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14/01/2008 | FRANCE | N°26

France | France, Cour d'appel de reims, Chambre civile 1, 14 janvier 2008, 26


ARRET No du 14 janvier 2008

R. G : 06 / 02312
UNION NATIONALE POUR L'EMPLOI DANS L'INDUSTRIE ET LE COMMERCE-UNEDIC-DELEGATION NATIONALE AGS
c /
SELARL B... BERNARD ET NICOLAS
AH
Formule exécutoire le : à : COUR D'APPEL DE REIMS CHAMBRE CIVILE-1o SECTION ARRET DU 14 JANVIER 2008

APPELANTE : d'un jugement rendu le 03 Août 2006 par le Tribunal de Grande Instance de REIMS,

UNION NATIONALE POUR L'EMPLOI DANS L'INDUSTRIE ET LE COMMERCE-UNEDIC-DELEGATION NATIONALE AGS 77 rue de Miromesnil 75008 PARIS

COMPARANT, concluant par la SCP DELVINCOURT-JA

CQUEMET-CAULIER-RICHARD avoués à la Cour, et ayant pour conseil la SCP LAFARGE-FLECHEUX-C...

ARRET No du 14 janvier 2008

R. G : 06 / 02312
UNION NATIONALE POUR L'EMPLOI DANS L'INDUSTRIE ET LE COMMERCE-UNEDIC-DELEGATION NATIONALE AGS
c /
SELARL B... BERNARD ET NICOLAS
AH
Formule exécutoire le : à : COUR D'APPEL DE REIMS CHAMBRE CIVILE-1o SECTION ARRET DU 14 JANVIER 2008

APPELANTE : d'un jugement rendu le 03 Août 2006 par le Tribunal de Grande Instance de REIMS,

UNION NATIONALE POUR L'EMPLOI DANS L'INDUSTRIE ET LE COMMERCE-UNEDIC-DELEGATION NATIONALE AGS 77 rue de Miromesnil 75008 PARIS

COMPARANT, concluant par la SCP DELVINCOURT-JACQUEMET-CAULIER-RICHARD avoués à la Cour, et ayant pour conseil la SCP LAFARGE-FLECHEUX-CAMPANA-LE BLEVENNEC
INTIMEE :
SELARL B... BERNARD ET NICOLAS ...62000 ARRAS

Comparant, concluant par la SCP THOMA-LE RUNIGO-DELAVEAU-GAUDEAUX, avoués à la Cour, et ayant pour conseil Me Jean-Pierre FABRE, avocat au barreau de PARIS.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :
Monsieur MAUNAND, Président de Chambre Monsieur MANSION, Conseiller Madame HUSSENET, Conseiller

