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02/07/2024 | FRANCE | N°22/02083

France | France, Cour d'appel de Poitiers, 1ère chambre, 02 juillet 2024, 22/02083


ARRÊT N°258



N° RG 22/02083



N° Portalis DBV5-V-B7G-GTRZ





[C]



C/



[P] [X]

















Loi n° 77 - 1468 du 30/12/1977

Copie revêtue de la formule exécutoire



Le aux avocats





Copie gratuite délivrée



Le aux avocats















RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE POITIERS

1ère Chambr

e Civile



ARRÊT DU 02 JUILLET 2024





Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 juin 2022 rendu par le Tribunal Judiciaire de LA ROCHELLE





APPELANTE :



Madame [Y] [C] épouse [W] [M]

née le 19 Novembre 1947 à [Localité 9] (44)

[Adresse 1] - [Localité 6]



ayant pour avocat postulant M...

ARRÊT N°258

N° RG 22/02083

N° Portalis DBV5-V-B7G-GTRZ

[C]

C/

[P] [X]

Loi n° 77 - 1468 du 30/12/1977

Copie revêtue de la formule exécutoire

Le aux avocats

Copie gratuite délivrée

Le aux avocats

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE POITIERS

1ère Chambre Civile

ARRÊT DU 02 JUILLET 2024

Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 juin 2022 rendu par le Tribunal Judiciaire de LA ROCHELLE

APPELANTE :

Madame [Y] [C] épouse [W] [M]

née le 19 Novembre 1947 à [Localité 9] (44)

[Adresse 1] - [Localité 6]

ayant pour avocat postulant Me Marie COLOMBEAU, avocat au barreau de POITIERS et pour avocat plaidant Me Julie HOUDUSSE, avocat au barreau d'ANGERS

INTIMÉE :

Madame [U] [P] [X]

née le 15 Mai 1974 à [Localité 7] (13)

[Adresse 10] - [Localité 6]

ayant pour avocat Me Régis SAINTE MARIE PRICOT de la SELARL ACTE JURIS, avocat au barreau de SAINTES

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des articles 907 et 786 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 13 Mai 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant :

Monsieur Dominique ORSINI, Conseiller

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Thierry MONGE, Président de Chambre

Monsieur Dominique ORSINI, Conseiller

Monsieur Philippe MAURY, Conseiller

GREFFIER, lors des débats : Lilian ROBELOT

ARRÊT :

- Contradictoire

- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- Signé par Monsieur Thierry MONGE, Président de Chambre, et par Madame Elodie TISSERAUD, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*****

PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

[U] [P]-[X] est propriétaire d'un bien immobilier situé [Adresse 10], sur la commune [Localité 6] (Charente-Maritime), cadastré section G n°[Cadastre 4] pour une contenance 1 a 15 ca. Ce bien provient de la division de la parcelle cadastrée section G n° [Cadastre 5].

[Y] [C] épouse [W] [M] est propriétaire de l'immeuble contigu situé [Adresse 1].

Par acte du 22 avril 2021, [U] [P]-[X] a fait assigner [Y] [C] épouse [W] [M] devant le tribunal judiciaire de La Rochelle. Elle a à titre principal demandé de la condamner à :

- enlever sous astreinte la partie de son portail empiétant sur son fonds ;

- enlever des plaques de sa clôture situées au dessus du regard du pluvial commun ;

- lui payer la somme de 15.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation des troubles anormaux du voisinage subis.

[Y] [C] épouse [W] [M] a conclu au rejet de ces demandes en l'absence selon elle d'une part d'empiétement, non établi et le portail ayant été déplacé, d'autre part de trouble anormal de voisinage.

Par jugement du 28 juin 2022, le tribunal judiciaire de La Rochelle a statué en ces termes :

'- CONDAMNE Madame [Y] [W] [M] née [C] à enlever la partie de son portail située sur le fonds de Madame [U] [P] [X] dans un délai de trois mois à compter de la signification de la présente décision et, passé ce délai, sous astreinte de 30€ par jour de retard,

- CONDAMNE Madame [Y] [W] [M] née [C] à retirer les plaques de métal dont les fixations empiètent sur le fonds de Madame [U] [P] [X] et qui sont situées au niveau du regard d'eaux pluviales et ce dans un délai de trois mois à compter de la signification de la présente décision et, passé ce délai, sous astreinte de 30 € (trente euros) par jour de retard.

