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29/03/2006 | FRANCE | N°JURITEXT000006949296

France | France, Cour d'appel de reims, Ct0193, 29 mars 2006, JURITEXT000006949296


ARRÊT No du 08/02/2006 AFFAIRE No : 05/00800 OM/GP Bouslem X... C/ STE SYNERGIE, Soc. FONDERIES COLLIGNON, CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES ARDENNES, Formule exécutoire le : à :COUR D'APPEL DE REIMS CHAMBRE SOCIALE ARRÊT DU 08 FÉVRIER 2006

APPELANT : d'un jugement rendu le 22 Février 2005 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale des ARDENNES Monsieur Bouslem X... 25 rue Barillon 08000 CHARLEVILLE-MEZIERES Comparant, concluant et plaidant par la SCP DELGENES-VAUCOIS-JUSTINE-DELGENES, avocats au barreau de CHARLEVILLE-MEZIERES, INTIMÉES : STE SYNERGIE 70 rue du Pe

tit Bois 08000 CHARLEVILLE-MEZIERES Comparant, concluant et pl...

ARRÊT No du 08/02/2006 AFFAIRE No : 05/00800 OM/GP Bouslem X... C/ STE SYNERGIE, Soc. FONDERIES COLLIGNON, CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES ARDENNES, Formule exécutoire le : à :COUR D'APPEL DE REIMS CHAMBRE SOCIALE ARRÊT DU 08 FÉVRIER 2006

APPELANT : d'un jugement rendu le 22 Février 2005 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale des ARDENNES Monsieur Bouslem X... 25 rue Barillon 08000 CHARLEVILLE-MEZIERES Comparant, concluant et plaidant par la SCP DELGENES-VAUCOIS-JUSTINE-DELGENES, avocats au barreau de CHARLEVILLE-MEZIERES, INTIMÉES : STE SYNERGIE 70 rue du Petit Bois 08000 CHARLEVILLE-MEZIERES Comparant, concluant et plaidant par Maître DELVAL, avocat au barreau de CHARLEVILLE MEZIERES Société FONDERIES COLLIGNON 139 rue Buchis 08800 DEVILLE Comparant, concluant et plaidant par la SCP BLOCQUAUX, BROCARD avocat au barreau de CHARLEVILLE MEZIERES CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES ARDENNES 14 avenue Georges Corneau 08101 CHARLEVILLE MEZIERES CEDEX Non comparante, ni représentée COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :

Monsieur Olivier MANSION, Y... Monsieur Bertrand SCHEIBLING, Conseiller Madame Christine ROBERT, Conseiller GREFFIER lors des débats : Madame Geneviève Z..., adjoint administratif principal faisant fonction de greffier assermenté lors des débats DÉBATS : A l'audience publique tenue le 28 Novembre 2005, où l'affaire a été mise en délibéré au 08 Février 2006, sans opposition de la part des conseils des parties et en application des dispositions des articles 939 et 945-1 du nouveau code de procédure civile, Monsieur Olivier MANSION, conseiller rapporteur a entendu les avocats des parties en leurs explications, puis ce magistrat en a rendu compte à la cour dans son délibéré. ARRÊT : prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Nouveau Code de

procédure civile et signé par Monsieur Olivier Mansion Y... et par Monsieur Christophe A..., Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. Par jugement du 22 février 2005, le Tribunal des affaires de sécurité sociale des Ardennes a rejeté la demande de M X... tendant à faire juger que l'accident de travail dont il a été victime le 28 septembre 2000 était dû à la faute inexcusable de l'employeur.

Le 16 mars 2005, M X... a interjeté appel de cette décision. Il soutient que l'employeur n'a pas respecté son obligation de sécurité renforcée dans le cadre d'une mise à disposition d'un salarié travaillant à titre temporaire, et que les mesures de prévention et de protection étaient absentes ou insuffisantes, tout comme les instructions reçues lors de l'accident. Enfin, il n'aurait commis aucune faute susceptible d'influer sur son droit à réparation.

