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10/12/2007 | FRANCE | N°991

France | France, Cour d'appel de reims, Chambre civile 1, 10 décembre 2007, 991


ARRET No
du 10 décembre 2007

R. G : 06 / 01834

S. A. R. L. LA FERME DE LA GLOIRE DIEU
X...

c /

AA...
Y...
Y...
Y...

AH

Formule exécutoire le :
à : COUR D'APPEL DE REIMS
CHAMBRE CIVILE-1o SECTION
ARRET DU 10 DECEMBRE 2007

APPELANTS :
d'un jugement rendu le 03 Mai 2006 par le Tribunal de Grande Instance de TROYES,

La S. A. R. L. LA FERME DE LA GLOIRE DIEU
10250 COURTERON
Monsieur Pascal RUELLE
Ferme de la Gloire Dieu
10250 COURTERON

COMPARANT, concluant par la SCP GENET-BRAI

BANT avoués à la Cour, et ayant pour conseil Me Guillaume Z..., avocat au barreau de PARIS

INTIMES :

Madame Claude A... veuve B...Y..., pri...

ARRET No
du 10 décembre 2007

R. G : 06 / 01834

S. A. R. L. LA FERME DE LA GLOIRE DIEU
X...

c /

AA...
Y...
Y...
Y...

AH

Formule exécutoire le :
à : COUR D'APPEL DE REIMS
CHAMBRE CIVILE-1o SECTION
ARRET DU 10 DECEMBRE 2007

APPELANTS :
d'un jugement rendu le 03 Mai 2006 par le Tribunal de Grande Instance de TROYES,

La S. A. R. L. LA FERME DE LA GLOIRE DIEU
10250 COURTERON
Monsieur Pascal RUELLE
Ferme de la Gloire Dieu
10250 COURTERON

COMPARANT, concluant par la SCP GENET-BRAIBANT avoués à la Cour, et ayant pour conseil Me Guillaume Z..., avocat au barreau de PARIS

INTIMES :

Madame Claude A... veuve B...Y..., prise tant en son nom personnel qu'en qualité d'ayant droit de feu M. Bernard Y...
...
10250 MUSSY SUR SEINE
Madame Valéry Y..., pris en qualité d'héritière de feu M. Bernard Y...
...
10250 MUSSY SUR SEINE
Monsieur Georges Y..., pris en qualité d'héritier de feu M. Bernard Y...
...
10250 MUSSY SUR SEINE
Mademoiselle Isabelle Y..., pris en qualité d'héritière de feu M. Bernard Y...
...
10250 MUSSY SUR SEINE

Comparant, concluant par la SCP THOMA-LE RUNIGO-DELAVEAU-GAUDEAUX, avoués à la Cour, et ayant pour conseil la SCP BABEAU-VERRY-LINVAL, avocats au barreau de TROYES

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :

Monsieur MAUNAND, Président de Chambre
Monsieur MANSION, Conseiller
Madame HUSSENET, Conseiller

GREFFIER :

Madame Maryline THOMAS, Greffier lors des débats et Madame Francine C..., adjoint administratif, faisant fonction de Greffier lors du prononcé,

DEBATS :

A l'audience publique du 12 Novembre 2007, où l'affaire a été mise en délibéré au 10 Décembre 2007,

ARRET :

Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 10 Décembre 2007 et signé par Monsieur Yves MAUNAND, Président de Chambre, et Madame Francine C..., adjoint administratif, faisant fonction de Greffier auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

Par jugement rendu le 26 février 1992, le tribunal de grande instance de TROYES a homologué le plan de cession des éléments d'actifs de l'exploitation agricole de Monsieur Francis Y..., en redressement judiciaire, au profit de Monsieur Pascal RUELLE. Ces actifs se composaient notamment de bâtiments agricoles, d'une maison de maître, et de 42 ha 83 a et 96 ca de terres, sur les communes de COURTERON et de PLAINES SAINT LANGE (Aube). Le jugement prévoyait un délai de six mois pour la réalisation du plan et désignait Maître D...en qualité de commissaire à l'exécution.

