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18/06/2024 | FRANCE | N°22/02410

France | France, Cour d'appel de Poitiers, 1ère chambre, 18 juin 2024, 22/02410


ARRET N°243



N° RG 22/02410 - N° Portalis DBV5-V-B7G-GUM6















S.A.S. ECOFIM



C/



Etablissement Public CENTRE HOSPITALIER DE [Localité 2]

S.A.R.L. IMMO CONSEIL FINANCE

S.A.S. INFRALON



































Loi n° 77-1468 du30/12/1977

Copie revêtue de la formule exécutoire



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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE POITIERS



1ère Chambre Civile



ARRÊT DU 18 JUIN 2024







Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/02410 - N° Portalis DBV5-V-B7G-GUM6



Décision déférée à la Cour : jugement du...

ARRET N°243

N° RG 22/02410 - N° Portalis DBV5-V-B7G-GUM6

S.A.S. ECOFIM

C/

Etablissement Public CENTRE HOSPITALIER DE [Localité 2]

S.A.R.L. IMMO CONSEIL FINANCE

S.A.S. INFRALON

Loi n° 77-1468 du30/12/1977

Copie revêtue de la formule exécutoire

Le à

Le à

Le à

Copie gratuite délivrée

Le à

Le à

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE POITIERS

1ère Chambre Civile

ARRÊT DU 18 JUIN 2024

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/02410 - N° Portalis DBV5-V-B7G-GUM6

Décision déférée à la Cour : jugement du 12 août 2022 rendu par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de LA ROCHELLE.

APPELANTE :

S.A.S. ECOFIM

[Adresse 5]

[Localité 8]

ayant pour avocat postulant Me Jérôme CLERC de la SELARL LX POITIERS-ORLEANS, avocat au barreau de POITIERS et pour avocat plaidant Me Philippe PERICAUD, avocat au barreau de PARIS, substitué par Me Déborah BOUSSEMART, avocat au barreau de PARIS

INTIMEES :

CENTRE HOSPITALIER DE [Localité 2]

[Adresse 1]

[Localité 2]

ayant pour avocat Me Olivier BERTRAND de la SELARL BERTRAND, avocat au barreau de LA ROCHELLE-[Localité 2]

S.A.R.L. IMMO CONSEIL FINANCE

[Adresse 6]

[Localité 3]

S.A.S. INFRALON

[Adresse 4]

[Localité 7]

ayant toutes les deux pour avocat Me Daniel CHARCELLAY de la SELARL MINAUD CHARCELLAY, avocat au barreau de LA ROCHELLE-[Localité 2]

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 04 Avril 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant :

M. Thierry MONGE, Président de Chambre

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Thierry MONGE, Président de Chambre

Monsieur Dominique ORSINI, Conseiller

Monsieur Philippe MAURY, Conseiller

GREFFIER, lors des débats : Mme Elodie TISSERAUD,

ARRÊT :

- Contradictoire

- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- Signé par M. Thierry MONGE, Président de Chambre, et par Mme Elodie TISSERAUD, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ :

Le centre hospitalier de [Localité 2] a donné mandat de vente le 6 février 2016 à la société Immo Conseil Finance afin de lui trouver un acquéreur au prix d'1 million d'euros net vendeur pour un bien immobilier dont il souhaitait se défaire, la convention stipulant que les honoraires de l'agence, égaux à 5% du prix de vente, seraient à la charge de l'acquéreur.

Une offre d'achat a été formulée le 6 décembre 2016 par la société International Financial Concept.

Le directeur du centre hospitalier a validé cette offre sous la double condition de l'approbation du conseil de surveillance de l'établissement et d'une signature de l'acte authentique de vente avant le 15 janvier 2017.

Aucun acte authentique n'ayant été dressé au 15 janvier 2017, il a fait sommation à la société International Financial Concept de venir signer un compromis de vente le 7 février 2017.

Celle-ci ayant indiqué à cette date se substituer la société Ecofim, le centre hospitalier a refusé de signer le compromis de vente avec cette dernière.