Les sociétés Synergie et Fonderies Collignon concluent à la confirmation du jugement affirmant que l'employeur avait respecté toutes ses obligations et que l'accident proviendrait de l'absence de port de casque par le salarié lors de la chute d'un outil sur sa tête.

La Caisse primaire d'assurance maladie des Ardennes n'est ni présente ni représentée.

Il sera renvoyé pour un plus ample exposé des moyens et demandes des parties aux conclusions des 29 avril et 28 novembre 2005, respectivement pour l'appelant et les intimées, et ce telles que reprises à l'oral à l'audience du 28 novembre 2005.

MOTIFS

Sur la demande principale :

1o) Au regard des articles 1147 du Code civil, L 411-1 et L 452-1 du Code de la sécurité sociale et en vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l'employeur est tenu envers celui-ci d'une obligation de sécurité de résultat, notamment en ce qui concerne les accidents de travail, et que le manquement à cette obligation a le caractère d'une faute inexcusable , au sens de l'article L 452-1 précité, lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver ; il est indifférent, par ailleurs, que la faute inexcusable commise par l'employeur ait été la cause déterminante de l'accident survenu mais il suffit qu'elle en soit une cause nécessaire pour que la responsabilité de l'employeur soit engagée, alors même que d'autres fautes ont concouru au dommage. L'article L 453-1 du Code de la sécurité sociale dispose que la faute de la victime n'a pas pour effet d'exonérer l'employeur de la responsabilité qu'il encourt en raison de sa faute inexcusable ; que seule une faute inexcusable de la victime au sens de l'article susvisé peut permettre de réduire la majoration de sa rente, et que présente un tel caractère la faute volontaire de la victime d'une exceptionnelle gravité exposant sans raison valable son auteur à un danger dont il aurait dû avoir conscience.

Pour les salariés liés par un contrat de travail temporaire en application des articles L 124-2 et L 124-2-1 du Code du travail à l'exception de ceux auxquels il est fait appel en vue de l'exécution de travaux urgents nécessités par des mesures de sécurité et déjà dotés de la qualification nécessaire à cette intervention, le chef d'établissement est tenu d'organiser une formation pratique et appropriée en matière de sécurité, et ce de façon répétée

périodiquement dans des conditions fixées par voie réglementaire ou par convention ou accord collectif. Cette formation à la sécurité est renforcée lorsque les salariés sous contrat de travail temporaire sont affectés à des postes de travail présentant des risques particuliers pour leur santé ou leur sécurité, eu égard à la spécificité de leur contrat de travail. Dans ce cas, ces salariés bénéficient également d'un accueil et d'une information adaptés dans l'entreprise dans laquelle ils sont occupés. L'article R 231-38 du Code du travail renvoie aux articles R 231-36 et R 231-37 du même code en ce qui concerne la formation à la sécurité des travailleurs à titre temporaire notamment pour des tâches comportant, pour tout ou partie, des opération de manutention, des travaux d'entretien des matériels et des installations de l'établissement. Les articles L 233-5-1, R 233-1 et R 233-43 du Code du travail déterminent notamment les règles d'utilisation des moyens de protection, comme les casques, avec information de manière appropriée des risques contre lesquels ces moyens protègent les salariés, des conditions d'utilisation des équipements de protection, notamment des usages auxquels ils sont réservés et des instructions ou consignes concernant ces équipements et de leurs conditions de mise à disposition.

En l'espèce, M X... a subi un accident du travail le 28 septembre 2000 alors que ,salarié de la société Synergie, il était mis à disposition de la société Fonderies Collignon, à cette date, comme mécanicien d'entretien. Après intervention sur une panne d'un moteur de pont roulant, et alors qu'un tiers, M B..., amorçait la manoeuvre de descente du moteur à l'aide d'une corde, un outil, un pied de biche d'environ un kilogramme, posé sur ce moteur après avoir servi à sa dépose, a été entraîné par la corde et a chuté d'une hauteur de 5 mètres environ sur la tête du salarié, lequel ne portait pas de casque de protection. Il en est résulté un traumatisme crânien

occipital.