- CONDAMNE Madame [Y] [W] [M] née [C] à verser à Madame [U] [P] [X] la somme de TROIS MILLE EUROS (3000€) à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait des troubles anormaux du voisinage commis, et celle de TROIS MILLE CINQ CENTS EUROS (3500) en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- DEBOUTE Madame [Y] [W] [M] née [C] de sa demande de dommages et intérêts et de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,

- CONDAMNE Madame [Y] [W] [M] née [C] aux dépens,

- RAPPELLE que la présente décision bénéficie de plein droit de l'exécution provisoire'.

Il a considéré que :

- l'empiètement allégué du portail était établi par les procès-verbaux de constat dressés ;

- les plaques métalliques empêchant l'accès au regard commun du réseau d'évacuation des eaux pluviales, étaient en partie fixées avec des vis sur le fonds de la demanderesse ;

- le comportement injurieux et harcelant de la défenderesse constituait un trouble excédant les inconvénients normaux du voisinage, dont elle devait réparation des conséquences dommageables.

Par déclaration reçue au greffe le 7 août 2022, [Y] [C] épouse [W] [M] a interjeté appel de ce jugement.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 26 mars 2024, elle a demandé de :

'Vu le jugement rendu par le Tribunal Judiciaire de LA ROCHELLE en date du 28 juin 2022,

Vu les dispositions édictées par l'article 647 du Code Civil,

Vu le procès-verbal de constat établi le par Maître [H] en date du 27 septembre 2018,

Recevant la concluante en son appel ; l'y déclarant fondée et y faisant droit ;

Infirmer le jugement entrepris en ses dispositions lui faisant grief et statuant à nouveau ;

Débouter Madame [P]-[X] de l'ensemble de ses demandes;

Dire et juger que Madame [W] [M] a fait réaliser par ses soins des travaux de déplacement du portail ;

En conséquence,

Constater que la demande de Madame [P]-[X] est devenue sans objet ;

Infirmer le jugement rendu par le Tribunal Judiciaire de LA ROCHELLE en ce qu'il a condamné Madame [W] [M] à retirer les plaques de métal dont les fixations situées au niveau du regard d'eaux pluviales empièteraient sur le fonds de Mme [P]-[X] dans un délai de 3 mois à compter de la signification de la décision, ce sous astreinte de 30 € par jour de retard passé ce délai, cette dernière étant irrecevable et en tous les cas mal-fondée.

Condamner Madame [P]-[X] à régler à Madame [Y] [W] [M] la somme de 3 000,00 € sur le fondement de l'article 700 du CPC ;

Condamner Madame [P]-[X] aux entiers dépens, en ce compris les dépens de 1ère Instance'.

Elle a soutenu que :

- la preuve de l'empiètement du portail n'était pas rapportée ;

- la demande formée de ce chef était désormais sans objet, le portail ayant été déplacé ;

- la preuve d'un empiètement de la plaque posée sur le regard de l'installation d'évacuation des eaux pluviales n'était de même pas rapportée ;

- le fonds voisin était grevé au profit du sien d'une servitude de canalisations pour les eaux de pluie et les eaux usées, rappelée à son titre ;

- son fonds pouvait être clôturé ;

- les attestations produites étaient insuffisantes à caractériser un trouble anormal de voisinage.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 12 octobre 2023, [U] [P]-[X] a demandé de :

'Confirmer le jugement prononcé le 28 juin 2022 par le tribunal judiciaire de La Rochelle en ce qu'il a condamné Madame [Y] [W] [M] née [C] à retirer les plaques de métal dont les fixations empiètent sur le fond de Madame [U] [P] [X] qui sont situées au niveau du regard d'eau pluviale et ce dans un délai de trois mois à compter de la signification de la présente décision et, passé ce délai, sous astreinte de 30 € par jour de retard.

