La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/06/2024 | FRANCE | N°22/02593

France | France, Cour d'appel de Poitiers, 1ère chambre, 25 juin 2024, 22/02593


ARRÊT N°255



N° RG 22/02593



N° Portalis DBV5-V-B7G-GU3V









[Y]



C/



S.A. ALLIANZ VIE















Loi n° 77 - 1468 du 30/12/1977

Copie revêtue de la formule exécutoire



Le aux avocats





Copie gratuite délivrée



Le aux avocats



















RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APP

EL DE POITIERS

1ère Chambre Civile



ARRÊT DU 25 JUIN 2024







Décision déférée à la Cour : Jugement du 02 septembre 2022 rendu par le Tribunal Judiciaire de LA ROCHE SUR YON





APPELANTE :



Madame [J] [Y] née [M]

née le [Date naissance 2] 1956 à [Localité 7]

[Adresse 4]

[Localité 5]



ayant pour...

ARRÊT N°255

N° RG 22/02593

N° Portalis DBV5-V-B7G-GU3V

[Y]

C/

S.A. ALLIANZ VIE

Loi n° 77 - 1468 du 30/12/1977

Copie revêtue de la formule exécutoire

Le aux avocats

Copie gratuite délivrée

Le aux avocats

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE POITIERS

1ère Chambre Civile

ARRÊT DU 25 JUIN 2024

Décision déférée à la Cour : Jugement du 02 septembre 2022 rendu par le Tribunal Judiciaire de LA ROCHE SUR YON

APPELANTE :

Madame [J] [Y] née [M]

née le [Date naissance 2] 1956 à [Localité 7]

[Adresse 4]

[Localité 5]

ayant pour avocat postulant et plaidant Me Laurence BIRET-BULCOURT, avocat au barreau des SABLES D'OLONNE

INTIMÉE :

S.A. ALLIANZ VIE

N° SIRET : 340 234 962

[Adresse 1]

[Localité 6]

ayant pour avocat postulant Me Anne de CAMBOURG de la SELARL ANNE de CAMBOURG, avocat au barreau de POITIERS et pour avocat plaidant Me Aurélie QUESNEL, avocat au barreaude PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 02 Mai 2024, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Thierry MONGE, Président de Chambre

Monsieur Dominique ORSINI, Conseiller qui a présenté son rapport

Monsieur Philippe MAURY, Conseiller

qui en ont délibéré

GREFFIER, lors des débats : Monsieur Lilian ROBELOT,

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- Signé par Monsieur Thierry MONGE, Président de Chambre et par Madame Elodie TISSERAUD, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*****

PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

[T] [Y] a souscrit, à effet au 1er novembre 2000, une 'assurance décès' n° 60.158.686 AF auprès de la société AGF. Les risques décès et invalidité totale et définitive de l'assuré étaient garantis.

Les sociétés Assurances générales de France Vie et Assurances générales de France I.A.R.T. mentionnées en pied de page des conditions particulières du contrat dépendaient d'Allianz Group.

[T] [Y] a, en date du 23 juillet 2018, signé une 'demande de rachat ou de cessation de paiement' relative à cette assurance. Par courrier recommandé en date du 10 août 2018, la société Allianz a donné acte à [T] [Y] de la résiliation du contrat souscrit, à effet au 1er juillet 2018.

[T] [Y] est décédé le [Date décès 3] 2018.

La société Allianz Vie a refusé le versement à sa veuve d'un capital décès en raison de la résiliation du contrat souscrit.

Par acte du 9 avril 2020, [J] [M] veuve [Y] a assigné la société Allianz Vie devant le tribunal judiciaire de la Roche-sur-Yon. Elle a à titre principal demandé de :

- prononcer la nullité du formulaire signé le 23 juillet 2018 par son époux ;

- condamner la défenderesse à lui payer la somme de 53.526,37 € en exécution du contrat souscrit par [T] [Y].

