ARRET N°313
N° RG 21/02954 - N° Portalis DBV5-V-B7F-GMHA
[V]
C/
[I]
[I]
[F]
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE POITIERS
1ère Chambre Civile
ARRÊT DU 27 JUIN 2023
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/02954 - N° Portalis DBV5-V-B7F-GMHA
Décision déférée à la Cour : jugement du 07 septembre 2021 rendu par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de LA ROCHELLE.
APPELANTE :
Madame [E] [V]
[Adresse 4]
[Localité 2]
ayant pour avocat Me Cécile HIDREAU de la SCP BODIN-BOUTILLIER-DEMAISON-GIRET-HIDREAU-SHORTHOUSE, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT
INTIMES :
Madame [X] [H] épouse [I]
née le 18 Janvier 1980 à [Localité 8]
[Adresse 5]
[Localité 9]
Monsieur [U] [I]
né le 13 Janvier 1979 à [Localité 8]
[Adresse 5]
[Localité 9]
ayant tous les deux pour avocat Me Véronique CASTEL de la SELARL BONNEAU-CASTEL-PORTIER-GUILLARD, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT
Monsieur [O] [F]
né le 17 Janvier 1967 à [Localité 7]
[Adresse 1]
[Localité 3]
ayant pour avocat Me Christophe BELLIOT, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des articles 907 et 786 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 27 Avril 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant :
Madame Anne VERRIER, Conseiller
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. Thierry MONGE, Président de Chambre
Madame Anne VERRIER, Conseiller
Monsieur [O] MAURY, Conseiller
GREFFIER, lors des débats : Mme Elodie TISSERAUD,
ARRÊT :
- Contradictoire
- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,
- Signé par M. Thierry MONGE, Président de Chambre, et par Mme Elodie TISSERAUD, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DES FAITS, DE LA PROCÉDURE, DES PRÉTENTIONS
Les époux [F] ont acquis un terrain le 11 octobre 2007 situé à [Localité 9] (Charente-Maritime) et construit une maison.
Ils ont réalisé l'intégralité des travaux à l'exception du lot chauffage, emménagé courant 2009.
Le couple s'est séparé le 1er novembre 2014.
Par acte du 22 octobre 2016, ils ont vendu l'immeuble aux époux [I] pour un prix de 240 000 euros.
L'acte de vente indique en page 15 : 'le vendeur déclare avoir effectué lui-même tous les travaux de construction', information écrite en gras et soulignée.
Le divorce des époux [F] a été prononcé par jugement en date du 22 novembre 2018.
Les acquéreurs ont entrepris des travaux de rénovation, les ont interrompus.
Ils ont mandaté un huissier de justice aux fins de constat le 19 février 2018.
L'huissier de justice était requis pour constater des infiltrations au niveau des porte-fenêtres, des problèmes d'étanchéité des ouvertures.
Il faisait l'inventaire des désordres affectant la cave inondée, les infiltrations d'eau et d'air, le dysfonctionnement des portes, des volets, de la VMC, constatait des moisissures et infiltrations.
Les époux [I] ont ensuite mandaté un cabinet d'expertise: le cabinet Veritim.
Ce dernier constatait le 1er mars 2018 divers désordres et notamment :
-le bâti fuyard de la dépendance
-des baies fuyardes en lien avec les menuiseries et les seuils maçonnés
-l'impossibilité d'utiliser la fosse de la cuisine servant de cave au motif que l'eau remonte, l'impossibilité d'utiliser la cuvette WC à l'étage
-la non-conformité de l'escalier en bois
-une isolation thermique laissant ponctuellement à désirer
-le défaut d'entretien de l'installation de chauffage-climatisation, du réseau VMC
-l'absence de radiateurs à l'étage.
Le cabinet estimait à 90 000 euros minimum le coût des travaux de reprise, considérait que la maison n'était pas actuellement habitable.
Les acquéreurs ont assigné leurs vendeurs devant le juge des référés le 20 juillet 2018 aux fins d'expertise judiciaire.