Par ordonnance en date du 19 novembre 1992, le juge commissaire a confirmé les termes du plan, à l'exception de la parcelle référencée C 737 sur la commune de COURTERON, et de la A 1 sur celle de PLAINES SAINT LANGES, dont il était apparu qu'elles avaient été données à bail le 30 novembre 1979 à Monsieur Bernard Y..., frère de Francis, d'une part, a d'autre part ordonné la liquidation de la SCEA DE LA GLOIRE DIEU, gérée par le même Bernard Y..., d'autre part.

Monsieur Bernard Y...a formé tierce opposition à la fois au jugement du 26 février 1992 et à l'ordonnance du 19 novembre 1992.

Par jugement du 7 juillet 1993, le tribunal de grande instance l'a déclaré irrecevable.

Bernard Y...a alors relevé appel de cette décision, s'est désisté en ce qui concernait le jugement rendu le 26 février 1992, et par arrêt rendu le 29 mai 1996, la cour d'appel de céans a confirmé l'irrecevabilité de la tierce opposition, s'agissant de l'ordonnance du 19 novembre 1992.

Par arrêt du 16 mars 1999, la Cour de Cassation, saisie par Monsieur Y..., a cassé et annulé en toutes ses dispositions l'arrêt rendu le 29 mai 1999, renvoyant les parties devant la cour d'appel de DIJON.

Par jugement du 20 mars 1996, le tribunal de grande instance de TROYES a constaté que Pascal RUELLE, repreneur, présentait les garanties financières suffisantes pour exécuter le plan de cession arrêté le 26 février 1992 en tenant compte des parcelles exploitées par Bernard Y....

Par arrêt du 4 décembre 2001, la cour d'appel de DIJON a déclaré recevable et bien fondée la tierce opposition, déclaré nulle l'ordonnance du 19 novembre 1992 en ce qu'elle prononçait la liquidation de la SCEA LA GLOIRE DIEU, et précisé que la SCP DARGENT MORANGE, commissaire à l'exécution du plan de Monsieur Francis Y..., exécuterait sa mission conformément aux dispositions légales et au jugement ayant homologué le plan de cession.

Parallèlement, les statuts de la SCI LA FERME DE LA GLOIRE DIEU et de la SARL LA FERME DE LA GLOIRE DIEU, sociétés que Pascal RUELLE s'est substituées dans ses engagements de reprise, ont été établis le 2 février 1996 et la vente par Francis Y...de son actif, conformément au plan de cession homologué, a été régularisée par acte authentique le 25 avril 1996.

A cette date, par acte notarié dressé par Maître GILLET-E..., notaire à Bar sur Seine, Monsieur Francis Y...en effet a vendu à la SCI LA FERME DE LA GLOIRE DIEU, représentée par Monsieur Pascal RUELLE, les différents immeubles énumérés à l'acte, moyennant le prix de 410 610 francs.

A la même date, et dans les mêmes formes, Monsieur Francis Y...a vendu à la SARL LA FERME DE LA GLOIRE DIEU du matériel agricole au prix de 88 000 francs.

Par jugement en date du 17 avril 1997, le tribunal paritaire des baux ruraux de Bar sur Seine a déclaré valide le congé délivré à la requête de Frédéric RUELLE, frère de Pascal RUELLE, porteur de parts dans la SCI LA FERME DE LA GLOIRE DIEU, et cette SCI, à Bernard Y..., s'agissant des parcelles sises à COURTERON et LA PLAINE SAINT LANGES, respectivement C 737 et A 1 ; par ordonnance de référé du 23 décembre 1998, l'expulsion de Bernard Y...a été ordonnée pour le surplus des terres occupées.

Enfin, par jugement du 4 juin 2003, le tribunal de grande instance de TROYES a dit qu'il résultait des dispositifs des jugements des 26 février 1992 et 20 mars 1996 ainsi que de l'ordonnance du juge commissaire du 19 novembre 1992, que les parcelles cadastrées C737 et A1 étaient exclues du périmètre du plan de cession de l'entreprise Francis Y...; sur appel de cette décision, la Cour de céans a constaté le désistement de la SCI LA FERME DE DIEU, et l'acquiescement de la susnommée au jugement déféré.

