La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/06/2024 | FRANCE | N°23/01780

France | France, Cour d'appel de Poitiers, 2ème chambre, 25 juin 2024, 23/01780


ARRET N°226

CL/KP

N° RG 23/01780 - N° Portalis DBV5-V-B7H-G3H3













[T]



C/



SARL TRANSAC PMEexerçant sous l'enseigne PROJET COMMERCE



































RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE POITIERS



2ème Chambre Civile



ARRÊT DU 25 JUIN 2024





Numéro d'inscription au réperto

ire général : N° RG 23/01780 - N° Portalis DBV5-V-B7H-G3H3



Décision déférée à la Cour : jugement du 03 mars 2023 rendu par le Tribunal de Commerce de LA ROCHELLE.





APPELANT :



Monsieur [U] [T]

né le 21 Février 1961 à [Localité 7] (17)

[Adresse 4]

[Localité 3]



Ayant pour avocat plaidant M...

ARRET N°226

CL/KP

N° RG 23/01780 - N° Portalis DBV5-V-B7H-G3H3

[T]

C/

SARL TRANSAC PMEexerçant sous l'enseigne PROJET COMMERCE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE POITIERS

2ème Chambre Civile

ARRÊT DU 25 JUIN 2024

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/01780 - N° Portalis DBV5-V-B7H-G3H3

Décision déférée à la Cour : jugement du 03 mars 2023 rendu par le Tribunal de Commerce de LA ROCHELLE.

APPELANT :

Monsieur [U] [T]

né le 21 Février 1961 à [Localité 7] (17)

[Adresse 4]

[Localité 3]

Ayant pour avocat plaidant Me Vincent LAGRAVE de la SCP LAGRAVE - JOUTEUX, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT

INTIMEE :

SARL TRANSAC PMEexerçant sous l'enseigne PROJET COMMERCE Représentée en la personne de son gérant domicilié ès qualités au siège social sis.

[Adresse 1]

[Localité 2]

Ayant pour avocat postulant Me Henri-noël GALLET de la SCP GALLET-ALLERIT-WAGNER, avocat au barreau de POITIERS

Ayant pour avocat plaidant Me Philippe SCHMITT de la SELARL SCHMITT ROUX-NOEL ANDURAND, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT.

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 06 Mai 2024, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Claude PASCOT, Président

Monsieur Fabrice VETU, Conseiller

Monsieur Cédric LECLER, Conseiller

qui en ont délibéré

GREFFIER, lors des débats : Madame Véronique DEDIEU,

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- Signé par Monsieur Claude PASCOT, Président et par Madame Véronique DEDIEU, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*****

Le 10 février 2017, Monsieur [U] [T], se portant fort et solidaire pour toute personne morale ou physique qui se substituerait, et agissant en qualité d'acquéreur éventuel, a donné à la société à responsabilité limitée Transac Pme (la société Transac) un mandat non exclusif de recherche en vue de l'achat d'un fonds de commerce de brasserie/restaurant.

Le 17 février 2017, la société par action simplifiée Bpa-Bha Compagnie (la société Bpa-Bha) a confié à la société Transac un mandat non exclusif n° 9620, concernant la vente d'un fonds de commerce de bar, brasserie, restaurant, traiteur et glacier dénommé '[6]', exploité dans la commune d'[Localité 5], au prix net vendeur de 275 000 euros, correspondant à la valeur des immobilisations corporelles et incorporelles figurant au bilan de l'entreprise, hors stock ; les honoraires d'intermédiaire à la charge de l'acquéreur étant fixés à la somme de 27 000 euros hors taxes (ht).

La société Bpa-Bha avait été placée en redressement judiciaire par jugement du tribunal de commerce de La Rochelle en date du 31 janvier 2017, la Scp Delphine Raymond étant désignée en qualité de mandataire judiciaire.

Par ailleurs, selon ordonnance en date du 28 juin 2016, le juge des référés du tribunal de grande instance de La Rochelle avait constaté la résiliation de plein droit du bail commercial à la date du 11 mars 2016, en suspendant toutefois les effets de la clause résolutoire et en condamnant la société Bpa-Bha à payer une indemnité provisionnelle de 19 463,55 euros dans un délai de 4 mois à compter de la signification de la décision.

Ce délai n'avait pas été respecté.

