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04/04/2024 | FRANCE | N°24/00015

France | France, Cour d'appel de Poitiers, Référés premier président, 04 avril 2024, 24/00015


Ordonnance n 19

















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04 Avril 2024

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N° RG 24/00015 - N° Portalis DBV5-V-B7I-G7GU

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[J] [B] [M]

C/

[D] [C] [P] [S]

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R E P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











COUR D'APPEL DE POITIERS



ORDONNANCE DE LA PREMIERE PRÉSIDENTE


>RÉFÉRÉ









Rendue publiquement le quatre avril deux mille vingt quatre par Madame Estelle LAFOND, conseillère chargée du secrétariat général de la première présidence déléguée par la première présidente de la cour d'appel de Poitiers, assistée ...

Ordonnance n 19

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04 Avril 2024

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N° RG 24/00015 - N° Portalis DBV5-V-B7I-G7GU

---------------------------

[J] [B] [M]

C/

[D] [C] [P] [S]

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R E P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE POITIERS

ORDONNANCE DE LA PREMIERE PRÉSIDENTE

RÉFÉRÉ

Rendue publiquement le quatre avril deux mille vingt quatre par Madame Estelle LAFOND, conseillère chargée du secrétariat général de la première présidence déléguée par la première présidente de la cour d'appel de Poitiers, assistée de Madame Inès BELLIN, greffière,

Dans l'affaire qui a été examinée en audience publique le vingt et un mars deux mille vingt quatre, mise en délibéré au quatre avril deux mille vingt quatre.

ENTRE :

Monsieur [J] [B] [M]

[Adresse 5]

[Localité 1]

Représenté par Me Jérôme CLERC de la SELARL LX POITIERS-ORLEANS, avocat au barreau de POITIERS, avocat postulant,

et par Me Patrick HOEPFFNER de la SELARL HOEPFFNER, avocat au barreau de la CHARENTE, avocat plaidant

DEMANDEUR en référé ,

D'UNE PART,

ET :

Monsieur [D] [C] [P] [S]

[Adresse 6]

[Localité 1]

comparant, assisté de Me Thibaut KURZAWA de la SCP CALLAUD - MELLIER - KURZAWA, avocat au barreau de SAINTES

DEFENDEUR en référé ,

D'AUTRE PART,

Faits et procédure :

Monsieur [J] [M] a acquis la propriété d'un logis seigneurial situé sur la commune de [Localité 8] cadastré section C n°[Cadastre 2], n°[Cadastre 3] et n°[Cadastre 7], suivant acte notarié en date du 29 juillet 2020.

Monsieur [D] [S] a acquis la propriété d'une maison d'habitation située sur la parcelle voisine, cadastrée section C n°[Cadastre 4], suivant acte notarié en date du 22 décembre 2020.

La parcelle cadastrée section n°[Cadastre 7] serait configurée de telle sorte qu'elle prendrait naissance sur la voie communale n°3 de la commune de [Localité 8], se prolongerait à l'arrière de l'immeuble de Monsieur [D] [S] sur la parcelle cadastrée section C n°[Cadastre 4] et à l'arrière de celui de Monsieur [J] [M], sur la parcelle cadastrée section C n°[Cadastre 3], avant de déboucher sur une partie située au Nord de la propriété de Monsieur [D] [S].

Lors de l'acquisition de son bien immobilier, l'accès à la parcelle cadastrée section C n°[Cadastre 7] depuis la voie communale était fermée par un portail en bois.

Monsieur [D] [S] aurait revandiqué la propriété de l'espace situé entre les parcelles cadastrées section C n°[Cadastre 3] et [Cadastre 4], lequel se trouverait sur la parcelle cadastrée section C n°[Cadastre 7] appartenant à Monsieur [J] [M].

Plusieurs échanges ont eu lieu entre les parties et leurs conseils afin de trancher ce différend.

Par exploit en date du 10 mai 2021, Monsieur [J] [M] a donc fait assigner à jour fixe Monsieur [D] [S] devant le tribunal judiciaire de Saintes.

Selon jugement en date du 17 septembre 2021, le tribunal judiciaire de Saintes a :

rejeté l'ensemble des demandes de Monsieur [D] [S],

ordonné que l'espace situé entre l'arrière du bâtiment de Monsieur [D] [S] situé sur la parcelle cadastrée section C n°[Cadastre 4], côté Est, et l'arrière de celui appartenant à Monsieur [J] [M] sur la parcelle n°[Cadastre 3], côté Ouest de cette propriété, soit rattachée à la parcelle cadastrée section C n°[Cadastre 3] appartenant à Monsieur [J] [M], et la publication à la conservation des hypothèses de la présente décision de ce fait ;

condamné Monsieur [D] [S] à payer à Monsieur [J] [M] la somme de 7 251,60 € de dommages et intérêts ;

rejeté le surplus des demandes faites par Monsieur [J] [M] à titre principal ;

condamné Monsieur [D] [S] à régler à Monsieur [J] [M] la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamné Monsieur [D] [S] à supporter la totalité des dépens de la présente instance, en ce non compris les frais des constats en date des 17 février et 23 mars 2021.