Elle a soutenu à l'appui de ses demandes que :

- la signature du document, renseigné informatiquement, avait été obtenue par abus de faiblesse, son époux connaissant alors d'importants ennuis de santé ;

- le contrat souscrit était un contrat d'assurance vie relevant des dispositions de l'article L 132-20 du code des assurances et que la demande de son époux était une demande de rachat de celle-ci.

La société Allianz Vie a conclu au rejet de ces demandes, le contrat conclu par [T] [Y] étant un contrat mixte et non un contrat d'assurance vie, relevant des dispositions de l'article L 113-3 du code des assurances et non de l'article L 132-20 du même code. Elle a ajouté que la demanderesse ne contestait pas que son époux avait signé le document litigieux et que les ennuis de santé du signataire n'avaient pas altéré ses facultés cognitives.

Par jugement du 2 septembre 2022, le tribunal judiciaire de La Roche-sur-Yon a statué en ces termes :

'DEBOUTE Madame [J] [Y] née [M] de sa demande tendant à la nullité du formulaire signé le 23 juillet 2018 par Monsieur [T] [Y] ;

DEBOUTE Madame [J] [Y] née [M] de l'intégralité de ses autres demandes ;

DEBOUTE la société anonyme ALLIANZ VIE de sa demande sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

CONDAMNE Madame [J] [Y] née [M] aux dépens, dont distraction au profit de Maître [Z] [W] conformément aux dispositions de l'article 699 du même code ,

RAPPELLE que l'exécution provisoire du présent jugement est de droit'.

Il a considéré que :

- le contrat souscrit par [T] [Y] était un contrat mixte soumis aux dispositions de l'article L 113-1 du code des assurances ;

- la preuve d'une erreur du signataire ou d'un dol de l'assureur n'était pas rapportée ;

- le contrat ayant été résilié à la date du décès, l'épouse n'était pas fondée à solliciter paiement d'un capital décès.

Par déclaration reçue au greffe le 18 octobre 2022, [J] [Y] a interjeté appel de ce jugement.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 7 juin 2023, elle a demandé de :

'Vu l'article 1188 du code civil, vu l'article L 132-20 du Code des Assurances, vu le contrat n°60.158.686 AF du 04 novembre 2000, les moyens qui précèdent et les pièces versées aux débats,

INFIRMER/REFORMER/ANNULER le jugement rendu par le Tribunal Judiciaire de LA ROCHE SUR YON dont le dispositif est le suivant :

DEBOUTE Madame [J] [Y] née [M] de sa demande tendant à la nullité du formulaire signé le 23 juillet 2018 par Monsieur [T], [Y]

DEBOUTE Madame [J] [Y] née [M] de l'intégralité de ses autres demandes CONDAMNE Madame [J] [Y] née [M] aux dépens, dont distraction au profit de Maître [Z] [W] conformément aux dispositions de l'article 699 du même code;

RAPPELLE que l'exécution provisoire du présent jugement est de droit ;

En conséquence,

DIRE ET JUGER que le consentement de Monsieur [T] [Y] lors de la signature du formulaire du 23 juillet 2018 n'était ni libre ni éclairé et était vicié au sens des articles 1110 et suivants du code civil

JUGER nulle et de nul effet la demande de résiliation du contrat par Monsieur [T] [Y]

ORDONNER que la volonté de Monsieur [T] [Y] était de racheter le contrat n°60.158.686 AF

CONDAMNER la SA ALLIANZ VIE à verser à Madame [J] [Y] la somme de 53.526,37 € au titre du contrat souscrit par Monsieur [T] [Y]

DEBOUTER la SA ALLIANZ VIE de l'ensemble de ses demandes

FAIRE INJONCTION à la SA ALLIANZ VIE de produire l'original du document intitulé « demande de rachat ou de cessation de paiement »

Y ajoutant :

JUGER que la somme de 53.526,37 € portera intérêts au taux légal à compter du 23 juillet 2018

CONDAMNER la SA ALLIANZ VIE à verser à Madame [J] [Y] la somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile

CONDAMNER la SA ALLIANZ VIE aux dépens'.