Selon acte en date du 24 février 2017, préparé et rédigé par la société Transac, la société à responsabilité limitée L'Ile aux Marais, représentée par ses co-gérants Monsieur [U] [T] et Madame [L] [I] (les époux [T]), a formulé, sous diverses conditions suspensives, une offre d'achat du fonds de commerce 'Le Bistrot de Béné'pour une somme de 250 000 euros net vendeur, hors frais et honoraires.

Le 24 février 2017, les époux [T] ont en outre signé une reconnaissance des honoraires et se sont engagés à payer à la société Transac la somme de 12 500 euros ht soit 15 000 euros ttc à titre d'honoraires de négociation au jour de la levée de la dernière des conditions suspensives.

Le 2 mars 2017, Monsieur [M] [E] et Madame [Z] [X], agissant en qualité de représentants légaux de la société Bpa-Bha, ont accepté l'offre d'achat.

Le 11 mars 2017, et en exécution de cet accord, un compromis de cession de fonds de commerce a été signé entre la société Bpa-Bha et la société L'Ile aux Marais, hors la présence du mandataire judiciaire, et sans autorisation préalable du juge-commissaire, au prix de 250 000 euros se décomposant comme suit:

- 199 655 euros pour les éléments incorporels du fonds (enseigne, nom commercial, clientèle, achalandage et droit au bail);

- 50 345 euros pour le mobilier, les agencements et le matériel.

Les parties ont convenu de diverses conditions suspensives, qui devaient être réalisées à la date du 30 avril 2017 au plus tard, et notamment :

- l'obtention d'un prêt par l'acheteur ;

- l'autorisation de la cession par le tribunal de commerce de La Rochelle.

Le 17 avril 2017, les époux [T] ont déposé devant le tribunal de commerce de La Rochelle une offre de reprise du fonds de commerce de la société Bpa-Bha, rédigée par la société Transac, ensuite complétée le 18 mai 2017 par le cabinet d'avocat Acteo.

Par jugement en date du 23 mai 2017, le tribunal de commerce de La Rochelle a :

- autorisé la cession des éléments corporels et incorporels du fonds de commerce au profit de la société l'Ile aux Marais, au prix de 250 000 euros, ventilé comme suit :

- 101 000 euros au titre des éléments incorporels ;

- 101 000 euros pour les éléments corporels ;

- 5000 euros pour le stock ;

- désigné la Scp Delphine Raymond en qualité de mandataire liquidateur ;

- donné acte à Madame [X] (propriétaire des murs) de son accord sur l'indemnité transactionnelle de 60 000 euros en contrepartie de sa renonciation à se prévaloir de la résiliation du bail, somme qui serait versée par le liquidateur le jour de la cession, en sus des loyers et charges dues.

Par acte du 3 avril 2018, intervenu hors la présence de la société Transac, la société Bpa -Bha et la société l'Ile aux Marais ont réitéré la vente du fonds de commerce.

Le 28 septembre 2018, la société Transac a adressé à la société L'Ile aux Marais une mise en demeure de payer la somme de 15.000 € à titre d'indemnité compensatrice. Celle-ci étant demeurée infructueuse, la société Transac l'a attraite devant le tribunal de commerce de La Rochelle aux fins de la voir condamner à lui verser la somme précitée de 15.000€.

Par jugement en date du 5 juin 2020, le tribunal de commerce de La Rochelle a :

- dit la société Transac recevable et partiellement bien fondée en ses demandes, fins et conclusions ;

- débouté la société l'Ile aux Marais de l'ensemble de ses demandes reconventionnelles ;

- condamné la société l'Ile aux Marais à payer à la société Transac la somme de 15 000 euros au titre du paiement de la clause pénale liant les parties avec intérêt à compter de la mise en demeure du 28 septembre 2018.

Le 17 août 2020, la société l'Ile aux Marais a relevé appel de ce jugement en intimant la société Transac.

Par arrêt avant dire droit en date du 2 novembre 2021, la cour d'appel de Poitiers a :

- ordonné la réouverture des débats et la révocation de l'ordonnance de clôture ;

- invité les parties à conclure sur la recevabilité de l'action en paiement engagée par la société Transac à l'encontre de la société l'Ile aux Marais sur le fondement de la clause pénale stipulée au mandat non-exclusif de recherche n° 9609 du 10 février 2017, dès lors que celui-ci n'avait été signé que par Monsieur [U] [T], mandant ;

- ordonné le renvoi de l'affaire devant le conseiller de la mise en état, pour conclusions des parties sur ce moyen soulevé d'office en cours de délibéré.

