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13/10/2008 | FRANCE | N°595

France | France, Cour d'appel de reims, Chambre civile 1, 13 octobre 2008, 595


ARRET No
du 13 octobre 2008

R. G : 07 / 02311

MAYONOBE
S. C. I. PATRIMONIALE IMMOBILIERE

c /

CRCAM DE CHAMPAGNE BOURGOGNE

YM

Formule exécutoire le :
à : COUR D'APPEL DE REIMS
CHAMBRE CIVILE- 1o SECTION
ARRET DU 13 OCTOBRE 2008

APPELANTES :
d'un jugement rendu le 20 Juillet 2007 par le Tribunal de Grande Instance de TROYES,

Madame Arlette X... épouse XX...
...
10150 CHARMONT SOUS BARBUISE
LA S. C. I. PATRIMONIALE IMMOBILIERE
...
10150 CHARMONT SOUS BARBUISE

COMPARANT, concluant p

ar la SCP DELVINCOURT-JACQUEMET-CAULIER-RICHARD avoués à la Cour, et ayant pour conseil Me Joseph Y..., avocat au barreau de PARIS

INTI...

ARRET No
du 13 octobre 2008

R. G : 07 / 02311

MAYONOBE
S. C. I. PATRIMONIALE IMMOBILIERE

c /

CRCAM DE CHAMPAGNE BOURGOGNE

YM

Formule exécutoire le :
à : COUR D'APPEL DE REIMS
CHAMBRE CIVILE- 1o SECTION
ARRET DU 13 OCTOBRE 2008

APPELANTES :
d'un jugement rendu le 20 Juillet 2007 par le Tribunal de Grande Instance de TROYES,

Madame Arlette X... épouse XX...
...
10150 CHARMONT SOUS BARBUISE
LA S. C. I. PATRIMONIALE IMMOBILIERE
...
10150 CHARMONT SOUS BARBUISE

COMPARANT, concluant par la SCP DELVINCOURT-JACQUEMET-CAULIER-RICHARD avoués à la Cour, et ayant pour conseil Me Joseph Y..., avocat au barreau de PARIS

INTIMEE :

LA CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL-CRCAM-DE CHAMPAGNE BOURGOGNE
269 Faubourg Croncels
10000 TROYES

Comparant, concluant par la SCP SIX-GUILLAUME-SIX, avoués à la Cour, et ayant pour conseil Me Bernard-Claude Z..., avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :

Monsieur MAUNAND, Président de Chambre, entendu en son rapport
Madame SOUCIET, Conseiller
Monsieur MANSION, Conseiller

GREFFIER :

Madame Maryline THOMAS, Greffier lors des débats et du prononcé.

DEBATS :

A l'audience publique du 16 Septembre 2008, où l'affaire a été mise en délibéré au 13 Octobre 2008,

ARRET :

Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 13 Octobre 2008 et signé par Monsieur Yves MAUNAND, Président de Chambre, et Madame THOMAS, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

Suivant acte reçu le 3 mai 1990 par Me A..., notaire, la Caisse Régionale de Crédit agricole Mutuel de l'Aube, aux droits de laquelle sont venues la Caisse Régionale de Crédit agricole Mutuel de l'Aube et de la Haute-Marne, puis la Caisse Régionale de Crédit agricole Mutuel de Champagne-Bourgogne (ci-après le Crédit Agricole), a consenti un prêt de 12. 500. 000 francs à la SCI Les Terrasses de Reuilly pour lequel Mme Arlette X... épouse Kadouch s'est portée caution personnelle et solidaire à hauteur de 40 % des sommes empruntées.

Ce prêt arrivait à échéance le 3 novembre 1991 et n'a pas été remboursé.

*

Suivant acte reçu par Me B..., notaire, le 27 février 1991, le Crédit Agricole a consenti à la SCI Résidence Les Hortensias, en cours de constitution, un prêt d'un montant de 31. 000. 000 francs.

Pour garantir ce prêt, la banque a obtenu le cautionnement solidaire de Mme Iris C...épouse Kadouch, Mme Arlette X... épouse Kadouch, Mme Paulette D...épouse E..., Mme Jacqueline Kadouch, M. José F...G...et Mme Margarita H...I...épouse Pimentel G..., et ce, solidairement entre eux à hauteur de 61 %.

