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04/07/2024 | FRANCE | N°24/01101

France | France, Cour d'appel de Poitiers, Contestations avocats, 04 juillet 2024, 24/01101


Ordonnance n 22





























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04 Juillet 2024

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N° RG 24/01101

N° Portalis DBV5-V-B7I-HBDF

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S.C.P. [B] [V]

C/

[O] [S]

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Ordonnance notifiée aux parties le :

R E P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E



AU NOM DU PEUP

LE FRANÇAIS











COUR D'APPEL DE POITIERS



ORDONNANCE DU PREMIER PRESIDENT



Contestation d'honoraires d'avocat













Rendue le quatre juillet deux mille vingt quatre





Dans l'affaire qui a été examinée en audience publique le vingt juin deux mille vingt quatre pa...

Ordonnance n 22

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04 Juillet 2024

-------------------------

N° RG 24/01101

N° Portalis DBV5-V-B7I-HBDF

-------------------------

S.C.P. [B] [V]

C/

[O] [S]

-------------------------

Ordonnance notifiée aux parties le :

R E P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE POITIERS

ORDONNANCE DU PREMIER PRESIDENT

Contestation d'honoraires d'avocat

Rendue le quatre juillet deux mille vingt quatre

Dans l'affaire qui a été examinée en audience publique le vingt juin deux mille vingt quatre par Madame Estelle LAFOND, conseillère, agissant sur délégation de la première présidente de la cour d'appel de POITIERS, conformément à son ordonnance en date du 18 décembre 2023, assistée de Madame Inès BELLIN, greffière, lors des débats.

ENTRE :

S.C.P. [B] [V]

[Adresse 3]

[Localité 4]

représentée par son gérant en exercice, Maître [E] [B] [V], substitué par Me MESLE Louise'Ange, avocate au barreau de POITIERS

DEMANDEUR en contestation d'honoraires,

D'UNE PART,

ET :

Monsieur [O] [S]

[Adresse 2]

[Localité 1]

non comparant, ni représenté

DEFENDEUR en contestation d'honoraires,

D'AUTRE PART,

ORDONNANCE :

- Réputée contradictoire

- Prononcée publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

- Signée par Madame Estelle LAFOND, conseillère agissant sur délégation de la première présidente et par Madame Inès BELLIN, greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*****

Par lettre enregistrée le 30 juillet 2023, la SCP [B] [V] a saisi le bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Poitiers d'une demande de taxation de ses honoraires à la somme de 11 326,80 euros toutes taxes comprises, sur laquelle Monsieur [O] [S] a réglé la somme de 5 040 euros, soit un solde d'honoraires de 6 286,80 euros toutes taxes comprises.

Par décision en date du 29 mars 2024, le bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Poitiers a débouté la SCP [B] [V] de sa demande de taxation d'honoraires et ordonné à cette dernière de restituer à Monsieur [O] [S] la somme de 1 389,60 euros.

La décision du bâtonnier a été notifiée à la SCP [B] [V] le 10 avril 2024, lequel a formé un recours entre les mains de la première présidente de la cour d'appel de Poitiers le 3 mai 2024.

L'affaire a été appelée à l'audience du 20 juin 2024.

La SCP [B] [V] conteste la décision du bâtonnier.

Elle indique avoir été mandatée par Monsieur [O] [S] pour la défense de ses intérêts dans le cadre d'une procédure aux fins d'engager une action en responsabilité médicale l'opposant à des établissements de santé avec intervention forcée de l'assurance garantie accident de la vie.

Elle expose avoir signé une convention d'honoraires, laquelle prévoirait une facturation forfaitaire des frais de dossier ainsi qu'une base horaire des temps passé différente selon que ce temps passé résulte de travaux de secrétariat ou de prestations d'avocats et d'assistants juristes du cabinet.

Elle fait valoir que les diligences accomplies dans le dossier de Monsieur [O] [S] étaient nombreuses eu égard à la complexité du dossier et au nombre de défendeurs.

Elle soutient avoir accompli les diligences suivantes :

- la rédaction de deux assignations en référé devant le tribunal de Poitiers.

- l'étude des conclusions adverses.