La SAS Ecofim a alors fait assigner le centre hospitalier de [Localité 2] devant le tribunal de grande instance de La Rochelle, qui a ordonné par jugement du 5 juillet 2018 la vente forcée du bien au profit d'Ecofim au prix de 590.000 euros payable comptant.

L'agence ImmoConseil Finance n'ayant pas perçu sa commission, a fait assigner par acte du 7 octobre 2019 le centre hospitalier de [Localité 2] afin de l'entendre condamner à l'indemniser du préjudice qu'il lui avait causé.

Est intervenue volontairement à l'instance aux côtés d'ImmoConseil Finance la société Infralon, exerçant sous l'enseigne Comprilife Viagers de France.

Toutes deux ont attrait par acte du 5 mai 2020 la société Ecofim en intervention forcée.

Ces instances ont été jointes.

Dans le dernier état de leurs prétentions, les demanderesses réclamaient avec intérêts capitalisés 29.900 euros au principal et 15.000 euros de dommages et intérêts complémentaires in solidum au centre hospitalier sur le fondement de sa responsabilité contractuelle, pour les avoir fautivement privées de leur rémunération en refusant indûment de vendre son bien à Ecofim, et à celle-ci sur le fondement de l'article 6-1 de la loi dite 'Hoguet' du 2 janvier 1970, outre 10.000 euros d'indemnité de procédure.

Le centre hospitalier a conclu au rejet de ces demandes en contestant avoir commis une faute ; en indiquant n'avoir jamais contracté avec Comprilife; et en faisant fait valoir que le préjudice allégué avait nécessairement la nature d'une perte de chance, celle de percevoir des honoraires, et qu'une telle perte n'était pas établie dès lors qu'il restait loisible à l'agence ImmoConseil Finance de réclamer sa commission à la société Ecofim.

La société Ecofim a conclu à l'irrecevabilité de l'action dirigée à son encontre motif pris de l'autorité de chose jugée s'attachant au jugement du 5 juillet 2018, qui a ordonné la vente sans prévoir de commission ; elle a argué d'extinction le droit à commission de l'agence pour caducité de l'offre d'achat et du mandat ; argué subsidiairement de nullité le mandat; soutenu que l'agence n'avait réalisé de toute façon aucun service ; et réclamé reconventionnellement 50.000 euros de dommages et intérêts pour préjudice moral et procédure abusive.

Par jugement du 12 août 2022, le tribunal entre-temps devenu tribunal judiciaire de La Rochelle a :

* déclaré recevable la demande en paiement de la commission d'agence formée par la SARL ImmoConseil Finance et la SAS Infralon à l'encontre de la SAS Ecofim

* condamné la société Ecofim à verser à la SARL ImmoConseil Finance et la SAS Infralon la somme de 29.500 euros TTC avec intérêts au taux légal à compter du 5 mai 2020

* dit que les intérêts échus pour une année entière seraient capitalisés à compter du 5 mai 2020

* rejeté le surplus des demandes formées par la SARL ImmoConseil Finance et la SAS Infralon à l'encontre de la SAS Ecofim

* rejeté l'intégralité des demandes formées par la SARL ImmoConseil Finance et la SAS Infralon à l'encontre du centre hospitalier de [Localité 2]

* condamné la SAS Ecofim à payer 3.000 euros à la SARL ImmoConseil Finance et la SAS Infralon en application de l'article 700 du code de procédure civile

* rejeté les demandes formées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile par la SAS Ecofim et par le Centre hospitalier de [Localité 2]

* condamné la SAS Ecofim aux dépens de l'instance

* rappelé que l'exécution provisoire de la décision était de droit.

La société Ecofim a relevé appel le 28 septembre 2022 en intimant le centre hospitalier de [Localité 2], la SARL ImmoConseil Finance et la SAS Infralon.

Les sociétés ImmoConseil Finance et Infralon ont saisi d'un incident à fin de radiation pour défaut d'exécution du jugement le conseiller de la mise en état, qui a constaté par ordonnance du 9 mai 2023 qu'elles s'en désistaient du fait de l'exécution entre-temps intervenue.

