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04/07/2024 | FRANCE | N°24/00862

France | France, Cour d'appel de Poitiers, Contestations avocats, 04 juillet 2024, 24/00862


Ordonnance n 21





























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04 Juillet 2024

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N° RG 24/00862

N° Portalis DBV5-V-B7I-HAON

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[M] [O]

C/

S.E.L.A.R.L. GASTON - [F]-[K] - [I]

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Ordonnance notifiée aux parties le :

R E P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











COUR D'APPEL DE POITIERS



ORDONNANCE DU PREMIER PRESIDENT



Contestation d'honoraires d'avocat













Rendue le quatre juillet deux mille vingt quatre





Dans l'affaire qui a été examinée en audience publique le vingt juin deux ...

Ordonnance n 21

-------------------------

04 Juillet 2024

-------------------------

N° RG 24/00862

N° Portalis DBV5-V-B7I-HAON

-------------------------

[M] [O]

C/

S.E.L.A.R.L. GASTON - [F]-[K] - [I]

-------------------------

Ordonnance notifiée aux parties le :

R E P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE POITIERS

ORDONNANCE DU PREMIER PRESIDENT

Contestation d'honoraires d'avocat

Rendue le quatre juillet deux mille vingt quatre

Dans l'affaire qui a été examinée en audience publique le vingt juin deux mille vingt quatre par Madame Estelle LAFOND, conseillère, agissant sur délégation de la première présidente de la cour d'appel de POITIERS, conformément à son ordonnance en date du 18 décembre 2023, assistée de Madame Inès BELLIN, greffière, lors des débats.

ENTRE :

Madame [M] [O]

[Adresse 1]

[Localité 4]

comparante en personne

DEMANDEUR en contestation d'honoraires,

D'UNE PART,

ET :

S.E.L.A.R.L. GASTON - [F]-[K] - [I]

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Maître [U] [F], subsituée par Me [Z] [I], avocates au barreau de POITIERS

DEFENDEUR en contestation d'honoraires,

D'AUTRE PART,

ORDONNANCE :

- Contradictoire

- Prononcée publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

- Signée par Madame Estelle LAFOND, conseillère agissant sur délégation de la première présidente et par Madame Inès BELLIN, greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*****

Par lettre enregistrée le 27 octobre 2023, la SELARL GASTON ' [F]-[K] ' [I] a saisi le bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Poitiers d'une demande de taxation de ses honoraires à la somme de 2 535 euros toutes taxes comprises, outre 17,96 euros de frais au titre de la procédure de taxation devant le bâtonnier.

Par décision en date du 27 février 2024, le bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Poitiers a taxé les honoraires de la SELARL GASTON ' [F]-[K] ' [I], à la somme de 2 535 euros toutes taxes comprises, sur laquelle Madame [M] [O] reste devoir la somme de 1 335 euros, outre 17,96 euros de frais au titre de la procédure de taxation devant le bâtonnier.

La décision du bâtonnier a été notifiée à Madame [M] [O] le 2 mars 2024, laquelle a formé un recours entre les mains de la première présidente de la cour d'appel de Poitiers le 30 mars 2024.

L'affaire, appelée une première fois à l'audience du 23 mai 2024, a été renvoyée à l'audience du 20 juin 2024.

Madame [M] [O] indique avoir confié la défense de ses intérêts à la SELARL GASTON ' [F]-[K] ' [I] dans le cadre d'un litige l'opposant à son ex concubin concernant le sort d'un immeuble indivis dont ils étaient propriétaires.

Elle conteste le paiement de la somme de 1 335 euros sur les honoraires facturés par la SELARL GASTON ' [F]-[K] ' [I].

Elle fait valoir que par mail du 27 juin 2023, Maître [U] [F]-[K] aurait mentionné que les démarches auprès du tribunal judiciaire, au regard de la procédure, justifiait une première demande de provision d'un montant de 1 200 euros et qu'elle aurait suspendu les échanges avec la partie adverse dans l'attente du règlement de cet honoraire, de sorte que rien de justifierait la facturation d'un honoraire supplémentaire.