La banque a également obtenu le cautionnement solidaire à hauteur de 39 % de MM. Marc J..., Philippe K...et André L....

Le prêt, arrivé à échéance le 27 août 1992, n'a pas été remboursé.

*

MM. K...et J...ont contesté les signatures apposées sur les mandats de se porter caution.

Par jugement du 19 septembre 1997, le Tribunal de grande instance de Paris a déclaré faux le mandat attribué à M. K...et a annulé le cautionnement consenti en son nom. Ce jugement a été confirmé par arrêt de la Cour d'appel de Paris du 26 juin 2001.

Par jugement du 17 décembre 1999, le Tribunal de grande instance de Paris a également annulé le cautionnement consenti au nom de M. J...pour les mêmes motifs.

La banque a mis en cause la responsabilité du notaire et a obtenu, par arrêt du 4 mars 2005, la condamnation in solidum de la SCP B...Somborn Marc et de son assureur, Les Mutuelles du Mans, à lui payer la somme de 1, 5 million d'euros au regard de la faute commise par le notaire à l'origine de la perte d'une chance de recouvrer la part de créance garantie par les cautionnements annulés.

*

Les époux F...G..., propriétaires d'un immeuble situé à Saint-Mandé avaient fait apport le 28 décembre 1992 de la nue-propriété de ce bien, évalué à 7. 280. 000 francs, à une société familiale constituée pour les besoins de l'opération.

Le Crédit Agricole a engagé une action paulienne afin de voir juger inopposable l'acte du 28 décembre 1992. Il a été fait droit à cette demande par jugement du Tribunal de grande instance de Créteil du 11 mars 1997 confirmé par arrêt de la Cour d'appel de Paris du 25 janvier 2000. Le pourvoi formé contre cet arrêt a été rejeté par arrêt de la Cour de cassation du 5 février 2002.

*

Par acte d'apport en nature du 30 septembre 1992, Mme Paulette D...épouse E...avait également transféré à une SCI Padot ses droits sur un bien immobilier situé à Paris (13ème). Par arrêt confirmatif du 21 septembre 2001, la Cour d'appel de Paris a fait droit à l'action paulienne introduite par le Crédit Agricole et déclaré l'acte d'apport inopposable à ce dernier.

*

Suivant acte d'apport du 9 avril 1992 publié le 10 juin 1992, Mme X... épouse Kadouch, propriétaire d'un immeuble situé à Charmont-sur-Barbuise (10), avait apporté les droits y afférents à une SCI Patrimoniale Immobilière créée à cette occasion.

Estimant que cette opération avait été réalisée en fraude de ses droits, le Crédit Agricole a fait assigner le 1er août 1994 Mme X... épouse Kadouch et la SCI Patrimoniale Immobilière devant le Tribunal de grande instance de Troyes afin de voir ordonner, sur le fondement de l'article 1167 du code civil, l'annulation et en tous cas l'inopposabilité de l'acte d'apport en nature.

Mme X... épouse Kadouch et la SCI Patrimoniale Immobilière se sont opposées à la demande au motif, notamment, de la nullité des actes de cautionnement.

Par jugement du 20 juillet 2007, le Tribunal de grande instance de Troyes a :

- déclaré la Caisse Régionale de Crédit agricole Mutuel de Champagne-Bourgogne recevable à agir ;

- débouté Mme X... épouse Kadouch et la SCI Patrimoniale Immobilière de leur demande de sursis à statuer ;

- déclaré nul l'engagement de caution de Mme X... épouse Kadouch souscrit en garantie du prêt du 3 mai 1990 ;

- déclaré valide le contrat de prêt souscrit le 27 février 1991 ;

- déclaré valide la déclaration de créance au passif de la liquidation judiciaire de la SCI Résidence des Hortensias ;

- déclaré valide l'engagement de caution de Mme X... épouse Kadouch consenti en garantie du prêt du 27 février 1991 ;

- déclaré inopposable au Crédit Agricole l'acte d'apport en nature du 9 avril 1992, publié le 10 juin 1992, vol. 1992 no 2652, par lequel Mme X... épouse Kadouch a transféré au profit de la SCI Patrimoniale Immobilière le bien immobilier sis ...à Charmont-sur-Barbuise (10), comprenant une maison d'habitation, des dépendances et un terrain, le tout d'une contenance de 3. 150 m ², cadastré section ZN no 47, lieudit " Le Pré Cadet " ;

