ARRET N°247
FV/KP
N° RG 23/01310 - N° Portalis DBV5-V-B7H-GZ6L
[T] [J]
[T] [J]
[T] [J]
C/
S.A. BANQUE CIC OUEST
Loi n° 77-1468 du30/12/1977
Copie revêtue de la formule exécutoire
Le à
Le à
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Copie gratuite délivrée
Le à
Le à
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE POITIERS
2ème Chambre Civile
ARRÊT DU 02 JUILLET 2024
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/01310 - N° Portalis DBV5-V-B7H-GZ6L
Décision déférée à la Cour : jugement du 26 juillet 2022 rendu par le Tribunal Judiciaire de LA ROCHE SUR YON.
APPELANTS :
Monsieur [O] [T] [J]
né le [Date naissance 11] 1952 à [Localité 17] (77)
[Adresse 14]
[Localité 16]
Ayant pour avocat postulant Me Bruno MAZAUDON de la SELARL JURICA, avocat au barreau de POITIERS
Ayant pour avocat plaidant Me Olivier MORINO, avocat au barreau de LA ROCHE SUR YON.
Madame [Y] [T] [J]
née le [Date naissance 4] 1980 à [Localité 18] (85)
[Adresse 12]
[Localité 18]
Ayant pour avocat postulant Me Bruno MAZAUDON de la SELARL JURICA, avocat au barreau de POITIERS
Ayant pour avocat plaidant Me Olivier MORINO, avocat au barreau de LA ROCHE SUR YON.
Monsieur [K] [T] [J]
né le [Date naissance 6] 1981 à [Localité 18] (85)
[Adresse 5]
[Localité 15]
Ayant pour avocat postulant Me Bruno MAZAUDON de la SELARL JURICA, avocat au barreau de POITIERS
Ayant pour avocat plaidant Me Olivier MORINO, avocat au barreau de LA ROCHE SUR YON.
INTIMEE :
S.A. BANQUE CIC OUEST
[Adresse 3]
[Localité 13]/FRANCE
Ayant pour avocat plaidant Me François CUFI de la SELARL DGCD AVOCATS, avocat au barreau de LA ROCHE-SUR-YON.
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 05 Juin 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant :
Monsieur Fabrice VETU, Conseiller
Monsieur Cédric LECLER, Conseiller
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Fabrice VETU, Conseiller
Monsieur Cédric LECLER, Conseiller
Madame Estelle LAFOND, Conseiller
GREFFIER, lors des débats : Madame Véronique DEDIEU,
ARRÊT :
- CONTRADICTOIRE
- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,
- Signé par Monsieur Fabrice VETU, Conseiller en remplacement du Président légitimement empêché , et par Madame Véronique DEDIEU, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE
Selon acte authentique dressé par Maître [G] [M], notaire à [Localité 19] (85), en date du 14 mai 2004, la banque CIC Ouest a consenti à la SCI La Maiteraie un prêt à hauteur de 329.814 € remboursable en 240 mensualités d'un montant de 2.167,53 € au taux fixe de 4,95 %.
Le prêt était destiné au financement de l'acquisition d'un ensemble immobilier situé [Adresse 1], sur la commune de [Localité 20] (85), comprenant une maison d'habitation et deux bâtisses ainsi que diverses parcelles de terres, l'ensemble étant cadastré section AB n°[Cadastre 2], [Cadastre 7],[Cadastre 8],[Cadastre 9] et [Cadastre 10].
Une procédure de saisie immobilière a été mise en oeuvre et, par jugement d'adjudication du 09 décembre 2016, une partie des biens, comprenant la maison d'habitation et une parcelle (cadastrée AB n°[Cadastre 2] et [Cadastre 10]), a été adjugée pour le prix principal de 47.000 € et 16.000 €, soit un montant global de 63.000 €.
Par jugement en date du 21 février 2019, la SCI La Maiteraie a fait l'objet d'une procédure de redressement judiciaire, laquelle a été convertie en liquidation judiciaire suivant jugement du tribunal de grande instance de La Roche-Sur-Yon daté du 18 avril 2019.