Elle déclare avoir changé d'avocat et en avoir informé Maître [U] [F] par mail du 4 octobre 2023.

Elle soutient que Maître [U] [F] aurait manqué de diligence et failli à sa mission, notamment en n'ayant pas saisi l'opportunité de soumettre un projet de convention d'accord amiable avant que son ex concubin ne se rétracte de sa proposition de lui verser la totalité des fonds.

Elle fait valoir avoir déjà réglé le premier rendez-vous facturé 150 euros hors taxes par le cabinet et que les deux lettres recommandées avec accusé de réception lui auraient été facturées 250 hors taxes alors que la convention d'honoraires prévoirait une facturation de 15 euros pièce.

Elle conteste, en outre, le « forfait correspondance » de 300 euros alors que 21 correspondances auraient été échangées et que la convention d'honoraires prévoirait une facturation de 8 euros hors taxes par lettre simple.

Elle sollicite ainsi la réduction des honoraires de la SELARL GASTON ' [F]-[K] ' [I] en tenant compte de ces éléments, soit une réduction de 502 euros hors taxes des honoraires facturés, de sorte que les honoraires restants dus seraient de 732,60 euros toutes taxes comprises.

La SELARL GASTON ' [F]-[K] ' [I] indique avoir reçu Madame [M] [O] lors d'un rendez-vous à son cabinet et lui avoir transmis une consultation écrite ainsi qu'une convention d'honoraires, laquelle n'a jamais été régularisée par Madame [M] [O].

Elle expose que les démarches amiables engagées auraient donné lieu à deux factures réglées par sa cliente et qu'en septembre 2021, elle aurait informé Madame [M] [O] de ce que ses honoraires, dans le cadre d'une procédure judiciaire, seraient facturés au temps passé avec un minimum de 2 000 euros.

Elle indique avoir adressé un courrier recommandé à la partie adverse, resté sans réponse et avoir conseillé à sa cliente d'initier une procédure judiciaire.

Elle déclare que dans l'intervalle, la partie adverse a fait assigner Madame [M] [O] devant le tribunal judiciaire de Poitiers, qu'elle s'est ainsi constituée pour sa cliente avant de lui adresser une convention d'honoraires ainsi qu'une demande de provision d'un montant de 1 200 euros toutes taxes comprises.

Elle expose avoir signifié des conclusions d'incident le 10 mai 2023 et qu'après plusieurs échanges avec sa cliente, celle-ci lui a indiqué qu'elle souhaitait changer d'avocat, de sorte qu'elle lui a adressé une dernière facture d'un montant de 2 335 euros toutes taxes comprises, le 22 août 2023, sur laquelle Madame [M] [O] aurait réglé la somme de 1 200 euros, le 4 octobre 2023.

Elle conteste le manque de diligence qui lui est reproché et déclare que se ne serait qu'au regard des prétentions de Madame [M] [O] et du refus de son ex concubin qu'aucun accord n'aurait pu intervenir. Elle rappelle, à ce titre, que le juge taxateur n'a pas pour office d'apprécier les questions relevant de l'éventuelle mise en cause de la responsabilité professionnelle de l'avocat.

Elle soutient avoir convenu avec sa cliente d'un honoraire au temps passé, fixé de manière définitive à la somme 2 535 euros toutes taxes comprises, que l'ensemble des prestations afférentes à cette facturation auraient été justifiées au terme de la facture définitive et qu'il aurait été clairement tenu compte des prestations déjà réglées dans le détail de la facturation.

Elle fait valoir, s'agissant des honoraires facturés au titre des lettres recommandées avec accusé de réception, que la facturation invoquée par Madame [M] [O], soit 15 euros par lettre recommandées, correspondrait au coût d'envoi de ladite lettre sans autre prestation, alors que les lettres recommandées facturées correspondraient à l'envoi d'une proposition d'accord avec la partie adverse outre le coût d'envoi.