- condamné Mme X... épouse Kadouch et la SCI Patrimoniale Immobilière à supporter les frais afférents à la publication de tous les actes rendus nécessaires par la présente procédure ;

- déclaré irrecevable la demande de dommages-intérêts formée par Mme X... épouse Kadouch et la SCI Patrimoniale Immobilière ;

- condamné Mme X... épouse Kadouch et la SCI Patrimoniale Immobilière à payer au Crédit Agricole la somme de 5. 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté les parties du surplus de leurs demandes ;

- condamné Mme X... épouse Kadouch et la SCI Patrimoniale Immobilière aux dépens ;

- ordonné l'exécution provisoire.

Mme X... épouse Kadouch et la SCI Patrimoniale Immobilière ont relevé appel de ce jugement le 19 septembre 2007.

Par dernières conclusions notifiées le 8 septembre 2008, Mme X... épouse Kadouch et la SCI Patrimoniale Immobilière demandent à la Cour de déclarer bien fondé leur appel et mal fondé l'appel incident du Crédit Agricole et de :

- infirmer le jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a déclaré nul l'engagement de caution de Mme X... épouse Kadouch souscrit en garantie du prêt du 3 mai 1990 ;

- dire que le prêt consenti le 27 février 1991 n'a pas été repris par la SCI Résidence Les Hortensias ;

- déclarer en conséquence ce prêt nul et de nul effet ;

- débouter en conséquence le Crédit Agricole de toutes ses demandes ;

- en toute hypothèse, déclarer nuls et de nul effet les cautionnements de Mme X... épouse Kadouch ;

- confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré nul l'engagement de caution de Mme X... épouse Kadouch souscrit en garantie du prêt du 3 mai 1990 ;

- débouter en conséquence le Crédit Agricole de toutes ses demandes ;

- subsidiairement, faire droit à sa demande de dommages-intérêts formée contre le Crédit Agricole et le condamner à lui payer la somme équivalente au montant de ses réclamations ;

- ordonner la compensation de ces dommages-intérêts avec les sommes réclamées par le Crédit Agricole au titre de son engagement de caution ;

- débouter le Crédit Agricole de toutes ses demandes, notamment de son action paulienne ;

- condamner le Crédit Agricole au paiement de la somme de 4. 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Par dernières conclusions notifiées le 9 septembre 2008, la Caisse Régionale de Crédit agricole Mutuel de Champagne-Bourgogne demande à la Cour de :

- débouter Mme X... épouse Kadouch et la SCI Patrimoniale Immobilière de leur appel et confirmer le jugement en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a déclaré nul l'engagement de caution de Mme X... épouse Kadouch souscrit en garantie du prêt du 3 mai 1990 ;

- dire inopposable à son égard l'acte d'apport en nature du 9 avril 1992, publié le 10 juin 1992, vol. 1992 no 2652, par lequel Mme X... épouse Kadouch a transféré au profit de la SCI Patrimoniale Immobilière le bien immobilier sis ...à Charmont-sur-Barbuise (10), comprenant une maison d'habitation, des dépendances et un terrain, le tout d'une contenance de 3. 150 m ², cadastré section ZN no 47, lieudit " Le Pré Cadet " ;

- condamner solidairement Mme X... épouse Kadouch et la SCI Patrimoniale Immobilière à supporter tous les frais afférents à la publication de tous les actes rendus nécessaires par la présente procédure et ses suites ;

- le recevoir en son appel incident et dire bon et valable l'engagement de caution de Mme X... épouse Kadouch souscrit en garantie du prêt du 3 mai 1990 ;

- condamner solidairement les appelants au paiement de la somme de 5. 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

SUR CE, LA COUR,

Attendu qu'il ressort des différents actes notariés versés aux débats que l'appelante n'est pas " Mme Arlette X... née D..." comme mentionné par erreur dans l'acte d'appel et dans ses propres conclusions, mais Mme Arlette X... épouse Kadouch ; qu'il est en effet mentionné dans les différents actes produits que cette dernière est née le 9 août 1952 à Maisons-Lafitte (78) et qu'elle s'est mariée avec M. Gabriel Kadouch le 24 décembre 1976 ;

Qu'il convient de donner à l'appelante sa véritable identité ;

