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11/07/2023 | FRANCE | N°21/03055

France | France, Cour d'appel de Poitiers, 1ère chambre, 11 juillet 2023, 21/03055


ARRET N°337



N° RG 21/03055 - N° Portalis DBV5-V-B7F-GMO4















S.A.S. LES ORMEAUX

S.A.R.L. HUBEO



C/



[Y]

[Y]



















RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE POITIERS



1ère Chambre Civile



ARRÊT DU 11 JUILLET 2023







Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/03055 - N° Portalis DBV5-V-B7

F-GMO4



Décision déférée à la Cour : jugement du 10 septembre 2021 rendu par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de SAINTES.







APPELANTES :



S.A.S. LES ORMEAUX

[Adresse 26]

[Adresse 26]



S.A.R.L. HUBEO

[Adresse 26]

[Adresse 26]



ayant toutes les deux pour avoca...

ARRET N°337

N° RG 21/03055 - N° Portalis DBV5-V-B7F-GMO4

S.A.S. LES ORMEAUX

S.A.R.L. HUBEO

C/

[Y]

[Y]

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE POITIERS

1ère Chambre Civile

ARRÊT DU 11 JUILLET 2023

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/03055 - N° Portalis DBV5-V-B7F-GMO4

Décision déférée à la Cour : jugement du 10 septembre 2021 rendu par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de SAINTES.

APPELANTES :

S.A.S. LES ORMEAUX

[Adresse 26]

[Adresse 26]

S.A.R.L. HUBEO

[Adresse 26]

[Adresse 26]

ayant toutes les deux pour avocat postulant Me Yann MICHOT de la SCP ERIC TAPON - YANN MICHOT, avocat au barreau de POITIERS et pour avocat plaidant Me Philippe GATIN, avocat au barreau de SAINTES

INTIMES :

Madame [B] [Y]

née le [Date naissance 4] 1953 à [Localité 18]

[Adresse 5]

[Adresse 5]

ayant pour avocat postulant Me Ludivine SCHAUSS, avocat au barreau de POITIERS et pour avocat plaidant Me Jérôme BOUSQUET, avocat au barreau de LA CHARENTE

Monsieur [J] [Y]

né le [Date naissance 3] 1949 à

[Adresse 1]

[Adresse 1]

défaillant

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des articles 907 et 786 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 22 Mai 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant :

Monsieur Philippe MAURY, Conseiller

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Thierry MONGE, Président de Chambre

Monsieur Dominique ORSINI, Conseiller

Monsieur Philippe MAURY, Conseiller

GREFFIER, lors des débats : Mme Elodie TISSERAUD,

ARRÊT :

- Rendu par défaut

- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- Signé par M. Thierry MONGE, Président de Chambre, et par Mme Elodie TISSERAUD, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

La S.A.S LES ORMEAUX, présidée par la S.A.R.L. HUBEO laquelle est représentée par M. [F] [V], exploite un camping caravaning situé [Adresse 26] à [Localité 25].

Invoquant la prescription acquisitive immobilière, par actes d'huissier séparés délivrés les 21 février 2019 et 1er avril 2019, la S.A.S LES ORMEAUX a fait assigner Mme [B] [Y] et M. [J] [Y] devant le tribunal judiciaire de SAINTES aux fins de la voir déclarer propriétaire des parcelles cadastrées [Cadastre 17], [Cadastre 11], [Cadastre 12], [Cadastre 13], [Cadastre 14], [Cadastre 15], [Cadastre 23], [Cadastre 16],[Cadastre 9] et [Cadastre 10] se trouvant sur la commune de [Localité 25].

Aux termes de ses dernières conclusions signifiées le 26 janvier 2021, la S.A.S LES ORMEAUX et la S.A.R.L. HUBEO sollicitaient du tribunal de :

- les déclarer propriétaire des parcelles [Cadastre 17], [Cadastre 11], [Cadastre 12], [Cadastre 13], [Cadastre 14], [Cadastre 15], [Cadastre 23], [Cadastre 16], [Cadastre 9] et [Cadastre 10] se trouvant sur la commune de [Localité 25],

- publier le jugement à intervenir à la conservation des hypothèques dont dépend l'immeuble,

- débouter Mme [B] [Y] de ses demandes,

- ordonner l'exécution provisoire de la décision,

-condamner Mme [B] [Y] et M. [J] [Y] à lui régler la somme de 8 000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

En réponse, Mme [B] [Y] sollicitait par ses dernières écritures que soit prononcée :

- l'irrecevabilité et le rejet des demandes de la société LES ORMEAUX et la société HUBEO,

- l'annulation de l'acte de notoriété du 30 novembre 2018,

- la publication du jugement à intervenir à la conservation des hypothèques de [Localité 24],

- la condamnation de la SAS LES ORMEAUX à lui verser une provision sur

indemnité d'occupation de 2 500 € par mois à compter du ler janvier 2015 pour un montant de 150.000 €,

- la condamnation solidaire de la SAS LES ORMEAUX et la S.A.R.L. HUBEO aux entiers dépens ainsi qu' à lui verser 9 600 € au titre des frais irrépétibles,

- l'exécution provisoire.

Assigné selon les dispositions de l'article 659 du code de procédure civile, M. [J] [Y] n'a pas constitué avocat.

