ARRET N°253
FV/KP
N° RG 23/02181 - N° Portalis DBV5-V-B7H-G4ME
[T]
C/
Etablissement Public EKIDOM, OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT DE [Localité 3], VE NANT AUX DROITS DE SIPEA ET DE LOGIPARC
Loi n° 77-1468 du30/12/1977
Copie revêtue de la formule exécutoire
Le à
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Copie gratuite délivrée
Le à
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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE POITIERS
2ème Chambre Civile
ARRÊT DU 09 JUILLET 2024
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/02181 - N° Portalis DBV5-V-B7H-G4ME
Décision déférée à la Cour : ordonnance du 04 août 2023 rendue par le Juge des contentieux de la protection de POITIERS.
APPELANTE :
Madame [B] [T]
née le 13 Mai 1991 à [Localité 5] (36)
[Adresse 1]
[Localité 4]
Ayant pour avocat plaidant Me Damien GENEST, avocat au barreau de POITIERS.
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2023-004956 du 16/10/2023 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de POITIERS)
INTIMEE :
ETABLISSEMENT PUBLIC EKIDOM, OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT DE [Localité 3], venant aux droits DE SIPEA ET DE LOGIPARC
[Adresse 2]
[Localité 3]
Ayant pour avocat plaidant Me Philippe BROTTIER de la SCP PHILIPPE BROTTIER - THIERRY ZORO, avocat au barreau de POITIERS
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 14 Mai 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant :
Monsieur Fabrice VETU, Conseiller
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Fabrice VETU, Conseiller
Monsieur Cédric LECLER, Conseiller
Madame Estelle LAFOND, Conseiller
GREFFIER, lors des débats : Madame Véronique DEDIEU,
ARRÊT :
- CONTRADICTOIRE
- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,
- Signé par Monsieur Fabrice VETU, en remplacement du Président légitimement empêché et par Madame Véronique DEDIEU, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE
Par acte sous seing privé du 17 août 2020, l'Office Public de l'Habitat de Grand [Localité 3] (l'Ekidom) a donné à bail à Madame [B] [T] un logement situé [Adresse 1], sur la commune de [Localité 4] (86).
Le 09 mars 2021, Madame [T] a attrait en référé l'Ekidom devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Poitiers aux fins de le voir condamné à effectuer divers travaux dans un délai de 3 mois, suspendre le paiement du loyer et la reloger sous astreinte de 100 € par jour de retard, condamner l'Ekidom à lui verser la somme de 6.000 € à titre de provision sur dommages et intérêts en réparation du préjudice subi.
Par ordonnance de référé en date du 04 août 2023, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Poitiers a :
- Déclaré recevable l'action de l'Ekidom.
- Constaté à la date du 07 juillet 2022 la résiliation du bail conclu entre l'Ekidom d'une part, le bailleur, et Madame [B] [T] d'autre part, le preneur.
- Dit qu'à défaut pour Madame [B] [T] d'avoir spontanément libéré les lieux, il sera procédé à son expulsion et à celle de tous occupants et tous biens de son chef, avec le concours de la force publique et l'assistance d'un serrurier si besoin est, et en tout état de cause, à l'expiration d'un délai de deux mois à compter du commandement d'avoir à quitter les lieux.
- Dit qu'en cas de difficultés pour les meubles, il sera procédé conformément aux prévisions des articles L. 433-1 et suivants du Code des procédures civiles d'exécution.
- Dit qu'une copie de la présente décision sera transmise au représentant de l'État dans le département en vue du relogement de Madame [B] [T], en application des dispositions de l'article R. 412-2 du Code des procédures civiles d'exécution.
- Fixé à titre provisionnel le montant de l'indemnité d'occupation due à une somme égale au montant du loyer, révisable suivant les règles applicables aux organismes HLM.
- Condamné Madame [B] [T] à payer à l'Ekidom une provision de 10.801,05 € à valoir sur le montant des loyers, indemnités d'occupation et charges échus non réglés à la date du 31 mai 2023, avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision.
- Condamné Madame [B] [T] à payer à l'Ekidom une provision sur l'indemnité d'occupation d'un montant mensuel égal au loyer en cours (508,02 €), révisable suivant les règles applicables aux organismes HLM, outre la provision mensuelle sur charges qui sera à régulariser (20,84€), à compter du 1er juin 2023 et jusqu'à libération des lieux par remise des clés.
- Débouté Madame [B] [T] de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
-Condamné Madame [B] [T] aux dépens de l'instance.
Par déclaration en date du 26 septembre 2023, Madame [T] a relevé appel de cette décision en visant les chefs expressément critiqués.