Sur l'engagement de caution de Mme X... épouse Kadouch souscrit en garantie du prêt du 3 mai 1990

Attendu que le Crédit Agricole poursuit l'infirmation du jugement déféré en ce qu'il a déclaré nul l'engagement de caution de Mme X... épouse Kadouch souscrit en garantie du prêt du 3 mai 1990 en faisant valoir que, si le mandat de se porter caution, annexé à l'acte authentique, ne comporte pas les formalités prescrites par l'article 1326 du code civil, il constitue néanmoins un commencement de preuve par écrit valablement complété par des éléments extrinsèques ;

Attendu qu'aux termes de l'article 1326 du code civil, l'acte juridique par lequel une seule partie s'engage envers une autre à lui payer une somme d'argent ou à lui livrer un bien fongible doit être constaté dans un titre qui comporte la signature de celui qui souscrit cet engagement ainsi que la mention écrite par lui-même de la somme ou de la quantité en toutes lettres et en chiffres ;

Qu'en l'espèce, le mandat de se porter caution donné le 3 mai 1990 par Mme X... épouse Kadouch à M. Joseph Kadouch, annexé à l'acte de prêt du même jour, ne comporte pas la mention manuscrite, en toutes lettres et en chiffres, de la somme pour laquelle l'intéressée souscrivait son engagement ;

Que cet acte ne peut donc valoir que comme commencement de preuve par écrit ;

Attendu que cet acte irrégulier n'est cependant pas valablement complété par le fait invoqué par la banque selon lequel Mme X... épouse Kadouch était associée de la Sarl CIP, elle-même associée de la SCI Les Terrasses de Reuilly, qu'elle avait un intérêt personnel à l'opération immobilière et qu'elle était rompue à la vie des affaires pour être associée de cinq autres sociétés civiles immobilières et gérantes de quatre sociétés de promotion immobilière ;

Qu'en effet, ces seules circonstances ne constituent pas des éléments extrinsèques complétant utilement l'acte litigieux dès lors qu'elles n'établissent pas que Mme X... épouse Kadouch avait une parfaite connaissance de l'étendue de l'obligation qu'elle souscrivait en signant l'acte du 3 mai 1990 ;

Que le jugement déféré sera, par conséquent, confirmé en ce qu'il a déclaré nul l'engagement de caution de Mme X... épouse Kadouch souscrit en garantie du prêt du 3 mai 1990 ;

Sur la demande de nullité du prêt du 27 février 1991

Attendu que les appelantes poursuivent la nullité du prêt du 27 février 1991 motif pris de l'absence de ratification de ce prêt par la SCI Résidence Les Hortensias après son immatriculation ; qu'elles font valoir à cette fin que l'article 24 des statuts a donné pouvoir à Mme Iris C...de se porter acquéreur de tous immeubles et terrains et de contracter les emprunts nécessaires au financement des acquisitions et l'a autorisée à déléguer ses pouvoirs à M. Joseph Kadouch ; qu'elles rappellent que l'acte de prêt a été souscrit par la SCI Résidence Les Hortensias, en cours d'immatriculation, représentée par ses deux associés, M. José F...G...et la SCI Parisienne de Promotion, représentée par sa gérante, Mme Iris C..., elle-même représentée par M. Joseph Kadouch, lesquels n'avaient pas été mandatés par les statuts pour agir au nom de la société en formation ; qu'elles font observer qu'il n'y a pas de reprise d'engagement tacite et que l'acte de prêt ne pouvait engager la société, qui a été immatriculée le 12 avril 1991, qu'après décision spéciale et expresse des associés de ratifier les engagements intervenus antérieurement à l'immatriculation ; qu'elles concluent à la nullité de l'engagement de caution pour reposer sur une obligation qui n'est pas valable ;

Mais attendu qu'en vertu de l'article 1843 du code civil, les personnes qui ont agi au nom d'une société en formation avant l'immatriculation sont tenues des obligations nées des actes ainsi accomplis, avec solidarité si la société est commerciale, sans solidarité dans les autres cas ; que la société régulièrement immatriculée peut reprendre les engagements souscrits qui sont alors réputés avoir été dès l'origine contractés par celle-ci ;

