R. G : 07 / 02441
ARRÊT No
du : 27 novembre 2008
Monsieur Robert X...
C /
Madame Colette Y...née X...
Madame Irène Z...née X...
Monsieur André X...
Formule exécutoire le :
à :
COUR D'APPEL DE REIMS
CHAMBRE CIVILE-SECTION FAMILLE
ARRÊT DU 27 NOVEMBRE 2008
APPELANT :
Monsieur Robert X...
...
10210 Chaource
COMPARANT, concluant par la S. C. P. Genet-Braibant, avoué à la Cour, et ayant pour conseil Maître Jean-Philippe A..., avocat au barreau de Troyes
Appelant d'un jugement rendu par le tribunal de grande instance de Troyes le 05 Septembre 2007 (RG 06 / 1741).
INTIMES :
Madame Colette Y...née X...
...
51370 Saint Brice Courcelles
COMPARANT, concluant par la S. C. P. Six-Guillaume-Six, avoué à la Cour, et ayant pour conseil Maître Philippe B..., avocat au barreau de Troyes.
Madame Irène Z...née X...
...
58200 Cosne Sur Loire
Monsieur André X...
...
34340 Le Grau d'Agde
N'ayant pas constitué avoué, bien que régulièrement assignés.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Monsieur Hascher, président
Madame Lefèvre, conseiller
Madame C...: vice présidente placée auprès du Premier Président par ordonnances des 4 et 18 octobre 2007, désignée pour compléter la chambre de la famille par ordonnance du 30 octobre 2007.
GREFFIER D'AUDIENCE :
Madame Baldi, greffier lors des débats et du prononcé.
DÉBATS :
A l'audience publique du 16 Octobre 2008, le rapport entendu, où l'affaire a été mise en délibéré au 27 Novembre 2008,
ARRÊT :
Par défaut, prononcé publiquement, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, signé par Monsieur Hascher, président, et par Madame Baldi, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Exposé du litige
Monsieur Pierre X...et Madame Georgette D..., épouse X..., sont décédés respectivement les 18 juin 1983 et 27 février 1986, en laissant pour seuls héritiers leurs enfants, Irène, Bernard, André, Robert et Colette.
Par jugement en date du 28 octobre 1998, le tribunal de grande instance de Troyes a ordonné le partage judiciaire des communautés et successions de Monsieur Pierre X...et de Madame Georgette D..., épouse X..., reconnaissant à Madame Colette X..., épouse Y..., un droit à salaire différé et en ordonnant une expertise aux fins d'inventaire et d'évaluation des immeubles.
Monsieur Bernard X...est décédé le 1er septembre 2000 en laissant pour lui succéder ses quatre frères et soeurs, et par arrêt du 3 mai 2001, cette cour a confirmé le jugement du 28 octobre 1998, en ajoutant qu'André avait droit à un salaire différé.
Par jugement en date du 2 février 2005, le tribunal de grande instance de Troyes a fixé les créances de salaire différé de Madame Colette X..., épouse Y...et de Monsieur André X..., tout en renvoyant les parties devant notaire.
Par actes d'huissier en date des 8 et 24 août et du 24 septembre 2006, Monsieur Robert X...a fait assigner Madame Colette X..., épouse Y..., Madame Irène X...épouse Z...et Monsieur André X...aux fins de voir fixer une créance de salaire différé à son profit.
Par jugement rendu le 5 septembre 2007, le tribunal de grande instance de Troyes a :
- déclaré recevable la demande en fixation d'une créance de salaire différé de Monsieur Robert X...mais l'en a débouté,
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,
- condamné Monsieur Robert X...à payer à Madame Colette X...épouse Y...la somme de 500 euros à titre d'indemnité pour frais irrépétibles, outre aux dépens.
Monsieur Robert X...a interjeté appel à l'encontre ce jugement le 8 octobre 2007.