Par jugement réputé contradictoire en date du 10/09/2021, le tribunal judiciaire de SAINTES a statué comme suit :

'REJETTE la demande de Mme [B] [Y] au titre l'irrecevabilité de l'action de la SAS LES ORMEAUX et la S.A.R.L. HUBEO ;

DÉBOUTE la SAS LES ORMEAUX et, la S.A.R.L. HUBEO de leur demande

d'acquisition de la propriété des parcelles se trouvant sur la commune de [Localité 25] cadastrées [Cadastre 17], [Cadastre 11], [Cadastre 12], [Cadastre 13], [Cadastre 14], [Cadastre 15], [Cadastre 23], [Cadastre 16], [Cadastre 9] et [Cadastre 10] sur le fondement de la prescription acquisitive ;

ORDONNE l'annulation de l'acte de notoriété reçu le 30 novembre 2018 par Maître [P] [Z], notaire à [Localité 24] ;

DIT que Mme [B] [Y] et M. [J] [Y] sont propriétaires indivis des parcelles cadastrées [Cadastre 17], [Cadastre 11], [Cadastre 12], [Cadastre 13], [Cadastre 14], [Cadastre 15], [Cadastre 23], [Cadastre 16], [Cadastre 9] et [Cadastre 10] se trouvant sur la commune de [Localité 25] ;

ORDONNE la publication du présent jugement au service de la publicité foncière dont dépend l'immeuble, soit au service de la publicité foncière de [Localité 21] 1;

DIT que la SAS LES ORMEAUX et la S.A.R.L. HUBEO sont redevables d'une indemnité d'occupation à l'égard de Mme [B] [Y] pour l'occupation sans droit ni titre dès parcelles cadastrées [Cadastre 17], [Cadastre 11], [Cadastre 12], [Cadastre 13], [Cadastre 14], [Cadastre 15], [Cadastre 23], [Cadastre 16], [Cadastre 9] et [Cadastre 10] se trouvant sur la commune de [Localité 25] à compter du 31 octobre 2018;

REJETTE la demande de Mme [B] [Y] aux fins de fixation de la dite indemnité ;

REJETTE le surplus des demandes ;

CONDAMNE, in solidum, la SAS LES ORMEAUX et la S.A.R.L. HUBEO aux entiers dépens d'instance ;

CONDAMNE, in solidum, la SAS LES ORMEAUX et la S.A.R.L. HUBEO à verser à Mme [B] [Y] la somme de QUATRE MILLE CINQ CENTS EUROS (4 500 €) au titre des frais irrépétibles.

ORDONNE l'exécution provisoire de la présente décision'.

Le premier juge a notamment retenu que :

- Mme [B] [Y] sollicite que soit relevée l'irrecevabilité des demandes adverses mais aucun moyen n'est exposé au soutien de cette demande.

- sur la prescription, la SAS LES ORMEAUX présidée par la S.A.R.L. HUBEO représentée par M. [F] [V] exploite le camping LES ORMEAUX depuis le 30 juin 2012, date de la cession des parts sociales de la société CHARMILIE actionnaire unique de la société LOCARAVANE CAMPING.

- la SAS LES ORMEAUX et la S.A.R.L. HUBEO font valoir la jonction des possessions entre la leur et celle des auteurs de la société Les ORMEAUX, notamment la société LOCARAVANE CAMPING.

- s'il résulte des photographies produites que les parcelles en litige sont bien occupées par des caravanes ou autres par extension du camping LES ORMEAUX se trouvant sur les parcelles contiguës depuis 1979, il n'en demeure pas moins qu'il appartient au demandeur d'établir que cette possession présente le caractère non équivoque exigé par la loi.

- or, il résulte de la lecture des deux actes de cession des 8 juin 2012 et 30 juin 2012 ayant conduit à l'entrée en possession et l'exploitation du camping LES ORMEAUX par la SAS LES ORMEAUX et la S.A.R.L. HUBEO que l'acte de cession ne mentionne pas les parcelles litigieuses

Le compromis de cession de parts sociales signé le 8 juin 2012 entre les propriétaires de la société LOCARAVANE CAMPING et la S.A.R.L. HUBEO liste, en pages 4 et 5, les biens immobiliers et parcelles dont la société LOCARAVANE CAMPING est propriétaire et ceux dont elle n'est pas propriétaire mais qui sont exploités par elle.

- ainsi la possession des parcelles litigieuses par la société LOCARAVANE CAMPING, non mentionnée de manière expresse à l'acte de cession, que ce soit en qualité de propriétaire ou de simple exploitante, est donc entachée d'équivoque.

- ce vice d'équivoque empêche les demandeurs de se prévaloir de la jonction des possessions de sorte qu'exploitant les parcelles litigieuses depuis leur cession, à savoir le 30 juin 2012, la prescription acquisitive trentenaire n'est pas acquise.

- de manière surabondante, la possession alléguée ne remplit également pas la condition de paisibilité au regard du courrier du maire de la commune en date du 31 janvier 2018 aux termes duquel il résulte que la SAS LES ORMEAUX occupe les parcelles litigieuses sans autorisation administrative et en infraction au code de l'urbanisme, celles-ci étant situées zone N, zone inconstructible dont l'exploitation est limitée et soumise à autorisation. Cette impossibilité d'exploitation était connue ainsi qu'il en résulte d'un courrier de leur avocat du 31 mai 2018.

- la SAS LES ORMEAUX et la S.A.R.L. HUBEO n'établissent pas leur possession de manière non équivoque et paisible et depuis plus de trente ans et leur demande de prescription acquisitive sera rejetée.

- compte tenu de l'existence d'un acte de notoriété acquisitive contraire publié au service de la publicité foncière de [Localité 22], il convient d'ordonner la publication de la présente décision.

- sur la demande reconventionnelle de paiement d'une indemnité d'occupation, l'occupation sans droit ni titre par la SAS LES ORMEAUX et la S.A.R.L. HUBEO des parcelles appartenant à Mme [B] [Y] cause à cette dernière un préjudice de jouissance justifiant l'allocation d'une indemnité d'occupation qu'il conviendrait, compte tenu de la réclamation d'une telle indemnité par la défenderesse par lettre officielle du 31 octobre 2018,de fixer à compter du 31 octobre 2018.