Elle a soutenu que :

- le contrat souscrit était un contrat d'assurance vie et que l'assureur devait, en cas de résiliation, mettre à disposition la valeur de rachat du contrat ;

- l'assureur n'avait pas respecté les dispositions des articles L 133-3 et L 113-12 anciens du code des assurances relatives aux modalités de résiliation du contrat souscrit ;

- le consentement de son époux, malade, était vicié lors de la signature du document qui lui avait été présenté ;

- la preuve que ce document avait été signé par son époux n'était pas rapportée.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 14 mars 2024, la société AllianzVie a demandé de :

'Vu les Dispositions Générales et Particulières du contrat « ASSURANCE DECES AGF » n°60158686

Vu les articles 1103 et 1104 du Code civil,

[...]

- CONFIRMER le jugement rendu le 2 septembre 2022 par le Tribunal Judiciaire de La Roche-sur-Yon en ce qu'il a :

« DEBOUTE Madame [J] [Y] née [L] de sa demande tendant à la nullité du formulaire signé le 23 juillet 2018 par Monsieur [T] [Y] ;

DEBOUTE Madame [J] [Y] née [L] de l'intégralité de ses autres demandes ;

CONDAMNE Madame [J] [Y] née [L] aux dépens, dont distraction au profit de Maître [Z] [W] conformément aux dispositions de l'article 699 du même code. »

- DEBOUTER Madame [J] [Y] de l'ensemble de ses demandes,

- CONDAMNER Madame [J] [Y] au paiement de la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- CONDAMNER Madame [J] [Y] aux entiers dépens, dont distraction au profit de la SELARL ANNE DE CAMBOURG conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile'.

Elle a exposé que :

- le contrat souscrit, qui garantissait les risques décès et invalidité, n'était pas un contrat d'assurance vie soumis aux dispositions de l'article L 132-20 du code des assurances, mais un contrat mixte relevant de l'article L 113-3 du code des assurances ;

- ce contrat ne pouvait pas faire l'objet d'un rachat ;

- sa résiliation pouvait intervenir à une date convenue par les parties ;

- n'était pas rapportée la preuve d'une altération des facultés cognitives de l'assuré à la date de la signature du formulaire de résiliation.

Elle a pour ces motifs maintenu être fondée à refuser le versement du capital décès.

L'ordonnance de clôture est du 18 mars 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A - SUR LA QUALIFICATION DU CONTRAT

L'article L 132-20 alinéa 4 du code des assurances dispose que :'Le défaut de paiement d'une cotisation due au titre d'un contrat de capitalisation ne peut avoir pour sanction que la suspension ou la résiliation pure et simple du contrat et, dans ce dernier cas, la mise à la disposition du porteur de la valeur de rachat que ledit contrat a éventuellement acquise'.

Le contrat d'assurance qui garantit un risque décès et un risque maladie ou accident est un contrat dit mixte relevant, non des dispositions de l'article L 132-20 précité mais de celles des articles L 113-1 et suivants du code des assurances, permettant à l'assureur d'exclure toute possibilité pour l'assuré de racheter le capital garanti.

Un formulaire intitulé 'demande de souscription assurance décès AGF' en date du 2 octobre 2000 a été signé de [T] [Y], en vue du versement d'un capital : 'En cas de décès avant le terme du contrat' et : 'En cas d'invalidité'.

Les dispositions particulières du contrat souscrit par [T] [Y] mentionnent en en-tête une :

'ASSURANCE DECES AGF

Temporaire en cas de décès et d'invalidité'.

Elles précisent une date d'effet du contrat au 1er novembre 2000 et un terme du contrat au 1er novembre 2020, soit une durée du contrat et des paiements de 20 ans.

Au paragraphe : 'Vos garanties et leurs bénéficiaires', il est précisé que:

'LES GARANTIES PENDANT LA DUREE DE VOTRE CONTRAT

' En cas d'invalidité totale et définitive de Monsieur [T] [Y] nécessitant l'assistance d'une tierce personne

(Dispositions Générales Chapitres III et V)

Il est versé un capital de 351.110,00 FRF

[...]