Qu'en vertu de l'article 6, alinéa 3, du décret no 78-704 du 3 juillet 1978, pris pour application de cet article, les associés peuvent, dans les statuts ou par acte séparé, donner mandat à l'un ou plusieurs d'entre eux, ou au gérant non associé qui a été désigné, de prendre des engagements pour le compte de la société ; que, sous réserve qu'ils soient déterminés et que les modalités en soient précisées par le mandat, l'immatriculation de la société emportera reprise de ces engagements par ladite société ;

Qu'en l'espèce, aux termes de l'article 24 des statuts, adoptés le 1er janvier 1991, " tous pouvoirs sont donnés à Madame Iris C...à l'effet de se porter acquéreur de tous immeubles et terrains, de contracter tous emprunts ou financements nécessaires à ces acquisitions, de désigner Monsieur Joseph Kadouch à l'effet de la représenter pour la régularisation des opérations sus-visées conformément à l'article 14-1 des présents statuts " ;

Que, par procuration annexée à l'acte notarié, Mme Iris C..., agissant en qualité de gérante de la SCI Résidence Les Hortensias et de gérante de la Sarl Société Parisienne de Promotion Immobilière, a donné tous pouvoirs à M. Joseph Kadouch à l'effet de signer l'acte d'acquisition d'un immeuble situé à Saint-Maurice (94) et " l'acte établi par Maîtres Chaton et Somborn, notaires associés à Troyes, devant constater une ouverture de crédit en compte-courant par la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de l'Aube à la SCI Résidence Les Hortensias d'un montant de trente et un millions de francs (31. 000. 000 francs) destinée à financer notamment le prix d'acquisition d'une propriété immobilière à Saint-Maurice (Val-de-Marne) (suit la description du bien)... " ;

Que M. Joseph Kadouch, signataire de l'acte de prêt du 27 février 1991, avait reçu délégation à cette fin de Mme Iris C..., laquelle avait été expressément mandatée par les statuts de la société en cours d'immatriculation pour procéder à l'opération litigieuse ;

Qu'il s'ensuit que la formalité prévue par l'article 6, alinéa 3, du décret no 78-704 du 3 juillet 1978 ayant été accomplie, l'immatriculation de la société, effectuée le 12 avril 1991, a entraîné la reprise de l'engagement qui avait été souscrit le 27 février 1991 ;

Que c'est donc par une juste application de ces dispositions que les premiers juges ont rejeté la prétention des appelantes tendant à la nullité du prêt du 27 février 1991 ;

Sur la demande de nullité de l'acte de cautionnement pour défaut de signature par toutes les parties

Attendu que les appelantes poursuivent la nullité de l'acte de cautionnement signé par Mme X... épouse Kadouch en faisant valoir que les signatures de MM. K...et J...ont été déclarées fausses et qu'en conséquence l'acte de cautionnement litigieux doit être déclaré nul pour ne pas avoir été signé par l'intégralité des cautions ; qu'elles rappellent, d'une part, que cet argument a déjà été soulevé dans l'assignation du 26 juin 2000, laquelle a interrompu la prescription quinquennale soulevée par l'intimé au visa de l'article 1304 du code civil et, d'autre part, que dans son action contre le notaire, le Crédit Agricole contestait l'authenticité et l'efficacité de l'acte dressé par Me B...;

Mais attendu qu'il ne ressort pas des pièces versées aux débats que Mme X... épouse Kadouch, qui avait connaissance des jugements ayant annulé les actes de cautionnement consentis au nom de MM. K...et J...à tout le moins le 15 novembre 2000, ainsi que l'atteste le bordereau annexé aux conclusions qu'elle faisait signifier ce jour-là, ait agi en nullité de son propre acte de cautionnement pour défaut de signature de toutes les parties avant l'expiration du délai de cinq ans prévu par l'article 1304 du code civil ; que les appelantes ne produisent pas " l'assignation du 26 juin 2000 " par laquelle la prescription quinquennale aurait été prétendument interrompue par l'appelante ;

Qu'en toute hypothèse, l'action n'aurait pas pu prospérer sur ce fondement dès lors que l'article 23, désormais 41, du décret no 71-941 du 26 novembre 1971 vise exclusivement le défaut de signature des parties à l'acte authentique et non l'hypothèse de la signature, reconnue par la suite comme fausse, apposée sur un mandat de se porter caution annexé à l'acte ;

