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10/01/2001 | FRANCE | N°98/00649

France | France, Cour d'appel de reims, Chambre sociale, 10 janvier 2001, 98/00649


COUR D'APPEL DE REIMS CHAMBRE SOCIALE CBS ARRET N° 255 AFFAIRE N°:

98/00649 AFFAIRE X... /S.N.C. HENKEL ECOLAB C/ une décision rendue le 17 Février 1998 par le Conseil de Didier X... Prud'hommes de CHALONS EN CHAMPAGNE, section Industrie. ARRÊT DU 10 JANVIER 2001 APPELANT :

Monsieur Didier X... xxxxxxxxxxxx xxxxxxxxxxx51510 FAGNIERES Comparant, concluant et plaidant par la SCP A.C.G. etamp; ASSOCIES, avocats au barreau de CHALONS EN CHAMPAGNE, INTIMEE : S.N.C. HENKEL ECOLAB 8 rue Rouget de Lisle 92442 ISSY-LES-MOULIN EAUX Comparant, concluant et plaidant par la SELAFA FIDAL,

avocats au barreau de REIMS, COMPOSITION DE LA COUR lors du dél...

COUR D'APPEL DE REIMS CHAMBRE SOCIALE CBS ARRET N° 255 AFFAIRE N°:

98/00649 AFFAIRE X... /S.N.C. HENKEL ECOLAB C/ une décision rendue le 17 Février 1998 par le Conseil de Didier X... Prud'hommes de CHALONS EN CHAMPAGNE, section Industrie. ARRÊT DU 10 JANVIER 2001 APPELANT :

Monsieur Didier X... xxxxxxxxxxxx xxxxxxxxxxx51510 FAGNIERES Comparant, concluant et plaidant par la SCP A.C.G. etamp; ASSOCIES, avocats au barreau de CHALONS EN CHAMPAGNE, INTIMEE : S.N.C. HENKEL ECOLAB 8 rue Rouget de Lisle 92442 ISSY-LES-MOULIN EAUX Comparant, concluant et plaidant par la SELAFA FIDAL, avocats au barreau de REIMS, COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré : Monsieur Daniel MARZI, Président Madame Annie BOURGUET, Conseiller Madame Catherine BOLTEAU-SERRE, Conseiller GREFFIER Madame Geneviève PREVOTEAU, adjoint administratif principal faisant fonction de greffier, ayant prêté le serment de l'article 32 du décret du 20 juin 1967 lors des débats et du prononcé, DÉBATS: A l'audience publique tenue le 13 Novembre 2000, où l'affaire a été mise en délibéré au 10 Janvier 2001, sans opposition de la part des conseils des parties et en application des dispositions des articles 939 et 945-1 du nouveau code de procédure civile, Madame Catherine BOLTEAU-SERRE a entendu les avocats en leurs explications, puis ce magistrat en a rendu compte à la cour dans son délibéré. ARRÊT:

Prononcé par Monsieur Daniel MARZI, Président à l'audience publique du 10 Janvier 2001, qui a signé la minute avec le greffier présent lors du prononcé. Didier X... a été engagé par la société HENKEL ECOLAB à compter du 22 janvier 1996 en qualité de cariste par contrat à durée déterminée d'une durée de huit mois. Par courrier du 18 septembre 1996, le contrat a été prolongé jusqu'au 31 décembre 1997. Le 26 novembre 1997, Didier X... a saisi le Conseil de Prud'hommes de CHALONS en CHAMPAGNE d'une demande de requalification du contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée. Par jugement en date du