Elle indique que 21 correspondances auraient été adressées, outre les réponses apportées et que l'ensemble a ainsi été forfaitisé à la somme de 300 euros et que les 8 euros de facturation invoqués par Madame [M] [O] correspondrait là encore à l'envoi d'une lettre simple sans prestation autre.

Elle soutient que Madame [M] [O] aurait eu parfaitement connaissance des conditions financières de son intervention et qu'elle aurait clairement explicité son accord sur lesdites conventions.

Elle fait valoir, en tout état de cause, que l'ensemble des prestations facturées seraient justifiées et qu'elles auraient en outre toujours été effectuées en accord avec Madame [M] [O] s'agissant de la procédure devant le tribunal judiciaire de Poitiers, au soutien de ses intérêts et avec succès s'agissant de l'incompétence soulevée.

Elle sollicite, en conséquence, la confirmation de l'ordonnance de taxe du bâtonnier, la fixation de ses honoraires à la sommes 2 535 euros toutes taxes comprises et la condamnation de Madame [M] [O] à lui payer la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Sur la recevabilité :

Selon l'article 176 du décret du 27 novembre 1991, la décision du bâtonnier est susceptible de recours devant le premier président de la cour d'appel qui est saisi par l'avocat ou la partie par lettre recommandée avec accusé de réception. Le délai de recours est d'un mois à compter de la notification de la décision.

La décision du bâtonnier a été notifiée à Madame [M] [O] le 2 mars 2024, laquelle a formé un recours entre les mains de la première présidente de la cour d'appel de Poitiers le 30 mars 2024.

Le recours de Madame [M] [O] est donc recevable et régulier en la forme.

Sur le fond :

Les contestations concernant le montant et le recouvrement des honoraires des avocats sont réglées en recourant à la procédure prévue aux articles 174 et suivants du décret n°91-1197 du 27 novembre 1991.

Il résulte de l'article 10 de la loi n°71-1130 du 31 décembre 1971, modifié par la loi du 10 juillet 1991 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, que sauf en cas d'urgence ou de force majeure ou lorsqu'il intervient au titre de l'aide juridictionnelle totale ou de la troisième partie de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, l'avocat conclut par écrit avec son client une convention d'honoraires, qui précise notamment le montant ou le mode de détermination des honoraires couvrant les diligences prévisibles, ainsi que les divers frais et débours envisagés.

A défaut de convention, les honoraires sont fixés au regard de la situation de fortune du client, de la difficulté de l'affaire, des frais exposés par l'avocat, de sa notoriété et des diligences de celui-ci, conformément au quatrième alinéa de l'article 10 de la loi n°71-1130 du 31 décembre 1971.

Il sera rappelé qu'il n'entre pas dans les pouvoirs du juge de l'honoraire de se prononcer sur l'éventuelle responsabilité civile de l'avocat à l'égard de son client, liée au manquement à son devoir de conseil et d'information, ou à une exécution défectueuse de sa prestation.

De tels griefs relèvent de la responsabilité professionnelle de l'avocat et non de l'évaluation des honoraires et ils ne peuvent pas non plus justifier une réduction de sa rémunération.

En l'espèce, aucune convention d'honoraires n'a été signée par les parties, de sorte qu'il ne saurait être retenu que les parties auraient convenu d'un quelconque honoraire.

En conséquence, les honoraires de la SELARL GASTON ' [F]-[K] ' [I] seront fixés au regard de la situation de fortune du client, de la difficulté de l'affaire, des frais exposés par l'avocat, de sa notoriété et des diligences de celui-ci, conformément au quatrième alinéa de l'article 10 de la loi n°71-1130 du 31 décembre 1971.