Ledit jugement a été confirmé par la cour d'appel de Poitiers le 11 juillet 2023.

Par exploit en date du 17 janvier 2023, Monsieur [J] [M] a fait assigner Monsieur [D] [S] devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Saintes aux fins de voir ordonner à Monsieur [D] [S], sous astreinte, de procéder au retrait du système de surveillance vidéo mis en place sur le mur de son bâtiment, donnant sur la propriété de Monsieur [J] [M].

Par ailleurs, reprochant à Monsieur [D] [S] d'avoir affiché en évidence sur les parties de sa maison donnant sur la voie publique « souriez, vous êtes filmés illégalement (article 226-1, code pénal) ' par la caméra de Mr [M], [Adresse 5] », Monsieur [J] [M] l'a fait assigner devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Saintes par exploit en date du 10 mars 2023.

En cours de procédure, Monsieur [D] [S] ayant spontanément procédé au retrait de son affichage ainsi qu'au système de surveillance vidéo, Monsieur [J] [M] a ajouté une demande tendant à voir ordonner à Monsieur [D] [S] d'occulter les fenêtres et ouvertures qu'il aurait pratiquées dans le mur de sa maison donnant sur sa propriété, sous astreinte de 500 € par jour de retard, à compter de la décision à intervenir.

Suivant ordonnance en date du 9 janvier 2024, le juge des référés du tribunal judiciaire de Saintes a :

ordonné la jonction des procédures enregistrées sous les numéros 23/00134 et 23/00488,

constaté que la demande de Monsieur [J] [M] relative à l'enlèvement de la caméra apposée par Monsieur [D] [S] est devenue sans objet ;

constaté que la demande de Monsieur [J] [M] relative à l'enlèvement de la pancarte apposée par Monsieur [D] [S] est sans objet

dit n'y avoir lieu à référé sur la demande de Monsieur [J] [M] aux fins d'occultation des fenêtres ouvertes dans le mur d'habitation de Monsieur [D] [S]

condamné Monsieur [J] [M] à supprimer le dispositif de surveillance captant les images de l'habitation de Monsieur [D] [S] dans les 15 jours de la signification de la présente décision sous astreinte de 30 € par jours de retard pendant une durée de quatre mois ;

déclaré irrecevable la demande de Monsieur [D] [S] aux fins de condamnation de Monsieur [J] [M] au paiement d'une amende civile ;

dit n'y avoir lieu à référé sur la demande de Monsieur [D] [S] aux fins de dommages et intérêts ;

condamné Monsieur [J] [M] aux dépens ;

condamné Monsieur [J] [M] à payer à Monsieur [D] [S] une somme de 2 000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Monsieur [J] [M] a interjeté appel de ladite décision selon déclaration en date du 23 janvier 2024.

L'affaire a été orientée en circuit court et fixée pour être plaidée à l'audience de la première chambre civile le 30 mai 2024.

Par exploit en date du 15 février 2024, Monsieur [J] [M] a fait assigner Monsieur [D] [S] devant la première présidente de la cour d'appel de Poitiers, statuant en référé, aux fins d'obtenir, par application des dispositions de l'article 514-3 du code de procédure civile, l'arrêt de l'exécution provisoire de la décision dont appel.

L'affaire, appelée une première fois à l'audience du 7 mars 2024, a été renvoyée à l'audience du 21 mars 2024.

Monsieur [J] [M] indique avoir soulevé en première instance une fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée dans le cadre de l'instance l'ayant opposé à Monsieur [D] [S] sur la question de la propriété de l'espace séparant les deux biens immobiliers, au cours de laquelle ce dernier avait sollicité la condamnation de Monsieur [J] [M] à supprimer le détecteur de mouvement installé par lui dans ledit espace au mois d'août 2021.

Il fait ainsi valoir que la cour d'appel ayant débouté Monsieur [D] [S] de sa demande, le tribunal judiciaire ne pouvait, sauf à méconnaitre l'autorité de la chose jugée, faire droit à cette même demande, laquelle aurait dû être déclarée irrecevable.

Il soutient en outre que Monsieur [D] [S] ne pourrait se prévaloir d'aucune servitude de vue donnant sur l'espace dont la propriété a été reconnue judiciairement comme lui appartenant, de sorte qu'il n'aurait disposé d'aucun droit à pratiquer une ouverture sous forme de fenêtre donnant sur sa propriété. Il soutient ainsi que Monsieur [D] [S] ne saurait se plaindre que les caméras installées porteraient atteinte à l'intimité de sa vie privée.

Il fait enfin valoir qu'aucune des caméras installées ne focalisent sur les deux pièces dotées des ouvertures litigieuses, de sorte qu'il n'existerait aucun risque de violation de l'intimité de Monsieur [D] [S].

Il indique que les caméras constitueraient un des éléments d'équipement d'un système de vidéo-surveillance qu'il aurait mis en place afin d'assurer la sécurité de sa personne et de ses biens contre les risques d'intrusion sur sa propriété, étant âgé de 84 ans et vivant seul avec sa femme.