A cet égard constater que Madame [U] [P] [X] demande à la Cour de dire que seule la partie de plaque qui se trouve au droit du regard sis sur le fonds de Madame [Y] [W] [M] née [C] soit retirée, pour laisser un espace suffisant lui permettant d'accéder audit regard d'eau pluviale et ce dans un délai de trois mois à compter de la signification de l'arrêt à intervenir, passé ce délai, sous astreinte de 30 € par jour de retard.

Confirmer le jugement prononcé le 28 juin 2022 par le tribunal judiciaire de La Rochelle en ce qu'il a jugé que Madame [Y] [W] [M] née [C] s'est rendu coupable de troubles anormaux du voisinage.

Réformer le jugement dont appel en ce qu'il a limité les dommages et intérêts de ce chef à la somme de 3500 €.

Statuant à nouveau condamner Madame [Y] [W] [M] née [C] à verser à Madame [U] [P] [X] la somme de 60 000 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait des troubles anormaux du voisinage.

Confirmer le jugement prononcé le 28 juin 2022 par le Tribunal Judiciaire de La Rochelle en ce qu'il a condamné Madame [Y] [W] [M] née [C] à verser à Madame [U] [P] [X] la somme de 3500 € en application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Condamner Madame [Y] [W] [M] née [C] à régler à Madame [U] [P] [X] la somme de 5000 € et au coût des procès-verbaux de constat du 30 mai 2018 soit 439,53 €, et du 17 avril 2023 soit 381,20 € par application de l'article 700 du Code de Procédure Civile, au titre des frais irrépétibles d'appel.

Condamner Madame [Y] [W] [M] née [C] aux entiers dépens, de première instance et d'appel par application de l'article 699 du Code de Procédure Civile'.

Elle a maintenu que :

- le portail empiétait sur son fonds antérieurement à son déplacement ;

- les plaques soudées entre elles et en partie fixées sur son fonds, ne permettaient pas d'accéder au regard commun ;

- le comportement de l'appelante, caractérisé par de nombreuses attestations, était constitutif d'un trouble anormal du voisinage, dont elle était fondée à demander réparation.

L'ordonnance de clôture est du 4 avril 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

SUR LE PORTAIL

L'article 544 du code civil dispose que : 'La propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu'on n'en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements' et l'article 545 que : 'Nul ne peut être contraint de céder sa propriété, si ce n'est pour cause d'utilité publique, et moyennant une juste et préalable indemnité'.

Maître [J] [F], huissier de justice associé à [Localité 8], a constaté le 30 mai 2018 sur la requête de [U] [P]-[X] que :

'A mon arrivée, je me positionne dans la [Adresse 10] à l'avant de l'immeuble de la requérante et je constate que la clôture qui délimite sa propriété se trouve à l'intérieur de ses limites dans la mesure où la borne ronde est complètement apparente.

(photos 1 et 2)

La clôture délimitant son fond est constituée d'un grillage rigide posé sur un petit muret en ciment.

A droite de ce grillage, se trouve le portail deux battants donnant sur la propriété de Madame [C].

Le battant de gauche est fixé dans un montant vertical qui empiète sur le muret précédemment décrit et vient toucher le grillage rigide de la requérante.

(photos 3, 4, 5, 6)'.

[K] [B], huissier de justice à [Localité 8], a fait le 17 novembre 2021 le constat suivant sur la requête de [U] [P]-[X] :

'REMARQUE PREALABLE : Toutes les constatations ont été effectuées depuis la voie publique et la propriété de ma requérante, sans jamais pénétrer sur la parcelle voisine. Pendant toute la durée du constat nous avons été observés fixement par une femme présente dans l'allée voisine. Cette personne n'a pas répondu à mes salutations, ni à aucune de mes questions. Madame [P]-[X] [U] m'a indiqué qu'il s'agit de sa voisine Madame [W] [M] [Y].

- On peut voir sur le cliché n ° 1 du procès-verbal de Maître [F] en date du 30 Mai 2018 qu'une borne se trouvait à l'angle Nord de la parcelle cadastrée section G n ° [Cadastre 4] (Madame [U] [P]-[X]).

- Aujourd'hui, un portail en métal peint en blanc est disposé à l'entrée de la parcelle cadastrée section G n °[Cadastre 3] (Madame [W] [M] [Y]) côté [Adresse 10].