Les dernières écritures prises en compte par la cour au titre de l'article 954 du code de procédure civile ont été transmises par la voie électronique :

* le 14 juin 2023 par la SAS Ecofim

* le 20 mars 2023 par le centre hospitalier de [Localité 2]

* le 28 septembre 2023 par la SARL Immo Conseil Finance et la SAS Infralon.

La SAS Ecofim demande à la cour de la juger recevable et bien fondée en son appel, de :

I-

-juger que le jugement rendu par le tribunal de grande instance de La Rochelle le 5 juillet 2018 ne prévoit aucune commission sur le prix de vente des biens au profit des sociétés Immo Conseil Finance et Infralon

-juger que ce jugement, définitif, a autorité de la chose jugée

En conséquence, de juger irrecevables, sinon mal fondées, les sociétés Immo Conseil Finance et Infralon en leurs demandes de versement d'une commission et les en débouter

II-

-juger caduque l'offre d'achat du 6 décembre 2016 et en conséquence éteint tout droit à commission

-En conséquence juger irrecevables, sinon mal fondées, les sociétés Immo Conseil Finance et Infralon en leurs demandes de versement d'une commission et les en débouter

-En conséquence : infirmer le jugement rendu le 12 août 2022 par le tribunal judiciaire

III-

-juger caduc le mandat du 6 février

-juger que les sociétés Immo Conseil Finance et Infralon ont renoncé à commission

-En conséquence, de juger irrecevables, sinon mal fondées, les sociétés Immo Conseil Finance et Infralon en leurs demandes de versement d'une commission et les en débouter

-En conséquence : infirmer le jugement rendu le 12 août 2022 par le tribunal judiciaire

IV-

-juger le mandat du 6 février 2016 inopposable à la société Ecofim

-En conséquence, de juger irrecevables, sinon mal fondées, les sociétés Immo Conseil Finance et Infralon en leurs demandes de versement d'une commission et les en débouter

-En conséquence : infirmer le jugement rendu le 12 août 2022 par le tribunal judiciaire

V-

-juger nul le mandat du 6 février 2016

-En conséquence, de juger irrecevables, sinon mal fondées, les sociétés Immo Conseil Finance et Infralon en leurs demandes de versement d'une commission et les en débouter

-En conséquence : infirmer le jugement rendu le 12 août 2022 par le tribunal judiciaire

VI-

-juger l'absence de service rendu par les sociétés Immo Conseil Finance et Infralon

-En conséquence, de juger irrecevables, sinon mal fondées, les sociétés Immo Conseil Finance et Infralon en leurs demandes de versement d'une commission et les en débouter

-En conséquence : infirmer le jugement rendu le 12 août 2022 par le tribunal judiciaire

VII-

-juger mal fondées les sociétés Immo Conseil Finance et Infralon en leur appel incident aux fins de condamnation d'Ecofim à leur payer 15.000 euros à titre de dommages et intérêts ; les en débouter

VIII- Et dans tous les cas,

-débouter les sociétés Immo Conseil Finance et Infralon de toutes leurs demandes contraires aux présentes écritures

-juger recevable et fondée Ecofim en ses demandes reconventionnelles et condamner solidairement les sociétés Immo Conseil Finance et Infralon à payer à Ecofim la somme de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral et procédure abusive

-condamner solidairement les sociétés Immo Conseil Finance et Infralon à payer à la société Ecofim la somme de 7.000 euros ainsi qu'en tous les dépens.

Elle fait valoir que le jugement qui a ordonné la vente, et qui a autorité, n'a pas prévu de commission pour l'agence, laquelle pouvait intervenir à cette procédure si elle le voulait.

Elle affirme que la vente a été ordonnée en raison de la rencontre des volontés et non sur le fondement de son offre d'achat, qui était caduque depuis le 31 décembre 2016 faute de signature d'un compromis dans le délai prévu. Elle en infère que le droit de l'agence à rémunération n'a pas pu naître.

Elle affirme que la caducité de l'offre d'achat a entraîné celle du mandat du 6 février 2016

Elle maintient que l'agence avait de toute façon renoncé à ce mandat, en en signant un autre avec le centre hospitalier et en concluant un deuxième compromis avec la société Nidazur à laquelle le centre entendait vendre son bien.

