros arrêtés au 31 décembre 2015, ce montant étant à parfaire jusqu'à la résolution du litige, et condamner Mme Z...à leur payer « la somme de 740 686, 60 euros représentant leur appauvrissement et l'enrichissement de Mme Z...».

Ils font valoir qu'ils ont acheté les deux parcelles sur lesquelles existait un centre d'équitation pour y exploiter une écurie et y installer leur vie familiale, qu'ils ont réalisé de nombreux aménagements et frais d'entretien des bâtiments existants, qu'ils vivent dans l'incertitude sur leur sort depuis 2011.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 7 décembre 2016.
Sur ce, la cour :
Sur les effets de la clause de droit de retour de la donation-partage du 21 juin 1993 :
L'acte notarié du 21 juin 1993 expose, préalablement à la donation à titre de partage anticipé, qu'en vue du rapport en moins prenant ci-après effectué, M. Emmanuel X..., donataire copartagé, reconnaît avoir reçu des donateurs, au mois d'août 1989, à titre de don manuel et en avancement d'hoirie, la somme de 234 500 F. Il déclare que cette somme a été employée par lui, aux termes d'un acte notarié reçu le 10 août 1989 et a servi au paiement du prix et des frais d'acquisition d'une parcelle de pâture sise à Vrigne Meuse, cadastrée ZB no 39, lieudit « ... », toujours en sa possession, et que la somme ainsi employée et provenant du don manuel représente la totalité de la somme dépensée pour l'acquisition de cet immeuble.
L'acte ajoute : « Les parties fixent d'un commun accord la valeur actuelle de l'immeuble acquis en remploi, dans son état à l'époque de l'acquisition, à la somme de 235 000 F, somme à rapporter par M. Emmanuel X...au titre du don manuel sus-énoncé ».
Puis M. et Mme Philippe X...font donation entre vifs à titre de partage anticipé à leurs deux enfants, seuls présomptifs héritiers, donataires par parts égales, des biens ci-après désignés :
- la toute propriété du rapport de don manuel par M. Emmanuel X...de la somme de 235 000 F,- un chalet en bois sis à Issancourt-Rumel (Ardennes), évalué 170 000 F,- la nue-propriété, pour y réunir l'usufruit au décès du survivant des donateurs, de deux parcelles de bois, nue-propriété évaluée à 63 000 F.

Le total de la masse des biens donnés est de 468 000 F, dont moitié à chaque donataire, soit 234 000 F.
Le partage est réalisé par attribution à M. Emmanuel X...du premier lot : le rapport du don manuel de 235 000 F, avec soulte de 1 000 F due à sa copartageante, et par attribution à Mme Florence X...du second lot : la propriété du chalet, la nue-propriété des parcelles de bois et la somme de 1 000 F à recevoir à titre de soulte.
L'acte prévoit, en page 7, pour chaque donateur le droit de retour prévu par l'article 951 du code civil, pour le cas où un donataire viendrait à décéder avant eux sans enfants ni descendants. « Pour l'exercice de ce droit de retour, il est formellement convenu que le donateur reprendra les biens dans le lot en faisant l'objet (...) en proportion de son apport dans la masse des biens donnés et à partager ».
La donation-partage a été publiée au bureau des hypothèques de Charleville-Mézières le 23 juillet 1993, volume 1993 P, no3033, ainsi que mentionné sur la page de garde de l'acte de donation-partage.
L'article 1078-1 alinéa 1er du code civil indique que le lot de certains gratifiés pourra être formé, en totalité ou en partie, des donations déjà reçues par eux du disposant, eu égard éventuellement aux emplois et remplois qu'ils auront pu faire dans l'intervalle.
Il s'en déduit que la parcelle de pâture acquise avec la somme d'argent donnée est subrogée à cette somme dans la donation-partage et que le droit de retour conventionnel s'applique à cette parcelle.
Selon l'article 952 du code civil, « l'effet du droit de retour est de résoudre toutes les aliénations des biens et des droits donnés, et de faire revenir ces biens et droits au donateur, libres de toutes charges et hypothèques, exceptée l'hypothèque légale des époux (...) ».
Le retour conventionnel joue comme une condition résolutoire anéantissant de façon rétroactive la donation et les droits éventuellement constitués sur le bien qui en est l'objet. En conséquence, la propriété du bien donné revient aux donateurs par le seul fait du prédécès de M. Emmanuel X.... Ce dernier n'a pu transmettre par legs plus de droits qu'il n'en possédait et, en tout état de cause, la question de la publicité de l'acte de donation-partage ne se pose pas à son égard, puisqu'il n'a pas qualité de tiers dans ce contrat. Par suite, le legs est caduc et Mme Z...est déboutée de sa demande en délivrance du legs consenti sur la parcelle ZB no 61 et de toutes les demandes accessoires en découlant qu'elle a formées à titre principal (nullité de la vente des 26 et 27 mai 2011, revendication du bien immobilier, expulsion de M. A...et Mme B......). Le jugement est infirmé en ce sens.
Sur les demandes subsidiaires de Mme Z...:
L'existence du droit de retour conventionnel ne fait pas obstacle aux règles de l'accession relativement aux choses immobilières régies par les articles 552 et suivants du code civil s'agissant des constructions et ouvrages faits sur les terrains.
Mme Z...demande à tous les propriétaires successifs des parcelles en cause, pris solidairement, sur le fondement de l'article 555 du code civil, l'indemnisation de la valeur des constructions par elle réalisées sur ces parcelles, pour un montant de 217 837, 83 euros obtenu en appliquant l'indice du coût de la construction à la somme de 205 000 euros retenue dans l'acte de constatation de retour conventionnel du 9 mars 2011 (sa pièce no 9).

