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26/06/2024 | FRANCE | N°23/00667

France | France, Cour d'appel de Poitiers, 4ème chambre, 26 juin 2024, 23/00667


ARRET N°



N° RG 23/00667 - N° Portalis DBV5-V-B7H-GYIH









[U]



C/



[W]

[W]



















RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE POITIERS



4ème Chambre Civile



ARRÊT DU 26 JUIN 2024





Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/00667 - N° Portalis DBV5-V-B7H-GYIH



Décision déférée à la Cour : jugement du 04 jui

llet 2022 rendu par le tribunal judiciaire de NIORT.





APPELANTE :



Madame [P] [U]

née le [Date naissance 1] 1974 à [Localité 17] ([Localité 17])

[Adresse 6]

[Localité 5]





ayant pour avocat plaidant Me Christelle LEVELU de la SCP MONTAIGNE AVOCATS, avocat a...

ARRET N°

N° RG 23/00667 - N° Portalis DBV5-V-B7H-GYIH

[U]

C/

[W]

[W]

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE POITIERS

4ème Chambre Civile

ARRÊT DU 26 JUIN 2024

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/00667 - N° Portalis DBV5-V-B7H-GYIH

Décision déférée à la Cour : jugement du 04 juillet 2022 rendu par le tribunal judiciaire de NIORT.

APPELANTE :

Madame [P] [U]

née le [Date naissance 1] 1974 à [Localité 17] ([Localité 17])

[Adresse 6]

[Localité 5]

ayant pour avocat plaidant Me Christelle LEVELU de la SCP MONTAIGNE AVOCATS, avocat au barreau des DEUX-SEVRES

INTIMES :

Monsieur [M], [S], [F] [W]

né le [Date naissance 9] 1948 à [Localité 15] ([Localité 15])

[Adresse 11]

[Localité 13]

ayant pour avocat Me Henri-Noël GALLET de la SCP GALLET-ALLERIT-WAGNER, avocat au barreau de POITIERS

Madame [I] [L] [O] [X] [W] épouse [H]

née le [Date naissance 2] 1941 à [Localité 16]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 12]

ayant pour avocat postulant Me Marion LE LAIN de la SCP DROUINEAU 1927, avocat au barreau de POITIERS

ayant pour avocat plaidant Me Alexandre GASSE, avocat au barreau de NANCY

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 15 Mai 2024, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Denys BAILLARD, Président, qui a présenté son rapport

Madame Marie-Béatrice THIERCELIN, Conseillère

Madame Véronique PETEREAU, Conseillère

qui en ont délibéré

GREFFIER, lors des débats : Madame Diane MADRANGE,

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

**********************

EXPOSE DU LITIGE

Dans des conditions de régularité, de forme et de délai non discutées, Mme [U] a interjeté appel le 15 mars 2023 d'un jugement rendu le 4 juillet 2022 par le tribunal judiciaire de Niort qui a :

- rejeté sa demande tendant à voir condamner solidairement M. [W] et Mme [H] à lui payer la somme de 20.000 euros,

- rejeté sa demande tendant à voir constater le recel successoral commis par M. [W] et le condamner à restituer tous les fruits et revenus produits par les biens recelés,

- condamné Mme [U] à payer à M.[W] la somme de 13.499,44 euros qui portera intérêt au taux légal à compter du 5 juin 2020,

- rejeté la demande de M. [W] tendant à voir condamner Mme [U] à lui payer la somme de 1.500 euros à titre de dommages et intérêts,

- condamné Mme [P] [U] aux entiers dépens ainsi qu'à payer à M. [W] et à Mme [H] chacun la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure civile,

- Ordonné l'exécution provisoire.