Sur les irrégularités affectant le cautionnement

Attendu que la simple lecture de l'acte notarié du 27 février 1991 contredit les allégations des appelantes sur les discordances qu'elles relèvent entre les mentions portées en page 15 et celles figurant en page 17 ; qu'en effet, c'est seulement en page 17 que figure la répartition de l'engagement entre les cautions, à savoir, d'une part, à hauteur de 39 % solidairement entre MM. J..., K...et L...et, d'autre part, à hauteur de 61 % solidairement entre Mmes Iris D..., Arlette D..., Paulette E..., Mlle Jacqueline Kadouch et M. et Mme F...G...; que la page 15 ne mentionne aucune répartition de l'engagement souscrit par les différentes cautions ;

Que, par ailleurs, Mme X... épouse Kadouch était présente à la signature de l'acte authentique du 27 février 1991 de sorte qu'elle ne peut pas valablement soutenir qu'elle n'aurait pas été pleinement informée de l'étendue de l'engagement qu'elle souscrivait ;

Que les appelantes ne peuvent donc pas prétendre à la nullité du cautionnement sur ce fondement ;

Sur l'erreur, vice du consentement

Attendu que les appelantes soulèvent la nullité de l'acte de cautionnement consenti par Mme X... épouse Kadouch en faisant valoir que cette dernière ne s'est portée caution qu'à la condition que les autres intervenants se portent également cautions ; qu'elles soutiennent que l'engagement des autres cautions était déterminant dans la mesure où elle s'est engagée sous la condition de constitution d'autres sûretés au nombre desquelles l'engagement de caution de MM. K...et J..., dirigeants de la Banque Saga ; qu'elles rappellent que leurs cautionnements ont été déclarés nuls et qu'en raison de cette nullité son consentement a été obtenu par erreur dès lors qu'elle se trouve privée du recours contre ses cofidéjusseurs ; qu'en raison du lien d'indivisibilité implicite existant entre ces différents engagements, la nullité qui affecte l'un entraîne la nullité de l'autre ;

Mais attendu qu'en vertu de l'article 1110 du code civil, l'erreur n'est une cause de nullité de la convention que lorsqu'elle tombe sur la substance même de la chose qui en est l'objet ;

Qu'en l'espèce, Mme X... épouse Kadouch ne démontre pas qu'elle aurait fait des cautionnements de MM. J...et K...la condition déterminante de son engagement ; qu'en effet, l'acte de prêt était garanti par deux groupes distincts de cautions, à savoir le groupe des consorts D...-Pimentel G...solidairement entre eux à hauteur de 61 % et celui des consorts K...-Petit-L...solidairement entre eux à hauteur de 39 % ; qu'il s'ensuit qu'aucun recours subrogatoire n'était possible d'un groupe à l'autre de sorte que l'annulation des cautionnements de MM. K...et J...est sans incidence sur l'obligation de Mme X... épouse Kadouch et ne lui préjudicie pas ;

Qu'en outre, la circonstance alléguée selon laquelle MM. J...et K...auraient été les instigateurs de l'opération immobilière et que le Crédit Agricole n'aurait accepté de prêter de l'argent qu'en considération de la présence de la banque Saga, dirigée par MM. J...et K..., ne caractérise pas un lien d'indivisibilité implicite entre les différents engagements de caution alors que, bien au contraire, l'acte litigieux prévoit expressément un engagement limité des consorts D...-Pimentel G...d'une part et des consorts M...d'autre part ;

Que le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de nullité de l'engagement de caution souscrit par Mme X... épouse Kadouch ;

Sur l'action paulienne

Attendu qu'en vertu de l'article 1167 du code civil, les créanciers peuvent, en leur nom personnel, attaquer les actes faits par leur débiteur en fraude de leurs droits ;

Attendu que les premiers juges ont justement relevé que le Crédit Agricole pouvait se prévaloir à l'encontre de Mme X... épouse Kadouch d'un principe certain de créance au jour où, par acte du 9 avril 1992, elle a apporté les droits afférents à l'immeuble situé à Charmont-sur-Barbuise (10) à une SCI Patrimoniale Immobilière créée à cette occasion entre elle-même et ses deux enfants ; que Mme X... épouse Kadouch et son cocontractant avaient connaissance du préjudice causé au Crédit Agricole par l'acte litigieux qui faisait sortir du patrimoine du débiteur un bien immobilier, d'une valeur substantielle, en contrepartie de l'attribution au sein de la société civile immobilière de parts dont le tribunal a justement relevé qu'il n'était justifié ni de la négociabilité ni de la valeur ; qu'il s'en est suivi une insolvabilité apparente de la débitrice qui n'est pas utilement combattue par cette dernière qui ne démontre pas disposer de biens de valeur suffisante pour répondre de son engagement ; que les premiers juges ont également justement relevé que le caractère frauduleux de l'acte était conforté par la concomitance des opérations similaires effectuées par les autres cautions ;