Toutefois, en l'absence de justificatif, avis de valeur ou estimation, de la valeur locative des parcelles dont elle est propriétaire, il n'est pas permis au juge de fixer le montant de cette indemnité d'occupation de sorte que la demande en ce sens sera rejetée.

LA COUR

Vu l'appel en date du 21/10/2021 interjeté par la société SAS LES ORMEAUX et la société S.A.R.L. HUBEO

Vu l'article 954 du code de procédure civile

Aux termes du dispositif de leurs dernières conclusions en date du 18/07/2022, la société SAS LES ORMEAUX et la société S.A.R.L. HUBEO ont présenté les demandes suivantes :

'Rejetant toutes conclusions contraires comme injustes ou non fondées,

Vu les articles 2258, 2272, 2273, 2274, 2275 et 2260, 2265 du code civil,

Vu l'acte de notoriété acquisitive établi le 30 novembre 2018, par Maître [Z], Notaire à [Localité 24],

Vu le rapport d'expertise établi par M. [O] [K],

Vu le Procès-Verbal de Constat établi par Maître GODET,

Vu l'occupation continue, paisible, publique, non équivoque des parcelles depuis plus de 30 années par la SAS LES ORMEAUX et ses auteurs,

RÉFORMER le Jugement prononcé par le tribunal judiciaire de SAINTES,

Statuant à nouveau,

JUGER que la SAS LES ORMEAUX est propriétaire des parcelles suivantes:

- parcelle cadastrée section [Cadastre 17],

- parcelle cadastrée section [Cadastre 11],

- parcelle cadastrée section [Cadastre 12],

- parcelle cadastrée section [Cadastre 13],

- parcelle cadastrée section [Cadastre 14],

- parcelle cadastrée section [Cadastre 15],

- parcelle cadastrée section [Cadastre 23],

- parcelle cadastrée section [Cadastre 16],

- parcelle cadastrée section [Cadastre 9],

- parcelle cadastrée section [Cadastre 10].

sises à [Localité 25], Lieudit [Localité 20] et [Localité 19] pour une surface totale de 64a 69 ca.

JUGER que l'arrêt à intervenir sera publié à la conservation des hypothèques dont dépendent les immeubles,

CONFIRMER le jugement prononcé par la tribunal judiciaire de SAINTES en ce qu'il a débouté Mme [Y] de sa demande de l'indemnité d'occupation,

En tout état de cause,

JUGER irrecevable la demande de Mme [B] [Y] en ce qu'elle poursuit la condamnation solidaire de la SAS LES ORMEAUX et de la S.A.R.L. HUBEO au paiement d'une indemnité d'occupation de 3.510.000 €,

En tout état de cause,

DÉBOUTER Mme [Y] de sa demande de condamnation au paiement d'une indemnité d'occupation de 3.510.000 €,

JUGER que l'indemnité d'occupation à laquelle Mme [Y] pourrait prétendre, ne saurait excéder la somme de 16.892 €,

CONDAMNER Mme [B] [Y] et M. [J]

[Y] à payer à la SAS LES ORMEAUX une somme de 8.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNER les mêmes aux entiers dépens'.

A l'appui de leurs prétentions, la société SAS LES ORMEAUX et la société S.A.R.L. HUBEO soutiennent notamment que :

- à aucun moment une instance n'a été initiée à la requête de la S.A.R.L. HUBEO mais uniquement à la requête de la SAS LES ORMEAUX et dont le représentant légal n'est autre que la S.A.R.L. HUBEO.

Le cas échéant, seule la SAS LES ORMEAUX pourrait être tenue au paiement d'une indemnité d'occupation.

- la SAS LES ORMEAUX a fait procéder par M. [O] [K], expert agricole et foncier et expert immobilier près la cour d'appel de POITIERS à une analyse de l'historique de l'occupation des parcelles situées commune de [Localité 25] et cadastrées Section [Cadastre 17], [Cadastre 11], [Cadastre 12], [Cadastre 13], [Cadastre 14], [Cadastre 15], [Cadastre 23], [Cadastre 16], [Cadastre 9] et [Cadastre 10].

- Elle est propriétaire de ces parcelles par effet de la prescription acquisitive, au regard de l'inaction du véritable propriétaire.

- il résulte de l'acte reçu le 30 novembre 2018 par Maître [P] [Z], Notaire à [Localité 24], de ce que la SAS LES ORMEAUX, elle et ses auteurs, occupent les parcelles précitées depuis plus de 30 années et ce de manière continue, paisible, publique et non équivoque.

- s'il est soutenu que la SAS LES ORMEAUX ne serait propriétaire du camping que depuis le 6 juillet 2012, il y a lieu d'appliquer le principe de la jonction des possessions, le possesseur pouvant ajouter à sa possession celle de ses prédécesseurs.

- l'acte de notoriété acquisitive a été reçu par le notaire instrumentaire, Maître DENIS le 30 novembre 2018 établi en présence de deux témoins, M. et Mme [D].

- figurent en annexe de l'acte notarié :

* l'arrêté établi par la commune de [Localité 25] le 17 octobre 1994 relatif à l'autorisation d'agrandir un terrain de camping LES ORMEAUX, ledit arrêté faisant lui-même référence à un arrêté préfectoral du 19 juillet 1984 autorisant le camping LES ORMEAUX à bénéficier d'une capacité d'accueil de 140 emplacements.

* des photographies aériennes confirmant l'emprise du camping exploité depuis lors par la SAS LES ORMEAUX et ses auteurs.

- de nouvelles photographies sont versées aux débats dont la date de prise de vue du camping remonte au 29 septembre 1987, confirmant d'ores et déjà l'exploitation des parcelles propriété des consorts [Y] par l'exploitant du dit camping.