Madame [T], par dernières conclusions transmises le 06 mars 2024, demande à la cour de :
-Déclarer Madame [B] [T] recevable et bien-fondée en son appel,
-Infirmer l'ordonnance dont appel en ce qu'elle a :
Déclaré recevable l'action de Ekidom.
Constaté à la date du 7 juillet 2022 la résiliation du bail conclu entre Ekidom d'une part, le bailleur, et Madame [B] [T] d'autre part, le preneur.
Dit qu'à défaut pour Madame [B] [T] d'avoir spontanément libéré les lieux, il sera procédé à son expulsion et à celle de tous occupants et tous biens de son chef, avec le concours de la force publique et l'assistance d'un serrurier si besoin est, et en tout état de cause, à l'expiration d'un délai de deux mois à compter du commandement d'avoir à quitter les lieux.
Dit qu'en cas de difficultés pour les meubles, il sera procédé conformément aux prévisions des articles L. 433-1 et suivants du Code des Procédures Civiles d'Exécution.
Dit qu'une copie de la présente décision sera transmise au représentant de l'État dans le département en vue du relogement de Madame [B] [T], en application des dispositions de l'article R. 412-2 du Code des Procédures Civiles d'Exécution.
Fixé à titre provisionnel le montant de l'indemnité d'occupation due à une somme égale au montant du loyer, révisable suivant les règles applicables aux organismes HLM.
Condamné Madame [B] [T] à payer à Ekidom une provision de 10.801,05€ à valoir sur le montant des loyers, indemnités d'occupation et charges échus non réglés à la date du 31 mai 2023, avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision.
Condamné Madame [B] [T] à payer à Ekidom une provision sur l'indemnité d'occupation d'un montant mensuel égal au loyer en cours (508,02€), révisable suivant les règles applicables aux organismes HLM, outre la provision mensuelle sur charges qui sera à régulariser (20,84€), à compter du 1er juin 2023 et jusqu'à libération des lieux par remise des clés.
Débouté Madame [B] [T] de sa demande au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Condamné Madame [B] [T] aux dépens de l'instance.
Statuant à nouveau,
- Dire et juger l'Ekidom irrecevable et mal-fondé dans ses demandes, et l'en débouter.
- Dire n'y avoir lieu à référé et inviter les parties à se pourvoir au fond pour la tenue d'un vrai débat.
-Condamner l'Ekidom à payer à Madame [B] [T] la somme de 1.500€ par application de l'article 700 du Code de procédure civile.
-Condamner l'Ekidom aux entiers dépens de première instance et d'appel.
L'établissement Ekidom, par dernières conclusions RPVA du 25 mars 2024, demande à la cour de :
- Juger recevable et bien fondé l'Ekidom en toutes ses demandes,
- Voir juger irrecevable et particulièrement mal fondée Madame [T] en son appel et l'en débouter,
- Confirmer l'ordonnance en toutes ses dispositions,
- Condamner Madame [T] au paiement de la somme de 2.000€ au titre des frais irrépétibles, ainsi qu'aux entiers dépens d'appel.
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie expressément aux dernières conclusions précitées pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties.
L'instruction de l'affaire a été clôturée suivant ordonnance datée du 30 avril 2024 en vue d'être plaidée à l'audience du 14 du mois suivant, date à compter de laquelle elle a été mise en délibéré au 25 mai 2024, puis prorogée à ce jour.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur le l'assiette de la dette locative et le l'indécence du logement
1. La cour observe que sur ces points, les parties ne font que reprendre devant la cour leurs prétentions et leurs moyens de première instance.
2. Conformément aux dispositions de l'article 955 du Code de procédure civile, en l'absence d'élément nouveau soumis à son appréciation, la cour estime que le premier juge, par des motifs pertinents qu'elle approuve, a fait une exacte appréciation des faits de la cause et des droits des parties.
3. Il convient en conséquence de confirmer la décision déférée de ces chefs
Sur l'acquisition de la clause résolutoire et la demande provisionnelle
4. L'article 24 de la loi n° 89-462 du 06 juillet 1989, notamment modifiée par les lois du 24 mars 2014 et 23 novembre 2018, dispose que toute clause prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut de paiement du loyer et des charges aux termes convenus ou pour non-versement du dépôt de garantie ne produit effet que deux mois après un commandement de payer demeuré infructueux. Cette disposition indique notamment par ailleurs :
V.-Le juge peut, même d'office, accorder des délais de paiement dans la limite de trois années, par dérogation au délai prévu au premier alinéa de l'article 1343-5 du code civil, au locataire en situation de régler sa dette locative. Le quatrième alinéa de l'article 1343-5 s'applique lorsque la décision du juge est prise sur le fondement du présent alinéa. Le juge peut d'office vérifier tout élément constitutif de la dette locative et le respect de l'obligation prévue au premier alinéa de l'article 6 de la présente loi. Il invite les parties à lui produire tous éléments relatifs à l'existence d'une procédure de traitement du surendettement au sens du livre VII du code de la consommation.
