ARRET N°255
CL/KP
N° RG 22/01462 - N° Portalis DBV5-V-B7G-GR5B
[U]
C/
[I]
Société [28] CHEZ [31]
Société [20] CHEZ [24]
Société [35]
S.C.P. [33]
Société [23]
Société S.A.I. [32]
S.A. [25]
Etablissement RSI PICARDIE
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE POITIERS
2ème Chambre Civile
ARRÊT DU 06 JUIN 2023
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/01462 - N° Portalis DBV5-V-B7G-GR5B
Décision déférée à la Cour : jugement du 05 mai 2022 rendu par le Juge des contentieux de la protection des SABLES D'OLONNE.
APPELANTE :
Madame [E] [U]
[Adresse 18]
[Localité 17]
Représentée à l'audience par Me Olivier MORINO de la SAS BDO AVOCATS ATLANTIQUE, avocat au barreau de LA ROCHE-SUR-YON
INTIMES :
Monsieur [Y] [I]
[Adresse 3]
[Localité 2]
Non Comparant
Société [28] CHEZ [31]
Service surendettement
[Adresse 5]
[Localité 7]
Non Comparant
Société [20] CHEZ [24]
Surendettement
[Adresse 27]
[Localité 12]
Non Comparant
Société [35]
[Adresse 6]
[Adresse 22]
[Localité 15]
Non Comparant
S.C.P. [33]
[Adresse 10]
[Localité 11]
Non Comparant
Société [23]
[19]
[Adresse 21]
[Localité 14]
Non Comparant
Société S.A.I. [32]
[Adresse 8]
[Localité 1]
Non Comparant
S.A. [25]
[Adresse 9]
[Localité 13]
Non Comparant
Etablissement RSI PICARDIE
Caisse de régime social des indépendants
[Adresse 4]
[Localité 16]
Non Comparant
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des articles 907 et 786 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 03 Avril 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant :
Monsieur Cédric LECLER, Conseiller
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Claude PASCOT, Président
Monsieur Fabrice VETU, Conseiller
Monsieur Cédric LECLER, Conseiller
GREFFIER, lors des débats : Madame Véronique DEDIEU,
ARRÊT :
- REPUTE CONTRADICTOIRE
- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,
- Signé par Monsieur Claude PASCOT, Président, et par Madame Véronique DEDIEU, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
******
Par déclaration enregistrée le 10 décembre 2018 au secrétariat de la commission de surendettement des particuliers de la Vendée (la commission), Madame [E] [U] a demandé le traitement de sa situation d'endettement.
Le 8 février 2019, sa demande a été déclarée irrecevable par la commission et un recours a été formé par la débitrice le 1er mars 2019.
Le 9 avril 2020, le juge a prononcé la recevabilité du dossier de Madame [U].
Les 7 et 17 juillet 2020, la commission a alors déclaré le dossier recevable, décidé de l'orienter vers des mesures imposées et a transmis un état détaillé des dettes.
L'état détaillé des dettes a été notifié à Madame [U], par lettre recommandée reçue le 22 juillet 2020, et aux créanciers.
Par lettre recommandée du 6 août 2020, Madame [U] a contesté, dans le délai prévu à l'article R.723-8 du code de la consommation, l'état détaillé aux motifs que les créances seraient les suivantes :
- [25] : 0 euro,
- RSI Picardie : 0 euros,
- [20] : 39.551,40 euros
- [26] : 80.075,79 euros,
-[28] : 12.412, 29 euros,
La commission a transmis la demande de vérification du passif au juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire des Sables d'Olonne.
Par jugement en date du 8 avril 2021, il a fixé les créances ainsi qu'il suit :
- RSI PICARDIE ref 2580851515003 : 8.908 euros
- [25] ref M04064959001 : 0 euro
- [20] ref 81581828351 : 40.357,80 euros
- [28] ex [26] caution : 80.075,79 euros
- [28] ex [26] ref 347896824 + CONNEX/V014817881 : 12.412 29 euros.
A l'issue de cette procédure de vérification des créances, la commission a adopté le 19 août 2021 des mesures prévoyant le remboursement des dettes selon des mensualités de 525 euros au taux 0% sur une durée de 50 mois, Madame [U] ayant déjà bénéficié de précédentes mesures pendant une durée de 24 mois, les mesures ne permettant pas à Madame [U] de solder toutes les dettes, le solde dû de 186.627,39 euros ayant été effacé.