Par arrêt contradictoire en date du 20 juin 2023, la cour de céans a :

- infirmé le jugement susdit en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il avait débouté la société à responsabilité limitée L'Ile aux Marais de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive ;

- confirmé le jugement déféré de ce seul chef ;

Statuant à nouveau dans cette limite et y ajoutant :

-déclaré irrecevable la demande de la société Transac à l'encontre de la société à responsabilité limitée L'Ile aux Marais ;

- rappelé que le présent arrêt vaudrait titre de restitution des sommes allouées en exécution du jugement déféré ;

- débouté la demande de la société Transac de sa demande au titre des frais des frais irrépétibles de première instance et d'appel ;

- condamné la société Transac aux entiers dépens de première instance et d'appel et à payer à la société à responsabilité limitée L'Ile aux Marais la somme de 4000 euros des frais irrépétibles de première instance et d'appel.

* * * * *

Le 2 février 2022, la société Transac a assigné Monsieur [T] devant le tribunal de commerce de La Rochelle.

En dernier lieu, la société Transac a demandé de :

In limine litis,

- constater la compétence du tribunal de commerce pour connaître du présent litige ;

- constater la recevabilité de la présente action qu'elle avait engagée à l'encontre de Monsieur [T] ;

à titre principal,

- la recevoir en toutes ses demandes ;

- condamner Monsieur [T] à lui payer la somme de 15'000 € au titre du paiement de la clause pénale liant les parties avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure en date du 28 septembre 2018 ;

à titre subsidiaire,

- prononcer le sursis à statuer dans l'attente de la décision à intervenir par la cour d'appel de céans sous le RG 20/0 1540 ;

- condamner Monsieur [T] à lui verser la somme de 3000 € au titre des frais irrépétibles.

En dernier lieu, Monsieur [T] a demandé :

à titre principal,

- que le tribunal se déclarât incompétent pour connaître de ce litige et de renvoyer les parties à mieux se pourvoir devant le tribunal judiciaire de La Rochelle ;

- de déclarer irrecevable l'action pour défaut de se contredire au détriment d'autrui ;

à titre subsidiaire,

- débouter la société Transac de l'ensemble de ses demandes ;

en tout état de cause et reconventionnellement,

- condamner la société Transac à lui payer la somme de 4000 € à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive ;

- condamner la société Transac à lui payer la somme de 4000 € au titre des frais irrépétibles.

Par jugement en date du 3 mars 2023, le tribunal de commerce de La Rochelle :

- s'est déclaré compétent pour connaître de ce litige entre les deux parties ;

- a dit recevable l'action de la société Transac à l'encontre de Monsieur [T] ;

- a prononcé le sursis à statuer dans l'attente de la décision à intervenir par la cour d'appel de Poitiers sous le RG 20/1540 ;

- a débouté Monsieur [T] de l'ensemble de ses demandes ;

- a dit qu'il ne serait pas fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- a réservé les dépens.

Le 24 juillet 2023, Monsieur [T] a relevé appel de ce jugement, en intimant la société Transac, mais en limitant son appel en ce que le tribunal s'était déclaré compétent pour connaître du litige, et avait déclaré recevable l'action de la société Transac à son encontre.

Le 8 décembre 2023, Monsieur [T] a demandé d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré et statuant à nouveau :

A titre principal, de :

- réformer la décision déférée en ce qu'elle avait reconnu la compétence matérielle du tribunal de commerce pour connaître de l'action mise en 'uvre à son encontre ;

- déclarer le tribunal de commerce de la Rochelle incompétent pour connaître du litige l'opposant à la société Transac, et renvoyer les parties à mieux se pourvoir devant le tribunal judiciaire de la Rochelle ;

A titre subsidiaire, de :

- réformer le jugement déféré qui avait déclaré recevable l'action dans l'attente de l'arrêt de la cour de céans ;

- déclarer irrecevable l'action en paiement dirigée à son encontre au titre de la violation du principe de l'interdiction de se contredire au détriment d'autrui;

En tout état de cause, et reconventionnellement,

- condamner la société Transac à lui payer la somme de 4000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

- condamner la société Transac à lui payer la somme de 4000 € au titre des frais irrépétibles des deux instances.