- deux prises de vue du 28 juillet 1991 montrent l'extension du camping suite à l'Arrêté prononcé le 17 octobre 1994 par la commune DE [Localité 25] autorisant la capacité du camping à passer de 140 à 166 emplacements.

- par arrêté du 26 janvier 1998 le camping a été classé en camping mention tourisme en catégorie 3 pour une capacité d'accueil de 189 emplacements.

- on constate que postérieurement à l'année 1984, le camping LES ORMEAUX exploitait les parcelles propriété des consorts [Y] sans aucun doute possible, ainsi que cela relève du rapport d'expertise de M. [K].

- l'expert s'appuie notamment sur l'analyse des photographies aériennes annexées au procès-verbal de constat établi par Maître GODET le 7 mai 2022.

- les mobile-homes qui ont été installés sur les parcelles propriété de l'intimée ne l'ont pas été de manière temporaire ou ponctuelle.

- la demande reconventionnelle de dommages et intérêts constitue un aveu judiciaire de l'existence de la possession du fait de l'occupation effective par la SAS LES ORMEAUX et ses auteurs des parcelles litigieuses.

- la possession n'est pas équivoque. Depuis plusieurs décennies la SAS LES ORMEAUX et ses auteurs exploitent les parcelles de terre propriété des consorts [Y] après avoir installé des mobile-homes et avoir proposé ceux-ci à la location aux clients du camping

- les consorts [D], natifs de [Localité 27], ont confirmé l'occupation effective des parcelles litigieuses depuis plus de trente ans.

- le fait qu'aucune mention ne figure dans l'acte de cession quant aux parcelles litigieuses est sans incidence. La S.A.R.L. LOCARAVANE CAMPING n'était pas propriétaire des parcelles et ne disposait d'aucun titre lui permettant de les exploiter en accord avec le propriétaire.

C'est simplement pour cette raison, que les parcelles, objet du présent litige, n'ont pas été portées dans ledit acte de cession.

- la SAS LES ORMEAUX et avant elle ses auteurs, se sont toujours comportés comme les véritables propriétaires des parcelles, objet de la présente instance.

- la possession est continue, paisible et publique.

- le tribunal a déduit de façon erronée que la possession ne serait pas paisible au vu de la correspondance adressée par la commune de [Localité 25] portant date du 31 janvier 2018 aux termes de laquelle il résulterait que les parcelles litigieuses occupées par la société LES ORMEAUX le seraient sans autorisation administrative en infraction avec le code de l'urbanisme en ce que celles-ci seraient situées en zone N, zone inconstructible.

Cette correspondance est sans incidence, rédigée par la commune qui est un tiers et ne dispose d'aucun droit sur les parcelles litigieuses.

- la possession est publique, n'a pas été dissimulée et accompagnée d'actes apparents notamment de l'arrêté préfectoral du 19 juillet 1984 autorisant le CAMPING LES ORMEAUX à avoir une capacité d'accueil portée à 140 emplacements.

- elle a débuté entre l'année 1987 et 1989.

- si l'occupation n'a pas été admise par les consorts [Y] mais pour autant, ceux-ci n'ont initié aucune procédure pour mettre un terme à ladite possession ou l'interrompre et n'ont saisi aucune juridiction.

- sur la demande reconventionnelle d'indemnité d'occupation, les consorts [Y] ont été plus que négligents quant aux parcelles litigieuses.

Mme [Y] verse aux débats une expertise établie par un M. [U] mais sa valorisation est contestée car il a raisonné non sur la valeur locative mais sur la valeur immobilière des parcelles.

Il est rappelé que seule Mme [Y] forme des demandes mais que le bien est indivis avec son frère.

- M. [K] a rappelé que les parcelles litigieuses étaient situées en zone Nt (secteur naturel des campings) au PLU de la commune de [Localité 25], à l'exception des parcelles [Cadastre 23] et [Cadastre 16] classées en zone N.

- parcelles représentent une surface de l'ordre de 6.469 m2 sur un total d'unité foncière du camping d'environ 44.540 m2, soit 14,18 %.

- l'expert judiciaire a donc déterminé l'indemnité d'occupation qui aurait pu être due pour les parcelles litigieuses, à savoir 33.784 € sur la période 2018-2022, s'agissant d'un droit indivis avec son frère [J] [Y], et Mme [Y] ne saurait solliciter une somme supérieure à 16.892 €.

- seule la SAS LES ORMEAUX pourrait être tenue au paiement d'une indemnité d'occupation et il n'y a pas lieu à condamnation in solidum de la S.A.R.L. HUBEO.

Aux termes du dispositif de ses dernières conclusions en date du 16/04/2022, Mme [B] [Y] a présenté les demandes suivantes :

''-Vu les dispositions des articles 1240, 2258, 2272, 2274, 2275, 2260, 2261 et 2265 du code civil,

Vu les dispositions de l'article L123-1-5 du code de l'urbanisme

Vu les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Vu le jugement du tribunal judiciaire de SAINTES du 10 septembre 2021

Vu les pièces versées aux débats,

Confirmer le jugement du tribunal judiciaire de SAINTES du 10 septembre 2021 en ce qu'il a :

- Débouté la SAS LES ORMEAUX et la S.A.R.L. HUBEO de leur demande d'acquisition de la propriété des parcelles se trouvant sur la commune de [Localité 25] cadastrées [Cadastre 17], [Cadastre 11], [Cadastre 12], [Cadastre 13], [Cadastre 14], [Cadastre 15], [Cadastre 23], [Cadastre 16], [Cadastre 9] et [Cadastre 10] sur le fondement de la prescription acquisitive ;