Elle conteste aussi être redevable d'une commission au motif que le mandat du 6 février 2016 qui la prévoit ne lui est pas opposable, n'ayant établi des rapports qu'entre le mandant qui vendait son bien et le mandataire, et elle ajoute que son offre d'achat ne précise ni le principe ni le montant d'une commission, et qu'elle a au surplus été émise par l'entremise de 'Comprilife' qui n'est que le nom commercial d'Infralon, laquelle n'est pas agent immobilier, ne dispose d'aucune carte de transaction et ne peut revendiquer une quelconque commission, l'agent étant Immo Conseil Finance, qui n'est pas intervenue à l'offre d'achat. Elle dénie toute valeur juridique au bon de visite signé par International Finance Concept.

Elle affirme que le mandat est de toute façon nul :

-en ce qu'il prévoyait un autre prix de vente, en l'occurrence 1 million d'euros, et qu'il fallait un avenant ou un autre mandat pour vendre à 590.000 euros

-en ce qu'il ne comporte pas comme requis par la loi Hoguet le nom et l'adresse de la caisse de garantie de l'agent et le lieu de délivrance de sa carte professionnelle.

Elle fait aussi valoir qu'il est de jurisprudence qu'aucun droit à commission ne peut naître d'un mandat lorsqu'il a été suivi d'un second sur le même bien, ce qui est le cas en l'espèce, où un deuxième mandat a été conclu avec la société Nidazur.

Elle soutient encore pour refuser toute commission aux sociétés Immo Conseil Finance et Infralon, qu'elles n'ont pas accompli de service justifiant qu'elle les rémunère, ayant au contraire tout fait pour que le bien soit vendu à la société Nidazur.

Elle approuve le rejet de la demande adverse de dommages et intérêts.

Le centre hospitalier de [Localité 2] demande à la cour :

¿ sur l'appel principal : de confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté l'intégralité des demandes formées à son encontre par Immo Conseil Finance et Infralon

¿ sur l'appel incident de celles-ci : de les débouter de leurs demandes à son encontre

¿ en tout état de cause : de condamner Immo Conseil Finance et Infralon aux dépens d'appel et à lui verser 3.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à supporter les éventuels frais d'exécution forcée.

Il indique n'avoir conclu le mandat qu'avec Immo Conseil Finance et n'avoir aucun lien contractuel avec la société Infralon, l'éventuelle convention conclue entre ces deux sociétés pour se partager les honoraires ne lui étant pas opposable.

Il conteste avoir commis une faute en faisant valoir que le tribunal ne lui en impute aucune dans le jugement qui a ordonné la vente, et a au contraire rejeté la demande de dommages et intérêts formulée contre lui par Ecofim en l'absence de preuve d'une intention de nuire.

Il qualifie de mensongère l'affirmation des sociétés Immo Conseil Finance et Infralon selon lesquelles elles auraient ignoré la procédure en vente forcée devant le tribunal en indiquant produire les courriers prouvant qu'elles se sont renseignées sur le cours de cette instance lorsqu'elle était pendante.

Il soutient que l'action de ces agences est mal dirigée à son égard car si une commission leur est due, c'est par l'acheteur et non par lui, qui vendait son bien.

Il objecte que la demande ne peut pas être formée contre lui sur le fondement de l'article 1231-6 du code civil au motif que celui-ci est postérieur au mandat litigieux, et conteste en tout état de cause avoir pu engager sa responsabilité, en niant toute faute.

Il approuve le tribunal d'avoir jugé que son refus initial de conclure la vente n'a pas causé de préjudice aux demanderesses puisque le préjudice aurait la nature d'une perte de chance, celle d'avoir perçu leur commission, et que précisément, elles obtiennent leur rémunération auprès d'Ecofim.

Il fait valoir subsidiairement que le préjudice de perte de chance ne peut être égal au montant de la commission comme elles le demandent.