L'expert désigné par ordonnance du 16 octobre 2018 a déposé son rapport le 9 mars 2020.
Par acte du 15 juin 2020, les consorts [I] ont assigné M. [F] et Mme [V] devant le tribunal judiciaire de La Rochelle aux fins d'indemnisation sur le fondement de la garantie des vices cachés.
Par jugement du 7 septembre 2021 , le tribunal judiciaire de La Rochelle a statué comme suit :
'-dit que l'immeuble vendu par Monsieur [O] [F] et Madame [E] [V] à Monsieur [U] [I] et Madame [X] [I] le 22 octobre 2016 situé [Adresse 6] à [Localité 9] pour le prix de 240 000€ était affecté au jour de la vente de vices cachés dont la gravité est telle que les acquéreurs n'en auraient donné qu'un moindre prix,
-dit que la clause d'exclusion de garantie des vices cachés contenue à l'acte de vente ne peut s'appliquer,
-condamne en conséquence M. [F] et Mme [V] à verser à M. [U] [I] et Mme [X] [I] les sommes de :
.164 209,44€ avec indexation sur l'indice BT 01, indice de référence celui du 09 mars 2020, date du rapport d'expertise puis avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation en justice,
.12 000€ à titre de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice de jouissance et de leur préjudice moral,
.5000€ en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
-déboute Mme [V] de sa demande tendant à être garantie des condamnations prononcées à son encontre par M. [F],
-condamne M. [F] et Mme [V] aux dépens qui comprendront ceux de l'instance en référé, le coût du constat d'huissier du 19 février 2018 et les honoraires de l'expert judiciaire,
-rappelle que la présente décision bénéficie de plein droit de l'exécution provisoire '
Le premier juge a notamment retenu que :
La clause d'exclusion ne s'applique pas.
Le vendeur a procédé à la quasi intégralité des travaux.
Les travaux de construction ont été réalisés avant le départ de l'épouse.
Les infiltrations d'eau et d'air n'étaient pas visibles lors des visites.
Les autres désordres ne sont pas visibles d'un acquéreur profane normalement diligent.
L'immeuble est affecté de nombreux désordres cachés et qui sont pour certains de nature à rendre l'immeuble impropre à destination.
Les travaux nécessaires à la remise en état ont été chiffrés à la somme de 164.209,44 euros.
Il est incontestable que les acquéreurs ne peuvent jouir normalement de leur immeuble au regard notamment du défaut d'isolation, du défaut d'étanchéité à l'air, qu'ils en seront privés durant deux mois minimum durant la réalisation des travaux.
Le préjudice moral et de jouissance sera réparé par l'allocation d'une somme de 12 000 euros.
LA COUR
Vu l'appel en date du 12 octobre 2021 interjeté par Mme [V]
Vu l'article 954 du code de procédure civile
Aux termes du dispositif de ses dernières conclusions en date du 1er juillet 2022, Mme [E] [V] a présenté les demandes suivantes :
Vu les dispositions des articles 1641 et suivants du Code civil ;
Vu les dispositions des articles 262-1 et 1442 du Code civil ;
-RÉFORMER le jugement rendu par le Tribunal judiciaire de LA ROCHELLE le 7 septembre 2021 en ce qu'il a :
-considéré «comme une seule et même partie » Monsieur [O] [F] et Madame [E] [V] et - ce faisant - considéré Madame [E] [V] tenue à la garantie des vices cachés tout autant que son ex-conjoint;
-condamné Madame [E] [V] avec son ex-conjoint, Monsieur [O] [F] à payer à Monsieur et Madame [I] :
non seulement le coût des travaux de remise en état, soit la somme principale de 164 209.44 € avec indexation sur l'indice BT1, outre les intérêts au taux légal à compter de l'assignation en justice ;
mais aussi la somme 12000 € à titre de dommages et intérêts, outre 5000 € au titre des frais irrépétibles et les entiers dépens, le tout étant assorti de l'exécution provisoire de droit.