- Ordonné l'annulation de l'acte de notoriété reçu le 30 novembre 2018 par Maître [P] [Z], Notaire à [Localité 24] ;

- Dit que Mme [B] [Y] et M. [J] [Y] sont propriétaires indivis des parcelles cadastrées [Cadastre 17], [Cadastre 11], [Cadastre 12], [Cadastre 13], [Cadastre 14], [Cadastre 15], [Cadastre 23], [Cadastre 16], [Cadastre 9] et [Cadastre 10] se trouvant sur la commune de [Localité 25] ;

- Ordonné la publication du jugement au service de la publicité foncière dont dépend l'immeuble, soit au service de la publicité foncière de [Localité 21] 1 ;

- Dit que la SAS LES ORMEAUX et la S.A.R.L. HUBEO sont redevables d'une indemnité d'occupation à l'égard de Mme [B] [Y] pour l'occupation sans droit ni titre des parcelles cadastrées [Cadastre 17], [Cadastre 11], [Cadastre 12], [Cadastre 13], [Cadastre 14], [Cadastre 15], [Cadastre 23], [Cadastre 16], [Cadastre 9] et [Cadastre 10] se trouvant sur la commune de [Localité 25] à compter du 31 octobre 2018;

- Condamné in solidum la SAS LES ORMEAUX et la S.A.R.L. HUBEO à verser à Mme [B] [Y] la somme de 4 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la première instance ;

- Condamné in solidum la SAS LES ORMEAUX et la S.A.R.L. HUBEO aux entiers dépens de la première instance ;

Réformer le jugement du tribunal judiciaire de SAINTES du 10 septembre 2021 en ce qu'il a :

- Rejeté la demande de Mme [B] [Y] au titre de l'irrecevabilité de l'action de la SAS LES ORMEAUX et la S.A.R.L. HUBEO;

- Rejeté la demande de Mme [B] [Y] aux fins de fixation de l'indemnité d'occupation ;

Statuant à nouveau,

Déclarer irrecevables et mal fondées la SAS LES ORMEAUX et la S.A.R.L. HUBEO ;

Condamner solidairement la SAS LES ORMEAUX et la S.A.R.L. HUBEO à verser à Mme [B] [Y] une indemnité d'occupation de 3 510 000,00 € (trois millions cinq cent dix mille euros) ;

Condamner solidairement la SAS LES ORMEAUX et la S.A.R.L. HUBEO à payer à Mme [B] [Y] une somme de 8 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens'.

A l'appui de ses prétentions, Mme [B] [Y] soutient notamment que :

- elle rapporte la preuve qu'elle est propriétaire indivise des parcelles objet de la demande selon acte notarié du 30 septembre 1997 d'attestation immobilière.

- la SAS LES ORMEAUX est une société exploitante du camping Les Ormeaux sis à [Localité 25].

- l'acte de notoriété acquisitive du 30 novembre 2018 signée par Maître [P] [Z] notaire associé à [Localité 24] est rédigé avec beaucoup de précautions et reste sans effet pour justifier de l'action en prescription acquisitive.

Cet acte ne crée pas de droit de propriété et ne vaut que comme un élément de preuve parmi d'autres.

- ce document et ceux annexés concernant l'exploitation du camping n'apportent pas la preuve d'une possession continue, paisible et non équivoque de plus de trente ans.

- s'agissant de l'arrêté délivré le 17 octobre 1994 par la mairie de [Localité 25], portant autorisation d'agrandir un terrain de camping Les Ormeaux, la demande et l'obtention par l'exploitant précédent d'un permis d'extension de son activité de camping ne marque qu'une volonté de se comporter en simple détenteur et de satisfaire à une obligation légale de sécurité.

- l'affirmation selon laquelle l'appelante possède depuis plus de 30 ans de façon continue, paisible, publique et non équivoque les terrains qu'elle occupe n'est justifiée par aucune pièce et aucun élément.

- les pièces adverses n° 7 et 8 produites, en la forme de photomontage de prise de vue ne sont absolument pas probantes quant aux caractéristiques d'arpentage de parcelles de terrain et d'une possession, pas davantage de données temporelles.

- la SOCIÉTÉ LES ORMEAUX a été immatriculée sous le numéro 378 119 242 le 14 mai 1990.

Ayant une existence légale depuis cette date, cette société ne possède donc pas en 2018, depuis plus 30 ans, les parcelles objet de sa demande de prescription acquisitive.

- les sociétés appelantes exposent avoir acquis suivant un protocole d'accord signé le 6 juillet 2012, 500 actions cédées à la SAS LOCARAVANE CAMPING pour le prix de 1 750 000 €, ce protocole révèle incontestablement l'absence de référence au titre d'occupation justifiant l'exploitation du camping sur les parcelles situées à [Localité 25].

Aucune clause n'a été rédigée concernant la surface d'exploitation du camping et surtout la propriété des parcelles et donc encore moins sur le montant des loyers dus au propriétaire.

- l'arrêté délivré par la mairie de [Localité 25] le 17 octobre 1994 portant autorisation d'agrandir un terrain camping les ormeaux ne fait pas référence à un titre d'occupation des parcelles concernées par la demande d'extension.

L'autorisation a été donnée sans vérification par le maire de la commune de [Localité 25] de l'accord du propriétaire des parcelles.

- l'existence légale de la SAS LES ORMEAUX date du 14 mai 1990 et qu'elle occupe sans droit ni titre les parcelles appartenant à Mme [B] [Y] et à son frère depuis 2008, à la suite du transfert de son siège social, soit depuis 9 ans à la date de l'acte d'assignation et les demandes formées sont irrecevables.