Par mise en demeure adressée aux associés de la SCI La Maiteraie, la banque CIC Ouest a réclamé à chacun des associés le paiement de sa créance à proportion de leurs parts dans le capital social.
Les 23,28 et 29 janvier 2020, la banque CIC Ouest a attrait Monsieur [O] [T] [J], Madame [Y] [T] [J] et Monsieur [K] [T] [J] aux fins d'obtenir leur condamnation à lui payer les sommes suivantes :
* 317.466,41 € pour M. [O] [T] [J], outre les intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 12 novembre 2019,
* 57.721,16 € pour M. [K] [T] [J], outre les intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 31 octobre 2019,
* 57.721,16 € pour Mme [Y] [T] [J], outre les intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 31 octobre 2019.
Dans le dernier état de leurs demandes, les défendeurs ont demandé le rejet des demandes de la banque CIC Ouest et reconventionnellement sollicité, à titre principal, la condamnation de cette dernière au paiement des sommes suivantes :
* 315.000 € pour M. [O] [T] [J],
* 55.000 € pour M. [K] [T] [J],
* 55.000 € pour Mme [Y] [T] [J].
A titre subsidiaire, ils ont sollicité 'la prescription des intérêts courus entre le 1er janvier 2017 et le 1er janvier 2011".
Par jugement en date du 26 juillet 2022, le tribunal judiciaire de La Roche-Sur-Yon a statué ainsi :
- Dit irrecevable les demandes reconventionnelles des consorts [T] [J]
- Dit recevable et bien fondé les demandes de paiement du CIC Ouest,
- Condamne M. [O] [T] [J] à payer la somme de 317.466,41 €, M. [K] [T] [J] celle de 57.721,16 € et Mme [Y] [T] [J] celle de 57.721,16 € à la banque CIC Ouest outre intérêts au taux légal à compter du 31 octobre 2019,
- Condamne in solidum les consorts [T] [J] à payer à la banque CIC Ouest une indemnité de 1000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Par déclaration en date du 5 juin 2023, les consorts [T] [J] ont relevé appel de cette décision en visant les chefs expressément critiqués en intimant la banque CIC Ouest.
Les consorts [T] [J] ont, par dernières conclusions transmises le 29 août 2023, demandé à la cour de :
- Réformer le jugement du tribunal judiciaire de La Roche-Sur-Yon en date du 26 juillet 2022 en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau,
Sur la demande principale,
- Déclarer la SA banque CIC Ouest irrecevable et mal fondée en toutes ses demandes, et l'en débouter,
Sur la demande reconventionnelle,
- Faire droit à la demande reconventionnelle des appelants, et en conséquences,
- Condamner la banque CIC Ouest à payer les sommes suivantes :
315.500 € à M. [O] [T] [J],
55.000 € à M. [K] [T] [J],
55.000 € à Mme [Y], [T] [J].
Subsidiairement,
- Déclarer prescrite l'acte de la banque au titre des intérêts courus entre le 1er janvier 2007 et le 1er janvier 2011.
En tout état de cause,
- Condamner la SA banque CIC Ouest à payer la somme de 2.000 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile, à chacun des appelants,
- Condamner la SA Banque CIC Ouest aux entiers dépens,
- Et dire que, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, Maître Olivier Morino et Maître Bruno Mazaudon pourront chacun pour ceux les concernant recouvrer directement les frais dont ils ont fait l'avance sans en avoir reçu provision.
La banque CIC Ouest a, par dernières conclusions transmises le 13 novembre 2023, demandé à la cour de :
- Confirmer en toutes ses dispositions le jugement du tribunal judiciaire de La Roche-Sur-Yon du 26 juillet 2022,
- Y ajoutant, condamner solidairement les consorts [T] [J] au paiement de la somme de 3.000€ sur le fondement de l'article 700 du code de la procédure civil pour la procédure d'appel outre la confirmation de la somme mise à leur charge à ce titre par la décision de la première instance,
- Condamner les consorts [T] [J] aux entiers dépens de la première instance et d'appel.
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie expressément aux dernières conclusions précitées pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties.