Statuant de nouveau,
A titre principal :
-dire et juger que Mme [V] n'a pas participé aux travaux de construction de l'immeuble litigieux et n'a au surplus aucune qualification dans le domaine de la construction
-constater en tout état de cause qu'elle a quitté l'immeuble litigieux le 1 novembre 2014 ;
-dire et juger que seul M. [O] [F] a la qualité de vendeur constructeur, en ce qu'il a conçu puis construit l'immeuble litigeux ;
-dire et juger que la clause d'exclusion de la garantie des vices cachés contenue dans l'acte notarié conclu le 22 octobre 2016 a vocation à pleinement s'appliquer pour ce qui concerne Madame [E] [V], laquelle ne saurait être assimilée à un vendeur constructeur ;
-Rejeter en conséquence les prétentions, fins et conclusions des époux [I] dirigées à son encontre ;
A titre subsidiaire :
Si par extraordinaire, Mme [V] devait été considérée comme tenue au titre de la garantie des vices cachés, dire et juger que M. [F] sera tenu de la relever indemne de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre.
-Condamner également ce dernier à verser à Mme [V] la somme de 4000€ au titre des frais irrépétibles, outre les entiers dépens,
A l'appui de ses prétentions, Mme [V] soutient en substance que :
-Les époux avaient cessé la vie commune depuis le 1er novembre 2014.
-Plusieurs visites ont précédé la vente.De nombreux vices étaient apparents.
-M. [I] est maçon. C'est donc un professionnel de la construction.
Les acquéreurs étaient particulièrement avisés.
La clause d'exclusion de garantie des vices cachés s'applique.
-C'est M. [F] qui a construit l'immeuble.
-Le divorce a été prononcé par jugement du 22 novembre 2018.
-Elle ne sait pas ce que son ex mari a fait après son départ. Elle était de parfaite bonne foi.
Aux termes du dispositif de ses dernières conclusions en date du 6 avril 2022 , M. [F] a présenté les demandes suivantes :
-Déclarer recevable et fondé l'appel incident de Monsieur [F],
En conséquence,
-Infirmer le jugement dont appel,
Ce faisant, statuant à nouveau,
-À titre principal,
dire et juger que la clause d'exclusion de garantie des vices cachés contenue à l'acte de vente doit s'appliquer,
-débouter les époux [I] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions.
Subsidiairement,
-limiter le montant des sommes dues par application des principes du régime de la garantie des vices cachés soit 14.122,84 €.
En tout état de cause,
Dans la mesure où la cour confirmerait l'inapplicabilité de la clause de non garantie,
-confirmer le jugement en ce qu'il a retenu la garantie solidaire de M. [F] et de Mme [V] ,sans que M. [F] puisse être condamné à garantir Mme [V] au titre de sa part de condamnation.
-condamner les époux [I] et Mme [V] à payer, chacun, à Monsieur [F] la somme de 5.000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile
-réformer le jugement en ce qu'il a débouté Monsieur [F] de sa demande de condamnation à l'article 700 envers les époux [I] à hauteur de 5.000,00 € devant le Tribunal Judiciaire de La Rochelle.
-condamner ensemble les époux [I] et Mme [V] aux entiers dépens de première instance et d'appel.
A l'appui de ses prétentions, M. [F] soutient en substance que :
-L'acquéreur avait une compétence technique.
-Les désordres structurels sont invoqués dans l'assignation. Ils ne pouvaient passer inaperçus de l'acquéreur qui est maçon et chef d'équipe.
-L' huissier de justice a su relever les désordres décrits dans l'assignation. Un maçon serait moins compétent qu'un huissier de justice.
-Des visites ont précédé l'achat. De nombreux désordres étaient apparents.
-Les sondages n'étaient pas utiles pour constater le défaut d' encastrement des fenêtres et des porte-fenêtres dans la maçonnerie. Ils étaient visibles surtout pour un maçon tout comme les défauts du garage et de la terrasse, les parties non enduites de la maçonnerie.