- Même en grattant le sol côte rue à l'emplacement de la borne on ne trouve plus trace de celle-ci.

- En effet on ne voit que le béton dans lequel le pilier gauche du portail de Madame [W] [M] [Y] est fixé.

- Il y a un espace de seulement 1 cm entre le pilier droit du portail de ma requérante et le support gauche du portail de Madame [W] [M] [Y]'.

Il résulte de ces procès-verbaux, probants et non réfutés, que le pilier du portail situé à l'entrée du fonds de l'appelante été réalisé sur la borne matérialisant la limite des fonds et empiète dès lors sur le fonds voisin.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a constaté cet empiètement.

Il n'est pas contesté que l'appelante a procédé à l'enlèvement de la partie du portail qui empiétait sur le fonds voisin. Elle a produit une facture de travaux en date du 14 septembre 2022 de l'entreprise Moyé Métal, de :

' Démontage du portail.

Descellement du poteau.

Recoupe de la parti qui dépasse chez la voisine.

Remise en place et scellement de l'ensemble'.

Il sera ajouté au jugement en ce que cet empiètement a désormais cessé.

SUR LES PLAQUES

Les époux [I] [O] et [E] [R] ont vendu par acte du 26 mai 2007 à [U] [P]-[X] le bien immobilier cadastré section G n° [Cadastre 4].

Il a été stipulé en page 6 de cet acte que :

'CONSTITUTION DE SERVITUDES

Le vendeur déclare que les eaux usées et les eaux pluviales de l'immeuble vendu et des immeubles restant lui appartenir sont recueillies par des canalisations existantes passant sous les parcelles cadastrées n° [Cadastre 3] et [Cadastre 4] pour rejoindre la boite de raccordement des eaux usées et celles des eaux pluviales se trouvant en bordure de la parcelle [Cadastre 4].

Par conséquent, Mademoiselle [P]-[X], confère à titre de servitude réelle et perpétuelle au Vendeur, qui accepte, une servitude de canalisations pour les eaux de pluie et les eaux usées tel que cette canalisation existe actuellement :

Fonds dominants : commune de [Localité 6],

Section G, numéro [Cadastre 2],

[...]

Section G, numéro [Cadastre 3],

[...]

Fonds servant : commune de [Localité 6]

Section G, numéro [Cadastre 4],

[...]

Il est convenu entre les parties :

Que le propriétaire du fonds dominant n'aura accès sur le fonds servant qu'en cas d'absolue nécessité pour des travaux à réaliser sur les canalisations.

Qu'en cas de travaux de réparation ou remplacement de ces canalisations tous les frais, en ce compris ceux de remise en état du terrain du fonds servant seront partagés par parts égales entre eux entre les propriétaires du fonds dominant.

Qu'en cas de dégradation par le propriétaire du fonds servant des canalisations les frais de rénovation et de remise en état incomberont à ce dernier

[...]

Que les parcelles constituant le fonds dominant appartiennent à Monsieur et Ma dame [O] ainsi qu'il est indiqué dans l'effet relatif.

Que la parcelle constituant le fonds servant appartient à Mademoiselle [P]-[X] aux termes des présentes'.

L'emplacement de la boîte de raccordement précitée n'a pas été précisé sur les plans annexés à l'acte de vente.

Cet acte la situe 'en bordure de la parcelle [Cadastre 4]".

Maître [D] [H] a, sur la requête de l'appelante, fait le 27 septembre 2018 le constat suivant :

'Sur le retour perpendiculaire depuis l'angle du portail, je constate que Madame [M] a fait positionner une clôture en aluminium thermolaqué sur sa propriété depuis l'angle formé par la borne jusqu'à la jonction entre les deux bâtiments.

Cette clôture se situe le long d'un grillage rigide doublé de toiles plastique positionnées elles, sur la propriété « [P] ».

[...]

Ces deux premiers panneaux laqués sont fixés sur un cadre métallique avec des barres épaisses à mi-hauteur.

Le dernier segment n'est lui pas rigidifié par un cadre épais.

