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14/11/2006 | FRANCE | N°35

France | France, Cour d'appel de reims, Ct0140, 14 novembre 2006, 35


ARRÊT No du 14 novembre 2006

E.A. / F.B.
R.G : 05 / 02513
M. Jean-Claude X...
C /
M. Emmanuel Y...
Mme Yvette Z...
Mme Fabienne A...
M. Gérard A...
Mlle Sylvie A...
Formule exécutoire le : à :

S.C.P.D.J. CR.S.C.P.S.G.S.

COUR D'APPEL DE REIMS
AUDIENCE SOLENNELLE
ARRÊT DU 14 NOVEMBRE 2006
PARTIES EN CAUSE :
ENTRE :
Monsieur Jean-Claude X......

COMPARANT, concluant par la S.C.P. DELVINCOURT-JACQUEMET-CAULIER-RICHARD, avoués à la Cour, et ayant pour conseil Maître Jean-Marc PRUDHOMME, avocat au barreau de SAINT

-QUENTIN.
DEMANDEUR en première instance.
APPELANT devant la Cour d'Appel d'AMIENS d'un jugement rendu le 27 Juin 2000 ...

ARRÊT No du 14 novembre 2006

E.A. / F.B.
R.G : 05 / 02513
M. Jean-Claude X...
C /
M. Emmanuel Y...
Mme Yvette Z...
Mme Fabienne A...
M. Gérard A...
Mlle Sylvie A...
Formule exécutoire le : à :

S.C.P.D.J. CR.S.C.P.S.G.S.

COUR D'APPEL DE REIMS
AUDIENCE SOLENNELLE
ARRÊT DU 14 NOVEMBRE 2006
PARTIES EN CAUSE :
ENTRE :
Monsieur Jean-Claude X......

COMPARANT, concluant par la S.C.P. DELVINCOURT-JACQUEMET-CAULIER-RICHARD, avoués à la Cour, et ayant pour conseil Maître Jean-Marc PRUDHOMME, avocat au barreau de SAINT-QUENTIN.
DEMANDEUR en première instance.
APPELANT devant la Cour d'Appel d'AMIENS d'un jugement rendu le 27 Juin 2000 par le Tribunal de Grande Instance de LAON.
DEMANDEUR devant la Cour d'Appel de REIMS, Cour de renvoi.
ET :
Monsieur Emmanuel Y...
02700 BARISIS
COMPARANT, concluant par la S.C.P. SIX-GUILLAUME-SIX, avoués à la Cour, et ayant pour conseil Maître Catherine PINCHON, avocat au barreau de SAINT-QUENTIN.
Madame Yvette Z...épouse A......

Madame Fabienne A...épouse Y......

Monsieur Gérard A......

Mademoiselle Sylvie A......

N'AYANT PAS CONSTITUÉ AVOUÉ, bien que TOUS régulièrement assignés.
DÉFENDEURS en première instance.
INTIMÉS devant la Cour d'Appel d'AMIENS d'un jugement rendu le 27 Juin 2000 par le Tribunal de Grande Instance de LAON.
DÉFENDEURS devant la Cour d'Appel de REIMS, Cour de renvoi.
DÉBATS :
A l'audience publique du 13 Juin 2006, où l'affaire a été mise en délibéré au 12 Septembre 2006, régulièrement prorogé à l'audience du 14 novembre 2006.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Monsieur Bernard DAESCHLER, Premier Président Madame Henriette CHAUBON, Présidente de Chambre Madame Marie-Josèphe ROUVIERE, Conseiller Monsieur Thierry PERROT, Conseiller Monsieur Etienne ALESANDRINI, Conseiller.