-L'état des ventilateurs de la climatisation n'est pas un vice grave, relève de l'entretien comme le nettoyage de la VMC.
-L'acquéreur a enlevé le meuble qui fixait l' escalier en bois.
-Les portes frottaient déjà lors des visites.
-Le chauffe-eau avait plus de 10 ans. Il n'y a jamais eu de radiateurs à l'étage.
-La contre-pente de la douche n'est pas un vice. Le WC installé trop haut était apparent.
-L' installation d'électricité, le tout à l'égout, la fosse de récupération des eaux pluviales, la cave avaient les mêmes caractéristiques à la date de la vente.
-Les travaux de couverture, d'isolation, de cuvelage de la cave préconisés sont disproportionnés, excèdent les non-conformités dénoncées.
-L'immeuble n'était pas terminé au moment de la vente. Les garage et studio étaient en cours de construction.
-Le préjudice de jouissance n'est pas justifié.
-Il n'a pas fait de travaux après la séparation du couple. Mme [V] n'a pas renoncé au prix de vente.
Aux termes du dispositif de leurs dernières conclusions en date du 11 février 2022, les époux [I] ont présenté les demandes suivantes :
Vu les dispositions des articles 1641 et suivants du code civil,
Vu le rapport d'expertise judiciaire de Monsieur [G],
DIRE Madame [V] mal fondée en son appel;
-CONFIRMER le jugement rendu par le Tribunal Judiciaire de LA ROCHELLE le 7 septembre 2021, en toutes ses dispositions ;
Y AJOUTANT,
-CONDAMNER Monsieur [O] [F] et Madame [E] [V] à payer à Monsieur [U] [I] et Madame [X] [H] épouse [I] la somme de 5.000,00 €. en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens d'appel.
A l'appui de leurs prétentions, ils soutiennent en substance que :
-L'expert judiciaire a relevé que M. [F] avait construit la maison à l'exception de la climatisation et de l'installation du chauffe-eau dont il avait réalisé le tubage.
Il n'a pas demandé de permis avant de construire le garage, aménager le studio.
Aucune étude de sol n'a été faite.
-La pompe d'évacuation qui avait été prévue pour la cave n'a pas été installée.
-Il n'y a pas d'écran sous la toiture.
-L'étanchéité à l'air, le chauffage sont défaillants.
-L'expert a estimé le coût des reprises à 164 209,44 euros TTC.
Les défauts sont graves. Le traitement curatif est très onéreux.
-Des désordres ont été dissimulés.
Une plaque de placo-plâtre recouvrait un trou important créé par une fuite entre le chauffe-eau et la douche de la salle de bains.
-Les vendeurs sont constructeurs-vendeurs.
La déclaration atteste de l'achèvement des travaux au 1er juin 2010, a été reçue le 2 août 2016.
Ils n'ont respecté aucune des règles de construction.
L'immeuble n'a pas été entretenu.
-La fuite de la douche à l'étage est apparue en 2017.
-Des infiltrations sur le solin de la salle de jeu sont apparues en cours d'expertise.
-Les anomalies constructives n'étaient pas décelables.
-L'expert judiciaire a fait des sondages, est allé dans les combles, est monté sur toit, s'est adjoint un sapiteur.
-Les désordres n'affectent pas la maçonnerie.
-Il y a indivisibilité entre les vendeurs. Mme [V] est constructeur également.
-Les vendeurs ne démontrent pas que les défauts étaient apparents et connus.
Ils sont quant à eux réputés les avoir connus.
-Les vices rendent l'immeuble impropre à son usage normal.
Il convient de se référer aux écritures des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et de leurs moyens.
Vu l'ordonnance de clôture en date du 2 mars 2023.
SUR CE
-sur la mise hors de cause de Mme [V]
Il résulte des pièces que le divorce des époux [F] a été prononcé par jugement du 22 novembre 2018 postérieurement à la vente qui a été réitérée le 22 octobre 2016.