VI.-Par dérogation à la première phrase du V, lorsqu'une procédure de traitement du surendettement au sens du livre VII du code de la consommation a été ouverte au bénéfice du locataire et qu'au jour de l'audience, le locataire a repris le paiement du loyer et des charges, le juge qui constate l'acquisition de la clause de résiliation de plein droit du contrat de location statue dans les conditions suivantes :
1° Lorsque la commission de surendettement des particuliers a rendu une décision de recevabilité de la demande de traitement de la situation de surendettement formée par le locataire, le juge accorde des délais de paiement jusqu'à, selon les cas, l'approbation du plan conventionnel de redressement prévu à l'article L. 732-1 du code de la consommation, la décision imposant les mesures prévues aux articles L. 733-1, L. 733-4, L. 733-7 et L. 741-1 du même code, le jugement prononçant un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire, le jugement d'ouverture d'une procédure de rétablissement personnel avec liquidation judiciaire ou toute décision de clôture de la procédure de traitement du surendettement ;
2° Lorsqu'un plan conventionnel de redressement prévu à l'article L. 732-1 dudit code a été approuvé ou que la commission de surendettement des particuliers a imposé les mesures prévues aux articles L. 733-1, L. 733-4 et L. 733-7 du même code, dont le bailleur a été avisé, le juge accorde les délais et modalités de paiement de la dette locative contenus dans le plan ou imposés par la commission de surendettement des particuliers. Lorsque la commission de surendettement des particuliers a imposé pendant un délai la suspension de l'exigibilité de la créance locative en application du 4° de l'article L. 733-1 du même code, le juge accorde ce délai prolongé de trois mois pour permettre au locataire de saisir à nouveau la commission de surendettement des particuliers en application de l'article L. 733-2 du même code.
5. Pour rappel, l'Ekidom a fait délivrer à Mme [T] un commandement de payer la somme de 4.209,19 € visant la clause résolutoire par exploit daté du 06 mai 2022. Il s'ensuit que la clause résolutoire était acquise dès le 07 juillet 2022, faute de règlement des sommes visées dans ce commandement.
6. La décision de recevabilité étant intervenue le 17 juillet, soit après l'expiration de ce délai de deux mois suivant la signification du commandement, elle est sans effet sur l'acquisition de la clause résolutoire.
7. C'est donc à bon droit que le juge des contentieux de la protection saisi par voie de référé a déclaré acquise ladite clause et il convient de confirmer sur ce point.
8. En revanche, en vertu des textes susvisés, le premier juge devait accorder des délais de paiement valant jusqu'à l'adoption des mesures imposées intervenues, en l'espèce, le 25 septembre 2023 prévoyant, s'agissant du bailleur, une suspension de l'exigibilité de la créance de loyers de 18 mois, au taux de 0 %.
9. En raison de l'évolution du litige et, notamment, l'adoption desdites mesures imposée, non contestées par l'Ekidom, la cour réformera la décision de condamnation à titre provisionnel et à la libération des lieux et, faisant application du 2° du chapitre VI de l'article 24 de la loi du 06 juillet 1989, accordera à Madame [T] un délai prolongé de trois mois pour lui permettre de saisir à nouveau la commission de surendettement des particuliers en application de l'article L. 733-2 du Code de la consommation.
Sur les autres demandes
10. Il apparaît équitable de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
11. Les dépens d'appel seront mis à la charge de l'Ekidom.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Infirme l'ordonnance du juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Poitiers en date du 04 août 2023 sauf en ce qu'il a :
- Constaté à la date du 07 juillet 2022 la résiliation du bail conclu entre l'Ekidom d'une part, le bailleur, et Madame [B] [T] d'autre part, le preneur.
- Débouté Madame [B] [T] de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
- Condamné Madame [B] [T] aux dépens de l'instance.
Statuant à nouveau des seuls chefs infirmés,
Vu les mesures imposées par la commission des particuliers de la Vienne en date du 25 septembre 2023,
Constate la suspension de l'exigibilité de la créance locative de l'Ekidom prononcée par ladite commission à hauteur de 11.329,91 € pour une durée de 18 mois,
Suspend l'exigibilité de cette créance pour trois mois supplémentaires afin de permettre à Madame [B] [T] de saisir la commission de surendettement des particuliers de la Vienne,
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,
Condamne l'Office Public de l'Habitat de Grand [Localité 3] aux dépens d'appel.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,