Il fait ainsi valoir que le contraindre à procéder au retrait de cette installation de vidéo surveillance reviendrait à le priver d'un moyen efficace d'assurer sa sécurité et de se protéger contre les risques d'intrusion et que cette exposition au danger constituerait une conséquence manifestement excessive justifiant l'arrêt de l'exécution provisoire de la décision dont appel.

Il sollicite la condamnation de Monsieur [D] [S] à lui payer la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Monsieur [D] [S] s'oppose à la demande d'arrêt de l'exécution provisorie.

Il indique que Monsieur [J] [M] ne justifierait d'aucun moyen sérieux d'annulation ou de réformation de la décision dont appel.

Il fait ainsi valoir que la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée serait inopérante. Il indique avoir sollicité, dans le cadre de la procédure devant la cour d'appel de Poitiers, la suppression d'une seule caméra et que deux autres caméras auraient été installées par la suite, raison pour laquelle il a sollicité, dans le cadre de la procédure de référé, la condamnation de Monsieur [J] [M] à supprimer toutes les caméras et outils de vidéosurveillance installées.

Il indique que contrairement à ce que prétend Monsieur [J] [M], la servitude de vue serait acquise.

Il soutient que contrairement à ce soutient Monsieur [J] [M], les caméras seraient dirigées vers les pièces de sa propriété dotées des ouvertures litigieuses, à savoir la salle de bain et les WC.

Il fait valoir que Monsieur [J] [M] ne justifierait d'aucun danger de nature à considérer que l'exécution provisoire de la décision litigieuse aurait pour lui des conséquences manifestement excessives, alors même que trois caméras sur les quatre composant le dispositiif de vidéosurveillance seraient orientées vers son domicile et que deux gardiens seraient présents en permanence sur la propriété de son voisin, logés par ce dernier. Il soutient, en outre, que la commune de [Localité 8] ne ferait pas parties des communes les plus à risque en terme d'insécurité.

Il sollicite la condamnation de Monsieur [J] [M] à lui payer la somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Il est renvoyé aux conclusions écrites des parties déposées lors de l'audience pour un examen complet de leurs moyens et prétentions.

Motifs :

L'article 514-3 du code de procédure civile dispose qu'en cas d'appel, le premier président peut être saisi afin d'arrêter l'exécution provisoire de la décision lorsqu'il existe un moyen sérieux d'annulation ou de réformation et que l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives.

La demande de la partie qui a comparu en première instance sans faire valoir d'observations sur l'exécution provisoire n'est recevable que si, outre l'existence d'un moyen sérieux d'annulation ou de réformation, l'exécution provisoire risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives qui se sont révélées postérieurement à la décision de première instance.

En cas d'opposition, le juge qui a rendu la décision peut, d'office ou à la demande d'une partie, arrêter l'exécution provisoire de droit lorsqu'elle risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives.

Il en découle que l'arrêt de l'exécution provisoire est subordonné à la réalisation des deux conditions, cumulatives, suivantes: la démonstration de l'existence d'un moyen sérieux d'annulation ou de réformation de la décision qui en est assortie, et la justification de ce que l'exécution de cette décision risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives.

Monsieur [J] [M] prétend que le retrait de l'installation de vidéo surveillance reviendrait à le priver d'un moyen d'assurer sa sécurité et de se protéger contre les risques d'intrusion, et que cette exposition au danger constituerait une conséquence manifestement excessive au sens de l'article 514-3 du code de procédure civile.

Les éléments versés aux débats ne permettent pas de démontrer que Monsieur [J] [M] se trouverait dans une situation de danger impérieuse rendant nécessaire le maintient d'un dispositif de captation d'image.

Le caractère manifestement excessif des conséquences de l'exécution provisoire n'est donc pas démontré.

Les conditions d'application de l'article 514-3 du code de procédure civile étant cumulatives, faute pour Monsieur [J] [M] de rapporter la preuve de l'existence de conséquences manifestement excessives à l'exécution provisoire de la décision litigieuse, il n'y a pas lieu d'examiner les autres conditions liées aux moyens sérieux d'annulation ou de réformation de la décision litigieuse, la demande d'arrêt de l'exécution provisoire sera rejetée.

Succombant à la présente instance, Monsieur [J] [M] sera condamné à payer à Monsieur [D] [S] la somme de 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Décision :

Par ces motifs, nous, Estelle LAFOND, conseillère chargée du secrétariat général de la première présidence déléguée par la première présidente de la cour d'appel de Poitiers, statuant par ordonnance contradictoire :

Déboutons Monsieur [J] [M] de sa demande d'arrêt de l'exécution provisoire de l'ordonnance rendue par le juge des référés du tribunal judiciaire de Saintes le 9 janvier 2024 ,

Condamnons Monsieur [J] [M] à payer à Monsieur [D] [S] la somme de 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamnons Monsieur [J] [M] aux dépens.

Et nous avons signé la présente ordonnance avec le greffier.

La greffière, La conseillère,

Inès BELLIN Estelle LAFOND


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Poitiers
Formation : Référés premier président
Numéro d'arrêt : 24/00015
Date de la décision : 04/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 10/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-04;24.00015 ?
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