Les sociétés Immo Conseil Finance et Infralon exerçant sous l'enseigne 'Comprilife Viagers de France' demandent à la cour de débouter Ecofim de son appel, de la débouter de l'ensemble de ses demandes, de confirmer le jugement en son chef condamnant Ecofim à leur payer 29.500 euros avec intérêts et capitalisation,

* de l'infirmer en ce qu'il les a déboutées de leur demande de dommages et intérêts à l'encontre d'Ecofim et du centre hospitalier, et statuant à nouveau, de

-condamner in solidum la société Ecofim et le centre hospitalier de [Localité 2] à leur payer la somme de 15.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice qu'elles ont subi distinct du simple retard, avec intérêts au taux légal depuis le 5 mai 2020 et application de la clause d'anatocisme

-d'ordonner la capitalisation des intérêts dans les conditions prévues par la loi

* d'infirmer le jugement en ce qu'il les a déboutées de leur demande de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la faute contractuelle du centre hospitalier, et statuant à nouveau,

-de condamner le centre hospitalier de [Localité 2] à leur payer la somme de 29.500 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de sa faute contractuelle,

avec intérêts au taux légal depuis le 5 mai 2020 et application de la clause d'anatocisme

-d'ordonner la capitalisation des intérêts dans les conditions prévues par la loi

* de débouter le centre hospitalier de ses demandes

* de condamner in solidum la société Ecofim et le centre hospitalier de [Localité 2]

-à leur payer 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile

-et aux entiers dépens.

Elles font valoir que leur entremise a été efficace puisqu'elles ont présenté à la société Ecofim le bien que celle-ci a acheté.

Elles maintiennent tirer leur droit à rémunération de l'article 6-1 de la loi du 2 janvier 1970.

Elles récusent l'autorité de chose jugée invoquée par l'appelante en indiquant qu'elles n'étaient pas partie à l'instance ayant abouti au jugement du 5 juillet 2018 et que celui-ci n'a pas statué sur le droit à commission.

Elles réfutent la caducité alléguée de l'offre émise le 6 décembre 2016 en faisant valoir que c'est précisément parce qu'elle ne la considérait pas comme caduque qu'Ecofim a agi en réitération de la vente, et en rappelant que le jugement a constaté l'accord des volontés.

Elles contestent que le mandat ait été révoqué en indiquant n'en avoir pas conclu d'autre avec le centre hospitalier.

Elles nient avoir renoncé à leur commission.

Elles affirment le caractère contractuel de leur droit à commission en faisant valoir que le bon de visite signé par Ecofim énonce expressément que les prix de vente donnés au visiteur comprennent les honoraires de négociation qui sont prévus à la charge de l'acquéreur.

Elles assurent être toutes deux titulaires d'une carte professionnelle.

Elles soutiennent qu'Ecofim est irrecevable à arguer de l'absence de mentions prévues par la loi dans le mandat qu'elles ont conclu avec le centre hospitalier.

Elles indiquent avoir réalisé le service efficace, ayant présenté le bien à Ecofim.

Elles contestent toute faute et s'opposent à la demande de dommages et intérêts de l'appelante.

Elles sollicitent par voie d'appel incident des dommages et intérêts à hauteur de 15.000 euros fondés sur la réparation d'un préjudice distinct du retard, en soutenant que la mauvaise foi du vendeur et de l'acheteur les obligent à engager des actions judiciaires pour faire valoir leurs droits et être réglées de prestations réalisées il y a six ans.

Elles indiquent être habiles à rechercher la responsabilité du centre hospitalier, qui par son refus fautif de signer le compromis de vente avec Ecofim leur a fait perdre une chance de percevoir leur commission, et elles réitèrent par voie d'appel incident leur demande qu'il soit condamné à leur verser son montant à titre de dommages et intérêts.

L'ordonnance de clôture est en date du 5 février 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

* sur la recevabilité à agir des sociétés Immo Conseil Finance et Infralon

¿ au titre de l'autorité de la chose jugée le 5 juillet 2018

Les sociétés Immo Conseil Finance et Infralon n'étant pas parties à l'instance ayant abouti au jugement du tribunal de grande instance de La Rochelle du 5 juillet 2018 qui a ordonné la vente au prix de 590.000 euros de son bien par le centre hospitalier de [Localité 2] à la société Ecofim, ne peuvent se voir opposer par celle-ci l'autorité de chose jugée par le tribunal, qui n'était au surplus saisi d'aucune prétention afférente à la question d'une commission d'agence immobilière et n'a pas statué de ce chef.