Le 31 octobre 2023, la société Transac a demandé de :

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il s'était déclaré compétent pour connaître du litige ;

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il avait déclaré recevable l'action qu'elle avait engagé à l'encontre de Monsieur [T] ;

- par conséquent, dire et juger Monsieur [T] tant irrecevable que non fondé en toutes ses demandes fins et conclusions avec toutes conséquences de droit ;

- la recevoir en toutes ses demandes ;

- condamner Monsieur [T] à lui payer la somme de 15 000€ au titre du paiement de la clause pénale liant les parties avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure en date du 28 septembre 2018 ;

En tout état de cause,

- condamner Monsieur [T] à lui verser la somme de 5000 € au titre des frais irrépétibles d'appel ;

- le condamner également aux entiers dépens qui comprendraient nécessairement le coût de la procédure de première instance.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie expressément aux dernières conclusions précitées pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 8 avril 2024.

Le 19 avril 2024, la société Transac a produit de nouvelles écritures.

Par message sur le réseau privé virtuel avocat en date du 7 mai 2023, la cour a invité les parties à présenter pour le 22 mai 2024 au plus tard leurs observations sur le moyen relevé d'office, tenant à l'irrecevabilité devant la cour de la demande de la société Transac de condamnation de Monsieur [T] au titre de la clause pénale insérée au mandat de vente du 10 février 2017, par suite de l'absence de pouvoir d'évocation de la cour, faute pour la société Transac, appelante incidente, d'avoir sollicité l'autorisation de la première présidente de la cour de céans de relever appel du chef du jugement ayant sursis à statuer sur cette même demande qu'elle avait présentée au premier juge, et ce par application de l'article 380 du code de procédure civile.

Le 14 mai 2024, Monsieur [T] a déposé une note en délibéré.

Le 21 mai 2024, la société Transac a déposé une note en délibéré.

MOTIVATION :

Sur la recevabilité des écritures de l'intimée déposées après l'ordonnance de clôture :

Selon l'article 802 alinéa 1 du code de procédure civile, après l'ordonnance de clôture, aucune conclusion ne peut être déposée ni aucune pièce produite aux débats, à peine d'irrecevabilité prononcée d'office.

Selon l'article 803 alinéa 1 du code de procédure civile, l'ordonnance de clôture ne peut être révoquée que s'il se révèle une cause grave depuis qu'elle a été rendue.

Le 1er août 2023, Monsieur [T], appelant, a déposé ses premières écritures et ses pièces n°1 à 7.

Le 31 octobre 2023, la société Transac, intimée, a déposé ses premières écritures et pièces.

Le 22 novembre 2023, le greffe a transmis aux parties le calendrier de procédure, fixant la clôture au 8 avril 2024 et l'audience de plaidoirie au 6 mai suivant.

Le 8 décembre 2023, Monsieur [T] a déposé ses deuxièmes écritures, ainsi que de nouvelles pièces n°8 à 11.

Le 8 avril 2024, conformément au calendrier de procédure transmis aux parties, l'ordonnance de clôture a été rendue.

Le 19 avril 2024, la société Transac a déposé de nouvelles écritures, en indiquant que celles-ci étaient identiques aux précédentes, et visaient à intégrer les numéros des pièces dans le corps des conclusions pour plus de lisibilité.

Mais alors que le calendrier de procédure n'a fait l'objet d'aucune observation, ni notamment de demande de report de l'ordonnance de clôture avant son échéance, il appartenait aux parties d'accomplir les diligences procédurales leur incombant conformément à celui-ci.

Il appartenait ainsi notamment à l'appelant de produire dans ce délai ses écritures selon la présentation qu'il estimait la plus appropriée.

Surtout, il ne résulte pas de ces éléments la démonstration d'une quelconque cause grave depuis que l'ordonnance de clôture a été rendue, de nature à en justifier la révocation.

De plus, il sera observé que la révocation de l'ordonnance de clôture n'a même pas été demandée par l'intimée qui a déposé de nouvelles écritures après sa date.

Il conviendra donc de déclarer irrecevables les écritures déposées par la société Transac le 19 avril 2024.

Sur la compétence du tribunal de commerce :

Selon l'article L. 721-3 du code de commerce,

Les tribunaux de commerce connaissent :

1° des contestations relatives aux engagements entre commerçants, entre artisans, entre établissements de crédit, entre sociétés de financement ou entre eux

2° de celles relative aux sociétés commerciales ;

3° de celles relatives aux actes de commerce entre toutes personnes.

Toutefois, les parties peuvent, au moment où elles contractent, convenir de soumettre à l'arbitrage les contestations ci-dessus énumérées. Par exception, lorsque le cautionnement d'une dette commerciale n'a pas été souscrit dans le cadre de l'activité professionnelle de la caution, la clause compromissoire ne peut être opposée à celle-ci.