- l'installation ponctuelle de matériel de loisir et de structure mobile dont la preuve n'est pas invoquée et pas davantage rapportée qu'ils soient fixés au sol depuis plus de trente années rend la possession équivoque.

- la possession n'est pas paisible, car la SAS LES ORMEAUX et ses prédécesseurs ont ainsi commis et commettent une voie de fait depuis de nombreuses années par atteinte à la loi et au règlement. Ils ne peuvent donc prescrire utilement.

- les parcelles en causes et objet du présent litige sont situées en Zone N du PLU de [Localité 25].

- il y a lieu à annulation de l'acte de notoriété reçu le 30 novembre 2018 par Maître [P] [Z] et à publication de l'arrêt à intervenir.

- il y a lieu à indemnité d'occupation à l'égard de Mme [B] [Y].

Comme point de départ de l'indemnité d'occupation, il conviendra de retenir la date du 1er janvier 2015 et non celle du 31 octobre 2018, date de réclamation. Il y a lieu en effet de réparer le préjudice subi dans son intégralité

Il conviendra de retenir la date du 1er janvier 2015, en considération de la date de la première formulation de la demande indemnitaire en justice et du délai de prescription quinquennal.

- Mme [Y] a fait procéder à une expertise des parcelles litigieuses dont elle est propriétaire et l'expert sollicité a rendu un avis de valeur en date du 15 avril 2022.

Il retient ainsi une valeur locative des parcelles de 3 510 000,00 € pour la période du 1 er janvier 2015 au 31 décembre 2021 et cette somme est sollicitée au titre de l'indemnité d'occupation.

Il convient de se référer aux écritures des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et de leurs moyens.

M. [J] [Y], régulièrement assigné à étude, n'a pas constitué avocat en cause d'appel.

Vu l'ordonnance de clôture en date du 20/03/2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur la recevabilité de l'action engagée à l'encontre de Mme [B] [Y] et M. [J] [Y]:

L'article 122 du code de procédure civile dispose : ' constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée'.

L'article 31 du code de procédure civile dispose que l'action en justice est 'ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé.'

L'article 32 du même code dispose que 'est irrecevable toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d'agir'.

En l'espèce, Mme [B] [Y] conteste la recevabilité de l'action engagée en évoquant le défaut d'applicabilité en l'espèce des dispositions légales relatives à la prescription acquisitive.

Il s'agit là d'une contestation de fond, afférente au bien ou mal fondé de l'action, et non d'une fin de non-recevoir.

La recevabilité de l'action, telle que retenue par le tribunal, sera confirmée.

Sur la prescription acquisitive :

L'article 2272 du code civil dispose que 'le délai de prescription pour acquérir la propriété immobilière est de 30 ans.

Toutefois, celui qui acquiert de bonne foi et par juste titre un immeuble en prescrit la propriété par 10 ans'.

L'article 2261 du même code précise que dans tous les cas de possession, 'pour pouvoir prescrire, il faut une possession continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque, et à titre de propriétaire.'

L'article 2265 du code civil précise que 'pour compléter la prescription, on peut joindre à sa possession celle de son auteur, de quelque manière qu'on lui ait succédé...' cela sous réserve que son auteur ait lui-même possédé de manière continue et non interrompue, paisible, publique, rions équivoque et à titre de propriétaire.

En l'espèce, selon acte du 30 septembre 1997 d'attestation immobilière, il est établi que M. [J] [Y] et sa soeur Mme [B] [Y] ont hérité des parcelles cadastrées [Cadastre 17], [Cadastre 11], [Cadastre 12], [Cadastre 13], [Cadastre 14], [Cadastre 15], [Cadastre 23], [Cadastre 16],[Cadastre 9] et [Cadastre 10] sises communes de [Localité 25].

De même, l'acte de notoriété acquisitive établi en date du 30 novembre 2018 par Maître [P] [Z], notaire à [Localité 24], fait expressément mention de la fiche délivrée par le service de la publicité foncière de [Localité 22] en date du 20 novembre 2018 qui confirme les actes successifs attestant de la propriété des parcelles litigieuses par le père des intimés puis d'un acte notarié passé le 20 mai 1998 et publié au service de la publicité foncière de [Localité 22] les 29 juin et 13 août 1998 aux termes duquel M. [J] [Y] et Mme [B] [Y] sont propriétaires indivis desdites parcelles.

Par acte sous seing privé en date du 6 juillet 2012, M. [A] agissant tant pour son compte que pour celui de la S.A.R.L. CHARMILIE a cédé à la S.A.R.L. FINANCIÈRE LES ORMEAUX, les actions qu'il détenait dans la SAS LOCARAVANE-CAMPING devenue par la suite SAS LES ORMEAUX, présidée par la société S.A.R.L. HUBEO.

Pour se prévaloir de la prescription acquisitive des parcelles litigieuses depuis avant son entrée en propriété du camping LES ORMEAUX, la SAS LES ORMEAUX avec sa présidente fait valoir la jonction des possessions entre la sienne et celle de ses auteurs, notamment la société LOCARAVANE CAMPING.

Les appelantes soutiennent que l'effectivité de la prescription résulterait de l'acte reçu le 30 novembre 2018 par Maître [P] [Z], notaire à [Localité 24] (17), de ce que la SAS LES ORMEAUX, elle et ses auteurs, occupent les parcelles précitées depuis plus de 30 années et ce de manière continue, paisible, publique et non équivoque.

Toutefois, un acte notarié constatant une usucapion ne peut par lui-même et à lui seul établir celle-ci et il appartient au juge d'apprécier si les conditions requises pour l'usucapion sont réunies.

La preuve de cette réunion incombe à celui qui invoque l'usucapion.