Par exploit du 30 avril 1999, la SARL DE LA FERME DIEU, considérant que par le seul fait de Bernard Y...elle avait perdu sept campagnes culturales couvrant la période de 1992 à 1998, sur une superficie de 42 ha 83 a 96 ca, soit la totalité des terres entrant dans l'actif de Francis Y..., objet du plan de cession de février 1992, a fait assigner celui-ci par devant le tribunal de grande instance de TROYES, aux fins de le voir déclarer responsable, sur le fondement de l'article 1382 du code civil, de son préjudice, et de la voir condamner en conséquence au paiement de la somme de 1 161 000 francs, avec intérêts légaux à compter de l'assignation. Elle sollicitait en outre le bénéfice de l'exécution provisoire et la condamnation de Monsieur Y...au paiement de la somme de 25 000 francs au titre des frais irrépétibles.

Par suite du décès de Monsieur Bernard Y..., la SARL LA FERME DE LA GLOIRE DIEU, par exploit du avril 2000, a assigné Mme Claude A... veuve Y..., prise en son nom personnel et en qualité d'administratrice légale des biens de ses enfants alors mineurs, Isabelle, Georges et Valéry Y..., aux mêmes fins que précédemment.

Au terme de leurs écritures, les défendeurs concluaient à l'irrecevabilité des demandes, motif pris que la société n'aurait d'existence légale que depuis le 14 mars 1996, et que l'objet social ne serait pas agricole. Ils demandaient que la SCEA soit déclarée recevable en son intervention volontaire, dans la mesure où la demande en indemnisation ne pouvait être dirigée que contre elle, puisqu'elle exploitait les terres.

Subsidiairement, ils demandaient la désignation d'un expert pour chiffrer le préjudice subi par la SARL FERME DE LA GLOIRE DIEU, nécessairement limité à l'année 1997, et la condamnation de la demanderesse à verser à la SCEA une indemnité de 7 450,48 € correspondant aux frais de labours et d'engrais pour la récolte 1999.

Par conclusions du 13 octobre 2004, la SARL LA FERME DE LA GLOIRE DIEU et Monsieur Pascal RUELLE sollicitaient que soit donné acte à ce dernier de son intervention volontaire.

Ils concluaient à l'irrecevabilité de l'intervention de la SCEA DE LA GLOIRE DIEU et maintenaient leur demande de condamnation à l'encontre des héritiers de Bernard Y..., tendant à les voir condamner in solidum, à titre principal, au paiement, à la SARL LA FERME DE LA GLOIRE DIEU, de la somme de 165 532,15 €, subsidiairement, au paiement à Pascal RUELLE, de 118 237,25 € et à la SARL, de 47 294,90 €, outre, en tout état de cause, une indemnité au titre des frais irrépétibles.

Par jugement rendu le 22 juin 2005, le tribunal a :

-déclaré la SCEA DE LA GLOIRE DIEU irrecevable en son intervention volontaire,

-déclaré la SARL LA FERME DE LA GLOIRE DIEU recevable en sa demande ;

-déclaré Pascal RUELLE recevable en son intervention volontaire,

-avant dire droit sur le bien fondé des réclamations, sursis à statuer et ordonné la réouverture des débats en invitant les parties à conclure sur la demande de déclaration de responsabilité des héritiers de Bernard Y...sur le fondement de l'article 1382 du code civil, et sur la demande de condamnation " in solidum " desdits héritiers.

Par jugement rendu le 3 mai 2006, enfin, le tribunal a :

-déclaré la SARL LA FERME DE LA GLOIRE DIEU et Pascal RUELLE irrecevables en leurs demandes tendant à voir juger la SCEA DE LA GLOIRE DIEU irrecevable en son intervention volontaire et Pascal RUELLE recevable en son intervention volontaire, vu l'autorité de chose jugée ;

-déclaré la SARL LA FERME DE LA GLOIRE DIEU et Pascal RUELLE mal fondés en leurs demandes ;

-les en a déboutés ;

-débouté les consorts Y...de leur demande reconventionnelle en répétition de l'indu ;

-dit n'y avoir lieu à exécution provisoire du jugement ;

-condamné la SARL LA FERME DE LA GLOIRE DIEU au paiement de la somme de 1 600 € à Claude A... veuve Y..., Georges, Valery et Isabelle Y...;

-condamné la SARL LA FERME DE LA GLOIRE DIEU aux dépens.