Prive sa décision de base légale au regard de ce texte, la cour d'appel qui, pour statuer comme elle l'a fait, retient que rien ne permet d'établir l'intervention de deux personnes physiques en qualité de commerçants, dans leur rapport avec une société, ou leur intervention en qualité de dirigeant d'une autre société, lors de la souscription et de l'exécution du cautionnement litigieux, sans rechercher si les faits allégués ne se rattachaient pas par un lien direct à la gestion de sociétés commerciales, peu important que ces personnes physiques n'aient pas eu la qualité de commerçant non plus que celle de dirigeant de droit de ces sociétés (Cass. com, 27 octobre 2009, n°08-20.384, Bull. IV, n°138).

Viole ce texte la cour d'appel qui, statuant sur contredit, pour écarter la compétence du tribunal de commerce, retient que le gérant d'une société à responsabilité limitée, n'a pas la qualité de commerçant et que ses manquements ne se rattachent pas à la gestion de la société par un lien direct, alors que les manquements commis par le gérant d'une société commerciale à l'occasion de l'exécution d'un contrat se rattachent par un lien direct à la gestion de celle-ci et que la circonstance qu'il ne soit pas personnellement commerçant ou qu'il n'ait pas accompli d'acte de commerce est indifférente (Cass. com., 14 novembre 2018, n°16-26.115, publié).

Selon l'article L. 121-1 du même code,

Sont commerçants ceux qui exercent des actes de commerce et en font leur profession habituelle.

Est inopposable au défendeur non commerçant une clause attributive de compétence au tribunal de commerce (Cass. com., 10 juin 1997, n°94-12.316, Bull. IV, n°185).

Pour soulever l'incompétence de la juridiction commerciale, Monsieur [T] soutient n'être ni commerçant, ni inscrit en tant que tel au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers.

Il avance que la circonstance qu'il soit gérant d'une société à responsabilité limitée ne lui confère pas plus cette qualité.

Et si le mandat de recherche litigieux avait prévu une clause attributive de juridiction au tribunal de commerce de La Rochelle, Monsieur [T] soutient que cette clause lui est inopposable en sa qualité de non-commerçant.

Il dénie encore que sa signature de ce mandat de recherche puisse constituer de son chef un acte de commerce, ni que, en sa qualité de cuisinier de formation, il ferait profession habituelle de signer des mandats de recherches de fonds de commerce.

* * * * *

Le mandat de recherche non exclusif n°9609 en date du 10 février 2017 a été passé entre Monsieur [U] [T], en sa qualité de mandant, et la société Transac, en sa qualité de mandataire, le premier confiant à la seconde un mandat non exclusif de rechercher pour son compte un fonds de commerce de brasserie restaurant à l'achat, pour une durée irrévocable de 3 mois, qui passé ce délai, se poursuivrait pour une durée de 12 mois sauf révocation par l'une ou l'autre des parties moyennant un préavis de 15 jours par lettre recommandée avec accusé de réception.

Il y est précisé que Monsieur [U] [T] se porte fort et solidaire, pour tous ascendants, descendants ou alliés ainsi que pour toutes personnes morales ou physiques qui se substitueraient ou auxquelles s'associeraient, même minoritairement, et agissant en qualité d'acquéreur éventuel, dûment habilité à signer ce mandat et prêt à en justifier.

Le 17 février 2017, la société Bpa-Bha a confié à la société Transac un mandat non exclusif n° 9620, concernant la vente d'un fonds de commerce de bar, brasserie, restaurant, traiteur et glacier dénommé '[6]', exploité dans la commune d'[Localité 5], au prix net vendeur de 275 000 euros, correspondant à la valeur des immobilisations corporelles et incorporelles figurant au bilan de l'entreprise, hors stock ; les honoraires d'intermédiaire à la charge de l'acquéreur étant fixés à la somme de 27 000 euros hors taxes (ht).

Selon acte en date du 24 février 2017, préparé et rédigé par la société Transac, la société L'Ile aux Marais, représentée par ses co-gérants Monsieur [U] [T] et Madame [L] [I], a formulé, sous diverses conditions suspensives, une offre d'achat du fonds de commerce 'Le Bistrot de Béné'pour une somme de 250 000 euros net vendeur, hors frais et honoraires.

Et cette offre d'achat a été acceptée par les gérants de la société Bpa-Bha, en procédure collective.