GREFFIER :
Madame Maryline THOMAS, Greffier lors des débats et Madame Francine COLLARD, adjoint administratif, faisant fonction de Greffier lors du prononcé,
MINISTERE PUBLIC :
Auquel l'affaire a été régulièrement communiquée.
DEBATS :
A l'audience publique du 03 Décembre 2007, où l'affaire a été mise en délibéré au 14 Janvier 2008,
ARRET :
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 14 Janvier 2008 et signé par Monsieur Yves MAUNAND, Président de Chambre, et Madame THOMAS, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
Par jugement du 24 septembre 1999, le tribunal de commerce d'ARRAS a désigné Maître Nicolas B..., membre de la SELARL B..., en qualité de liquidateur de la société ESSAM, en redressement judiciaire depuis le 2 juillet 1999.
Par lettres recommandées avec accusé de réception du 4 octobre 1999, la SELARL B... a notifié aux salariés de la société ESSAM leur licenciement économique ; 11, puis 77 d'entre eux ont ensuite saisi le conseil de prud'hommes de LENS pour faire juger que ce licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Au terme des premières procédures, 11 arrêts ont été rendus le 27 septembre 2002 par la Cour d'Appel de DOUAI, aujourd'hui définitifs, par lesquels il a été jugé que les licenciements dénoncés étaient sans cause réelle et sérieuse faute d'indication du motif économique. La créance de dommages et intérêts de chaque salarié au passif de la société a été fixée, l'AGS, partie à l'instance, se voyant tenue à garantie dans les limites des articles L 143-11-8 et D 143-2 du code du travail.
En exécution de ces décisions, l'AGS a versé aux salariés concernés la somme totale de 247 000 €.
Par courrier du 3 décembre 2002, L'UNION NATIONALE POUR L'EMPLOI DANS L'INDUSTRIE ET LE COMMERCE DELEGATION NATIONALE AGS (l'UNEDIC), considérant que le liquidateur avait commis une faute dans la procédure de licenciement, a vainement invité Maître Nicolas B... à mettre en jeu son assurance professionnelle, afin de l'indemniser du préjudice résultant de l'octroi des dommages et intérêts dont elle avait dû faire l'avance.
Par exploit du 21 janvier 2005, l'UNEDIC-DELEGATION NATIONALE AGS a assigné la SELARL B... par-devant le tribunal de grande instance de REIMS, à l'effet, au visa des articles 47 du nouveau code de procédure civile, 174 du décret du 27 décembre 1985, et 1382 du code civil de :
A titre principal :
La voir déclarer entièrement responsable de son préjudice, et condamner en conséquence à lui payer la somme de 247 000 € à titre de dommages et intérêts ;
A titre subsidiaire :
Voir prononcer un partage de responsabilité entre les parties, et voir condamner la SELARL B... au paiement de la somme de 12 500 € à titre de dommages et intérêts ;
En tout état de cause :
Voir condamner la SELARL B... au paiement de la somme de 4 000 € au titre des frais irrépétibles, en sus des entiers dépens de l'instance.
La SELARL B... pour sa part considérait que les lettres de licenciement étaient parfaitement régulières au regard des exigences de la Cour de cassation, demandait au tribunal de constater que la liquidation judiciaire de la société ESSAM ne lui permettait pas de soutenir une procédure devant ladite cour, en conséquence, de dire qu'elle n'avait commis aucune faute susceptible d'engager sa responsabilité, de constater que l'UNEDIC était seule à l'origine du préjudice invoqué faute d'avoir sérieusement défendu sur le fond devant la cour d'appel de DOUAI et d'avoir formé les pourvois en cassation nécessaires, voire, de lui avoir proposé les fonds suffisants pour mener ces procédures.
Elle concluait en conséquence au rejet des prétentions adverses, et à la condamnation de l'UNEDIC à lui verser les sommes de 5 000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive, outre 2 000 € du chef des frais irrépétibles, en sus des dépens.
Par jugement en date du 3 août 2006, le tribunal a débouté l'UNEDIC DELEGATION NATIONALE AGS de toutes ses demandes, rejeté de même la demande de dommages et intérêts formée par la SELARL B..., condamné l'UNEDIC, tenue des entiers dépens, à lui verser la somme de 1 000 € à titre d'indemnité de procédure.
Il devait en effet retenir que la simple référence à la liquidation judiciaire dans les lettres de licenciement notifiées aux salariés n'entachait pas celles-ci d'irrégularité, puisqu'étant considéré comme l'énoncé du motif économique exigé par l'article L 122-14-2 du code du travail, de sorte qu'aucune faute ne pouvait être reprochée à la SELARL défenderesse.
L'UNEDI DELEGATION NATIONALE AGS a relevé appel de cette décision le 29 août 2006.
Au terme de ses dernières conclusions, notifiées le 16 novembre 2007, elle poursuit l'infirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions lui faisant grief, et demande à la Cour, statuant à nouveau, de :
-dire et juger que la responsabilité de la SELARL B... doit être examinée au regard du droit positif jurisprudentiel applicable en 1999, date de la rédaction et de l'envoi des lettres de licenciement litigieuses ;-dire et juger qu'à cette époque toute lettre de licenciement devait comporter l'exposé du motif économique le justifiant, peu important que les licenciements aient été prononcés à la suite d'un jugement de redressement judiciaire ;