- la rédaction de conclusions responsives.

- l'étude approfondie des différents dossiers médicaux de Mr [S].

- la préparation de l'expertise avait constitution d'un dossier de 59 pièces.

- un déplacement au CHU de [Localité 5] pour assistance à l'expertise.

- l'étude du pré, rapport d'expertise et la rédaction d'un dire

- l'étude du rapport définitif et des indemnisations auxquelles Monsieur [S] pourrait prétendre.

- les nombreuses correspondances d'usage (Huissier, avocat, clients, protection juridique, expert établissements médicaux, juridiction, régie des avances et recettes, service des expertises), accrues par le nombre de défendeurs et par le refus initial de la mutuelle de [Localité 5] assurance de prendre en charge les honoraires d'avocats.

- entretiens téléphoniques divers.

- étude des contrats souscrits par Monsieur [S] (Garantie accident de la vie : conditions générales et conditions particulières).

- représentation lors de nombreuses audiences :

- audiences de renvoi dans le cadre de la procédure en référé.

- audience de plaidoirie dans le cadre de la procédure en référé.

- audience relative à la rectification d'erreurs matérielles initiées par l'une des parties.

Elle soutient ainsi avoir accompli de multiples diligences et poursuivi sa mission à son terme, en conformité avec la convention d'honoraires, de sorte qu'elle serait légitime à solliciter le paiement du reliquat de ces honoraires par Monsieur [O] [S].

Au titre de l'horaire de résultat, la SCP [B] [V] fait valoir que l'expertise médicale réalisée ne faisait état d'aucune erreur ou faute médicale, de sorte qu'elle aurait procédé à la rédaction d'un dire afin de solliciter de l'expert qu'il se prononce sur les préjudices de Monsieur [O] [S] dans le but de mobiliser le cas échéant, la garantie contractuelle souscrite.

Elle indique que Monsieur [O] [S] aurait accepté une proposition de sa compagnie d'assurance sans l'en aviser au préalable et que si cette somme était inférieure à celle à laquelle il aurait pu prétendre en justice, il n'en demeurait pas moins que cette transaction avait été permise grâce à son intervention, notamment par la rédaction d'un dire à Expert, l'ayant conduit procéder à une évaluation des préjudices de son client, de sorte que l'honoraire de résultat prévu à la convention serait dû.

Elle fait en outre valoir que ledit honoraire ne serait pas contesté par Monsieur [O] [S], lequel aurait réglé la somme correspondante, soit 1 389,60 euros sans aucune contestation.

Elle soutient que la circonstance que cette somme ait été versée par la mutuelle de [Localité 5] assurances directement à Monsieur [O] [S] serait indifférente, malgré le terme « condamnation » évoqué dans la convention d'honoraires.

Elle indiqua ainsi que Monsieur [O] [S] resterait devoir la somme de 4 897,20 euros toutes taxes comprises au titre de l'honoraire au temps passé.

Elle sollicite en conséquence, l'infirmation de la décision du bâtonnier, la fixation des honoraires restant dû par Monsieur [O] [S] à la somme de 4 897,20 euros toutes taxes comprises, correspondant à un honoraire de 9 937,20 euros toutes taxes comprises, sous déduction d'un montant de 5 040 euros toutes taxes comprise déjà réglé ; qu'il soit enjoint à Monsieur [O] [S] de lui régler ladite somme et de voir dire que la somme de 1 3 89,60 euros versé au titre de l'honoraire de résultat ne fait pas objet à restitution de la part de la SCP [B] [V].

Monsieur [O] [S] n'a pas comparu à l'audience et n'était pas représenté.

Sur la recevabilité :

Selon l'article 176 du décret du 27 novembre 1991, la décision du bâtonnier est susceptible de recours devant le premier président de la cour d'appel qui est saisi par l'avocat ou la partie par lettre recommandée avec accusé de réception. Le délai de recours est d'un mois à compter de la notification de la décision.

La décision du bâtonnier a été notifiée à la SCP [B] [V] le 10 avril 2024, lequel a formé un recours entre les mains de la première présidente de la cour d'appel de Poitiers le 3 mai 2024.