En l'espèce, l'acte de notoriété acquisitive en date du 30 novembre 2018 contient l'attestation de M. et Mme [D] qui ont ' attesté comme étant de notoriété publique et à leurs connaissances que depuis plus de TRENTE (30 ans), elle a procédé, lui et ses auteurs, dans le cas de l'exploitation du camping Les Ormeaux, à savoir à [Localité 25], diverses parcelles de terre figurant ainsi au cadastre (suivent les numéros des parcelles litigieuses)

Que cette possession a eu lieu d'une façon continue, paisible et non équivoque.

Que par suite toutes les conditions exigées par l'article 2261 du code civil sont réunies au profit de la société dénommée LES ORMEAUX, dans le siège est à [Adresse 26], identifiée au SIREN sous le numéro 378 11 92 42 immatriculé au registre du commerce et des sociétés de SAINTES.

Qu'il doit être considéré comme possesseur du bien suivi désigné'.

Il résulte ainsi de l'attestation de M. et Mme [D] que les exploitants successifs du camping des Ormeaux avaient exercé depuis plus de 30 ans à la date de cet acte une possession poursuivie publiquement au titre de leur exploitation des parcelles litigieuses.

La SAS LES ORMEAUX a fait procéder par M. [O] [K], expert agricole et foncier et expert immobilier près la cour d'appel de POITIERS à une étude versée aux débats, portant analyse de l'historique de l'occupation des parcelles litigieuses

Cette étude, si elle n'est pas contradictoire, constitue néanmoins un élément d'appréciation régulièrement produit, soumis à la discussion et qui, avec d'autres qui le corroboreraient, peut revêtir une force probante.

Elle s'appuie sur l'analyse de diverses photographies aériennes, dont celles annexées au procès-verbal de constat établi par Maître GODET le 7 mai 2022, afin de définir l'emprise du camping exploité par la SAS LES ORMEAUX et ses auteurs.

Sont ainsi considérées une prise de vue du camping du 29 septembre 1987, deux prises de vue du 28 juillet 1991 montrant l'extension du camping suite à l'arrêté prononcé le 17 octobre 1994 autorisant la capacité du camping à passer de 140 à 166 emplacements, étant précisé que par arrêté du 26 janvier 1998, le camping a été classé en camping mention tourisme en catégorie 3 pour une capacité d'accueil de 189 emplacements.

M. [K] indique ainsi que l'étude comparative de ces clichés démontre que l'occupation des parcelles litigieuses aurait débuté en 1987 dans la partie Nord, comme le montre la photographie aérienne du 29/09/1987 et qu'elle s'est poursuivie vers l'Est, au point qu'en 1989, les parcelles litigieuses étaient occupées dans leur totalité de l'extrémité Nord-Ouest des parcelles [Cadastre 23] et [Cadastre 16] et de l'extrémité Nord-Est de la parcelle [Cadastre 7], selon photographie aérienne du 22/06/1989.

Mme [Y] fait valoir pour contester ces indices que l'occupation était le fait de mobile-homes par nature déplaçables, mais il ressort de ces photographies suffisamment précises soumises à l'appréciation de la cour une présence sytématique de ces équipements et la preuve que cette occupation a effectivement perduré de manière continue sur l'emprise litigieuse à compter du mois de septembre 1987 pendant 30 ans.

Cette étude, fondée sur des documents probants, n'est pas réfutée, et elle est convaincante.

Elle est en cohérence avec les témoignages des époux [D] recueillis dans un acte authentique.

La réalité d'une occupation continue depuis trente ans de l'ensemble des parcelles des consorts [Y] par la société LES ORMEAUX et ses auteurs est ainsi établie.

Le caractère paisible de cette possession est démontré et n'est d'ailleurs pas réellement contredit, puisqu'aucun élément des débats ne permet de retenir l'existence de voies de fait accompagnées de faits de violence physique ou morale, la société LES ORMEAUX et avant elle ses auteurs ayant simplement étendu leur activité de camping aux parcelles litigieuses, sans que Mme [B] [Y] ni M. [J] [Y] s'y soient opposés ou aient fait l'objet , eux-mêmes ou quiconque d'autre au demeurant, d'une contrainte quelconque de la part des occupants.

Cette possession trentenaire n'est pas entachée d'équivoque.

Il n'est ni établi, ni soutenu, que la société LES ORMEAUX aurait occupé les lieux en vertu d'un bail, d'une convention, d'une autorisation quelconque desdits consorts, et ils l'ont été avec l'intention de se conduire en propriétaire.

Aucune équivoque ne peut, par ailleurs, résulter des termes de l'acte de cession du 6 juillet 2012 qui ne concerne que les rapports entre cédant et cessionnaire des parts de la société d'exploitation, et n'avait aucun motif de mentionner, en l'absence de titre, que cette cession inclurait une exploitation des parcelles litigieuses propriété des consorts [Y], même si sont expressément visés à l'acte d'une part les immeubles cédés, et d'autre part des parcelles ([Cadastre 8], [Cadastre 6] et [Cadastre 2]) qui n'étaient pas propriété de la S.A.R.L. LOCARAVANE CAMPING mais qui étaient exploitées par elle, en accord avec leurs propriétaires.

S'agissant du caractère public de la possession, il résulte de l'exploitation continûment ostensible du camping par elle-même, dont témoigne l'arrêté pris par la commune de [Localité 25] le 17 octobre 1994, relatif à l'autorisation d'agrandir un terrain de camping LES ORMEAUX. Cet arrêté fait lui-même référence à un arrêté préfectoral du 19 juillet 1984 autorisant le camping LES ORMEAUX à bénéficier d'une capacité d'accueil de 140 emplacements, cette possession s'exerçant à titre de propriétaire exploitant, à l'identique de l'exploitation des autres parcelles dont la SAS LES ORMEAUX et ses auteurs étaient propriétaires. Au surplus, par arrêté du 26 janvier 1998 le camping a été classé en camping mention tourisme pour une capacité d'accueil de 189 emplacements.