En cas de décès de Monsieur [T] [Y]

(Dispositions Générales Chapitres III et V)

Il est versé un capital de 351.110,00 FRF

Les bénéficiaires que vous avez désignés :

En cas de décès :

le conjoint de l'assuré(e)'...

Les conditions générales du contrat sont intitulées :

'Assurance Décès AGF

Contrat d'assurance sur la vie'.

Il est précisé en bas de page :

'Les caractéristiques et le fonctionnement de l'Assurance Décès AGF sont définies par ces Dispositions Générales (référence DTV N° 97.018) et vos Dispositions Particulières'.

Ces conditions générales stipulent que :

'I Présentation du contrat

Assurance Décès AGF est un contrat d'assurance sur la vie

[...]

III Les engagements de AGF VIE

' En cas de décès de l'assuré(e) avant le terme du contrat, les AGF VIE S'engagent à payer le capital garanti indiqué au Dispositions Particulières.

Le règlement du capital met alors fin au contrat'.

Les garanties souscrites déterminent la qualification du contrat souscrit.

Celui-ci garantit un risque décès et un risque invalidité. Il est un contrat mixte qui ne relève pas des dispositions de l'article L 132-20 du code des assurances.

Le capital convenu n'est versé au bénéficiaire de l'assurance que si le décès de l'assuré intervient avant le terme du contrat.

B - SUR LA RÉSILIATION

L'article L 113-12 du code des assurances dans sa version applicable à la date de souscription du contrat dispose que

'La durée du contrat et les conditions de résiliation sont fixées par la police.

Toutefois, l'assuré a le droit de résilier le contrat à l'expiration d'un délai d'un an, en envoyant une lettre recommandée à l'assureur au moins deux mois avant la date d'échéance. Ce droit appartient, dans les mêmes conditions, à l'assureur. Il peut être dérogé à cette règle pour les contrats individuels d'assurance maladie et pour la couverture des risques autres que ceux des particuliers. Le droit de résilier le contrat tous les ans doit être rappelé dans chaque police. Le délai de résiliation court à partir de la date figurant sur le cachet de la poste.

Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux assurances sur la vie'.

Dans sa version applicable au 23 juillet 2018, cet article permet en outre de résilier le contrat : 'par envoi recommandé électronique'.

L'article L 113-14 du même code précise que : 'Dans tous les cas où l'assuré a la faculté de demander la résiliation, il peut le faire à son choix, soit par une déclaration faite contre récépissé au siège social ou chez le représentant de l'assureur dans la localité, soit par acte extrajudiciaire, soit par lettre recommandée, soit par tout autre moyen indiqué dans la police'. Dans sa version applicable au 23 juillet 2018, cet article permet en outre de résilier le contrat : 'par envoi recommandé électronique'.

Le terme du contrat était fixé au 1er novembre 2020.

Les parties peuvent d'un commun accord convenir de modifier cette date.

Un formulaire de 'demande de rachat ou de cessation des paiements' a été signé par [T] [Y]. Ce formulaire signé, en date du 23 juillet 2018, partiellement prérempli, est identique à celui demeuré en la possession de l'assuré, non signé.

Les signatures figurant à trois reprises sur ce formulaire, sur chaque page, sont similaires entre elles et similaires à celle figurant sur le formulaire de demande d'adhésion.

Il n'est dès lors pas nécessaire d'ordonner ainsi que sollicité par l'appelante, la production de l'original signé de ce formulaire, la cour disposant des éléments nécessaires pour statuer.

En page 3 de ce formulaire, a été cochée la case du paragraphe : 'Cessation de paiement (contrats à cotisations périodiques/versements réguliers). Il a été précisé que : 'Remarque : la cessation du paiement des cotisations périodiques entraîne soit la réduction, soit la résiliation du contrat (voir les Dispositions Générales ou la Notice)'.