Les recours de la SCP [B] [V] est donc recevable et régulier en la forme.

Sur le fond :

Les contestations concernant le montant et le recouvrement des honoraires des avocats sont réglées en recourant à la procédure prévue aux articles 174 et suivants du décret n°91-1197 du 27 novembre 1991.

Il résulte de l'article 10 de la loi n°71-1130 du 31 décembre 1971, modifié par la loi du 10 juillet 1991 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, que sauf en cas d'urgence ou de force majeure ou lorsqu'il intervient au titre de l'aide juridictionnelle totale ou de la troisième partie de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, l'avocat conclut par écrit avec son client une convention d'honoraires, qui précise notamment le montant ou le mode de détermination des honoraires couvrant les diligences prévisibles, ainsi que les divers frais et débours envisagés.

A défaut de convention, les honoraires sont fixés au regard de la situation de fortune du client, de la difficulté de l'affaire, des frais exposés par l'avocat, de sa notoriété et des diligences de celui-ci, conformément au quatrième alinéa de l'article 10 de la loi n°71-1130 du 31 décembre 1971.

Il sera rappelé qu'il n'entre pas dans les pouvoirs du juge de l'honoraire de se prononcer sur l'éventuelle responsabilité civile de l'avocat à l'égard de son client, liée au manquement à son devoir de conseil et d'information, ou à une exécution défectueuse de sa prestation. De tels griefs relèvent de la responsabilité professionnelle de l'avocat et non de l'évaluation des honoraires et ils ne peuvent pas non plus justifier une réduction de sa rémunération.

Les parties ont signé une convention d'honoraires le 6 octobre 2020, laquelle prévoit :

- un forfait de 300 euros pour les frais de dossier,

- un honoraire au temps passé de 50 euros hors taxes de l'heure pour les frais de secrétariat ;

- un honoraire au temps passé de 190 euros hors taxes au titre des honoraires d'avocat ;

- un honoraire complémentaire de résultat « en cas de condamnations obtenues »  équivalent à 15% hors taxes de l'ensemble des sommes obtenues.

Sur les honoraires au temps passé

Il ressort des pièces du dossier et des déclarations des parties que la SCP [B] [V] a accompli les diligences suivantes :

- la rédaction de deux assignations en référé devant le tribunal de Poitiers.

- l'étude des conclusions adverses.

- la rédaction de conclusions responsives.

- l'étude approfondie des différents dossiers médicaux de Monsieur [O] [S].

- la préparation de l'expertise avait constitution d'un dossier de 59 pièces.

- un déplacement au CHU de [Localité 5] pour assistance à l'expertise.

- l'étude du pré, rapport d'expertise et la rédaction d'un dire

- l'étude du rapport définitif et des indemnisations auxquelles Monsieur [O] [S] pourrait prétendre.

- les nombreuses correspondances d'usage (Huissier, avocat, clients, protection juridique, expert établissements médicaux, juridiction, régie des avances et recettes, service des expertises), accrues par le nombre de défendeurs et par le refus initial de la mutuelle de [Localité 5] assurance de prendre en charge les honoraires d'avocats.

- entretiens téléphoniques divers.

- étude des contrats souscrits par Monsieur [S] (Garantie accident de la vie : conditions générales et conditions particulières).

- représentation lors de nombreuses audiences :

- audiences de renvoi dans le cadre de la procédure en référé.

- audience de plaidoirie dans le cadre de la procédure en référé.

- audience relative à la rectification d'erreurs matérielles initiées par l'une des parties.

Les honoraires facturés par la SCP [B] [V] s'établissent à la somme de 9 937,20 euros toutes taxes comprises, sur laquelle Monsieur [O] [S] a réglé la somme de 5 040 euros toutes taxes comprises.

Lesdits honoraires apparaissent manifestement excessifs au regard des diligences accomplies.

Il convient de taxer les honoraires de la SCP [B] [V] comme suit :

- 300 euros hors taxes au titre des frais de dossier,

- 250 euros hors taxes au titre des frais de secrétariat correspondant à 5 heures de travail de secrétariat sur la base d'un honoraire au temps passé de 50 euros hors taxes de l'heure, au lieu des 8 heures et 31 minutes facturées ;

- 4 750 euros hors taxes au titre des diligences accomplies correspondant à 25 heures de travail.