Aux termes de ses dernières écritures en date du 25 février 2008, Monsieur Robert X...conclut à l'infirmation du jugement déféré dans la mesure utile, au débouté de Madame Colette X..., épouse Y..., et
demande à la cour de juger qu'il a travaillé sur l'exploitation de ses parents pour la période du 24 février 1956 au 1er mars 1959 et de fixer son salaire différé à trois années sur la base des 2 / 3 de la somme correspondant à 2080 fois le taux du S. M. I. C. en vigueur au jour du partage définitif. Il sollicite en outre la condamnation de Madame Colette X..., épouse Y..., à lui payer la somme de 1. 000 euros à titre d'indemnité pour frais irrépétibles.
Il expose que le tribunal a fait une mauvaise appréciation des éléments de la cause car il appartient à celui qui se prévaut d'un droit au salaire différé de rapporter la preuve par tous moyens de ce qu'il remplit les conditions légales pour se voir reconnaître titulaire d'une telle créance. Il produit une attestation sur l'honneur d'avoir exercé une activité non salarié agricole sur l'exploitation agricole de ses parents pour la période du 24 février 1956 au 1er mars 1959, validée par deux témoins.
Aux termes de ses dernières écritures en date du 27 mai 2008, Madame Colette X..., épouse Y..., conclut à la confirmation du jugement entrepris, au débouté de l'appelant et forme une demande reconventionnelle en paiement des sommes de 2. 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et malicieuse et 2. 000 euros à titre d'indemnité pour frais irrépétibles.
Elle fait valoir que son frère reprend le même argumentaire que celui développé en première instance.
Madame Irène X..., épouse Z..., et Monsieur André X..., assignés respectivement à personne et suivant procès verbal de recherches infructueuses, n'ont pas constitué avoué.
Motifs de la décision
Sur la demande de créance de salaire différé de Monsieur Robert X...:
Attendu qu'en vertu de l'article L 321-13 du code rural, les descendants d'un exploitant agricole qui, âgés de plus de dix-huit ans, participent directement et effectivement à l'exploitation, sans être associés aux bénéfices ni aux pertes et qui ne perçoivent pas de salaire en argent en contrepartie de leur collaboration, sont réputés légalement bénéficiaires d'un contrat de travail à salaire différé sans que la prise en compte de ce salaire pour la détermination des parts successorales puisse donner lieu au paiement d'une soulte à la charge des cohéritiers ; que le taux annuel du salaire sera égal, pour chacune des années de participation, à la valeur des deux tiers de la somme correspondant à 2080 fois le taux du salaire minimum interprofessionnel de croissance en vigueur, soit au jour du partage consécutif au décès de l'exploitant soit au plus tard à la date du règlement de la créance, si ce règlement intervient du vivant de l'exploitant ;
Attendu qu'en application de l'article L. 321-19 du code rural, il appartient à celui qui se prévaut d'un droit au salaire différé de rapporter la preuve par tous moyens de ce qu'il remplit les conditions légales pour se voir reconnaître titulaire d'une telle créance ;
Attendu qu'en l'espèce, Monsieur Robert X...soutient avoir travaillé gratuitement au profit de l'exploitation familiale du 24 février 1956 au 1er mars 1959 et bénéficier ainsi d'une créance de salaire différé ;
Qu'il reprend le même argumentaire que celui présenté devant le premier juge ;
Qu'à l'appui de sa demande, il verse une attestation sur l'honneur de sa part confirmée par trois témoins dont le maire de la commune attestant qu'il a exercé une activité non salariée agricole ; qu'il produit également trois attestations de personnes habitant à Chaource témoignant qu'il a travaillé sur l'exploitation familiale jusqu'à l'âge de 21 ans ;