Le moyen opposé à ce titre par la société Ecofim a été rejeté à bon droit.

¿ au titre de la qualité d'agent immobilier des demanderesses

La société Immo Conseil Finance est titulaire de la carte professionnelle CPI34022016000009574 et de la garantie financière du Lloyd's N°LEGAI01928 (pièce n°4 du centre hospitalier) et la société Infralon, exerçant sous l'enseigne 'Comprilife', de la carte professionnelle n°0228T délivrée par la préfecture de [Localité 7] et de la garantie financière de Torus Insurance (leur pièce n°2).

Elles ont ainsi qualité pour solliciter paiement d'une commission, étant observé que cette qualité n'est pas requise pour solliciter, comme elles le font aussi, des dommages et intérêts, une partie serait-elle chiffrée au montant de la commission qu'elles n'ont pas perçue.

Elles justifient, par ailleurs, au moyen de leur pièce n°8, avoir conclu entre elles un accord de coopération et de partage d'honoraires au titre des commissions perçues par chacune sur une opération.

* sur le moyen tiré par la société Ecofim d'une caducité de son offre d'achat

La société Ecofim n'est pas fondée à soutenir pour contester être susceptible de devoir une commission que l'offre d'achat qu'elle a émise le 6 décembre 2016 serait caduque faute de signature d'un compromis avec le vendeur avant la date du 15 janvier 2018, alors que c'est précisément parce que son offre a été jugée toujours valable que le tribunal de grande instance de La Rochelle a ordonné la vente à son profit du bien objet de cette offre, en retenant, comme elle le soutenait, que la condition mise par le vendeur à son acceptation tenant à la signature d'un compromis avant le 15 janvier 2018 n'était pas une condition déterminante de son acceptation et qu'il y avait renoncé en faisant convoquer Ecofim pour signer un compromis postérieurement.

Le moyen opposé à ce titre par la société Ecofim a été rejeté à bon droit.

* sur le moyen tiré par la société Ecofim d'une révocation du mandat

Pas plus qu'en première instance, la société Ecofim ne rapporte la preuve d'une révocation par le centre hospitalier du mandant de vente qu'il avait signé le 16 février 2016 avec Immo Conseil Finance, étant observé qu'il n'est pas justifié d'un autre mandat entre les parties.

Le moyen opposé à ce titre par la société Ecofim a été rejeté à bon droit.

* sur le moyen tiré par Ecofim d'une renonciation de l'agence à son droit à commission

Pas plus qu'en première instance, la société Ecofim ne rapporte en cause d'appel la preuve, qui lui incombe, d'une renonciation de la société Immo Conseil Finance à lui demander la commission en cas d'achat du bien qu'elle lui avait présenté, les éléments qu'elle avance, tirés de la présentation de ce bien par l'agence à une autre personne intéressée par l'acquisition de ce bien, la société Nidazur, et des renseignements qu'elle prit sur l'état d'avancement de l'instance judiciaire en vente forcée pendante devant le tribunal de grande instance de La Rochelle, ne caractérisant pas, de la part de l'agence, une telle renonciation, qui doit être non équivoque, étant au contraire observé que ces démarches étaient justement empreintes d'équivoque car le centre hospitalier considérait à l'époque être délié de son acceptation de l'offre émise par Ecofim et pouvoir vendre son bien à une autre.

Ce moyen a été pertinemment rejeté par le tribunal.

* sur le moyen tiré par la société Ecofim de l'inopposabilité du mandat à son égard

Le mandat conclu entre le centre hospitalier de [Localité 2] et la société Immo Conseil Finance stipule que le bien sera vendu pour un prix net vendeur et que les honoraires sont à la charge de l'acquéreur et d'un montant de 5% du prix de vente.