Il considérait en effet qu'il était incontestable que Bernard Y..., en se maintenant abusivement sur les terres objet du plan de cession avait commis une faute, au demeurant non contestée par ses héritiers.

Il estimait toutefois que cette faute ne pouvait être tenue pour seule à l'origine du retard pris pour la réalisation du plan, rappelant à cet égard que :
-Pascal RUELLE ne s'expliquait pas sur le fait qu'alors qu'un délai d'exécution de six mois était initialement prévu, et que Bernard Y...s'était désisté de sa tierce opposition concernant ledit plan de cession, rien n'avait été fait dans le délai ainsi imparti,
-les demandeurs ne s'expliquaient pas davantage sur leur inertie entre 1994 (désistement) et février 1996, date à laquelle Pascal RUELLE les deux sociétés (SCI et SARL) que Pascal RUELLE s'étaient substituées dans les droits qu'il tenait du jugement du 26 février 1992 ont été constituées, avant régularisation du plan de cession par acte authentique du 25 avril 1996,
-ce n'était qu'en décembre 1998 que la SCI LA FERME DE LA GLOIRE DIEU avait mis en ouvre la procédure d'expulsion.

Le tribunal en déduisait qu'aucune indemnisation ne pouvait dès lors être sollicitée.

Il observait ensuite que, outre qu'ils n'avaient donné aucun fondement juridique à leur demande reconventionnelle, lequel pouvait toutefois être recherché dans les dispositions de l'article 1371 du code civil, les défendeurs étaient mal venus de réclamer un quelconque dédommagement, la faute commise par l'appauvri, et qui est à l'origine de son appauvrissement-soit en l'espèce le maintien abusif de Bernard Y...sur les terres litigieuses-, le privant, et après lui ses héritiers, de l'action " de in rem verso ".

ooooo

La SARL LA FERME DE LA GLOIRE DIEU et Monsieur Pascal RUELLE ont relevé appel de cette décision par déclaration du 6 juillet 2006.

Au terme de leurs dernières conclusions, notifiées le 5 juillet 2007, ils poursuivent l'infirmation partielle du jugement entrepris, et demandent à la cour, statuant à nouveau, de :

Vu l'article 1382 du code civil,

-constater que Monsieur Bernard Y...est seul responsable du retard dans l'exécution du plan de cession ainsi que dans la prise de possession des terres par la SARL LA FERME DE LA GLOIRE DIEU ;
-dire et juger que le comportement fautif de Monsieur Y...est en lien direct et certain avec le préjudice économique subi par la SARL LA FERME DE LA GLOIRE DIEU ;
-en conséquence, condamner solidairement les consorts Y...ès qualités d'ayants droit de Bernard Y..., à verser à la SARL LA FERME DE LA GLOIRE DIEU la somme de 165 532,15 € en réparation du préjudice subi ;
-subsidiairement, condamner solidairement les consorts Y...à verser à Monsieur Pascal RUELLE la somme de 118 237,25 € et à la SARL LA FERME DE LA GLOIRE DIEU, celle de 47 294,90 € ;
-confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a débouté les consorts Y...de leur demande reconventionnelle ;
-condamner les consorts Y...solidairement à verser à Pascal RUELLE et à la SARL LA FERME DE LA GLOIRE DIEU une indemnité de 6 000 € en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, et les déclarer tenus des entiers dépens, avec pour ceux d'appel, droit de recouvrement direct au profit de la SCP d'avoués GENET BRAIBANT.

Ils font valoir au soutien de leur appel que le tribunal a, à tort, refusé de considérer le lien de causalité direct et certain entre le maintien de Monsieur Bernard Y...sur les lieux, la multiplication des procédures initiées par celui-ci et la virulence dont il a fait preuve pour empêcher la mise à exécution du plan, et le retard effectivement pris à l'exécution. Ils ajoutent que la tierce opposition formée par l'intéressé ne permettait pas, avant 1994, date de son désistement partiel, la prise de possession des terres, ensuite de quoi un nouveau délai a été imposé de fait par la nécessité d'entreprendre à nouveau toutes les démarches auprès des organismes bancaires, plusieurs offres de prêt étant devenues caduques. Ils exposent ensuite que la résistance de Bernard RUELLE explique le nouveau retard constaté, postérieurement à la signature de l'acte authentique.