Il ressort des pièces du dossier et des déclarations des parties que la SELARL GASTON ' [F]-[K] ' [I] a taxé ses honoraires comme suit :

trois rendez-vous physiques sur la base d'un tarif horaire de 150 euros hors taxes, soit un montant total de 450 euros hors taxes,

un rendez-vous téléphoniques sur la base d'un tarif horaire de 150 euros hors taxes, soit un montant total de 37,50 euros hors taxes ;

deux correspondances par LRAR sur la base de 125 euros hors taxes l'unité, soit un montant total de 250 euros hors taxes ;

un forfait de 300 euros hors taxes pour les échanges de mails et de courriers ;

deux heures pour l'étude du dossier sur la base d'un tarif horaire de 200 euros hors taxes, soit un montant total de 400 euros hors taxes ;

trois heures pour la procédure sur la base d'un tarif horaire de 300 euros hors taxes, soit un montant total de 900 euros hors taxes.

Les honoraires facturés par la SELARL GASTON ' [F]-[K] ' [I] s'établissent à la somme de 2 337,50 euros hors taxes, soit 2 805 euros toutes taxes comprises sur laquelle Madame [M] [O] a réglé la somme de 1 425 euros toutes taxes comprises.

Il apparaît que les honoraires facturés sont excessifs au regard des diligences accomplies.

Ainsi, il convient de réduire le forfait correspondances à la somme de 180 euros hors taxes au lieu des 300 euros hors taxes facturés.

Par ailleurs, les taux horaires retenus de 200 euros hors taxes pour l'étude du dossier et 300 euros hors taxes pour la procédure n'apparaissent pas justifiés au regard de la difficulté de l'affaire, de sorte qu'il convient de les réduire et de retenir un taux horaire unique de 180 hors taxes à la fois au titre de l'étude du dossier et de la procédure. La SELARL GASTON ' [F]-[K] ' [I] justifie pour ces diligences, conformément à sa facturation, de 5 heures de travail.

En conséquence, les honoraires de la SELARL GASTON ' [F]-[K] ' [I] seront taxés à la somme de 1 817,50 euros hors taxes, soit 2 181 euros toutes taxes comprises, sur laquelle Madame [M] [O] s'est acquittée de la somme de 1 425 euros toutes taxes comprises.

Madame [M] [O] sera donc condamnée à payer à la SELARL GASTON ' [F]-[K] ' [I] la somme de 756 euros toutes taxes comprises au titre des honoraires restant dus.

Sur l'article 700 du code de procédure civile :

Le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens en tenant compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à ces condamnations.

L'équité commande de débouter la SELARL GASTON ' [F]-[K] ' [I] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Sur les dépens :

L'article 696 du code de procédure civile dispose que la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.

L'équité commande laisser à chacune des parties la charge de ses propres dépens.

PAR CES MOTIFS :

Nous, Estelle LAFOND, conseillère chargée du secrétariat général de la première présidence, statuant par délégation de la première présidente, par mise à disposition au greffe et par ordonnance contradictoire,

Déclarons le recours de Madame [M] [O] recevable,

Infirmons l'ordonnance du bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Poitiers en date du 27 février 2024 ;

En conséquence,

Taxons les honoraires de la SELARL GASTON ' [F]-[K] ' [I] à la somme de 1 817,50 euros hors taxes, soit 2 181 euros toutes taxes comprises;

Constatons que Madame [M] [O] s'est acquittée de la somme de 1 425 euros toutes taxes comprises sur les honoraires de la SELARL GASTON ' [F]-[K] ' [I] ;

Condamnons Madame [M] [O] à payer à la SELARL GASTON ' [F]-[K] ' [I] la somme de 756 euros toutes taxes comprises au titre des honoraires restant dus ;

Déboutons la SELARL GASTON ' [F]-[K] ' [I] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Disons que chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens.

La greffière, La conseillère,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Poitiers
Formation : Contestations avocats
Numéro d'arrêt : 24/00862
Date de la décision : 04/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 10/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-04;24.00862 ?
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