-dire et juger que la SARL B... a commis une faute en ne mentionnant pas le motif économique dans les lettres de licenciement ;-dire et juger, quand bien même serait-il considéré qu'il convient de distinguer entre procédure de redressement judiciaire et procédure de liquidation judiciaire, et qu'aucune jurisprudence de la Cour de cassation relative à des espèces mettant en cause la responsabilité des employeurs en liquidation judiciaire n'existait à l'époque des faits, que la SELARL B... a commis une imprudence et une négligence fautives en ne mentionnant pas le motif économique dans les lettres litigieuses ;-en tout état de cause, dire et juger que la SELARL B... a commis une faute, ou pour le moins une imprudence et une négligence fautives en s'abstenant d'inscrire un pourvoi à l'encontre des arrêts de condamnation de la cour d'appel de DOUAI, les laissant devenir définitifs ;-en conséquence, la déclarer entièrement responsable du préjudice subi par l'UNEDIC AGS ;-condamner la SELARL B... à payer à L'UNEDIC AGS la somme de 247 000 € à titre de dommages et intérêts, outre les intérêts au taux légal à compter de l'assignation, au besoin à titre de dommages et intérêts complémentaires ;-débouter la SELARL B... de toutes ses demandes, fins et conclusions ;-la condamner au paiement en outre de la somme de 4 000 € au titre des frais irrépétibles, en sus des entiers dépens de première instance et d'appel, avec pour ces derniers, droit de recouvrement direct au profit de la SCP d'avoués DELVINCOURT JACQUEMET CAULIER-RICHARD.

Subsidiairement, il est sollicité un partage de responsabilité.
L'UNEDIC AGS excipe au soutien de ses prétentions de différents articles de doctrine et arrêts rendus par la chambre sociale de la Cour de cassation contemporains des faits incriminés, à l'inverse de la jurisprudence produite par la partie adverse, en date de 2004.
Elle ajoute qu'il appartenait à tout le moins à la SELARL B..., sûre de son bon droit, de se pourvoir en cassation contre les arrêts de la cour d'appel de DOUAI.
Par dernières écritures notifiées le 15 octobre 2007, la SELARL B..., reprenant ses moyens développés en première instance concernant notamment la distinction à opérer entre les hypothèses de redressement judiciaire, d'une part, et de liquidation judiciaire d'autre part, demande à la Cour de :
-constater que les lettres de licenciement établies par Maître B... étaient parfaitement régulières au regard des exigences de la Cour de cassation ;-constater que la liquidation judiciaire de la société ESSAM ne disposait pas des fonds lui permettant de soutenir une procédure devant la Cour de cassation ;-en conséquence, dire et juger que Maître B... n'a commis aucune faute susceptible d'engager sa responsabilité, de constater que l'UNEDIC est seule à l'origine du préjudice qu'elle invoque, faute d'avoir sérieusement défendu sur le fond devant la cour d'appel de DOUAI et d'avoir formé les pourvois qui s'imposaient, ou, si elle craignait une irrecevabilité, d'avoir fourni les fonds suffisants à la procédure collective pour mener ces procédures ;-confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté L'UNEDIC AGS de ses demandes ;-pour le surplus, infirmer ledit jugement et condamner L'UNEDIC à payer à la SELARL B... la somme de 1 € symbolique à titre de dommages et intérêts, ainsi que 4 000 € d'indemnité de procédure, et la déclarer tenue des dépens, avec droit de recouvrement direct au profit de la SCP THOMA LE RUNIGO DELAVEAU GAUDEAUX.