Concernant le préjudice subi, ils affirment que, sans le comportement fautif de Bernard Y..., ils auraient pu exploiter les parcelles objet du plan de cession dès 1992, et non seulement à partir de 1999, la création de la SARL et la signature de l'acte authentique de vente étant alors rendues possibles bien avant 1996.

Par dernières écritures notifiées le 19 juin 2007, Madame Claude A... veuve Y..., Madame Valery Y..., Mademoiselle Isabelle Y...et Monsieur Georges Y...concluent à la confirmation en toutes ses dispositions du jugement dont appel, demandant subsidiairement à la Cour de :

-dire et juger que la SARL LA FERME DE LA GLOIRE DIEU ne saurait prétendre à l'indemnisation d'un préjudice antérieurement au 1er juillet 1996, date de son début d'activité ;
-constater par ailleurs que la seule perte potentielle de ladite SARL ne peut concerner que les années 1997 et 1998, du fait de l'acquisition des terres par la SCI LA GLOIRE DIEU le 25 avril 1996 ;
-débouter la SARL LA FERME DE LA GLOIRE DIEU de ses demandes pour les années 1997 et 1998 du fait de la reprise irrégulière des parcelle objet du bail du 30 novembre 1979, qui lui a permis de se remplir elle-même de ses droits éventuels ;
-condamner la SARL LA FERME DE LA GLOIRE DIEU et Monsieur Pascal RUELLE à payer aux consorts Y...une indemnité pour frais irrépétibles de 1600 € et les condamner aux entiers dépens, avec pour ceux d'appel, faculté de recouvrement direct accordée à la SCP THOMA LE RUNIGO DELAVEAU GAUDEAUX, avoués ;
-plus subsidiairement, de désigner un expert avec pour mission de déterminer le bénéfice net potentiel de la SARL LA FERME DE LA GLOIRE DIEU sur ces terres récupérées en décembre 1998, tenant compte de ce que l'entreprise n'avait, en matière agricole, pas commencé à fonctionner, et a bénéficié pour partie de terres déjà labourées et ensemencées par Bernard Y....

Concernant les demandes formées par la SARL LA FERME DE LA GLOIRE DIEU, ils rappellent que celle-ci n'ayant eu d'existence juridique qu'à compter du 14 mars 1996, elle est irrecevable à présenter une quelconque réclamation pour la période antérieure, ainsi que précédemment jugé par le tribunal de grande instance au terme de sa décision du 22 juin 2005, aujourd'hui définitive. Ils concluent ensuite au débouté de la demande pour la période postérieure, après avoir observé que l'activité de ladite SARL, débutée en réalité seulement le 1er juillet 1996, n'avait, selon l'extrait K BIS produit, aucun objet agricole déclaré, puisqu'il n'est question dans ce document que de restauration, location de chambre d'hôtes, élevage de volailles et salaison, ou encore, élevage de vers à soie.

Ils font par ailleurs état de ce que par suite d'une erreur matérielle ayant entaché le jugement du Tribunal Paritaire des Baux Ruraux,13 ha de terre auraient été indûment restitués à la SCI, incluant à tort les deux parcelles exclues du plan de cession.

Ils reprennent enfin à leur compte la motivation du tribunal, tirée de l'absence de lien de causalité entre faute et dommage, compte tenu de l'inertie de Monsieur Pascal RUELLE.

S'agissant de la demande présentée à titre subsidiaire par ce dernier, au titre de la période antérieure à la constitution des deux sociétés, ils soulignent que l'intéressé n'a jamais été personnellement propriétaire des terres litigieuses, acquises par la seule SCI LA FERME DE LA GLOIRE DIEU.