Les ressources retenues étaient de 2.092 euros, les charges de 1.567 euros, la capacité de remboursement de 525 euros et le maximum légal de remboursement de 724,35 euros.
La commission n'a retenu aucune personne à charge.
Le montant global de l'endettement était chiffré à la somme de 212.877,50 euros.
La commission a également réalisé un nouvel état détaillé le 23 septembre 2021.
Par courrier daté du 14 septembre 2021, la banque [20] a contesté ces mesures au motif qu'il résultait des mesures imposées une rupture d'égalité entre les créanciers, les crédits liés à la consommation faisaient l'objet d'un plan de remboursement sur 44 mois tandis que le prêt immobilier faisait l'objet d'un moratoire de 50 mois suivi d'un effacement des dettes.
Par jugement en date du 05 mai 2022, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire des Sables d'Olonne a :
- déclaré recevable le recours de la banque [20] ;
- fixé les créances telles qu'arrêtées dans l'état des créances établi par la commission de surendettement des particuliers;
- fixé le 'reste à vivre' de Madame [E] [U] à la somme de 1.392, 69 euros ;
- fixé sa capacité de remboursement mensuelle à 927,50 euros ;
- arrêté le plan d'apurement suivant un plan sur 50 mois sans frais ni intérêts, selon tableau détaillé au jugement ;
- dit que les versements devraient intervenir avant le 20 de chaque mois, le plan commençant à s'appliquer à compter du mois de juillet 2022 ;
- dit qu'à l'issue les soldes restant dus seraient effacés en application de l'article L.733-4 2° du code de la consommation ;
- dit que dans les deux mois suivant tout événement de nature à augmenter sa capacité de remboursement, la débitrice devrait sous peine de déchéance informer la commission de surendettement des particuliers de sa nouvelle situation afin qu'un nouvel échelonnement des dettes soit établi ;
- dit qu'en cas de non respect du plan, et faute de régularisation par la débitrice dans les deux mois de la mise en demeure qui serait délivrée à cet effet, le plan sera caduc et chaque créancier recouvrerait l'intégralité de ses droits de poursuite et d'exécution ;
- dit qu'à peine de déchéance, la débitrice devrait également s'abstenir de contracter tout nouvel emprunt ou de prendre tout nouvel engagement qui aggraverait leur situation financière ;
- rappelé que sont exclues de toute remise, de tout rééchelonnement et de tout effacement les dettes suivantes :
dettes alimentaires
réparations pécuniaires allouées aux victimes dans le cadre d'une condamnation pénale,
amendes,
dettes dont le prix a été payé à ses lieu et place par la caution ou le coobligé, personne physique
dettes ayant pour origine des manoeuvres frauduleuses commises au préjudice d'un organisme de protection sociale dans les conditions prévues aux articles L.114-12 du code de la sécurité sociale
- rappelé que le présent jugement était de plein droit exécutoire par provision;
- laissé les dépens à la charge de l'Etat.
Pour statuer ainsi, le juge du surendettement a relevé que la capacité de remboursement de la débitrice était plus importante depuis que cette dernière percevait, en plus de sa retraite, une rémunération de l'Eirl [U]. Il a ainsi ajouté au plan 38 mensualités de 281,76 euros au bénéfice de la banque [20] pour le remboursement du prêt immobilier de 40.357,80 euros.
Ce jugement a été notifié à Madame [U] par courrier recommandé distribué le 18 mai 2022.
Par courrier recommandé du 27 mai 2022, Madame [U] a interjeté appel de cette décision.
Elle a contesté le plan d'apurement au motif que la société [28] et le Rsi Picardie ne seraient pas détenteurs des créances retenues aux sommes respectives de 80.75,79 et 8.908 euros.
Bien que régulièrement convoquées, les intimés n'ont pas comparu, ni adressé d'observations écrites à l'exception de la banque [20] qui a averti la cour qu'elle ne serait ni présente ni représentée à l'audience et qu'elle maintenait le quantum de sa créance à la somme de 40.357,80 euros.
Ce dernier créancier n'avait pas préalablement comparu ni n'avait sollicité de dispense de comparution par application de l'article 446-1 du code de procédure civile.