Ainsi, les honoraires de la SCP [B] [V] seront taxés à la somme de 5 300 euros hors taxes, soit 6 360 euros toutes taxes comprises sur laquelle il n'est pas contesté que Monsieur [O] [S] a réglé la somme de 5 040 euros.

Monsieur [O] [S] reste donc devoir la somme de 1 320 euros toutes taxes comprises au titre des honoraires de la SCP [B] [V].

Sur l'honoraire de résultat

La SCP [B] [V] a facturé un honoraire de résultat à Monsieur [O] [S] correspondant à 15% de la somme versée par sa compagnie d'assurance dans le cadre d'une transaction, soit la somme de 1 389,60 euros toutes taxes comprises.

Ladite somme a été entièrement réglée par Monsieur [O] [S].

Si Monsieur [O] [S] n'a jamais contesté cette somme, l'exigibilité de l'honoraire de résultat relève de l'ordre public, de sorte qu'il appartient au premier président de statuer sur ce point.

En l'espèce, la convention d'honoraires prévoit qu'un honoraire complémentaire de résultat « en cas de condamnations obtenues » équivalent à 15% hors taxes de l'ensemble des sommes obtenues.

Ainsi, en application de ladite convention, un honoraire de résultat ne peut être facturé qu'en cas de condamnation obtenues.

Or, aucune condamnation n'a été prononcée, de sorte que l'honoraire de résultat n'est pas exigible.

En conséquence l'honoraire de résultat ayant été facturé et réglé sans qu'il ne soit dû, il convient d'en ordonner la restitution.

La SCP [B] [V] devra donc restituer la somme de 1 389,60 euros, indument réglé au titre de l'honoraire de résultat, à Monsieur [O] [S].

Sur la compensation des sommes dues

Il sera ordonné la compensation des sommes dues réciproquement par les parties, entre Monsieur [O] [S] d'une part et la SCP [B] [V] d'autre part, de sorte que Monsieur [O] [S] restera devoir à la SCP [B] [V] la somme de 69,60 euros toutes taxes comprises.

Monsieur [O] [S] sera en conséquence condamné à payer à la SCP [B] [V] la somme de 69,60 euros toutes taxes comprises au titre des honoraires au temps passé.

Sur les dépens :

L'article 696 du code de procédure civile dispose que la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.

L'équité commande de laisser à chacune des parties la charge de ses propres dépens.

PAR CES MOTIFS :

Nous, Estelle LAFOND, conseillère chargée du secrétariat général de la première présidence, statuant par délégation de la première présidente, par mise à disposition au greffe et par ordonnance réputée contradictoire,

Déclarons le recours de la SCP [B] [V] recevable,

Infirmons l'ordonnance du bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Poitiers en date du 29 mars 2024 ;

Statuant à nouveau,

Taxons les honoraires au temps passé de la SCP [B] [V] à la somme de 5 300 euros hors taxes, soit 6 360 euros toutes taxes comprises ;

Constatons que Monsieur [O] [S] s'est acquitté de la somme de 5 040 euros toutes taxes comprises au titre des honoraires au temps passé ;

Dison que Monsieur [O] [S] reste devoir la somme de 1 320 euros toutes taxes comprises au titre des honoraires au temps passé ;

Disons que la SCP [B] [V] devra restituer à Monsieur [O] [S] la somme de 1 389,60 euros réglé au titre de l'honoraire de résultat ;

Ordonnons la compensation des sommes dues réciproquement par les parties ;

Constatons que Monsieur [O] [S], reste redevable, après compensation desdites sommes, de la somme de 69,60 euros toutes taxes comprises ;

Condamnons Monsieur [O] [S] à payer ladite somme à la SCP [B] [V] ;

Disons que chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens.

La greffière, La conseillère,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Poitiers
Formation : Contestations avocats
Numéro d'arrêt : 24/01101
Date de la décision : 04/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 10/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-04;24.01101 ?
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