La société Ecofim n'est certes pas partie à ce mandat, mais la société International Financial Concept à laquelle elle s'est substituée selon accord daté du 3 février 2016 -en réalité 2017 ainsi que l'a déjà retenu le tribunal de grande instance de La Rochelle dans son jugement du 5 juillet 2018- avait signé le 30 août 2016 un bon de visite énonçant que le bien lui avait été présenté au nom d'Immo Conseil Finance par madame [G], que le montant des honoraires de l'agence en cas de vente du bien serait de 5%, et que le signataire s'interdisait de traiter directement ou indirectement l'achat de ce bien sans l'intervention de cette agence (cf pièce n°9 des intimées).

La signature de ce bon rend opposables au signataire -et à celui qui s'est substitué à lui- le principe et le montant de la commission due par l'acquéreur de ce bien à l'agence qui le lui avait présenté et fait visiter.

* sur le moyen tiré par Ecofim de la nullité du mandat

Le tribunal a pertinemment dit que le non-respect du formalisme du mandat prévu aux articles 1eret 6 de la loi du 2 janvier 1970 était sanctionné par une nullité relative que seul pouvait invoquer le mandant dans l'intérêt duquel ces règles sont instituées, et non la société Ecofim.

Le premier juge a également dit à bon droit que la validité du mandat n'était pas affectée par la circonstance que le vendeur a accepté postérieurement à sa conclusion de vendre le bien à un prix inférieur à celui qui y était stipulé, ce dont la société Ecofim, qui l'a acquis à ce prix moindre, ne peut se faire un grief.

* sur la prestation fondant la commission

La société Immo Conseil Finance a présenté et fait visiter le bien du centre hospitalier à la société International Financial Concept à laquelle la SAS Ecofim s'est substituée.

International Financial Concept a certifié en signant le bon de visite qu'elle n'en avait pas connaissance auparavant et que l'agence le lui avait présenté pour la première fois.

Immo Conseil Finance et Infralon ont ensuite établi l'offre d'achat formulée le 6 décembre 2016 par International Financial Concept.

Ces diligences caractérisent le service fourni et fondent le droit à commission.

Ce droit n'est pas affecté par la circonstance qu'elles auraient ensuite présenté le bien à la société Nidazur parce que le centre se considérait comme délié de son acceptation de l'offre.

Le tribunal a relevé à raison que rien n'accréditait que l'agence ait oeuvré pour empêcher la conclusion de la vente avec International Financial Concept et/ou Ecofim.

* sur le droit à commission des sociétés Immo Conseil Finance et Infralon

Il résulte des éléments précédemment considérés que les sociétés Immo Conseil Finance et Infralon -qui justifient avoir conclu entre elles une convention de partage d'honoraires- sont fondées à réclamer à la société Ecofim la commission de 5% du prix de vente du bien qu'elles lui ont présenté et qu'elle a acheté, peu important que la vente ait été imposée au centre hospitalier par une décision de justice, ni que cette décision n'ait rien dit de la question de la commission, le tribunal ne tranchant que les prétentions qui lui étaient soumises, dont aucune ne portait sur la commission, étant rappelé que l'agent immobilier n'était pas partie à l'instance.

Le jugement sera ainsi confirmé en ce qu'il a condamné la société Ecofim à verser à la SARL ImmoConseil Finance et la SAS Infralon la somme de 29.500 euros TTC avec intérêts au taux légal à compter du 5 mai 2020.

Il le sera aussi en ce qu'il a dit que les intérêts échus pour une année entière seraient capitalisés à compter du 5 mai 2020, l'anatocisme étant de droit lorsqu'il est sollicité en justice.

* sur la demande en paiement de l'agence en tant que dirigée contre le centre hospitalier

Le centre hospitalier de [Localité 2], vendeur, n'est pas débiteur de la commission, contractuellement fixée à la charge de l'acquéreur par le mandat le liant à l'agence.

Les sociétés Immo Conseil Finance et Infralon reprennent devant la cour leur demande visant à le voir condamner in solidum avec Ecofim à leur payer des dommages et intérêts de ce montant en réparation du préjudice qu'il leur aurait causé par sa faute, en refusant la vente.