Par conclusions déposées le 3 avril 2023, et soutenues oralement à l'audience, de l'audience, Madame [U] a demandé d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il avait fixé :
- les créances de [28] et Rsi Picardie telles qu'arrêtées dans l'état des créances établi par la commission de surendettement des particuliers ;
- son 'reste à vivre' à la somme de 1.392,69 euros ;
- sa capacité de remboursement mensuel à 927,50 euros ;
- et en ce qu'il a arrêté un plan d'apurement sur 50 mois sans frais ni intérêts;
statuant à nouveau,
A titre principal :
Fixer la créance de la société [30] à la somme de 0 euro,
Fixer la créance de l'Urssaf Picardie à la somme de 0 euro,
Fixer un nouveau 'reste à vivre' de Madame [E] [U] et une nouvelle capacité de remboursement mensuel,
A titre subsidiaire,
Fixer la créance de la société [30] à la somme de 12.412,29 euros,
Fixer la créance de l'Urssaf Picardie à la somme de 0 euro,
Fixer un nouveau 'reste à vivre' de Madame [E] [U] et une nouvelle capacité de remboursement mensuel,
Arrêter un nouveau plan d'apurement des créances,
En tout état de cause :
Condamner la société [30] et l'Urssaf Picardie à lui payer la somme de 2.500 euros au titre des frais irrépétibles.
À l'issue des débats, l'affaire a été mise en délibéré, la décision étant rendue le 6 juin 2023 par mise à disposition au greffe.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur la vérification des créances:
En vertu de l'article L. 733-12 du Code de la consommation applicable à la procédure de surendettement des particuliers, le juge saisi d'une contestation des mesures imposées ou recommandées peut, même d'office, vérifier la validité des créances, des titres qui les constatent ainsi que le montant des sommes réclamées.
Mais selon l'article R. 723-8 du même code,
Le débiteur peut contester l'état du passif dressé par la commission dans un délai de vingt jours. A l'expiration de ce délai, il ne peut plus formuler une telle demande. La commission informe le débiteur de ce délai.
En retenant que l'intéressée percevait une retraite mensuelle nette de 1.627 euros, dont l'addition avec les revenus liés à sa poursuite d'activité au sein de l'Eirl, n'excéderait pas 3.000 euros, qu'elle supportait des charges mensuelles de 20.72,50 euros et que sa capacité de remboursement devait être fixée à 927,50 euros, en rappelant que l'intéressée avait déjà bénéficié de mesures pendant 34 mois, le premier juge a établi un plan du 50 mois, avec effacement partiel des dettes subsistantes à la fin de ce plan.
Madame [U] conteste le plan, lui imposant de régler les sommes mensuelles de 559 euros à [28] et 742,34 euros au Rsi Picardie, motif pris de ce que ces deux organismes ne seraient pas titulaires à son égard de créances respectives de 80.075,79 euros et 8.908 euros.
Mais dès avant l'établissement de l'état des créances au 23 septembre 2021, retenant les deux créances susdites, par courrier en date du 6 août 2020, Madame [U] avait indiqué que :
- s'agissant de la dette de [28] à hauteur de 108 075,79 euros, il convenait d'en déduire, le produit de la vente à son profit de sa maison pour un montant de 28 000 euros, et qu'en outre, sur cette créance, la banque bénéficié de la garantie de la [36] ;
- s'agissant du Rsi, aucune somme n'était due, puisque cet organisme social avait procédé à une estimation de ses revenus professionnels pour l'année 2009 à 19.400 euros, alors qu'en réalité ils n'étaient que de 8302 euros (dont avis d'imposition y afférent).
Dès lors, à l'occasion de la contestation du plan, l'intéressée se trouve habile à contester les créances qu'elle avait contestées.
Sur la prescription de la créance détenue par le Rsi, au droit desquels est venue l'Urssaf de Picardie :
C'est à celui qui oppose la fin de non-recevoir tirée de la prescription d'en rapporter la preuve.
L'article L. 244-3 du code de la sécurité sociale dispose que les actions concernant les cotisations et contributions sociales se prescrivent par 3 ans à compter du 30 juin de l'année qui suit l'année au titre de laquelle elles sont dues pour les travailleurs indépendants.
Madame [U] soutient que la créance de 8908 euros au titre de l'année 2009, dont le Rsi se prévaut à son encontre dans le cadre du présent plan de surendettement, serait manifestement prescrite.
Mais elle n'apporte strictement aucun élément de nature à corroborer son affirmation.
Il y aura donc lieu de rejeter la demande de Madame [U] tendant à voir la créance susdite du Rsi déclarée prescrite.
Cette créance sera donc retenue pour son entier montant.
Sur la créance de [28] :
C'est à celui qui se prétend libéré de son paiement d'en rapporter la preuve.