Le 11 mars 2017, et en exécution de cet accord, un compromis de cession de fonds de commerce a été signé entre la société Bpa-Bha et la société L'Ile aux Marais avant que le tribunal de commerce n'autorise la cession du fonds de commerce de la première au profit de la seconde.

Il se déduira du tout que le mandat de recherche signé par Monsieur [T] le 10 février 2017, confiant à la société Transac la recherche d'un fonds de commerce, a donné lieu à un compromis de vente d'un fonds de commerce entre la société l'Ile aux Marais, acquéreur, dont Monsieur [T] est le gérant, et la société Bph-Bpa, cédante.

Ainsi, ce mandat de recherche, et notamment de plus fort en ce qu'il comporte une promesse de porte-fort, se rattache par un lien direct à la gestion de la société l'Ile aux Marais.

Il s'en déduira la compétence matérielle de la juridiction commerciale.

Il y aura donc lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré le tribunal de commerce de La Rochelle compétent pour connaître du litige entre les parties.

Sur l'estoppel :

Nul ne peut se contredire au détriment d'autrui.

La fin de non-recevoir tirée de ce principe sanctionne l'attitude procédurale consistant pour une partie, au cours d'une même instance, à adopter des positions contraires ou incompatibles entre elles dans des conditions qui induisent en erreur son adversaire sur ses intentions.

Le mandat de recherche non exclusif n°9609 en date du 10 février 2017 a été passé entre Monsieur [U] [T], en sa qualité de mandant, et la société Transac, en sa qualité de mandataire, le premier confiant à la seconde un mandat non exclusif de rechercher pour son compte un fonds de commerce de brasserie restaurant à l'achat, pour une durée irrévocable de 3 mois, qui passé ce délai, se poursuivrait pour une durée de 12 mois sauf révocation par l'une ou l'autre des parties moyennant un préavis de 15 jours par lettre recommandée avec accusé de réception.

Ce mandat de recherche précise que Monsieur [U] [T] se porte fort et solidaire, pour tous ascendants, descendants ou alliés ainsi que pour toutes personnes morales ou physiques qui se substitueraient ou auxquelles s'associeraient, même minoritairement, et agissant en qualité d'acquéreur éventuel, dûment habilité à signer ce mandat et prêt à en justifier.

Ce mandat prévoit que la rémunération du mandataire serait fixée en vertu d'un barème par tranche précisé à l'acte.

Ce contrat de mandat avait prévu une clause pénale ainsi rédigée:

De convention expresse et à titre de condition essentielle sans laquelle le mandataire n'aurait pas accepté la présente mission, le mandant s'interdit de traiter personnellement par l'intermédiaire d'un tiers (agence, avocat, mandataire judiciaire ou tout autre intermédiaire)

sur une affaire qui lui aurait été présentée par le mandataire pendant la durée du mandat, et pendant une durée d'un an après l'expiration ou la résiliation du mandat.

Le mandataire adressera au mandant à la fin du mandat la liste des dossiers qui lui auront été présentés par le mandataire pendant la durée du mandat. En cas de non-respect de ses obligations, le mandant s'engage expressément à verser au mandataire, en vertu des articles 1142 et 1152 du Code civil, et à titre de dommages-intérêts, une indemnité compensatrice forfaitaire égale au montant de la rémunération prévue, en réparation du préjudice.

En observant que la société l'Ile aux Marais, représentée par ses cogérants les époux [T], qu'elle avait mis en contact avec la société Bpa-Bha, avait conclu avec cette dernière la vente de son fonds de commerce à hauteur de 250 000 euros, sans avoir été elle-même associée à cette vente et sans que sa propre rémunération lui fût versée, la société Transac a demandé dans le cadre de la présente instance la condamnation de Monsieur [T] à lui payer la somme de 15 000 euros au titre de la clause pénale insérée au mandat de recherche non exclusif du 10 février 2017.

Mais Monsieur [T] lui oppose l'irrecevabilité de cette demande formée à son encontre, en observant que la société Transac avait formé exactement la même demande à son encontre dans l'instance ayant donné lieu à l'arrêt de la cour de céans susdit du 20 juin 2023.

Cependant, en ce que ce litige antérieur n'opposait pas la société Transac à Monsieur [T] pris en son nom personnel, mais la société Transac à la société l'Ile aux Marais, quand bien même celle-ci était représentée par Monsieur [T] en sa qualité de gérant, l'appelant ne peut pas venir reprocher à l'intimée de s'être contredite à son détriment dans le cadre du présent litige.