La vente s'étant réalisée en définitive, en exécution du jugement, et le droit de l'agence à la commission prévue étant reconnu, et concrètement consacré par la condamnation de la société Ecofim à la leur payer, laquelle condamnation a d'ailleurs été exécutée ainsi que l'a constaté le conseiller de la mise en état, la chance perdue n'a pas de réalité, et le jugement sera confirmé en ce qu'il les a déboutées de cette demande.

* sur la demande de dommages et intérêts formée par Immo Conseil Finance et Infralon

Les sociétés Immo Conseil Finance et Infralon sont recevables à réclamer à la société Ecofim et/ou au centre hospitalier réparation du préjudice qu'elles ont subi autre que résultant du seul retard à percevoir leur commission tel que réparé par l'allocation des intérêts moratoires.

Elles peuvent formuler cette demande sur le droit commun de la responsabilité, sans nécessité de mobiliser l'article 1231-6 du code civil, entré en vigueur postérieurement à la conclusion du mandat litigieux.

Pour autant, elles ne justifient pas de la réalité du préjudice invoqué, aucun élément n'établissant qu'elles subissent un préjudice autre que celui né du retard à encaisser leur commission que réparent les intérêts moratoires capitalisés, et d'avoir dû agir en justice pour l'obtenir, dont la charge financière relève du champ d'application de l'article 700 du code de procédure civile.

Le jugement sera ainsi confirmé en ce qu'il a rejeté ce chef de demande.

* sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive formulée par Ecofim

Au vu du sens de la décision, l'action des sociétés Immo Conseil Fiance et Infralon, qui est accueillie en son principal chef de demande, ne revêt aucun caractère abusif ni plus généralement fautif, et la demande de dommages et intérêts formulée à ce titre par la société Ecofim a été rejetée à bon droit par le premier juge, dont la décision sera confirmée de ce chef.

* sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile

Les chefs de décision du jugement afférents aux dépens et à l'application de l'article 700 du code de procédure civile sont pertinents et adaptés et seront confirmés.

La société Ecofim succombe devant la cour et supportera les dépens d'appel.

Elle versera en application de l'article 700 du code de procédure civile une indemnité parties qu'elle a intimées.

* sur la demande relative aux frais éventuels de recouvrement forcé

L'article L 111-8 du code des procédures civiles d'exécution dispose que :

'A l'exception des droits proportionnels de recouvrement ou d'encaissement qui peuvent être mis partiellement à la charge des créanciers dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, les frais de l'exécution forcée sont à la charge du débiteur, sauf s'il est manifeste qu'ils n'étaient pas nécessaires au moment où ils ont été exposés. Les contestations sont tranchées par le juge.

Les frais de recouvrement entrepris sans titre exécutoire restent à la charge du créancier, sauf s'ils concernent un acte dont l'accomplissement est prescrit par la loi au créancier. Toute stipulation contraire est réputée non écrite, sauf disposition législative contraire.

Cependant, le créancier qui justifie du caractère nécessaire des démarches entreprises pour recouvrer sa créance peut demander au juge de l'exécution de laisser tout ou partie des frais ainsi exposés à la charge du débiteur de mauvaise foi.'.

La prestation de recouvrement ou d'encaissement de l'article A 444-32 du code de commerce (n° 129 du tableau 3-1 du décret n° 2016-230 du 26 février 2016, anciennement droit proportionnel dégressif supplémentaire, article 10 du décret n°96-1080 du 12 décembre 1996) que peut solliciter le commissaire de justice chargé du recouvrement de sommes est par application de l'article R 444-55 du code de commerce à la charge du créancier.

La demande présentée sur ce fondement sera pour ces motifs rejetée.

PAR CES MOTIFS

la cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort:

CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions

ajoutant :

REJETTE toutes prétentions autres ou contraires

CONDAMNE la SAS Ecofim aux dépens d'appel

CONDAMNE la société Ecofim à payer en application de l'article 700 du code de procédure civile

* 3.000 euros aux sociétés Immo Conseil Fiance et Infralon, ensemble

* 3.000 euros au centre hospitalier de [Localité 2]

REJETTE la demande relative aux frais éventuels de recouvrement forcé.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Poitiers
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22/02410
Date de la décision : 18/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 24/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-18;22.02410 ?
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