L'appelante sollicite, aux termes de ses conclusions, auxquelles il convient de se référer pour les moyens de droit et de fait en application de l'article 455 du code de procédure civile, la réformation du jugement en ce qu'il a :

- rejeté sa demande tendant à voir condamner solidairement M. [W] et Mme [H] à lui payer la somme de 20.000 euros,

- rejeté sa demande tendant à voir constater le recel successoral commis par M. [W] et le condamner à restituer tous les fruits et revenus produits par les biens recelés,

- l'a condamnée à payer à M. [W] la somme de 13.499,44 euros qui portera intérêt au taux légal à compter du 5 juin 2020,

- l'a condamnée aux entiers dépens ainsi qu'à payer à M. [W] et à Mme [H] chacun la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure civile,

et statuant à nouveau de :

- dire et juger que Mme [W] et M.[W] ont bien été auteurs d'un abus de faiblesse à l'encontre de Mme [B] [W],

- dire et juger que cet abus de faiblesse est constitutif d'une faute, ayant entrainé un préjudice successoral pour Mme [U],

- condamner solidairement M. [W] et Mme [W] à verser à Mme [U] la somme de 20.000 euros au titre de son préjudice subi en raison de l'abus de faiblesse à l'encontre de Mme [B] [W],

- constater le recel successoral de M. [W] à l'encontre de Mme [U],

- condamner M. [W] à rendre tous les fruits et revenus produits par les biens recelés,

- condamner solidairement M. [W] et Mme [W] à la somme de 3.000 euros au titre de ses frais irrépétibles devant le Tribunal Judiciaire de Niort en application de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance.

Y ajoutant

- condamner solidairement M. et Mme [W] à la somme de 3.000 euros au titre de ses frais irrépétibles devant la Cour d'Appel en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

- les condamner solidairement aux entiers dépens d'appel.

Au soutien de ses prétentions, elle indique que la supputation du premier juge que Mme [B] [W], sa mère, ait pu vouloir se réconcilier avec sa s'ur, sans certitude puisqu'il utilise le conditionnel, et surtout sur la seule affirmation de M. [W] parce qu'il aurait des intérêts contraires à Mme [H] née [W] est erronée.

M. [W] et Mme [H] ont commis une faute et abusé de l'état de vulnérabilité de sa mère, atteinte d'un cancer et en soins palliatifs, pour lui faire signer un acte de succession dans lequel elle a signé un accord transactionnel pour renoncer à réintégrer les donations supérieures que Mme [H] a reçu de sa mère.

Les intimés avaient parfaitement connaissance de cette vulnérabilité qui en outre est confirmée par l'incohérence de l'acte.

Elle estime que l'abus de faiblesse n'a pas d'autre intérêt que celui de vouloir détourner ou de manipuler la succession de sa mère et donc cause un préjudice successoral évident aux héritiers dont sa fille.

Son préjudice est également moral et physique puisque depuis les faits elle est dans une dépression importante.

Les éléments permettant de caractériser la responsabilité délictuelle des intimés sont réunis et ils seront condamnés solidairement à lui verser la somme de 20.000 euros, en réparation de son préjudice.

Sur le recel, elle indique que M. [W] s'est approprié et a vendu des biens meubles dépendant de la succession et appartenant en propre à Mme [W].

Sur sa condamnation au paiement de la somme de 13.499,44 euros au titre de sommes trop perçues de l'IRCANTEC (pension de reversion du premier époux) elle considère que M. [W] ne rapporte pas la preuve du paiement de cette somme.

M. [W] sollicite de la cour de voir :

- dire et juger les conclusions de Mme [U] du 16 avril 2024 irrecevables,

- dire et juger Mme [U] irrecevable en ses réclamations au titre d'un prétendu recel successoral,

- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il l'a débouté de sa demande en dommages et intérêts et corriger l'erreur matérielle qui l'affecte au titre de la demande concernant l'IRCANTEC,

Y faisant droit :

- condamner Mme [U] à 5.000 euros à titre de dommages et intérêts,

Au titre du paiement par M. [W] à l'IRCANTEC, dire et juger que c'est la somme de 1.349,44 euros que Mme [U] doit lui payer au lieu de la somme de 13.499,44 euros reprise par le premier juge dans le dispositif de sa décision,

- condamner Mme [U] à une indemnité supplémentaire de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- la condamner aux entiers dépens.