Le fait que le couple soit séparé de fait depuis novembre 2014 est inopérant d'autant que Mme [V] qui a participé aux opérations d'expertise judiciaire ne soutient, ni ne démontre que des travaux ont été effectués par M. [F] après qu'elle a quitté l'immeuble.
Les travaux litigieux ont été financés et réalisés par le couple.
Il n'importe de déterminer si l'un des ex-époux a matériellement réalisé les travaux plutôt que l'autre, l'immeuble ayant été édifié non par des professionnels mais par les époux qui ont l'un et l'autre perçu le prix de vente.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a dit que M. [O] [F] et Mme [E] [V] devaient être qualifiés de constructeurs-vendeurs.
-sur la clause d'exclusion des vices cachés
Le tribunal a écarté la clause d'exclusion de garantie des vices cachés.
Mme [V] soutient que la clause d'exclusion s'applique au motif que les acquéreurs étaient compétents, avisés, M. [I] étant maçon.
L'acte de vente stipule une clause de non garantie des vices cachés, clause qui ne s'applique pas :
-si le vendeur a la qualité de professionnel de l'immobilier ou de la construction, ou s'il est réputé ou s'est comporté comme tel,
-s'il est prouvé par l'acquéreur dans les délais légaux que les vices cachés étaient en réalité connus du Vendeur.
L'acte indique en page 15, en gras souligné: ' le Vendeur déclare avoir effectué lui-même tous les travaux de constructions'.
Compte tenu des travaux effectués par le vendeur, travaux qui ont porté sur l'intégralité des lots à l'exception du lot chauffage, et donc sur la charpente, la toiture, la maçonnerie, les menuiseries, l'isolation, le second oeuvre, les salles de bain, les vendeurs sont réputés être des professionnels de la construction.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a retenu que la clause d'exclusion des vices cachés ne pouvait d'aucune manière s'appliquer.
L'expert judiciaire a en outre mis en évidence la dissimulation par une plaque de placo-plâtre d'un trou important créé par une fuite entre le chauffe-eau et la douche de la salle de bains, élément qui établit une connaissance par les vendeurs d'une cause d'infiltration qui a été occultée.
-sur le caractère caché des vices
Les vendeurs soutiennent que les vices étaient apparents, que les acquéreurs ont acheté en connaissance de cause dans la mesure où M. [I] est maçon.
M. [F] fait valoir que l'assignation aux fins d'expertise invoque d'ores et déjà des désordres structurels, que l'huissier de justice qui n'est pas un technicien de la construction a été en mesure de constater les désordres le 19 février 2018.
Il rappelle que plusieurs visites ont précédé la vente.
Il estime qu'un maçon était évidemment à même de se rendre compte des défauts affectant les fenêtres et porte-fenêtres, le garage, la terrasse.
Il estime que les défauts affectant :
-la cave, dépourvue d'étanchéité,
-l'escalier non-conforme,
-les portes qui frottent,
-l'ancienneté du chauffe-eau
-les radiateurs absents à l'étage,
-le tout à l'égout, la récupération des eaux pluviales,
-les parties non enduites de la maçonnerie,
-les gouttières manquantes,
-le WC installé en hauteur
étaient apparents, visibles, connus.
Il assure avoir vendu un ensemble inachevé s'agissant en particulier du garage et du studio installé dans le garage.
Les époux [I] soutiennent au contraire que les désordres étaient cachés, qu'ils n'ont pu les découvrir qu'après occupation des lieux et à l'occasion des travaux entrepris.
L'article 1642 du code civil dispose que le vendeur n'est pas tenu des vices apparents et dont l'acheteur a pu se convaincre lui-même.
L'expert rappelle que 5 visites ont précédé la signature.
Il indique que fin 2016- courant 2017 de mauvaises odeurs sont apparues, des moisissures, des fuites survenues.
Il a consigné la présence de cales toujours présentes et apparentes sous les porte-fenêtres dans le béton.