GREFFIER : Madame Frédérique BIF, Greffier lors des débats et du prononcé.
ARRÊT :
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Nouveau Code de Procédure Civile, et signé par Monsieur Etienne ALESANDRINI, Conseiller, par suite d'un empêchement du Premier Président, et par Madame Frédérique BIF, Greffier, auquel la minute de la décision lui a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCÉDURE
Le 12 septembre 1996, il a été procédé devant notaire à un échange de parcelles de terre entre Monsieur Jean-Claude X...d'une part, Monsieur Fabien A...et son épouse, Madame Yvette Z..., d'autre part.
Monsieur Emmanuel Y..., qui bénéficiait d'un bail rural sur les parcelles cédées par Monsieur X..., a fait assigner les coéchangistes, par actes des 18 et 26 juin 1998, afin de voir prononcer la nullité de l'échange pour violation des dispositions de l'article R. 124-5 du Code Rural. Monsieur Fabien A...étant décédé au cours de la procédure, ses héritiers sont intervenus volontairement à l'instance.
Par jugement rendu le 27 juin 2000, le Tribunal de Grande Instance de LAON a prononcé la nullité de l'échange, et condamné d'une part Monsieur X...seul à payer à Monsieur Y...la somme de 10. 000 F (1. 524,49 Euros) en réparation du préjudice subi, d'autre part Monsieur X...et les consorts A...à payer à Monsieur Y...une indemnité de 5. 000 F (762,25 Euros) sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Sur appel de Monsieur X..., la Cour d'Appel d'AMIENS a, dans un premier arrêt rendu le 18 septembre 2001, relevé d'office que la procédure d'opposition à échange par les titulaires de droits afférents aux immeubles échangés, prévue par l'article L. 124-1 du Code Rural, devait être introduite devant le président du Tribunal de Grande Instance, et non sous la forme d'une action en nullité non prévue par les textes, et invité les parties à s'expliquer sur ce point.
Toutefois, dans son second arrêt rendu le 14 mars 2002, la Cour d'Appel n'a pas retenu l'irrecevabilité de l'action mais, observant que Monsieur X...entendait fonder ses demandes sur les dispositions des articles 1108,1131 et 1304 du Code Civil, elle a considéré que la nullité pour cause illicite ne pouvait être prononcée parce qu'il n'était pas établi que le motif illicite, visant à faire échec à l'intention de préemption sur les parcelles qu'avait manifesté Monsieur Y..., déterminant pour Monsieur X..., était connu des époux A...lors de la conclusion de l'échange. La Cour a donc débouté Monsieur Y....
Sur pourvoi formé par Monsieur Y..., la Cour de Cassation a énoncé qu'une convention pouvait être annulée pour cause illicite ou immorale, même lorsque l'une des parties n'avait pas eu connaissance du caractère illicite ou immoral du motif déterminant de la conclusion du contrat. La Cour de Cassation a ensuite exposé qu'ayant rappelé les circonstances de l'échange litigieux sur lesquelles Monsieur Y...se fondait pour soutenir qu'il était intervenu en fraude de ses droits, et ayant relevé qu'en pareil cas le preneur disposait d'une action en nullité de l'acte frauduleux devant le tribunal paritaire des baux ruraux, tout en se bornant à écarter la complicité des époux A..., ce dont il résultait qu'elle n'excluait pas que la volonté de faire obstacle à l'exercice du droit de préemption du preneur ait été, pour le bailleur, le motif déterminant de l'échange auquel il avait procédé, la cour d'appel, en se déterminant comme elle l'avait fait, avait violé les articles 1108 et 1133 du Code Civil.L'arrêt de la cour d'appel a en conséquence été cassé et annulé en toutes ses dispositions, et l'affaire renvoyée devant la Cour d'Appel de REIMS.
Monsieur Jean-Claude X..., appelant du jugement de première instance, sans dénier expressément avoir cherché à faire obstacle à l'exercice par Monsieur Y...de son droit de préemption, soutient que cela ne pourrait pas constituer un motif suffisamment déterminant pour être considéré comme la cause du contrat, et ajoute qu'il aurait obtenu, par le moyen de l'échange, la propriété d'une parcelle en nature de terrain à construire jouxtant son habitation, ce qui aurait apporté une plus value importante à son immeuble. Il demande en conséquence que le jugement entrepris soit infirmé, et que Monsieur Y...soit déclaré irrecevable, et en tout cas mal fondé en ses fins, moyens et conclusions, et en soit débouté.
Il sollicite de plus la condamnation de Monsieur Y...à lui payer la somme de 2. 000 Euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Monsieur Emmanuel Y..., intimé, soutient au contraire que le simple examen des faits et de l'historique de leurs rapports suffirait à démontrer que Monsieur X...n'avait pas d'autre volonté, en procédant à l'échange, que de faire obstruction à son droit de préemption, cause illicite devant entraîner la nullité du contrat. Il fait particulièrement valoir que l'échange serait intervenu aussitôt après un arrêt rendu le 10 janvier 1996 par la cour de cassation sur la validité du droit de préemption du preneur, et que Monsieur X...aurait tout mis en oeuvre pour qu'il ne soit pas informé de l'échange. Il souligne que l'explication sur l'agrandissement de la propriété est présentée pour la première fois devant cette cour, après 10 ans de procédure, et ne serait pas confortée par la production de pièces.
Monsieur Y...conclut en conséquence à la confirmation du jugement entrepris, et à la condamnation de Monsieur X...à lui payer la somme de 2. 500 Euros, sur le fondement de l'article 700 déjà visé.
Mesdames Yvette A...née Z...et Fabienne Y...née A..., Mademoiselle Sylvie A...et Monsieur Gérard A..., intimés, n'ont pas constitué avoué bien qu'ayant été régulièrement assignés.