Sur l'irrecevabilité des conclusions de l'appelante, il souligne qu'en application de l'article 910 du Code de Procédure Civile, l'intimé à un appel incident ou à un appel provoqué dispose, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, d'un délai de 3 mois à compter de la notification qui lui en est faite pour remettre ses conclusions au Greffe.

Au terme de ses conclusions signifiées le 18/08/2023, M. [W] a relevé appel incident en conséquence de quoi, Mme [U] devait impérativement conclure en réponse au plus tard le 18 novembre 2023.

Dès lors, les conclusions signifiées par Mme [U] le 15/04/2024 pour une clôture au 17 avril 2024 seront nécessairement déclarées irrecevables au terme des dispositions de l'article 910 susvisé.

Au fond il expose que Mme [B] [W] était à la date du 05/12/2014 en état de prendre la décision en toute conscience et en dépit de l'évolution de sa maladie de renoncer au rapport à succession des dons manuels faits par sa mère.

Elle a manifestement trouvé un apaisement dans le fait de renouer avec sa s'ur et de régler leur différend.

Si l'état de Mme [W] se dégradait, Mme [U] ne peut affirmer sans travestir la réalité qu'elle présentait le 5 décembre 2014 une absence totale d'autonomie et n'était pas en capacité physique et mentale de signer le protocole d'accord.

Son implication quotidienne rend inconcevable l'idée qu'il ait pu intervenir dans les affaires de sa femme dans un sens contraire aux intérêts de celle-ci et encore plus dans le sens des intérêts de sa belle-s'ur.

L'abus de faiblesse revendiqué par l'appelante est totalement imaginaire mais plus encore porte atteinte à la mémoire de son épouse et à lui également, raison de sa demande de réparation.

S'agissant du recel au décès de sa mère, il a été donné à Mme [U] l'opportunité de prendre tous les meubles et objets qui garnissaient le domicile, ce qu'elle a fait.

L'acte authentique de partage du 24/06/2015intègre dans l'actif de succession le mobilier appartenant en propre à Mme [W] pour une somme de 1.215 euros selon inventaire et prisée réalisés contradictoirement et validés par les parties.

En outre il était fondé à conserver les biens propres de sa défunte épouse se trouvant au domicile conjugal.

Si Mme [U] estimait pouvoir élever une contestation sur la mise en vente de certains biens ayant appartenu à sa mère, bien qu'ayant reçu dans le cadre du partage la contre-valeur de ces biens, elle avait largement la possibilité de se manifester puisque ces biens ont été chargés puis déchargés et déballés par son compagnon et encore communiqués à son attention par le fils de M. [W] ès qualité de commissaire-priseur.

La vente s'est opérée publiquement par un commissaire-priseur assermenté.

Mme [H] demande quant à elle à la cour de :

-juger irrecevables les conclusions récapitulatives signifiées par Mme [U] le 15 avril 2024 au même motif de tardivété,

-de confirmer en toutes ses dispositions le jugement critiqué sauf en ce qu'il a rejeté sa demande tendant à voir condamner Mme [U] à lui payer une somme de 1.500 euros à titre de dommages et interêts,

Statuant à nouveau,

- condamner Mme [U] à lui payer une somme de 1.500 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice physique, moral et psychologique subi,

- la condamner à lui payer une somme de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Elle soutient que sa soeur était parfaitement saine d'esprit, bien qu'en état de fatigue musculaire, lors de la signature du partage transactionnel intervenue le 5 décembre 2014, soit plus d'une vingtaine de jours avant son décès, intervenu le 30 décembre 2014.

Il n'est par établi qu'elle aurait été dans un état d'insanité d'esprit ou manipulé par sa s'ur, au moment de la signature de l'acte litigieux, ne lui permettant pas ainsi d'exprimer sa volonté.

Ce partage transactionnel a été signé par Mme [W] en parfaite connaissance des services rendus par Mme [H] à leur mère.

Les accusations portées à son encontre sont particulièrement graves et blessantes ; la présente procédure porte atteinte à sa santé et remet également en cause son intégrité, raison de sa demande dommages et intérêts.