Elle rappelle à l'instar des premiers juges que l'autorité de chose jugée est relative, et qu'en l'espèce, elle n'était pas partie, en son nom personnel, à la procédure ayant donné lieu aux arrêts de la cour d'appel de DOUAI en date du 11 septembre 2002, la question de la responsabilité du mandataire liquidateur n'étant alors pas soulevée.
Elle soutient ensuite que la procédure engagée par l'UNEDIC à son encontre est génératrice d'un préjudice professionnel et moral important, justifiant dans son principe l'allocation de dommages et intérêts.
SUR CE LA COUR
Attendu qu'il est constant que l'autorité de chose jugée qui s'attache aux arrêts rendus le 27 septembre 2002 par la Cour d'appel de DOUAI est relative, et que ces décisions n'emportent pas par elles-même à l'encontre du liquidateur la démonstration d'une faute délictuelle ou quasi délictuelle, compte tenu de l'absence d'identité de cause et de parties avec le présent litige ;
Attendu ensuite qu'ainsi que l'ont pertinemment relevé les premiers juges, la Cour de cassation n'avait pas été amenée à statuer, en 1999, sur l'éventuel défaut de motivation d'une lettre de licenciement pour motif économique se référant uniquement à la liquidation judiciaire de l'employeur, les espèces versées aux débats concernant des licenciements prononcés pendant la période de redressement judiciaire, pour laquelle il ne peut y avoir analogie de raisonnement puisque le licenciement n'est pas nécessairement induit, en pareil cas, par la nature de la procédure collective engagée ;
Que ses décisions ultérieures ont démontré la justesse de cette analyse, de sorte qu'il ne saurait être fait grief à Maître B... d'avoir procédé ainsi qu'il l'a fait, ni même d'avoir négligé de prendre la précaution superfétatoire d'une motivation complémentaire, dont on voit mal, au demeurant, quel aurait pu en être le contenu ;
Attendu que l'UNEDIC AGS ne conteste pas, par ailleurs, n'avoir pas discuté le fond du litige porté devant la Cour d'appel de DOUAI, soit la validité des lettres de licenciement et par suite la régularité même de la procédure suivie, alors qu'elle y avait un intérêt majeur, étant tenue à la garantie des éventuelles condamnations et que rien ne lui interdisait de mener ce débat ;
Qu'elle est dès lors mal venue d'invoquer la perte d'une chance d'obtenir la cassation des 11 arrêts de condamnation résultant de la défaillance du liquidateur, lequel, impécunieux par hypothèse, n'a pas régularisé de pourvoi contre lesdits arrêts ;
Attendu qu'il s'ensuit que c'est par une exacte appréciation des faits et du droit applicable que le tribunal de grande instance a rejeté la demande indemnitaire présentée par l'UNEDIC AGS comme celle, formée reconventionnellement par la SELARL B..., tendant à l'allocation de dommages et intérêts, en l'absence de preuve d'une quelconque intention de nuire ou de légèreté blâmable de la partie adverse ;
Que le jugement déféré sera confirmé en toutes ses dispositions ;
Attendu au surplus qu'il serait inéquitable de laisser supporter par la SELARL B..., attraite à tort devant la Cour de céans, les frais irrépétibles exposés en cause d'appel ; qu'une indemnité de 2 000 € lui sera versée en conséquence par l'UNEDIC AGS, qui verra sa propre réclamation du même chef rejetée, et sera en outre tenue des dépens d'appel ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement et contradictoirement ;
Confirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris ;
Y ajoutant ;
Condamne l'UNEDIC AGS à verser à la SELARL B... la somme de 2 000 € en application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
La déboute de sa propre demande du même chef ;
Condamne L'UNEDIC AGS aux dépens d'appel, et admet la SCP THOMA LE RUNIGO DELAVEAU GAUDEAUX, avoués, au bénéfice de l'article 699 du code précité.
Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de reims
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 26
Date de la décision : 14/01/2008
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Reims, 03 août 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.reims;arret;2008-01-14;26 ?
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