Il lui appartient d'apporter la preuve de ce qu'elle a fait les constructions et ouvrages évoqués, puisque M. Emmanuel X...était seul propriétaire des parcelles à la date de leur divorce, intervenu le 11 avril 2007, et que toutes constructions, plantations et ouvrages, sur un terrain, sont présumés faits par le propriétaire à ses frais et lui appartenir, si le contraire n'est prouvé (article 553 du code civil). A cet effet, Mme Z...produit divers chèques, factures, relevés bancaires datés de septembre 2004 à janvier 2007.
Or, selon la convention entre époux du 6 février 2007 portant règlement des effets du divorce et homologuée par jugement du 11 avril 2007 prononçant le divorce, les époux ont fait procéder à l'établissement d'une convention de divorce portant règlement complet des conséquences de leur séparation selon acte notarié reçu le 8 janvier 2007.

Cette convention du 8 janvier 2007 expose que les époux, pratiquant tous deux l'équitation, ont avant et pendant leur mariage réalisé divers investissements et aménagements destinés à leur permettre d'exercer leurs activités équestres dans les meilleures conditions.

Puis, sous le titre II-Liquidation du régime matrimonial, les époux déclarent n'être ni créanciers, ni débiteurs l'un envers l'autre, dans les termes de l'article 1543 du code civil, et s'accordent sur une convention de mises à disposition réciproques (piste de galop, herbage, poney, véhicules) pendant trois années dont il résulte une soulte due par Mme Z...de 12 000 euros.
Dans ces conditions, le premier juge a exactement apprécié que Mme Z...ne pouvait prétendre disposer à l'égard des propriétaires ayant succédé à M. Emmanuel X...d'une créance dont elle ne se déclarait pas titulaire contre son ex-mari en janvier 2007, alors que les constructions et travaux invoqués avaient déjà été réalisés (pièces no 7 et 8 de M. et Mme Philippe X...).
La demande en paiement au titre de constructions édifiées sur le terrain du conjoint se heurte donc à l'autorité de chose jugée de la décision du 11 avril 2007 et s'en trouve irrecevable. Le jugement est confirmé sur ce point.
Sur la demande en dommages et intérêts formée par M. A...et Mme B...:
M. A...et Mme B...sollicitent la condamnation de Mme Z...à leur payer une somme de 100 euros par jour au titre de leur préjudice moral depuis l'assignation en intervention forcée du 3 juillet 2012, soit 127 500 euros au 31 décembre 2015, sauf à parfaire jusqu'à complète résolution du litige. Ils expliquent que depuis la naissance du contentieux, ils vivent dans l'incertitude de leur sort, inquiets de subir une expulsion.

Cependant, la condamnation au paiement de dommages-intérêts suppose que soient caractérisées les circonstances de nature à faire dégénérer en faute l'exercice du droit d'agir en justice. Or, M. A...et Mme B...ne démontrent pas que Mme Z...a agi de manière fautive en assignant les donateurs et les acquéreurs des parcelles pour obtenir la délivrance d'un legs. Ils sont donc déboutés de leur demande en indemnisation.

M. A...et Mme B...demandent également, dans le dispositif de leurs écritures, « en tout état de cause » la condamnation de Mme Z...à leur payer une somme de 740 686, 60 euros représentant leur appauvrissement et son enrichissement corrélatif. Toutefois, cette demande, qui correspond à l'indemnisation du préjudice découlant de leur éventuelle éviction, a nécessairement un caractère subsidiaire ; elle n'a pas à être examinée puisque les prétentions de Mme Z...sont rejetées.
Sur les autres demandes :
Mme Z...succombe pour l'essentiel en ses demandes et supporte les dépens d'appel. Elle est condamnée au paiement d'une somme globale de 2 000 euros à M. et Mme Philippe X...sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Par ces motifs :
Infirme partiellement le jugement rendu le 3 avril 2015 par le tribunal de grande instance de Charleville-Mézières,
Statuant à nouveau,
Dit caduc le legs consenti par testament du 15 juin 2005 par M. Emmanuel X...à Mme Z...,
Déboute Mme Z...de sa demande en délivrance du dit legs et de toutes les demandes accessoires en découlant,
Confirme le jugement pour le surplus,
Y ajoutant,
Déboute M. A...et Mme B...de leur demande en dommages et intérêts à l'encontre de Mme Z...,
Condamne Mme Z...à payer à M. et Mme Philippe X...une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette toutes autres demandes,
Condamne Mme Z...aux dépens d'appel avec possibilité de recouvrement direct au profit de la SCP Delvincourt-Caulier-Richard, avocats, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de reims
Formation : 1ère chambre civile - section ii
Numéro d'arrêt : 15/01307
Date de la décision : 03/02/2017
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.reims;arret;2017-02-03;15.01307 ?
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