Qu'à hauteur d'appel, il produit deux nouvelles attestations datées des 28 juin et 1er juillet 2008, dont celle de Monsieur E..., vétérinaire en retraite, aux termes desquelles ces deux personnes, font des déclarations similaires à celles susvisées, même si la première parle de « travaux quotidiens jusqu'à l'âge de 21 ans » et l'autre « jusqu'à l'âge de 21 ans sans salaire et sans argent de poche » ;
Que toutefois, les deux derniers témoignages versés, s'ils sont plus précis sur les éventuels période et caractère gratuit du travail accompli, sont insuffisants, au vu des éléments du dossier et du temps écoulé depuis l'ouverture de la succession et des différentes décisions judiciaires prononcées dans le cadre desquelles l'appelant n'est jamais volontairement intervenu bien que lesdits jugements lui aient été régulièrement signifiés ;
Qu'en effet, c'est à bon droit que le tribunal a retenu que les pièces produites aux débats par Monsieur Robert X...ne sauraient suffire, en l'absence d'une attestation de la Mutualité Sociale Agricole (ci-après désignée MSA) et de relevés de carrière correspondant à cette période, à établir sa participation effective et directe à l'exploitation, sans avoir perçu de salaire en argent ni avoir été associé aux résultats de l'entreprise ;
Que de plus, il convient de souligner que les autres enfants du défunt n'ont jamais contesté le droit au salaire différé pour Colette puis d'André, mais n'ont pas reconnu le même droit au profit de Robert ; qu'ainsi, Monsieur F...expert commis dans une des précédentes procédures, dans un rapport rédigé le 13 décembre 2001 a noté « (…) il n'est pas dans la mission de l'expert de contester ou de valider les demandes en paiement de salaire différé de Monsieur Robert X...que ses cohéritiers contestent. Il appartiendra donc au tribunal, si Monsieur Robert X...le saisit, de statuer sur cette demande (...) ;
Qu'au surplus, il y a lieu de relever que Monsieur Robert X...a attendu l'année 2006 pour saisir la juridiction compétente d'une demande de fixation de créance à salaire différé, 8 années après l'ouverture des opérations de compte liquidation et partage des communauté et succession réunies de Monsieur Pierre X...et de Madame Georgette D..., épouse X..., alors qu'il connaissait parfaitement ainsi la procédure à suivre et les pièces essentielles à fournir, notamment celle de la MSA, ce qu'il ne fait toujours pas, à hauteur d'appel ;
Qu'en conséquence, il convient de confirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions ;
Attendu qu'à défaut de préciser en quoi l'appel interjeté par Monsieur Robert X...excéderait le droit de cette partie d'ester en justice et aurait ainsi dégénéré en abus, et à défaut de préciser quel préjudice l'indemnité de 2. 000 euros qu'elle réclame aurait vocation à réparer, indépendamment des frais irrépétibles qu'elle a dû exposer et pour lesquels elle forme une demande distincte, Madame Colette X..., épouse Y..., sera déboutée de sa demande reconventionnelle de dommages et intérêts ;
Attendu que conformément à l'article 696 du nouveau code de procédure civile, Monsieur Robert X...succombant il sera tenu aux dépens d'appel et ne peut dès lors voir prospérer sa demande en paiement à titre d'indemnité pour frais irrépétibles ;
Attendu que l'équité commande de condamner Monsieur Robert X...à payer à Madame Colette X...la somme de 2. 000 euros à titre d'indemnité pour frais irrépétibles ;
Par ces motifs
Confirme le jugement rendu le 5 septembre 2007 par le tribunal de grande instance de Troyes, en toutes ses dispositions,
Déboute Madame Colette X..., épouse Y..., de sa demande en paiement à titre de dommages et intérêts,
Condamne Monsieur Robert X...à payer Madame Colette X..., épouse Y..., la somme de 2. 000 euros à titre d'indemnité pour frais irrépétibles,
Le déboute de sa demande sur le même fondement :
Condamne Monsieur Robert X...aux dépens et autorise la S. C. P. Six-Guillaume-Six, avoués, à les recouvrer directement dans les formes et conditions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,