Par courrier recommandé en date du 10 août 2016, la société Allianz -Allianz Vie a indiqué à [T] [Y] que :

'J'accuse réception, par pli recommandé, de votre lettre du 23 juillet 2018 et vous donne acte de la résiliation de votre contrat N° 60.158.686 AF à compter du 1er juillet 2018.

Toutes les garanties cessent leur effet et les cotisations échues restent acquises à la Compagnie'.

Ce courrier, dont les termes sont clairs, n'a pas appelé d'observations de la part de [T] [Y].

La résiliation du contrat a pris effet au 1er juillet 2018.

C - SUR LE CONSENTEMENT

1 - sur une insanité d'esprit

L'article 1128 du code civil dans sa version applicable au 23 juillet 2018 dispose que :

'Sont nécessaires à la validité d'un contrat :

1° Le consentement des parties'.

L'article 1129 du même code dispose que : 'Conformément à l'article 414-1, il faut être sain d'esprit pour consentir valablement à un contrat' .

Aux termes de l'article 414-1 précité : 'Pour faire un acte valable, il faut être sain d'esprit. C'est à ceux qui agissent en nullité pour cette cause de prouver l'existence d'un trouble mental au moment de l'acte'.

La charge de la preuve de l'insanité d'esprit incombe à l'appelante.

[T] [Y] est décédé le [Date décès 3] 2018.

Le docteur [R] [U] [N] a, dans un certificat en date du 19 juin 2019, indiqué que : 'M. [Y] [T]...a bénéficié d'un suivi médical permanent depuis 2002, émaillé de nombreuses hospitalisations jusqu'à son décès'.

Le compte-rendu en date du 15 novembre 2017 du docteur [S] [V] exerçant au centre hospitalier départemental de la Vendée de [Localité 8] adressé au docteur [R] [U] [N] précité a trait aux soins rendus nécessaires par l'état diabétique du patient et une amputation antérieure de la jambe gauche. Il ne fait pas mention, directement ou indirectement, d'une quelconque altération des facultés mentales de [T] [Y].

Celui du 9 mai 2018 fait mention d'une ponction d'ascite, d'une obésité et d'une cirrhose du foie, mais non d'une altération des facultés mentales.

Dans celui en date du 26 juin 2018 qui a un objet similaire au précédent, le docteur [X] [P] indique que [T] [Y] :''m'informe d'un projet de voyage à la Réunion au mois d'octobre prochain'. Ce médecin a indiqué dans son compte-rendu que : 'J'espère que celui-ci sera possible au vu de ses comorbidités'.

Les comptes-rendus suivants, s'ils mettent en évidence un état de santé dégradé, ne font pas mention d'une altération des facultés mentales.

[K] [O], masseur-kinésithérapeute a déclaré dans une attestation en date du 10 novembre 2020 que :

'Je soussigné atteste par la présente avoir eu en soin de kinésithérapie Monsieur [T] [Y] entre décembre 2013 et novembre 2018 avant son décès.

Je voyais Monsieur 2 fois par semaine en moyenne.

Durant l'année 2018 et même fin 2017 l'état de santé de Monsieur [Y] s'est dégradé de manière importante tant sur le plan orthopédique que moral et cognitif.

Monsieur à cette époque avait de gros problèmes de mémoire et ne pouvait plus gérer son stress ni ses émotions.

Son sommeil était totalement perturbé et seule la télévision lui était possible comme activité.

Son addiction alcoolique avait beaucoup augmenté et ses capacités d'analyse d'autant.

Fait pour valoir ce que de droit.

Il ne lisait plus et n'arrivait plus à finaliser ses projets, travaux de maison entre autre.

Il lui était devenu compliqué de prendre des décisions seul et devait être accompagné par son épouse pour tous les aspects financiers ou décisionnels de sa vie'.

Cette attestation n'établit pas l'absence de lucidité de [T] [Y] le 23 juillet 2018, date de l'acte de résiliation de l'assurance souscrite.

Son épouse, présentée l'accompagner 'pour tous les aspects financiers ou décisionnels de sa vie', n'a pas adressé d'observation à la société Allianz postérieurement à la résiliation du contrat et notamment à réception du courrier recommandé de notification de celle-ci.