Il résulte des productions, du constat d'huissier de justice du 19 février 2018 et du rapport d'expertise que plusieurs désordres, non-conformités étaient apparents d'une part, ne pouvaient échapper à l' acquéreur dont le métier est d'être maçon d'autre part ainsi que le soutient le vendeur.
Rentrent dans la catégorie des vices apparents les désordres suivants :
-la non-conformité de l'escalier que les époux [I] ont d'ailleurs fait renforcer
-les défauts de pose affectant les portes qui ferment mal ou ne s'ouvrent pas,
-les dysfonctionnements des volets roulants
-l'ancienneté du chauffe-eau décrit comme rouillé et fuyard
-l'absence de radiateurs à l'étage (des attentes électriques étaient présentes pour poser les radiateurs)
-l'absence de gouttières notamment sur le garage
-la pose des cuvettes suspendues placées trop haut au regard du niveau du sol
Rentrent dans la catégorie des vices apparents compte tenu de la qualification de l'acquéreur qui est maçon :
-les défauts de la terrasse dont les pierres sont plus hautes que les seuils ce qui est une source d'infiltrations
-les parties non enduites de la maçonnerie
-le défaut de seuil du garage.
Peuvent donc seuls être qualifiés de vices cachés :
-le défaut d'isolation qui est très insuffisante parfois absente dans certaines pièces notamment dans la salle de jeux.
-les non-conformités des menuiseries dont les ouvertures présentent un grave défaut d'étanchéité.
-le défaut d'étanchéité de la cave de la cuisine, le défaut de pompe d'évacuation dans la cave de la cuisine.
-l'insuffisance structurelle de l'installation de chauffage aggravée par le défaut d'entretien.
Si les appareils de climatisation réversible sont présents, et font beaucoup de bruit, ils ne permettent pas de chauffer la maison
-les dysfonctionnements de la VMC de la salle de bains, du rez de chaussée.
La VMC est installée mais ne fonctionne pas car elle a été mal posée (tuyaux percés et coudés).
-le défaut de pose affectant le sol de la douche qui a pour effet que l'eau s'écoule vers une chambre.
-le dysfonctionnement du tout à l'égout qui est régulièrement bouché du fait de l'existence d'une contre-pente.
-les fuites de la toiture, la non-conformité de la pente de la toiture étant précisé que les fuites sur le solin de la salle de jeux sont apparues pendant les opérations d'expertise.
Les vices précités n'ont pu être découverts qu'à la faveur d'une occupation effective de l'immeuble et des travaux engagés.
Il sera rappelé que les visites de l'immeuble sont intervenues en juillet, période qui ne permettait nullement aux acquéreurs d'appréhender l'insuffisance structurelle de l'installation de chauffage et du défaut d'isolation de l'immeuble.
-sur la gravité des vices
M. [F] soutient que les vices n'ont pas la gravité requise, que les travaux prescrits sont surestimés s'agissant de la reprise de la couverture, de l'isolation.
L'article 1641 du code civil dispose que le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage, que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix s'il les avait connus.
Les acquéreurs font valoir la multiplicité et la gravité des désordres, le coût des travaux chiffré par l'expert à la somme de 164 209,44 euros.
L'expert indique que le studio est impropre à sa destination et que la maison va le devenir très rapidement du fait d'une isolation insuffisante, des fuites de la toiture, des infiltrations d'air affectant toutes les menuiseries, de l'insuffisance du chauffage.
Il stigmatise les infiltrations d'eau et d'air.
Il indique que le chauffage fonctionne comme si les fenêtres étaient ouvertes en plein hiver toute la journée, que le test de l'étanchéité à l'air révèle de grosses carences. Il compare l'immeuble à un gruyère.
Il résulte de cette analyse que l'immeuble acquis présente des vices tels qu'ils compromettent la destination de l'immeuble comme maison d'habitation, que la situation ne peut que s'aggraver s'il n'est pas procédé à des travaux d'importance dans un délai rapide.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a retenu que l'immeuble vendu était atteint à la date de la vente de vices cachés graves justifiant l'action en indemnisation exercée par les acquéreurs.