L'épaisseur de ce châssis est implantée sur la moitié arrière de la borne de géomètre'.

La photographie annexée en regard de cette dernière observation, prise du fonds de l'appelante, fait apparaître que le châssis précité, en qu'il est implanté sur la moitié arrière de la borne de géomètre, empiète sur le fonds de l'intimée.

Maître [J] [F] précitée a constaté le 30 mai 2018 que :

'L'extrémité droite de la façade de l'immeuble de la requérante se termine par un habillage en pierres, les pierres verticales délimitant sa propriété et le fond voisin.

(photo 7)

Là encore, la propriété de la requérante est matérialisée par un grillage rigide fixé dans des poteaux métalliques enfoncés dans le sol.

A l'arrière de ce grillage, se trouve sur la propriété [C] des plaques métalliques pleines qui elles aussi sont fixées dans le sol.

Je constate que les fixations de ces plaques empiètent de 5,3 cm sur la propriété de la requérante.

(photos 8,9, 10, 11, 13, 14)'.

Ces constats, qui se corroborent entre eux, établissent l'empiètement sur le fonds de l'intimé constaté par le premier juge.

Le jugement sera pour ces motifs confirmé en ce qu'il a ordonné à l'appelante de procéder sous astreinte à l'enlèvement des plaques.

Maître [K] [B] précité a constaté le 17 avril 2023 que l'appelante n'avait pas retiré ces plaques.

SUR LA DEMANDE DE DOMMAGES ET INTERETS

L'article 1240 du code civil dispose que : 'tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer'.

L'intimée soutient que le comportement de l'appelante est constitutif d'un tel trouble.

Elle a produit aux débats 13 attestations établies par des membres de sa famille, une collègue, des voisins et des relations. Ces attestations établissent que l'appelante profère régulièrement des insultes envers l'intimée et les personnes qu'elle reçoit.

[A] [Z] a ainsi déclaré que :

'J'ai pu constaté de nombreuses fois que la voisine, Mme [Y] [C], m'insultait quand j'entrais dans le jardin de Mlle [U] [P]

Lors de certains repas [U] [P] n'osait même pas ouvrir sa porte fenêtre de peur que ses invités se fassent insulter.

J'ai aussi entendu des nombreuses insultes envers [U] (salope, grosse pute, sale blonde....

Plusieurs fois pour éviter ces insultes je suis rentrée par la fenêtre du salon et non par la porte d'entrée'.

[S] [N] a quant à elle déclaré que :

'Je suis la voisine de Md [P] [X] j'ai assisté à des insultes du harcèlement j'ai moi même subit la violence verbale meme des violences corporelles par 2 fois depuis 10 ans

Md [C] nous fait vivre un harcèlement constant.

J'ai vu Md [P] [X] en larmes suite aux attaques incessante de notre voisine, elle surveille nos faits et gestes insulte nos visiteurs (Adultes et enfants)'.

Les autres attestations décrivent un même comportement de l'appelante.

Le maire de la commune [Localité 6] a dans un courrier en date du 1er février 2019 produit par l'intimée que :

'Je me permets de préciser que Mme [W] [M] née [C] [Y] a des différents avec l'ensemble de ses voisins depuis plusieurs années et que des procédures son en cours pour atteinte physique et verbale envers le voisinage. L'ensemble du dossier a été remis à la gendarmerie de [Localité 8] et que Mme le Procureur PAGENELLE Isabelle de La ROCHELLE en a été informer des agissements de Mme [W] [M] née [C] [Y]'.

[U] [P] [X] a déposé plainte le 27 juillet 2019 à l'encontre de sa voisine. Elle a notamment déclaré au gendarme qui l'entendait que :

'Ce jour je me présente à votre unité afin de porter plainte à l'encontre de ma voisine madame [M] [Y], suite à l'empoissonnement de mon chat.

Il s'agit de ma voisine dont nos jardins sont collés.

Je suis en partie en vacances le 27 juin 2019 vers 18 heures, et je suis de retour chez moi depuis le dimanche 21 juillet 2019.

Le lundi 22 juillet dans la journée, j'ai alors constaté la présence de graines de type mort aux rats dans mon jardin.