SUR QUOI,
Attendu que Mesdames Yvette A...née Z...et Fabienne Y...née A..., ainsi que Mademoiselle Sylvie A..., ont été assignées à personne ; que l'assignation destinée à Monsieur Gérard A...a été remise à son épouse, présente à son domicile, le 8 février 2006, puis qu'il a été procédé le 22 mars 2006 à une nouvelle tentative d'assignation de Monsieur A..., qui a donné lieu au dépôt de l'acte en l'étude de l'officier ministériel ; que ces intimés ayant ainsi été régulièrement assignés, le présent arrêt sera réputé contradictoire à l'égard des trois premières, et par défaut à l'égard du dernier ;
Attendu que, dans la partie conclusive de ses dernières écritures, Monsieur X...demande que Monsieur Y...soit déclaré soit déclaré irrecevable en ses fins, moyens et conclusions, mais ne présente aucun moyen à l'appui de cette prétention ; qu'il ne s'agit manifestement que d'une clause de style, et qu'il n'y a pas lieu en conséquence de relever d'irrecevabilité de ce chef ;
Attendu qu'il ressort des pièces produites par Monsieur Y..., et qu'il n'est d'ailleurs pas contesté par Monsieur X..., que les trois parcelles de terres que ce dernier a échangé contre une parcelle appartenant à Monsieur Fabien A...avaient fait l'objet dès 1991 d'un projet de vente, à la suite duquel les preneurs avaient notifié au bailleur leur intention d'exercer leur droit de préemption, en subrogeant dans leurs droits leur petit-fils majeur, Monsieur Emmanuel Y..., et qu'il s'en est suivi un litige et une longue procédure portant tant sur la recevabilité de la déclaration de préemption que sur le montant du prix de vente des parcelles ; que cette procédure était encore en cours lorsqu'est intervenu l'échange ;
Attendu qu'il n'est pas plus contesté que l'échange litigieux fait obstacle à l'exercice du droit de préemption ;
Attendu qu'il ressort de l'acte notarié ayant constaté l'échange que les valeurs des biens échangés, trois parcelles en nature de terre et pâture d'une superficie totale de 3 ha 3 a 81 ca d'une part et une parcelle en nature de terre d'une surface de 16 a 16 ca étaient identiques, estimées par les parties à 77. 202 F (11. 769,37 Euros) et n'ont donné lieu à aucune soulte ; qu'il n'est pas démontré par Monsieur Y...que cette équivalence de valeur était de pure convenance et que les parties à l'échange auraient sous évalué les terres cédées par Monsieur X...ou surévalué celle abandonnée par les époux A...; que cet échange qui n'appauvrissait donc pas Monsieur X...lui permettait d'accroître la surface du terrain sur lequel se trouve sa maison d'habitation et le cas échéant, s'agissant de parcelles constructibles et bénéficiant d'un certificat d'urbanisme, de pouvoir envisager de lotir et de vendre une partie de ces terrains ; que l'intérêt de disposer d'une plus grande surface et de pouvoir réaliser à plus ou moins long terme une opération immobilière fructueuse a donc pu être le motif de l'échange ;
Attendu que Monsieur X...pouvait peut-être parvenir au même résultat en laissant Monsieur Y...bénéficier de son droit de préemption pour, avec l'argent obtenu de cette vente, acquérir des époux A...la parcelle voisine de son habitation ; qu'il n'est pas impossible qu'il ait cherché, en préférant l'échange, à nuire à Monsieur Y...; qu'il n'est cependant pas démontré, par les circonstances précédemment rappelées et les pièces produites, que cette éventuelle volonté de faire échec au droit de préemption ait été le motif déterminant de l'échange ; qu'il y a donc lieu en conséquence d'infirmer le jugement rendu par le tribunal de Laon, lequel avait déduit du fait que l'échange avait été établi alors que Monsieur Y...était en procès avec Monsieur X..., qui lui refusait d'exercer son droit de préemption, que cet acte d'échange était intervenu pour priver le demandeur de ses droits, sans examiner s'il n'existait pas d'autre motif, et de débouter Monsieur Y...de ses demandes ;
Attendu que Monsieur Y..., qui succombe sur l'appel de Monsieur X..., supportera l'intégralité des dépens de première instance et d'appel ;
Attendu qu'il n'y a cependant pas lieu d'allouer à l'une quelconque des parties une indemnisation au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
PAR CES MOTIFS,
LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement à l'égard de Messieurs Jean-Claude X...et Emmanuel Y..., par arrêt réputé contradictoire à l'égard de Mesdames Yvette A...née Z...et Fabienne Y...née A..., et de Mademoiselle Sylvie A..., et par défaut à l'égard de Monsieur Gérard A..., et en dernier ressort,
Infirme le jugement rendu le 27 juin 2000 par le Tribunal de Grande Instance de LAON en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau ;
Déboute Monsieur Emmanuel Y...de sa demande d'annulation de l'échange de parcelles de terre entre Monsieur Jean-Claude X...et Monsieur et Madame Fabien A...constaté par acte authentique dressé le 12 septembre 1996 par Maître E..., Notaire à COUCY-LE-CHÂTEAU (Aisne) ;
Le déboute de ses demandes en indemnisation ;
Déboute toutes les parties de leurs demandes respectives fondées sur les dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
Fait masse des dépens de première instance et d'appel et dit qu'ils seront intégralement supportés par Monsieur Y....
LE GREFFIER, LE CONSEILLER,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de reims
Formation : Ct0140
Numéro d'arrêt : 35
Date de la décision : 14/11/2006

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Laon, 27 juin 2000


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.reims;arret;2006-11-14;35 ?
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