Vu les dernières conclusions de l'appelante en date du 29 avril 2024 ;

vu les dernières conclusions des intimés en date du 30 avril 2024 ;

L'ordonnance de clôture a été rendue le 30 avril 2024.

SUR QUOI

Mme [W] [B], née le [Date naissance 10] 1945 a épousé en première noces M. [U] [A] [K], de cette union est née :

- [U] [P] le [Date naissance 7] 1974 à [Localité 17].

Le couple a divorcé le 14 août 1984.

Mme [W] s'est remariée le [Date mariage 3] 2003, avec M. [W] [M].

Aucun enfant n'est issu de cette union.

Concernant la succession de la mère de Mme [W] et de Mme [H], sa soeur, Mme[N] décédée le [Date décès 8] 2013, il est apparu l'existence de dons manuels qu'elles avaient reçus en juillet 2008 à savoir :

- 37.000 € pour Mme [W],

- 77.000 € pour Mme [H].

La question de la réintégration de 20.000 euros dans la succession à titre d'avance de part successorale a été l'objet d'échanges et de désaccords entre les deux soeurs.

Mme [W] a cependant signé le 5 décembre 2014 un acte de partage transactionnel avec sa s'ur, ne reprenant pas les donations et la somme de 20.000 euros.

C'est l'objet principal du litige outre le recel successoral de biens meubles reproché à M. [W].

Sur l'irrecevabilité des conclusions de l'appelante reçues par voie dématérialisée le 15 avril 2024

Par application de l'article 910 du code de procédure civile : ' L'intimé à un appel incident ou à un appel provoqué dispose, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, d'un délai de trois mois à compter de la notification qui lui en est faite pour remettre ses conclusions au greffe.'

L'article 910-4 dispose ' A peine d'irrecevabilité, relevée d'office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910, l'ensemble de leurs prétentions sur le fond. L'irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées des prétentions ultérieures.

Néanmoins, et sans préjudice de l'alinéa 2 de l'article 802, demeurent recevables, dans les limites des chefs du jugement critiqués, les prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses ou à faire juger les questions nées, postérieurement aux premières conclusions, de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.'

En l'espèce Mme [U] a déposé ses premières conclusions le 14 juin 2023.

M. [W] a déposé ses conclusions les 18 et 21 août 2023 qui contiennent un appel incident du chef du rejet de sa demande de condamnation de l'appelante à titre de dommages et intérêts pour le préjudice moral et physique résultant de la procédure engagée par elle.

Mme [H] a formé la même demande le 14 septembre 2023.

Suivant conclusions en date du 15 avril 2024, Mme [U] se borne à reprendre, en développant d'autres moyens de fait, les prétentions exposées dans ses premières conclusions des chefs critiqués dans la déclaration d'appel, sans répliquer sur l'appel incident et la demande formée par M. [W] et Mme [H] de réformation du chef les déboutant de leur demande en réparation.

Dans ces conditions la demande tendant à l'irrecevabilité de ces conclusions sera rejetée.

Sur le fond

Sur l'abus de faiblesse commis par M. [W] et Mme [H] au préjudice de Mme [W] et le préjudice en résultant pour l'appelante

Suivant l'article 1240 du code civil 'Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer'.

Il appartient à la vicime de rapporter la preuve de la faute et du lien de causalité entre celle-ci et le dommage établi.

En l'espèce Mme [U] soutient que M. [W] et Mme [H] ont commis une faute en abusant de la faiblesse de sa mère afin d'obtenir sa signature sur un acte de succession.

Elle ne fonde pas sa demande sur une altération des capacités de sa mère à consentir à l'acte de partage le 5 décembre 2014 et par conséquent sa nullité.

Mme [W], atteinte d'un cancer depuis 2013, a été hospitalisée à domicile à compter du 26 novembre 2014 jusqu'à son décès le 30 décembre de la même année.

Les pièces communiquées, par l'appelante comme les intimés, démontrent qu'elle était sur cette période dans un état de souffrance en lien avec sa maladie et capable d'évaluer le dégré de sa souffrance (pièce 14 : appelante).