La société Collignon, produit un document daté du 8 juillet 2000 et valant "formation individuelle au poste et à la sécurité" de M X... employé alors, à titre temporaire, comme électricien et portant sur les conditions de circulation à l'intérieur de l'usine, la sécurité incendie la démonstration du travail au poste et la protection individuelle obligatoire concernant le port des lunettes, des masques, des gants, chaussures de sécurité, des bleus ou blouses, des protecteurs d'oreille et de l'emploi des balladeuses. S'il n'est pas établi que l'emploi de mécanicien d'entretien, même dans une fonderie, présente un risque particulier pour la sécurité ou la santé de ces salariés, ce qui dispense l'employeur d'une obligation de formation renforcée à la sécurité, force est de constater qu'aucune formation n'a été dispensée sur le port de casque, non visé dans le liste du document précité. Par ailleurs, M C... indique, le 7 avril 2005, en relatant l'accident du travail que l'entreprise ne possédait pas de casques à cette date. M D... fait de même dans son attestation du 6 avril 2005.

Si dans deux courriers datés du 20 novembre 2003, ne revêtant pas les formes prescrites à l'article 202 du nouveau Code de procédure civile, MM B... et Carbonnière affirment que M X... : "n'avait aucune raison de se trouver à cet endroit au moment des faits. Il aurait dû attendre que le moteur soit au sol pour pouvoir le récupérer", force est de constater que l'objet même de l'intervention de MM B... et X... portait sur la réparation du moteur d'un pont roulant, qu'après détachement de ce moteur il convenait de le déposer au sol pour pouvoir procéder aux interventions nécessaires à sa réparation pour lesquelles les services de M X... étaient requis. De plus, la manoeuvre de dépose du moteur situé en hauteur et son transfert au sol imposait à l'employeur, lequel aurait dû avoir

conscience du danger intrinsèque découlant de ladite manoeuvre, de fournir aux salariés intervenant tout équipement de protection utile comme des casques pour éviter tout risque de chute tant du moteur lui même que de ses éléments ou tout autre objet.

En conséquence, et alors qu'aucune faute inexcusable au sens de l'article L 453-1 précité ne peut être retenu à l'encontre du salarié, il y a lieu d'affirmer que l'employeur a commis une faute inexcusable qui a concouru à l'accident de travail dont a été victime M X... le 28 septembre 2000. Le jugement du 22 février 2005, sera donc infirmé.

2o) L'article L 452-2 du Code de la sécurité sociale prévoit majoration d'indemnité en capital ou de rente en cas de faute inexcusable de l'employeur et dans des montants fixés par ce même article, cette majoration ne pouvant être réduite que si la salarié a lui-même commis une faute inexcusable.

A défaut de faute inexcusable imputable au salarié, comme retenu ci-avant, la majoration légale s'applique par le seul effet de l'article susvisé.

Au regard de l'article L 452-3 du Code de la sécurité sociale, la victime a droit à réparation du préjudice causé par les souffrances physiques et morales, des ses préjudices esthétiques et d'agrément comme du préjudice résultant de la perte ou de la diminution de ses possibilités de promotion professionnelle. Le recours à une expertise s'impose sur ces points afin de les déterminer. Le dispositif subséquent précise les modalités de cette mesure d'instruction, dont les frais seront supportés par la SA Synergie. Les parties seront renvoyées devant le Tribunal des affaires de sécurité sociale des Ardennes pour liquidation des préjudices après dépôt du rapport de l'expert.

Sur les autres demandes :

1o) Le présent jugement est nécessairement commun et opposable à la SA Fonderies Collignon et à la Caisse primaire d'assurance maladie des Ardennes régulièrement attraites à la cause. La Caisse primaire d'assurance maladie devra faire l'avance des indemnisations dues à M X...