Que le jugement déféré sera, par conséquent, confirmé en ce qu'il a fait droit à l'action paulienne intentée par le Crédit Agricole et déclaré inopposable à ce dernier l'acte d'apport du 9 avril 1992 ;

Sur la demande indemnitaire formée par Mme X... épouse Kadouch

Attendu qu'à l'appui de sa demande subsidiaire tendant à voir condamner le Crédit Agricole à lui payer une somme équivalente au montant de ses réclamations et ordonner la compensation de ces dommages-intérêts avec les sommes réclamées par la banque au titre de son engagement de caution, Mme X... épouse Kadouch se prévaut des fautes qu'aurait commises l'intimé en raison d'un financement excessif, d'un manquement à son devoir de prudence et d'une disproportion entre les prêts accordés et les ressources de la caution ;

Mais attendu que c'est à juste titre que les premiers juges ont fait droit à la fin de non-recevoir opposée par le Crédit Agricole aux prétentions de l'appelante dès lors que la faute de la banque, qui justifie d'un principe certain de créance, ne peut être invoquée par voie d'exception dans le cadre d'une défense à une action paulienne ;

Que le jugement déféré sera également confirmé de ce chef ;

Sur les autres demandes

Attendu que, succombant dans leurs prétentions devant la Cour, Mme X... épouse Kadouch et la SCI Patrimoniale Immobilière seront condamnées in solidum aux dépens d'appel ; qu'elles ne peuvent donc pas obtenir l'indemnité qu'elles sollicitent au titre de leurs frais de procédure non compris dans les dépens ;

Que l'équité commande leur condamnation in solidum à payer au Crédit Agricole la somme supplémentaire de 3. 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS,

Statuant publiquement et par arrêt contradictoire ;

Rappelle que l'appelante n'est pas " Mme Arlette X... née D...", mais Mme Arlette X... épouse Kadouch ;

Déboute Mme Arlette X... épouse Kadouch et la SCI Patrimoniale Immobilière de leurs prétentions et confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré ;

Condamne in solidum Mme Arlette X... épouse Kadouch et la SCI Patrimoniale Immobilière à payer à la Caisse Régionale de Crédit agricole Mutuel de Champagne-Bourgogne la somme supplémentaire de 3. 000 euros (trois mille euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Rejette la demande d'indemnité de procédure formée par Mme Arlette X... épouse Kadouch et la SCI Patrimoniale Immobilière et les condamne in solidum aux dépens d'appel ; admet la SCP Six Guillaume N..., avoués, au bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.

Le GreffierLe Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de reims
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 595
Date de la décision : 13/10/2008
Type d'affaire : Civile

Analyses

CAUTIONNEMENT - Conditions de validité - Acte de cautionnement - Mentions de l'article 1326 du code civil - Insuffisance - Portée - / JDF

En application de l'article 1326 du code civil, faute de comporter la mention manuscrite, en toutes lettres et en chiffres, de la somme pour laquelle l'intéressé souscrivait son engagement, l'acte est irrégulier et ne vaut que comme commencement de preuve par écrit. N'établie pas la parfaite connaissance de l'étendue de l'obligation et dés lors ne complète pas utilement l'acte irrégulier la qualité d'associé et de gérant dans divers sociétés ainsi que l'existence d'un intérêt personnel à l'opération litigieuse Cause un préjudice au créancier, justifiant une action paulienne le fait de sortir du patrimoine du débiteur, un bien immobilier, d'une valeur substantielle, en contrepartie de l'attribution au sein d'une société de parts dont le tribunal a relevé qu'il n'était justifié ni de la négociabilité ni de la valeur, entraînant une insolvabilité apparente du débiteur qui ne démontre pas disposer de biens de valeur suffisante pour répondre de son engagement.


Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Troyes, 20 juillet 2007


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.reims;arret;2008-10-13;595 ?
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