Elle était aussi jusqu'à quelque jours avant son décès consciente et en relation avec ses proches comme cela est noté dans le document 'transmissions ciblées', communiqué in extenso sur la durée d'hospitalisation, par M. [W] (pièce 5 de l'intimé) ; elle est y est décrite ainsi à certaines périodes et postérieurement au 5 décembre comme détendue, ayant de l'humour, craignant de 'fermer les yeux' ou se réjouissant du réveillon en famille le 24 décembre.

Il convient dès lors de déduire des éléments précédents que si Mme [W] était indéniablement dans un état médical la fragilisant, sans anéantir l'expression de sa volonté, il appartient uniquement à la cour de déterminer, si, au moment de l'acte litigieux du 5 décembre 2014, son époux ou sa fille ont, dans un premier temps, commis une faute, dans ce contexte, et, dans un second temps, de caractériser et d'évaluer, si la faute est établie, le dommage en résultant pour Mme [U].

Sur la faute, Mme [U] estime, à tort, que la signature de sa mère, déformée, et la mention d'un lieu incorrect sur l'acte de partage ([Localité 17] et non le lieu de signature) caractériseraient une faute des intimés alors qu'elle se place ici dans le champ de la seule analyse des capacités de la signataire et non de la preuve de la faute de son mari ou de sa soeur.

De même si Mme [U] indique dans ses conclusions que sa mère s'était 'battue' (pièce 19 : mail du 10 juin 2013) pour solliciter du notaire la réintégration de 20.000 euros dans la succession de sa grand-mère et que celle-ci dans un courrier du 12 juillet 2008 (pièce 18 ) avait prévu que Mme [H] devait rapporter cette somme, ces circonstances de fait, qui ne présument en rien de la volonté de Mme [W] dans les circonstances particulières de fin de vie qu'elle connaissait, ne permettent pas plus de rapporter la preuve d'un acte fautif des intimés au moment de la signature par elle de l'acte du 5 décembre 2014 et l'ayant déterminé à cela.

Outre ce défaut probatoire de l'existence d'une faute, la cour relève que, comme l'indique M. [W], Mme [U] ne rapporte pas plus la preuve de l'intérêt pour lui de favoriser sa belle soeur dans l'héritage de la mère de son épouse en acceptant qu'elle renonce à ce retour.

Enfin l'examen attentif de la pièce 5 de l'intimé susvisée démontre, a contrario d'une volonté de porter atteinte aux intérêts de son épouse, un engagement affectif et concret auprès d'elle jusqu'à sa mort.

La faute supposée des intimés à l'origine de l'acte de partage n'étant pas établie il n'y a pas lieu par conséquent d'examiner ni le lien de causalité entre le dommage dont Mme [U] se dit victime ni l'existence de celui-ci.

La première décision déboutant Mme [U] de sa demande de ce chef sera par conséquent confirmée.

Sur le recel des meubles dépendant de la succession de Mme [W]

Mme [U] soutient que des meubles composant la succession de sa mère ont été distraits par M. [W], dont notamment un trumeau, acte constituant un recel au sens de l'article 778 du code civil.

Elle produit à cet effet des photos d'objets, dont une photo de tapisserie, ainsi qu'une attestation d'un tiers, ex compagnon, qui précise n'avoir pas reçu d'objets de M. [W] mais l'avoir aidé à transporter ceux-ci.

M. [W] rappelle qu'il bénéficiait au titre de son contrat de mariage de l'usufruit du mobilier dépendant de la succession et qu'il était fondé à détenir les biens propres de celle-ci et à exercer sur eux son droit d'usufruit.

Il précise en outre que certains biens visés par l'appelante, dont la tapisserie des Gobelins ou le trumeau, pour étayer le recel sont des biens propres comme en témoigne l'acte notarié établi par les époux le 6 août 2003 (pièce 1 de l'appelante).

Il explique également que s'agissant des meubles dont personne ne voulait, il a bénéficié de l'aide de M. [R], ex-compagnon de Mme [U], pour les déposer à [Localité 14].

Si des meubles restants ont bien été vendus c'est en enchères publiques ce que Mme [U] n'ignorait pas.