Ces dernières étaient situées sur le sol qui me sépare du jardin de ma voisine.

Je précise qu'à cet endroit ce n'est pas mitoyen mais de mon coté.

[...]

Mon, jardin est clos et les graines étaient posés de façon à ce qu'elles soient de mon côté.

[...]

Lors de votre venue, nous avons constaté ensemble qu'elle poussait les graines vers chez moi à l'aide d'un balai.

[...]

J'ai fait visiter mon chat par mon vétérinaire mardi 23 juillet qui lui a fait un test.

Ce dernier a révélé que mon chat avait absorbé des graines et était donc atteins.

[...]

Le vétérinaire m'a également fait un document attestant que mon chat présentait les symptômes d'une intoxication'.

Dans une attestation en date du 23 juillet 2019, le docteur vétérinaire [V] [L] exerçant [Localité 6] a notamment indiqué que :

'La propriétaire a trouvé dans sa propriété des grains de blé enrobés de couleur rouge et d'autres de couleurs bleue selon ses dires ; il s'agit fort probablement de souricides (anticoagulants) pour lesquels dans la majorité des cas, un traitement journalier à la vitamine K1 est suffisant pour une période de 7semaines en l'absence de connaissance de la ou des molécule(s) employée(s).

[...]

Le pronostic reste réservé

[...]

Le chat ne sera considéré guéri qu'à l'issue du traitement'.

Entendue le 9 août 2019 par les enquêteurs, l'appelante a notamment déclaré que : 'Je l'ai fait car j'étais envahie de souris et de mulots provenant de chez elle'.

L'agence immobilière Ingrid Crabouiller Patrimoine & Immobilier a évalué le bien de [U] [P]-[X]. Elle a a en dernière page de son estimation indiqué, en rouge, que :

'NB : l'agressivité reconnue de la voisine envers le voisinage représente une certaine moins value du bien non prise en compte pour cette estimation'.

Ces documents se corroborent entre eux s'agissant du comportement de l'appelante, agressive et très injurieuse envers notamment sa voisine.

Les 3 attestations produites par l'appelante, insuffisamment circonstanciées, n'établissent pas ce même comportement qu'elle impute à sa voisine.

Ce comportement d'[Y] [C] épouse [W] [M] est fautif. Il perdure.

Il est du fait de son intensité et de sa permanence à l'origine pour l'intimée d'un important préjudice moral qui sera réparé par la somme de 10.000 € à titre de dommages et intérêts.

Le jugement sera réformé de ce chef.

SUR LES DEPENS

La charge des dépens d'appel incombe à l'appelante.

SUR LES DEMANDES PRESENTEES SUR LE FONDEMENT DE L'ARTICLE 700 DU CODE DE PROCÉDURE CIVILE

Le premier juge a équitablement apprécié l'indemnité due sur ce fondement par l'appelante.

Il serait par ailleurs inéquitable et préjudiciable aux droits de l'intimée de laisser à sa charge les sommes exposées par elle et non comprises dans les dépens d'appel. Il sera pour ce motif fait droit à la demande formée de ce chef pour le montant ci-après précisé, en ce inclus le coût du procès-verbal de constat du 17 avril 2023.

PAR CES MOTIFS

statuant par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,

CONFIRME le jugement du 28 juin 2022 du tribunal judiciaire de La Rochelle sauf en ce qu'il :

'- CONDAMNE Madame [Y] [W] [M] née [C] à verser à Madame [U] [P] [X] la somme de TROIS MILLE EUROS (3000€) à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait des troubles anormaux du voisinage commis' ;

et statuant à nouveau de ce chef d'infirmation,

CONDAMNE [Y] [C] épouse [W] [M] à payer à [U] [P]-[X] la somme de 10.000 € à titre de dommages et intérêts ;

et y ajoutant,

CONSTATE que l'empiètement du portail a cessé ;

CONDAMNE [Y] [C] épouse [W] [M] aux dépens d'appel ;

CONDAMNE [Y] [C] épouse [W] [M] à payer en cause d'appel à [U] [P]-[X] la somme de 4.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Poitiers
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22/02083
Date de la décision : 02/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 08/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-02;22.02083 ?
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