17 février 1998, le Conseil de Prud'hommes a dit n'y avoir lieu à requalification du contrat à durée déterminée, a débouté Didier X... de tous ses chefs de demandes et la société HENKEL ECOLAB de sa demande reconventionnelle, a mis les dépens à la charge de Didier X.... Par déclaration en date du 5 mars 1998, Didier X... a interjeté appel de cette décision. Vu les conclusions de Didier X... en date du 28 mai 1998, reprises oralement à l'audience du 13 novembre 2000 par l'appelant lequel demande à la cour d'infirmer le jugement ,entrepris, d'ordonner la requalification du contrat de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, de condamner la société HENKEL ECOLAB à lui payer la somme de 20.000 F. à titre de dommages-intérêts du fait de la requalification, d'ordonner sa réintégration, de dire et juger sans cause réelle ni sérieuse son licenciement, de condamner la société HENKEL ECOLAB au paiement de la somme de 400.000 F. à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse et celle de 8.000 F. en application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Vu les conclusions de la société HENKEL ECOLAB déposées à l'audience du 13 novembre 2000, reprises oralement à ladite audience par l'intimée laquelle demande à la cour de confirmer le jugement entrepris, de condamner Didier X... au paiement de la somme de 7.000 F. au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile et de le condamner aux entiers dépens. La société HENKEL ECOLAB, autorisée à produire en cours de délibéré certains documents, a adressé à la cour, par lettre du 19 décembre 2000, le livre d'entrées et de sorties du personnel sous contrats à durée déterminée et à durée indéterminée pour la période de janvier 1993 à novembre 1999 et du personnel intérimaire pour la période d'avril 1997 à juillet 1998, les convocations aux réunions du comité d'entreprise de février à décembre 1996, le contrat de travail à

durée indéterminée d'un ouvrier cariste en date du 27 février 1998 et les contrats de travail intérimaire des caristes du ler semestre 1998. MOTIFS DE LA DECISION : Attendu qu'en vertu de l'article L.122-1-1 du code du travail, le contrat de travail peut être conclu pour une durée déterminée dans le cas notamment d'un accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise ; Qu'en application de l'article L.122-1-2 dudit code, la durée totale du contrat, compte tenu le cas échéant du renouvellement, ne peut excéder dix huit mois ; qu'elle est portée à vingt quatre mois lorsque survient dans l'entreprise, qu'il s'agisse de l'entrepreneur principal ou d'un sous-traitant, d'une commande exceptionnelle à l'exportation dont l'importance nécessite la mise en oeuvre de moyens quantitativement et qualitativement exorbitants de ceux que l'entreprise utilise ordinairement ; que dans ce cas, la durée ne peut être inférieure à six mois et l'employeur doit procéder préalablement aux recrutements envisagés, à la consultation du comité d'entreprise ou à défaut des délégués du personnel ; Qu'en l'espèce, le contrat de travail à durée déterminée de Didier X... qui faisait suite à plusieurs missions de travail temporaire effectuées au sein de la société HENKEL ECOLAB, a été conclu pour une durée de huit mois, puis renouvelé pour une période de plus de quinze mois soit une durée totale de vingt trois mois et dix jours ; Que le motif pour lequel le contrat a été conclu est 1 'accroissement temporaire d'activité pour le lancement de produits à destination de l'Allemagne ; Qu'il résulte des pièces produites que HENKEL ECOLAB appartient à un groupe disposant en Europe de plusieurs sites de production dont celui de CHALONS en CHAMPAGNE; Que la société HENKEL ECOLAB affirme que cet établissement ne produisait pas pour l'exportation jusqu'en 1993, mais ne fournit aucun élément probant à l'appui de ses dires et ne justifie de la situation de l'entreprise à l'exportation, qu'à compter de 1995 ;

Qu'en outre, la notion de commande exceptionnelle telle que visée par l'article L.122-1-2 susmentionné, ne répond pas à la situation décrite par la société HENKEL ECOLAB, s'agissant dans le cadre de la politique d'un groupe, d'une simple répartition entre les différents sites européens en fonction de critères économiques ; Qu'ainsi, la société HENKEL ECOLAB explique que le tonnage export vers l'Allemagne à compter de 1997, n'a pas été celui initialement prévu en raison notamment de la politique de délocalisation du groupe vers d'autres sites de productions ; Que par ailleurs, la société HENKEL ECOLAB ne justifie pas que les commandes reçues de l'Allemagne, à les supposer exceptionnelles, nécessitaient la mise en aeuvre de moyens quantitativement et qualitativement exorbitants de ceux que l'entreprise utilise ordinairement ; Qu'en effet, aucun document probant n'est produit justifiant d'un accroissement important du personnel entre 1995 et 1997 et de sa baisse à compter de 1998 ; Qu'ainsi, les comptes-rendus des réunions du comité d'entreprise versés aux débats font état d'un effectif constant entre octobre 1995 et septembre 1996 ; qu'aucun compte-rendu n'est fourni pour les années 1997 et 1998 démontrant la mise en oeuvre de moyens exorbitants notamment en personnel ; Que le livre d'entrées et de sorties du personnel intérimaire ne couvre que la période d'avril 1997 à juillet 1998, ne permettant pas ainsi une comparaison avec les années antérieures ; que même pour les périodes produites (1997, 1998), le nombre d'employés intérimaires est constant ; Que Didier X... affirme par ailleurs que son poste (cariste) est un poste permanent dans l'entreprise ; Qu'il est attesté par deux salariés de l'entreprise (Joùl COLIN et JeanLouis LOTTON) que le travail de nuit s'est poursuivi pendant l'année 1998, que le service de réception des produits finis auquel appartenait Didier X... nécessite toujours autant de personnel ; qu'il existe toujours des intérimaires au