2o) La victime ayant liée par un contrat de travail avec la seule société Synergie, celle-ci est en droit d'obtenir la garantie de la société Collignon, entreprise utilisatrice et par ailleurs à l'origine de la faute retenue, de toutes condamnations prononcées à son encontre et des conséquences financières en résultant.

3o) La SA Synergie paiera à M X... une somme de 1 500 ç par application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Il n'y a pas lieu de statuer sur les dépens, la procédure étant gratuite et sans frais conformément à l'article R 144-6 du Code de la sécurité sociale.

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement, par décision réputée contradictoire :

- Reçoit, en la forme, l'appel interjeté par M X... contre le jugement du Tribunal des affaires de sécurité sociale des Ardennes en date du 22 février 2005,

- Infirme ledit jugement en toutes ses dispositions, Statuant à nouveau :

- Dit que la SA Synergie a commis une faute inexcusable lors de l'accident du travail subi par M X... le 28 septembre 2000,

- Dit que M X... a droit à majoration de la rente ou de l'indemnité en capital reçue à ce titre, et ce en application des dispositions de l'article L 452-2 du Code de la sécurité sociale,

- Ordonne une mesure d'expertise médicale et commet pour y procéder le docteur E... domicilié à Charleville-Mézières avec pour mission de :

[* convoquer et entendre les parties assistées, le cas échéant de leurs conseils, et recueillir leurs observations à l'occasion de l'exécution des opérations ou de la tenue des réunion d'expertise,

*]se faire remettre toutes pièces utiles à l'accomplissement de sa mission,

évaluer les éventuels postes de préjudice en résultant, par référence aux barèmes d'évaluation de droit commun et aux échelles habituelles tels que les souffrances physiques et morales, le préjudice esthétique, le préjudice d'agrément et la perte ou la diminution de sesbituelles tels que les souffrances physiques et morales, le préjudice esthétique, le préjudice d'agrément et la perte ou la diminution de ses possibilités de promotion professionnelle,

* donner à la juridiction toutes informations utiles,

- Dit que l'expert devra déposer son rapport au greffe du Tribunal des affaires de sécurité sociale des Ardennes, dans les trois mois à compter du versement de la provision à valoir sur sa rémunération, sauf prorogation dûment sollicitée en temps utile auprès du magistrat chargé du contrôle des expertises,

- Dit que l'expert remettra copie dudit rapport à chaque partie,

- Fixe à 1 300 ç la provision à valoir sur la rémunération de l'expert qui devra être consignée au greffe du Tribunal des affaires de sécurité sociale des Ardennes par la SA Synergie,

- Dit qu'en cas de refus ou d'empêchement de l'expert, il sera procédé à son remplacement par ordonnance rendue sur simple requête, - Dit qu'en cas de nécessité de recourir à un co-expert, il en sera déféré au magistrat chargé du contrôle des expertises par l'expert ou l'une des parties,

- Renvoie les parties devant le Tribunal des affaires de sécurité sociale des Ardennes pour procéder à la liquidation des indemnisations dues après dépôt du rapport de l'expert,

- Rappelle que le présent arrêt est nécessairement opposable à la Caisse primaire d'assurance maladie des Ardennes,

- Dit que la Caisse primaire d'assurance maladie des Ardennes fera avance des indemnisations dues à M X...,

- Dit que la SA Fonderies Collignon devra garantie pour toutes les condamnations prononcées à l'encontre de la SA Synergie,

- Condamne la SA Synergie à payer à M X... la somme de 1 500 ç en application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

LE GREFFIER

LE Y...


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de reims
Formation : Ct0193
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006949296
Date de la décision : 29/03/2006

Analyses

Pourvoi n : W 0613636 du 10/04/2006 Demandeur : Société FONDERIES COLLIGNON défendeur : STE SYNERGIE et a.


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.reims;arret;2006-03-29;juritext000006949296 ?
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