Car au visa de l'assignation qu'elle lui a été délivrée pour introduire le présent litige, la société Transac avait déjà expressément indiqué fonder sa demande indemnitaire à l'encontre de Monsieur [T] sur l'application de la clause pénale inséré au mandat de recherche du 10 février 2017.

Il y aura donc lieu de déclarer recevable l'action de la société Transac à l'encontre de Monsieur [T], et le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur le pouvoir d'évocation de la cour en ce qu'il porte sur la disposition du jugement ayant sursis à statuer sur sa demande en condamnation de Monsieur [T] au titre de la clause pénale, et sur la recevabilité de la demande y afférente à hauteur d'appel :

Selon l'article 568 du code de procédure civile,

Lorsque la cour d'appel infirme ou annule le jugement qui a ordonné une mesure d'instruction, ou qui, statuant sur l'exception de procédure, a mis fin à l'instance, elle peut évoquer les points non jugés si elle estime de bonne justice de donner à l'affaire une solution définitive, après avoir donné elle-même, le cas échéant, une mesure d'instruction.

L'évocation ne fait pas obstacle à l'application des articles 554,555 et 563 à 567.

Selon l'article 88 du même code,

Lorsque la cour d'appel est juridiction d'appel relativement la juridiction qu'elle estime compétente, elle peut évoquer le fond si elle estime de bonne justice de donner à l'affaire une solution définitive après avoir ordonné elle-même, le cas échéant, une mesure d'instruction.

Ne méconnaît pas les exigences de l'article 6. 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales la cour d'appel qui, saisie de l'appel d'un jugement de sursis à statuer, use de la faculté d'évoquer les points non jugés si elle estime de bonne justice, au regard notamment de l'exigence d'une durée raisonnable de la procédure, de donner à l'affaire une solution définitive (Cass. 2e civ., 21 avril 2005, n°06-16.466, Bull., II, n°110).

Il résulte de l'article 125 du code de procédure civile que le juge peut relever d'office les fins de non-recevoir d'ordre public, notamment lorsqu'elles résultent de l'inobservation des délais d'exercice d'une voie de recours, ou de l'absence d'ouverture d'une voie de recours.

Selon l'article 380 du code de procédure civile en son premier alinéa,

La décision de sursis (à statuer) peut être frappée d'appel sur autorisation du premier président de la cour d'appel s'il est justifié d'un motif grave et légitime.

Est irrecevable l'appel immédiat formé sans autorisation du premier président contre une décision de sursis, et cette irrecevabilité, d'ordre public, doit être relevée d'office.

Selon l'article 544 du même code,

Les jugements qui tranchent dans leur dispositif une partie du principal et ordonnent une mesure d'instruction ou une mesure provisoire peuvent être immédiatement frappés d'appel comme les jugements qui tranchent tout le principal.

Il en est de même lorsque le jugement qui statue sur l'exception de procédure, une fin de non recevoir ou tout autre incident met fin à l'instance.

Il résulte de l'article 380 du code de procédure civile que si le jugement de sursis à statuer n'a pas tranché une partie du principal et n'a pas mis fin à l'instance, l'autorisation du premier président est nécessaire.

Mais l'appel est immédiatement recevable, sans qu'il soit besoin d'autorisation du premier président, si le jugement est mixte au sens de l'article 544, ce qui est le cas lorsqu'il tranche une partie du principal et ordonne le sursis pour le surplus.

Le fait que l'action soit déclarée recevable ne permet pas de considérer qu'une partie du principal est tranchée au sens de l'article 544 du code de procédure civile, de sorte que la décision n'est pas susceptible d'un appel immédiat. Ainsi, le jugement qui, pour ordonner une expertise, déclare l'action recevable, ne touche pas une partie du principal (Cass. 1ère civ., 9 mai 1978, Bull., n°177).

De même, la condamnation à payer des dommages-intérêts pour procédure abusive, qui n'est pas afférente au fond du litige, ne tranche pas une partie du principal (Cass. 2e civ., 26 octobre 2006, n°05-14.489, Bull., II, n°289).

En cas d'appel d'un jugement qui a tranché une partie des demandes et sursis à statuer sur les autres, la cour d'appel n'a pas de pouvoir d'évocation sur les chefs du jugement ayant fait l'objet d'un sursis à statuer si l'appel n'a pas été autorisé par le premier président (Cass. 2e civ., 30 janvier 2003, n°00-15.914, Bull, II, n°21).