Il résulte des pièces au dossier que l'appelante se borne à affirmer que M. [W] aurait détourné certains meubles, proprieté de sa mère, sans pour autant rapporter la preuve de leur caractère propre mais en évoquant en outre des objets dont la propriété de M. [W] est au contraire avérée.

Au surplus il résulte des pièces qu'elle était informée que certains meubles - indéterminés quant à leur propriété - on été transportés par son ex- compagnon puis vendus sans qu'elle s'y oppose.

Mme [U] ne rapporte pas plus devant la cour non seulement la preuve de la distraction par M. [W] de biens propres dépendant de la succession de sa mère et moins encore la mauvaise foi et l'intention de ce dernier de frustrer les héritiers de son épouse.

Sur la condamnation de Mme [U] au paiement de sa part au titre du remboursement de l'IRCANTEC

M. [W] justifie avoir bien reçu de cet organisme un courrier lui demandant de régler la somme de 1.799,26 euros correspondant à un trop perçu par son épouse au titre de la pension de réversion de son premier mari.

Cette somme a été réclamée après la clôture des opérations de partage le 14 janvier 2016 et M. [W] a payé cette somme le 10 mars 2016 par chèque n°0122445.

Cette somme a été intégrée dans le passif de la succession et a été valablement partagée selon les droits des parties (3/4 pour Mme [U] soit 1.349,44) ce que l'appelante ne conteste pas.

Le jugement déféré a fait droit à la demande en mentionnant par erreur une somme incorrecte.

Le jugement sera réformé uniquement en ce sens, le principe de la créance étant justifié.

Sur la demande indemnitaire des intimés

M. [W] justifie par la production d'un compte-rendu de consultation établi le 26 août 2017 par le Dr [C] [V] présenter un haut risque cardio vasculaire et une nécessité de calme et d'apaisement justifiant la prescription d'anxiolytique à petites doses.

Le contexte familial conflictuel et la dégradation des relations entre Mme [U] et son beau père comme sa tante depuis le décès de Mme [W] sont indéniables.

Néanmoins M. [W] ne produit pas d'éléments plus récents permettant de retenir que l'appelante, y compris pour contester devant la cour les chefs du premier jugement, a poursuivi son action dans l'intention de lui nuire alors qu'elle était légitimement recevable à faire réexaminer les conditions de règlement de la succession de sa mère.

Mme [H], sauf à se dire affecter par la situation, vraisemblement à raison, ne produit pas plus d'éléments pour caractériser précisément son préjudice ni de comportement de l'appelante, hormis ses moyens pour soutenir ses prétentions devant la cour, caractérisant une intention de nuire.

Le premier jugement sera également confirmé en ce qu'il les a déboutés de leurs demandes de ce chef.

Sur les demandes accessoires

La condamnation de Mme [U] à verser à M. [W] et à Mme [H] la somme de 2.000 euros chacun au titre de l'article 700 du code de procédure civile en première instance sera confirmée.

Mme [U], succombant à titre principal, sera en outre condamée aux dépens ainsi qu'à verser 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile à M. [W] ainsi qu'à Mme [H] au titre de la présente instance.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Statuant dans les limites de l'appel,

Déclare recevable les conclusions de Mme [U] [P] en date du 14 avril 2024,

Au fond,

Confirme la décision déférée,

Sauf en ce qu'elle a condamné Mme [U] [P] à payer à M. [W] [M] la somme de 13.499,44 euros qui portera intérêts au taux légal à compter du 5 juin 2020,

Statuant à nouveau de ce chef,

Condamne Mme [U] [P] à payer à M. [W] [M] la somme de 1.349,44 euros qui portera intérêts au taux légal à compter du 5 juin 2020,

Y ajoutant,

Condamne Mme [U] [P] aux dépens de l'appel,

Condamne Mme [U] [P] à verser à Mme [H] [I] la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne Mme [U] [P] à verser à M. [W] [M] la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par Denys BAILLARD, Président et par Diane MADRANGE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

D. MADRANGE D. BAILLARD


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Poitiers
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23/00667
Date de la décision : 26/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-26;23.00667 ?
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