-sur les préjudices
L'article 1644 du code civil dispose:
Dans le cas des articles 1641 et 1643, l'acheteur a le choix de rendre la chose et de se faire restituer le prix , ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du prix.
L'article 1645 du code civil prévoit: Si le vendeur connaissait les vices de la chose, il est tenu, outre la restitution du prix qu'il en a reçu, de tous les dommages et intérêts envers l'acheteur. En l'espèce, les vendeurs sont réputés avoir eu connaissance des vices, sont donc tenus d'indemniser les acquéreurs de l'intégralité des préjudices subis.
Le coût des travaux de reprise correspondant aux vices cachés précités sera fixé sur la base du rapport d'expertise qui a détaillé chacun des postes à la somme de 78 544 euros.
Il convient d'y ajouter des frais de maîtrise d'oeuvre à hauteur de 10 % qui sont justifiés au regard de l'importance et de la technicité des travaux à réaliser sur l'existant.
Le coût des travaux sera donc fixé à 86.398 euros (78.544 + 7854), somme indexée sur l'évolution de l'indice BT 01 depuis le dépôt du rapport d'expertise.
M. [F] estime que le préjudice de jouissance allégué n'est pas établi.
L'expert indique que la famille [I] est exposée à des conditions d'habitation difficiles du fait du manque de chauffage et d' isolation surtout en hiver.
Il rappelle que la réalisation des travaux justifiera des frais de déménagement et de logement, estime la durée des travaux à 5 mois.
Ces préjudices existent alors même que la cour n'a pas retenu l'intégralité des vices pris en compte par le tribunal.
Il existe un préjudice de jouissance tangible au regard des conditions de vie induites par le manque de chauffage et les défauts d'isolation, l'obligation de déménager le mobilier et la famille du fait des travaux à réaliser, un préjudice moral, préjudices qui perdurent depuis octobre 2016 et qui seront évalués respectivement à 1500 euros et 500 euros par an, soit 14 000 euros.
-sur les autres demandes
Les frais de constat d'huissier de justice ne font pas partie des dépens.
Le jugement sera donc infirmé de ce chef.
Leur coût est pris en compte dans la fixation de l'indemnité allouée au titre des frais de procédure.
Il résulte de l'article 696 du code de procédure civile que ' La partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. (...).'
Compte tenu de la solution apportée au présent litige, les dépens d'appel seront fixés à la charge de M. [F] et de Mme [V].
Il est équitable de les condamner à payer aux époux [I] la somme fixée au dispositif du présent arrêt sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile .
PAR CES MOTIFS
statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort
-confirme le jugement en ses dispositions soumises à la cour sauf en ce qu'il a :
-condamné M. [F] et Mme [V] à verser aux époux [I] les sommes de :
.164 209,44 euros avec indexation sur l'indice BT 01, indice de référence celui du 09 mars 2020, date du rapport d'expertise puis avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation en justice,
-12 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice de jouissance et du préjudice moral
-condamné M. [F] et Mme [V] aux dépens qui comprendront le coût du constat d'huissier du 19 février 2018
Statuant de nouveau sur les points infirmés
-condamne M. [O] [F] et Mme [E] [V] à verser aux époux [U] et [X] [I] les sommes de :
-86.398 euros somme indexée sur l'évolution de l'indice BT 01 depuis le 9 mars 2020, date du dépôt du rapport d'expertise
-14.000 euros en réparation du préjudice de jouissance et du préjudice moral
-condamne M. [F] et Mme [V] aux dépens incluant les frais de référé et d'expertise judiciaire
Y ajoutant :
-déboute les parties de leurs autres demandes
-condamne M. [F] et Mme [V] aux dépens d'appel
-condamne M. [F] et Mme [V] à payer aux époux [I] la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile .
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,