L'instruction de l'affaire a été clôturée suivant ordonnance datée du 07 mai 2024 en vue d'être plaidée à l'audience du 05 suivant, date à compter de laquelle elle a été mise en délibéré.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la prescription de la créance de la Banque CIC Ouest
1. La cour observe que sur ce point, les parties ne font que reprendre devant la cour leurs prétentions et leurs moyens de première instance.
2. Conformément aux dispositions de l'article 955 du Code de procédure civile, en l'absence d'élément nouveau soumis à son appréciation, la cour estime que le premier juge, par des motifs pertinents qu'elle approuve, a fait une exacte appréciation des faits de la cause et des droits des parties.
3. Il convient en conséquence de confirmer la décision déférée de ce chef.
Sur la demande de dommages et intérêts au titre du devoir de mise en garde
4. Il est constant que lorsque l'emprunteur est une société civile immobilière, d'une part, seule celle-ci est créancière de l'obligation de mise en garde qui pèse sur le prêteur et non ses associés, même si ceux-ci sont tenus indéfiniment des dettes sociales, d'autre part, que le caractère averti de cet emprunteur s'apprécie en la seule personne de son représentant légal et non en celle de ses associés.
5. Il est tout aussi établi, en application des dispositions de l'article'2224 du Code civil, que l'action en responsabilité de l'emprunteur non averti à l'encontre du prêteur au titre d'un manquement à son devoir de mise en garde se prescrit par cinq ans à compter du jour du premier incident de paiement (jour de l'exigibilité des sommes que l'emprunteur n'a pas pu payer), permettant à l'emprunteur d'appréhender l'existence et les conséquences éventuelles d'un tel manquement.
6. Les appelants ne fournissent aucune indication sur le premier incident de paiement mais seulement sur la date de cessation des paiements, prélude de la liquidation judiciaire de la SCI La Maiteraie.
7. Mais la cour observe que Monsieur [O] [T] [J] ne conteste pas avoir régularisé, tant en qualité de gérant de la SCI qu'à titre personnel, le protocole d'accord du 13 juillet 2010 auquel il a été conféré force exécutoire, prévoyant un plan de remboursement de la créance du CIC.
8. Il ne conteste pas davantage ne pas l'avoir honoré.
9. Il pouvait donc, de façon certaine, appréhender l'existence et les conséquences des incidents de paiement de la SCI La Maiteraie à cette date.
10. Au regard de cette date, la cour confirmera que l'action en responsabilité de la SCI La Maiteraie pour défaut de devoir de mise en garde était prescrite au moment où celle-ci a été évoquée pour la première fois devant le premier juge.
Sur la prescription des intérêts
11. Au visa de l'article 2224 du Code civil, les appelants soutiennent que l'action de la banque en paiement des intérêts est prescrite pour les intérêts dus depuis plus de cinq ans à compter de commandement de payer valant saisie immobilière en date du 26 janvier 2016.
12. L'intimée fait observer que cette demande ne peut prospérer dans la mesure où les intérêts ne sont sollicités qu'à compter du 31 octobre 2019, date des mises en demeure adressées aux consorts [T] [J] et rappelle, en outre, que sa créance principale a été fixée par une ordonnance datée du 19 avril 2021 du juge-commissaire de la liquidation judiciaire de la SCI La Miteraie.
13. Il rappelle encore que les assignations des consorts [T] [J] ont été délivrées les 23, 28 et 29 janvier 2020, le jugement d'adjudication ayant été prononcé le 26 janvier 2016, aucune prescription quinquennale n'étant donc encourue.
14. Au regard des pièces produites et du texte invoqué, la cour constate qu'aucune prescription des intérêts ayant couru à compter du 26 janvier 2016 n'est encourue.
15. Cette demande sera rejetée.
Sur les autres demandes
Il apparaît équitable de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
Les consorts [T] qui échouent en leurs prétentions supporteront la charge des dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Confirme en toutes ses dispositions contestées le jugement du tribunal judiciaire de La Roche-Sur-Yon daté du 26 juillet 2022,
Y ajoutant,
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,
Condamne Monsieur [O] [T] [J], Madame [Y] [T] [J] et Monsieur [K] [T] [J] aux dépens d'appel.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,