service expédition dont deux employés à la réception des produits finis ; Qu'à la lumière des pièces produites par la société HENKEL ECOLAB au cours du délibéré, il convient de constater en effet, que des emplois de caristes ont été assurés par du personnel intérimaire sans interruption de la fin de l'année 1997 à la fin de l'année 1998, aucun élément n'étant produit pour la période postérieure ; Qu'il est ainsi démontré que Jean-Pierre ZBINDEN a été engagé en qualité de cariste intérimaire du 17 novembre 1997 au 24 décembre 1997, puis du 5 janvier 1998 au 28 février 1998 avant d'être engagé à cette date sous contrat à durée indéterminée ; Qu'entre le l' janvier date à laquelle Didier X... a quitté 1a société et le 4 janvier 1998, un intérimaire (Pascal POINTEAUX) a exercé les fonctions de cariste pour une courte durée (3 semaines) ; que dès le 5 janvier 1998, plusieurs intérimaires (8) ont été engagés, également en qualité de caristes, certains pour des périodes relativement longues (6 mois); que le 19 janvier 1998, Rénald VERY a, selon le livre du personnel intérimaire, assumé ces mêmes fonctions pendant plus de onze mois ; Qu'il résulte de ces éléments que le poste de cariste est bien un poste permanent que Didier X... était en mesure d'assurer postérieurement au terme de son contrat ; Que l'employeur lequel, interrogé à la barre, définit le cariste comme étant un manutentionnaire, ne démontre pas que le poste occupé par JeanPierre ZBINDEN, intérimaire puis sous contrat à durée indéterminée, au moment où il était mis fin au contrat à durée déterminée de Didier X..., ne pouvait être assuré par ce dernier ; Qu'enfin, les comptes-rendus des réunions du comité d'entreprise produits ne justifient pas que l'employeur a respecté l'obligation mise à sa charge de consulter préalablement à la conclusion du contrat de Didier X... le comité; Qu'en effet, les comptes-rendus produits se bornent à donner l'effectif de la société en mentionnant le nombre de contrats à durée déterminée à la fin du

mois précédant la réunion du comité; Qu'il ne s'agit pas d'une consultation préalable amenant les membres du comité a discuté le bien fondé de ses contrats mais d'un simple constat a posteriori de l'existence de contrats dont le motif de leur conclusion n'est pas communiqué lors des réunions, Qu'en outre, Joùl COLIN et Jean-Louis LOTTON, tous deux membres du comité d'entreprise selon les comptesrendus de réunions, attestent qu'aucune consultation préalable du comité n'a eu lieu avant l'embauche des cinq contrats à durée déterminée et lors de la prolongation de trois contrats à durée déterminée pour une durée de vingt trois mois et une semaine ; Qu'en conséquence, l'employeur ne démontre pas que la situation rencontrée lors de l'embauche sous contrat à durée déterminée de Didier X... et jusqu'en décembre 1997, répondait à celle visée à l'article L.122-1-2 du code du travail, notamment l'existence d'une commande exceptionnelle à l'exportation nécessitant la mise en oeuvre de moyens qualitativement et quantitativement exorbitants, ni que la conclusion du contrat a fait l'objet d'une consultation préalable du comité d'entreprise ; Qu'en vertu de l'article L.122-3-13 du code du travail, tout contrat conclu en violation notamment des articles L.122-1-1 et L.122-1-2 dudit code est réputé à durée indéterminée ; Qu'en conséquence, il convient de faire droit à la demande de requalification formée par Didier X..., Que le jugement entrepris sera infirmé sur ce point ; Que l'employeur sera donc condamné au paiement de la somme de 9.608 F. à titre d'indemnité réparant le préjudice ainsi subi par le salarié conformément à l'article L.122-3-13 précité, cette somme correspondant à un mois de salaire calculé sur la moyenne des trois derniers mois ; Que compte tenu de la requalification du contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, la rupture intervenue le 31 décembre 1997, en l'absence de toute lettre de licenciement, ne respecte pas la procédure de