Il n'est pour ces motifs pas établi que [T] [Y] n'était pas sain d'esprit au sens des dispositions précitées à la date de signature de l'acte de résiliation du contrat d'assurance.

2 - sur un vice du consentement

L'article 1130 du code civil dispose que :

'L'erreur, le dol et la violence vicient le consentement lorsqu'ils sont de telle nature que, sans eux, l'une des parties n'aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes.

Leur caractère déterminant s'apprécie eu égard aux personnes et aux circonstances dans lesquelles le consentement a été donné'.

a - sur l'erreur

L'article 1132 du code civil dispose que : 'L'erreur de droit ou de fait, à moins qu'elle ne soit inexcusable, est une cause de nullité du contrat lorsqu'elle porte sur les qualités essentielles de la prestation due ou sur celles du cocontractant'.

L'article 1133 du même code précise notamment que : 'Les qualités essentielles de la prestation sont celles qui ont été expressément ou tacitement convenues et en considération desquelles les parties ont contracté' et que : 'L'erreur est une cause de nullité qu'elle porte sur la prestation de l'une ou de l'autre partie'.

Le formulaire soumis à la signature de [T] [Y] s'intitule : 'demande de rachat ou de cessation des paiements'.

L'ensemble des paragraphes de ce formulaire relatifs à un rachat du contrat d'assurance a été biffé. Ainsi que précédemment exposé, seul le paragraphe relatif à la 'Cessation de paiement (contrats à cotisations périodiques/versements réguliers)' a été soumis à la signature de [T] [Y].

Il n'est pas établi que :

- ce dernier avait, antérieurement à la signature de ce document, fait savoir à l'assureur que son souhait de racheter le contrat et d'ainsi percevoir le capital qu'il pensait avoir acquis en contrepartie du versement de primes

- [T] [Y] pensait signer un formulaire de rachat du contrat emportant le versement d'un capital et non, un formulaire de résiliation du contrat.

L'erreur alléguée n'est pour ces motifs pas prouvée.

2 - sur un dol

L'article 1137 du code civil dispose que :

'Le dol est le fait pour un contractant d'obtenir le consentement de l'autre par des man'uvres ou des mensonges.

Constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par l'un des contractants d'une information dont il sait le caractère déterminant pour l'autre partie.

Néanmoins, ne constitue pas un dol le fait pour une partie de ne pas révéler à son cocontractant son estimation de la valeur de la prestation'.

Il appartient à l'appelante de prouver les manoeuvres frauduleuses, les mensonges ou la réticence de l'intimée destinées à tromper le consentement de son époux.

Cette preuve n'est en l'espèce pas rapportée.

Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de nullité de l'acte en date du 23 juillet 2018 signé de [T] [Y] et débouté [J] [M] veuve [Y] de ses demandes formées à l'encontre de la société Allianz Vie.

D - SUR LES DÉPENS

La charge des dépens d'appel incombe à l'appelante. Ils seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile par la selarl Anne de Cambourg.

E - SUR LES DEMANDES PRÉSENTÉES SUR LE FONDEMENT DE L'ARTICLE 700 DU CODE DE PROCÉDURE CIVILE

Le premier juge a équitablement apprécié n'y avoir lieu de faire application de ces dispositions.

Les circonstances de l'espèce ne justifient pas de faire droit aux demandes présentées sur ce fondement devant le cour.

PAR CES MOTIFS,

statuant par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,

REJETTE la demande de [J] [M] veuve [Y] de production aux débats de l'original signé par [T] [Y] son époux de l'acte en date du 23 juillet 2018 de résiliation du contrat d'assurance n° 60.158.686 AF ;

CONFIRME le jugement du 2 septembre 2022 du tribunal judiciaire de La Roche-sur-Yon ;

CONDAMNE la demande de [J] [M] veuve [Y] aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile par la selarl Anne de Cambourg.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Poitiers
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22/02593
Date de la décision : 25/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-25;22.02593 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award