Madame [U] soutient que la dette de [28], retenue dans le plan, devrait être supprimée, pour avoir été déjà réglée.
Plus spécialement, elle expose que celle-ci a trait à son engagement de caution au profit de la société [34], portant sur un concours d'un principal de 186.440 euros, garanti par son propre engagement de caution, pour lequel après remboursement de 28.000 euros correspondant au prix de vente de sa maison de [Localité 29], le solde serait pris en charge par la [36] selon notification jointe, de telle sorte que serait remboursé un total de 146.051 euros, que la prise en charge de la [36] serait de 80.075 euros, de telle sorte que le remboursement total s'élèverait à 226.126 euros.
Mais il ressort de l'acte d'acquisition du fonds de commerce de la société [34] en date du 9 août 2006 que l'acquisition avait été réalisée moyennant un prêt consenti par la banque [26], d'un principal de 186.440 euros, pour lequel :
- la [36] s'était portée caution à hauteur de 35 % du montant du prêt ;
- Madame [U] s'était portée caution à hauteur de 126.033,44 euros correspondant à 67,57 % de l'encours en principal, intérêts, commission, frais accessoires ;
- Monsieur [T] s'était porté caution pour la somme globale de 31 508,36 euros, correspondant à 16,89 % l'encours en principal, intérêts, commission, frais accessoires.
Et dans sa notification de garantie, la [36] ([36]) en date du 9 août 2006, portant la mention de ce qu'elle a été annexée à l'acte notarié par lequel la banque a consenti l'emprunt susdit, rappelle que cet organisme de cautionnement s'est engagée sur une quotité de garantie à hauteur de 35 % du concours réclamé à raison de 186.440 euros, Monsieur [T] et Madame [U] s'engageant comme cautions solidaires respectivement chacun à hauteur de 13 % et 52 %.
Il ressort de la déclaration de créance de la banque portant le cachet du 20 mai 2009 un total de 159 946,41 euros, et il y est fait état de caution à hauteur de 67,67 %, soit pour un total de 108.076,79 euros.
Mais il ressort du courrier du [26] en date du 2 mai 2018, que selon décompte en date du 13 janvier 2015, Madame [P] doit à ce titre la somme de 108.076,79 euros,
Il résulte de son propre courrier en date du 29 juillet 2020 que c'est son ex-mari Monsieur [T] qui a été appelé par la banque pour règlement de la somme de 28.000 euros, versée après réalisation de la vente d'un bien immobilier acquis à l'aide d'un crédit immobilier souscrit par le couple.
Et il sera observé que ce versement correspond peu ou prou au plafond de son engagement de caution, à hauteur de 31.508,36 euros
Dès lors, déduction faite du règlement issue de la vente immobilière, réalisé par l'ex-mari de Madame dans le plafond de son propre engagement de caution, Madame [U] restait ainsi exactement devoir à la banque la somme de 80.075,79 euros.
En outre, il ressort des conditions générales de la Siagi (article 7 dispositions à l'égard des cautions) que dans le cas ou la garantie de cet organisme est octroyée sous réserve de l'engagement de caution solidaire d'une ou plusieurs personnes physiques ou morales, sa garantie ne dispense pas la caution de l'exécution de son engagement dont elle supporte la charge intégrale et définitive, sauf ses recours contre le débiteur principal et d'éventuels cofidéjusseurs.
Il s'en déduira que la [36] ait procédé elle-même à un versement, sur sa propre quote-part objet de sa garantie, limitée à 35 %, se trouve sans emport sur la dette de caution de Madame [U], portant sur une portion distincte de la dette.
Ainsi en aucune manière, la [36] ne s'est engagée à garantir en lieu et place de Madame [U] la somme de 80.075 euros que lui réclame la société [28], inclue exactement dans son plan de surendettement.
Il s'en déduira l'exactitude, en leurs principe et montant, des deux dettes ainsi justement incluses dans le plan de surendettement dont bénéficie Madame [U], et que celle-ci doit à ce titre rembourser.
En l'absence de toute autre contestation par Madame [U], il y aura lieu de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions.
Les dépens d'appel seront laissés à la charge de Madame [U], qui sera encore déboutée de sa demande au titre des frais irrépétibles des deux instances.
PAR CES MOTIFS:
La Cour,
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;
Déboute Madame [E] [U] de sa demande au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel ;
Laisse les dépens d'appel à la charge de Madame [E] [U].
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,