licenciement et est sans cause réelle ni sérieuse ; Que conformément à l'article L.124-6 du code du travail, la durée des missions effectuées par le salarié chez l'utilisateur au cours des trois mois précédant son embauche par ledit utilisateur sous contrat à durée déterminée, doit être prise en compte pour le calcul de son ancienneté ; Qu'il résulte des pièces versées aux débats, que Didier X... a travaillé au sein de la société HENKEL ECOLAB en tant qu'intérimaire du 19 au 22 décembre 1995, du 2 au 5 janvier 1996, du 8 au 12 janvier 1996, du 15 au 19 janvier 1996, soit un total de dix huit jours ; Que compte tenu de la durée du contrat liant les parties (vingt trois mois et dix jours), Didier X... ne justifiait pas d'une ancienneté d'au moins deux ans au moment de la rupture du contrat ; Qu'en conséquence, il n'est en droit de solliciter que l'application des dispositions de l'article L. 122-14-5 du code du travail ; Que sa demande de réintégration sera donc rejetée ; Qu'en l'absence de tout justificatif concernant sa situation postérieurement à la rupture du contrat, des circonstances ayant entouré cette rupture et de son ancienneté, il convient d'allouer à Didier X... la somme de 58.000 F. correspondant à six mois de salaire, à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse ; Que ladite somme réparera également le préjudice moral subi par le salarié ; Que le salarié n'ayant pas formé de demande au titre du non respect de la procédure, l'indemnité susvisée réparera également le préjudice résultant de l'irrégularité de la procédure de licenciement ; Que l'équité et la situation des parties commandent qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile au bénéfice de Didier X... ; Que la société HENKEL ECOLAB sera condamnée au paiement de la somme de 6.000 F. à ce titre; Que succombant sur ses prétentions, elle sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel ; PAR CES MOTIFS

La Cour, Statuant publiquement et contradictoirement, Déclare recevable et partiellement fondé l'appel interjeté par Didier X..., Infirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 17 février 1998 par le Conseil de Prud'hommes de CHALONS en CHAMPAGNE, Statuant à nouveau et y ajoutant, Requalifie le contrat à durée déterminée en date du 19 janvier 1996 en contrat à durée indéterminée, Rejette la demande de réintégration formée par Didier JACQUES, Condamne la société HENKEL ECOLAB à payer à Didier X... les sommes suivantes : - NEUF MILLE SIX CENT HUIT FRANCS (9.608 F.) à titre d'indemnité réparant le préjudice subi par application de l'article L.122-3-13 du code du travail, - CINQUANTE HUIT MILLE FRANCS (58.000 F.) à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse, non respect de la procédure de licenciement et préjudice moral, toutes causes de préjudice confondues, Déboute Didier X... du surplus de ses demandes à ces titres, Déboute la société HENKEL ECOLAB de ses demandes, Condamne la société HENKEL ECOLAB à payer à Didier X... la somme de SIX MILLE FRANCS (6.000 F.) en application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, Condamne la société HENKEL ECOLAB aux dépens de première instance et d'appel. LE GREFFIER, LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de reims
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 98/00649
Date de la décision : 10/01/2001
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, DUREE DETERMINEE - Qualification donnée au contrat - Demande de requalification - Appréciation

Est conclu en violation des articles L. 122-1-1 et L 122-1-2 du Code du travail, le contrat de travail fixé à vingt-trois mois dès lors que l'employeur ne démontre pas que la situation lors de l'embauche du salarié répondait à la situation visée aux dits articles et notamment que l'existence d'une commande exceptionnelle à l'exportation nécessitait la mise en oeuvre de moyens quantitatifs et qualitatifs exorbitants ni que la conclusion du contrat a fait l'objet d'une consultation préalable du comité d'entreprise de sorte que cette violation doit être sanctionné par la requalification du contrat en un contrat à durée indéterminée


Références :

Articles L 122-1-1 et L 122-1-2 du Code du travail

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.reims;arret;2001-01-10;98.00649 ?
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