En l'espèce, le jugement déféré, qui n'a ni ordonné une mesure d'instruction ou provisoire, ni mis fin à l'instance, ne peut se voir appliquer l'article 544 du code de procédure civile, autorisant son appel immédiat sans autorisation primo-présidentielle.

Et en ce qu'il s'est borné à retenir la compétence de la juridiction commerciale et la recevabilité de la demande de la société Transac à l'encontre de Monsieur [T], et à débouter ce dernier de sa demande indemnitaire pour procédure abusive, il n'a pas tranché une partie du principal.

Ainsi, pour relever appel du jugement en ce qu'il avait prononcé le sursis à statuer sur la demande de la société Transac, il appartenait à celle-ci de solliciter l'autorisation primo-présidentielle d'en relever appel sur ce point.

Or, la société Transac a relevé appel principal du jugement, alors que ce dernier avait sursis à statuer sur sa demande principale en condamnation de Monsieur [T] au paiement de la clause pénale stipulée au mandat de recherche, pour réitérer cette même demande à hauteur de cour.

Mais l'examen de cette prétention présuppose l'infirmation du jugement en ce qu'il avait sursis à statuer jusqu'à l'arrêt de la cour de céans portant sur le litige noué entre la société Transac et la société l'Ile aux Marais.

Et la circonstance que cet arrêt, rendu le 20 juin 2023, soit antérieur à la déclaration d'appel dans le cadre du présent litige opposant la société Transac à Monsieur [T] formée le 24 juillet 2023, n'est pas de nature à infléchir cette analyse.

Or la société Transac n'a ni allégué, ni justifié, avoir sollicité et obtenu l'autorisation primo-présidentielle aux fins d'être autorisée à relever appel de la décision en ce que celle-ci avait sursis à statuer sur cette demande.

Il s'ensuit qu'il y a lieu de déclarer irrecevable l'appel formé par la société Transac à l'encontre du chef du jugement ayant sursis à statuer sur sa demande de condamnation au titre de la clause pénale.

La cour se trouve donc privée de tout pouvoir d'évocation à cet égard.

Par suite, il y aura lieu de déclarer irrecevable devant la cour la demande de la société Transac tendant à condamner Monsieur [T] à lui payer la somme de 15 000 euros en application de la clause pénale stipulée au mandat de recherche litigieux.

Sur l'abus de procédure :

Seule l'intention dolosive ou malicieuse, ou l'erreur grossière équivalente au dol, fait dégénérer en abus le droit d'ester en justice.

En l'espèce, le rejet des prétentions de la société Transac à hauteur d'appel, pour des raisons exclusivement liés à la seule procédure d'appel, ne caractérisent pas de son chef une intention dolosive ou malicieuse, ni une erreur grossière équivalente au dol.

Monsieur [T] sera débouté de sa demande indemnitaire pour procédure abusive, et le jugement sera confirmé de ce chef.

* * * * *

Aucune considération d'équité ne conduira, à un quelconque degré, à l'allocation d'indemnité de procédure à quiconque.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile et réservé les dépens de première instance.

Les parties seront déboutées de leurs demandes respectives au titre des frais irrépétibles d'appel.

Succombante néanmoins à hauteur de cour, la société Transac sera condamnée aux entiers d'appel.

PAR CES MOTIFS:

La cour,

statuant publiquement, par arrêt contradictoire, et après en avoir délibéré conformément à la loi,

Déclare irrecevables les conclusions déposées le 19 avril 2024 par la société à responsabilité limitée Transac Pme ;

Déclare irrecevable l'appel formé par la société à responsabilité limitée Transac Pme à l'encontre du chef du jugement déféré ayant sursis à statuer sur sa demande de condamnation de Monsieur [U] [T] au titre de la clause pénale insérée au mandat de vente du 10 février 2017;

Déclare irrecevable devant la cour la demande formée par la société à responsabilité limitée Transac Pme de condamnation de Monsieur [U] [T] au titre de la clause pénale insérée au mandat de vente du 10 février 2017;

Confirme le jugement déféré en toutes ses autres dispositions déférées à la cour ;

Y ajoutant :

Déboute les parties de leurs demandes au titre des frais des frais irrépétibles d'appel ;

Condamne la société à responsabilité limitée Transac Pme aux entiers dépens d'appel.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Poitiers
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23/01780
Date de la décision : 25/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-25;23.01780 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award