Enfin, si le courrier du maire de la commune en date du 31 janvier 2018 relève que la SAS LES ORMEAUX occuperait les parcelles litigieuses sans autorisation administrative et en infraction au code de l'urbanisme, certaines étant situées zone N inconstructibles, notamment les parcelles [Cadastre 23] et [Cadastre 16], cette situation d'irrégularité impacterait éventuellement les conditions d'exploitation du camping mais ne vient pas vicier la paisibilité de la possession de la SAS LES ORMEAUX, faute de violence de sa part.

En conséquence de ces éléments, la SAS LES ORMEAUX avec sa présidente la S.A.R.L. HUBEO établissent en l'espèce l'existence d'une possession continue, non équivoque, publique et paisible et depuis plus de trente ans par elle et ses auteurs, à titre de propriétaire, des parcelles cadastrées [Cadastre 17], [Cadastre 11], [Cadastre 12], [Cadastre 13], [Cadastre 14], [Cadastre 15], [Cadastre 23], [Cadastre 16],[Cadastre 9] et [Cadastre 10] sises communes de [Localité 25].

Il y a lieu en conséquence d'infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la demande en constat d'acquisition de la propriété de ces parcelles sur le fondement de la prescription acquisitive, et dit que Mme [B] [Y] et M. [J] [Y] sont propriétaires indivis des parcelles cadastrées [Cadastre 17], [Cadastre 11], [Cadastre 12], [Cadastre 13], [Cadastre 14], [Cadastre 15], [Cadastre 23], [Cadastre 16], [Cadastre 9] et [Cadastre 10] sises sur la commune de [Localité 25].

Il y a lieu ainsi de dire que la SAS LES ORMEAUX est propriétaire, par l'effet de la prescription acquisitive, des parcelles suivantes :

- parcelle cadastrée section [Cadastre 17],

- parcelle cadastrée section [Cadastre 11],

- parcelle cadastrée section [Cadastre 12],

- parcelle cadastrée section [Cadastre 13],

- parcelle cadastrée section [Cadastre 14],

- parcelle cadastrée section [Cadastre 15],

- parcelle cadastrée section [Cadastre 23],

- parcelle cadastrée section [Cadastre 16],

- parcelle cadastrée section [Cadastre 9],

- parcelle cadastrée section [Cadastre 10].

sises à [Localité 25], Lieudit [Localité 20] et [Localité 19] pour une surface totale de 64a 69 ca.

Au regard du constat d'usucapion, la publication du présent arrêt sera ordonnée au service de la publicité foncière de [Localité 21] 1, aux frais de la SAS LES ORMEAUX.

Il n'y a pas lieu au surplus à annulation de l'acte de notoriété reçu le 30 novembre 2018 par Maître [P] [Z], notaire à [Localité 24].

Sur la demande reconventionnelle d'indemnité d'occupation :

Etant constaté l'acquisition de la propriété des parcelles litigieuses au bénéfice de la société SAS LES ORMEAUX par l'effet de la prescription acquisitive, il y a lieu de rejeter la demande d'indemnité d'occupation formée par Mme [Y].

Sur les dépens et l'application de l'article 699 du code de procédure civile:

Il résulte de l'article 696 du code de procédure civile que ' La partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. (...).'

Compte tenu de la solution apportée au présent litige, les dépens d'appel seront fixés à la charge in solidum de Mme [B] [Y] et de M. [J] [Y].

Sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile :

Il est équitable de condamner in solidum Mme [B] [Y] et M. [J] [Y] à payer à la société SAS LES ORMEAUX la somme fixée au dispositif du présent arrêt sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par défaut,

DÉCLARE recevable l'action engagée à l'encontre de Mme [B] [Y] et de M. [J] [Y] par la SAS LES ORMEAUX et la S.A.R.L. HUBEO en sa qualité de président de la SAS LES ORMEAUX

INFIRME le jugement entrepris.

Statuant à nouveau,

DIT que la SAS LES ORMEAUX est propriétaire, par l'effet de la prescription acquisitive, des parcelles suivantes :

- parcelle cadastrée section [Cadastre 17],

- parcelle cadastrée section [Cadastre 11],

- parcelle cadastrée section [Cadastre 12],

- parcelle cadastrée section [Cadastre 13],

- parcelle cadastrée section [Cadastre 14],

- parcelle cadastrée section [Cadastre 15],

- parcelle cadastrée section [Cadastre 23],

- parcelle cadastrée section [Cadastre 16],

- parcelle cadastrée section [Cadastre 9],

- parcelle cadastrée section [Cadastre 10].

sises à [Localité 25], Lieudit [Localité 20] et [Localité 19] pour une surface totale de 64a 69 ca.

ORDONNE la publication du présent arrêt au service de la publicité foncière de [Localité 21] 1, aux frais de la SAS LES ORMEAUX.

DIT n'y avoir lieu à annulation de l'acte de notoriété acquisitive dressé le 30 novembre 2018 par Maître [P] [Z], notaire à [Localité 24].

DÉBOUTE Mme [B] [Y] de sa demande d'indemnité d'occupation.

Y ajoutant,

DÉBOUTE les parties de leurs autres demandes plus amples ou contraires.

CONDAMNE in solidum Mme [B] [Y] et M. [J] [Y] à payer à la société SAS LES ORMEAUX la somme de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause de première instance et d'appel.

CONDAMNE in solidum Mme [B] [Y] et M. [J] [Y] aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Poitiers
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21/03055
Date de la décision : 11/07/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-07-11;21.03055 ?
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