SUR CE LA COUR

Attendu qu'aux termes de l'article 1382 du code civil fondant l'action entreprise, " tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommages, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer " ;

Qu'il est par ailleurs constant que seul le préjudice direct, actuel et certain résultant de la faute invoquée est indemnisable ; qu'enfin, l'auteur de la faute peut être exonéré en tout ou partie de sa responsabilité s'il rapporte la preuve de ce que la faute de la victime elle-même a contribué à la réalisation du dommage, quand bien même elle ne présenterait pas le caractère de la force majeure ;

Attendu en l'espèce qu'il résulte des pièces produites que le Tribunal de Grande Instance de TROYES, dans sa décision ayant homologué le plan de cession de l'actif de l'exploitation de Francis Y..., et autorisé la vente de ces biens à Pascal RUELLE, a fixé à six mois le délai de réalisation de ce plan ;

Que toutefois, le seul acte de vente effectivement régularisé l'a été, en la forme authentique, le 25 avril 2006, au bénéfice de la SCI LA FERME DE LA GLOIRE DIEU, pour l'essentiel, de la SARL LA FERME DE LA GLOIRE DIEU, concernant le matériel agricole, toutes deux créées le 2 février de la même année ;

Que la SARL susnommée ne saurait dès lors prétendre à une quelconque indemnisation au titre de la période antérieure à sa création ;

Qu'il convient de noter ensuite, à l'instar des premiers juges, que Monsieur Pascal RUELLE, malgré la possibilité qui lui en avait été donnée par le jugement d'homologation, n'a jamais acquis personnellement la propriété desdites terres, alors même que rien, juridiquement, ne s'opposait à la réalisation du plan de cession dans le délai imparti, et qu'en particulier Monsieur Y...n'avait engagé aucune procédure pour contester la décision ;

Que si ce dernier a ensuite formé tierce opposition à l'ordonnance rendue le 19 novembre 1992, la cour observe qu'il s'en est par la suite désisté s'agissant des dispositions ayant confirmé, à l'exception des parcelles données à bail, les termes du plan, de sorte que là encore il était loisible à Monsieur RUELLE de mettre celui-ci à exécution, le litige restant en débat concernant exclusivement la dissolution du GAEC DE LA GLOIRE DIEU ;

Attendu que ce n'est pourtant que courant 1996 que les sociétés repreneuses ont été constituées, et l'acte de vente formalisé, et que plus de deux années encore se sont écoulées avant la mise en oeuvre de la procédure d'expulsion ;

Attendu par suite que c'est par de justes motifs que les premier juges ont considéré que, compte tenu de l'inertie inexplicable manifestée par les demandeurs à l'action, il n'était pas démontré la relation certaine et directe entre le maintien abusif de Bernard Y...sur une partie des terres litigieuses et le préjudice, à le supposer établi, étant observé au surplus que les appelants ne justifient pas de l'acquisition régulière des parcelles exclues du plan, dont, à tout le moins, Monsieur Y...était occupant légitime jusqu'à la validation devenue définitive du congé qui lui avait été délivré ;

Attendu de même que la décision entreprise sera confirmée en ce qu'elle a rejeté la demande reconventionnelle présentée par les consorts Y...tendant à obtenir le remboursement des dépenses effectuées par leur auteur sur les terres qu'il occupait sans droit ni titre, l'appauvri étant en l'espèce incontestablement à l'origine de son appauvrissement et par suite privé de l'action " de in rem verso " ;

Attendu enfin qu'aucune considération d'équité ne commande, en cause d'appel, de faire application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

Que la SARL LA FERME DE LA GLOIRE DIEU, et Monsieur Pascal RUELLE, qui succombent en leur appel, supporteront la charge des dépens y afférents ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement et contradictoirement ;

Confirme en toutes ses dispositions critiquées le jugement entrepris ;

Dit n'y avoir lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

Condamne la SARL LA FERME DE LA GLOIRE DIEU et Monsieur Pascal RUELLE aux dépens d'appel, et admet la SCP d'avoués THOMA LE RUNIGO DELAVEAU GAUDEAUX, au bénéfice de l'article 699 du code précité.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de reims
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 991
Date de la décision : 10/12/2007
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Troyes, 03 mai 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.reims;arret;2007-12-10;991 ?
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