ARRET N° 185
N° RG 21/01969 - N° Portalis DBV5-V-B7F-GJXU
[E]
C/
S.A.R.L. PIERROT TECH
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE POITIERS
1ère Chambre Civile
ARRÊT DU 02 MAI 2023
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/01969 - N° Portalis DBV5-V-B7F-GJXU
Décision déférée à la Cour : jugement du 17 mai 2021 rendu par le Président du TJ des SABLES D'OLONNE.
APPELANT :
Monsieur [V] [E]
né le 12 Juillet 1968 à [Localité 5]
[Adresse 1]
[Localité 3]
ayant pour avocat Me Gérald FROIDEFOND de la SCP B2FAVOCATS, avocat au barreau de POITIERS
INTIMEE :
S.A.R.L. PIERROT TECH
[Adresse 2]
[Localité 4]
ayant pour avocat Me David DURAND de la SELARL CNTD, avocat au barreau des SABLES D'OLONNE
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des articles 907 et 786 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 20 Février 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant :
Monsieur Philippe MAURY, Conseiller
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. Thierry MONGE, Président de Chambre
Monsieur Dominique ORSINI, Conseiller
Monsieur Philippe MAURY, Conseiller
GREFFIER, lors des débats : Mme Elodie TISSERAUD,
ARRÊT :
- Contradictoire
- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,
- Signé par M. Thierry MONGE, Président de Chambre, et par Mme Elodie TISSERAUD, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Le 3 février 2014, M. [V] [E] a confié à la société PIERROT TRECH la réparation d'un jet ski, type kawasaki 900 stx, modèle 2002, que celui-ci aurait récupéré, en partie démonté, auprès d'une société AQUADJET, placée en liquidation judiciaire.
Le 4 février 2014, la S.A.R.L. PIERROT TECH établissait un devis de remise en état consécutive à un « problème moteur suite à absorption d'eau par fissure à l'échappement » , pour un montant de 3.007,24 euros toutes taxes comprises, la prestation consistant en une dépose complète du moteur et de la turbine pour le remplacement du vilebrequin, des pistons, du corps de turbine et de l'hélice.
Le 27 février 2014, la S.A.R.L. PIERROT TECH informait M. [E] que le devis de réparation arrivait à échéance le 5 mars 2014 et que nonobstant l'accord verbal, elle n'avait toujours pas réceptionné l'acceptation écrite du devis ainsi que l'acompte.
Le 28 février 2014, M. [E] écrivait « j'étais absent ; je vous envoie un acompte la semaine prochaine.».
Le 11 mars 2014 la S.A.R.L. PIERROT TECH relançait M. [E].
En l'absence de réception du devis et de l'acompte promis, la S.A.R.L. PIERROT TECH relançait à nouveau M. [E] le 25 mars 2014 l'informant des frais de gardiennage à compter de ce même jour à hauteur de 12,50 euros hors taxes par jour calendaire.
Le 17 juin 2014 la S.A.R.L. PIERROT TECH adressait à M. [E] une ultime relance par lettre recommandée comportant demande d'avis de réception laquelle revenait à son expéditeur.
Le 4 mai 2019, cinq, années jour pour jour après l'établissement du devis par la S.A.R.L. PIERROT TECH, cette dernière recevait un courrier électronique de M. [E] aux termes duquel ce dernier sollicitait la restitution de son véhicule.
Ce 4 mai 2019, la S.A.R.L. PIERROT TRECH ne s'opposait pas à la reprise du véhicule, rappelant à M. [E] que cinq années s'étaient écoulées et qu'il était ainsi redevable des frais de gardiennage soit une somme dépassant les 22.500 euros hors taxes, l'informant que le véhicule était resté à l'abandon, aujourd'hui en état d'épave.
M. [E] confirmait le même jour son intention de reprendre possession de son véhicule dans l'état où il l'avait laissé, contestant devoir des frais de gardiennage et menaçant la S.A.R.L. PIERROT TECH de déposer plainte à son encontre.
La S.A.R.L. PIERROT TECH indiquait que le véhicule était demeuré stocké en plein air considérant que M. [E] était totalement responsable de l'abandon de l'engin depuis plus de cinq ans, le mettant en demeure de récupérer celui-ci demeuré dans son état mécanique préexistant, tout en renonçant aux frais de gardiennage, exigeant cependant le paiement de la somme de 65 euros au titre des frais générés par la réception du jet ski, le diagnostic et l'établissement du devis.
M. [E] ne répondait pas à ce courrier, informant la S.A.R.L. PIERROT TECH, six mois plus tard, le 16 décembre 2019, qu'il passerait prendre possession du véhicule le 21 du même mois.
Le 18 décembre 2019, la S.A.R.L. PIERROT TECH informait M. [E] d'une facturation de 2.190 euros qu'il aurait à acquitter le jour de la reprise de son véhicule au titre de frais de gardiennage, soit à la date du 21 décembre date fixée par lui-même, demandant à M. [E] de confirmer sa venue pour ce rendez-vous.
Le 6 janvier 2016, le tribunal de commerce de LA ROCHE-sur-YON a placé la S.A.R.L. PIERROT TECH en redressement judiciaire, Maître [Y] était désigné mandataire judiciaire.
Suivant requête en date du 30 juillet 2020, M. [V] [E] a fait convoquer devant le tribunal judiciaire des SABLES D'OLONNE la S.A.R.L. PIERROT TECH à l'effet d'obtenir paiement de la somme de 3.000 euros en principal et celle de 2.000 euros à titre de dommages et intérêts.
A l'appel de la cause le 12/10/2020, la S.A.R.L. PIERROT TECH a indiqué qu'elle était en redressement judiciaire depuis janvier 2017.
M. [E] appelait à la cause la scp [W]-[Y], commissaire à l'exécution du plan de redressement de la société PIERROT TECH.
Une jonction des deux procédures est intervenue par ordonnance du 11 janvier 2021.
M. [E] concluait à la condamnation de la S.A.R.L. PIERROT TECH au paiement de la somme de 5.000 euros au titre des préjudices subis ainsi qu'à celle de 1.800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La SCP [W]-[Y] et la S.A.R.L. PIERROT TECH concluaient au principal à :
- l'irrecevabilité de l'action engagée par M. [E] et des demandes formulées par ce dernier,
- l'inutilité de la mise en cause de la scp [W]-[Y], la procédure n'ayant pas été en cours à la date du jugement arrêtant le plan,
- au mal fondé des demandes de M. [E] auquel appartient la charge de la preuve du préjudice allégué.
La S.A.R.L. PIERROT TECH se portait reconventionnellement demanderesse et sollicitait à son profit la condamnation de M. [E] au paiement de la somme de 7.925 euros au titre des frais de gardiennage, celle de 65 euros au titre des frais de diagnostic, celle de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice et celle de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement contradictoire en date du 17/05/2021, le tribunal judiciaire des SABLES D'OLONNE a statué comme suit :
'Déclare irrecevable l'action engagée par M. [V] [E] .
Déboute M. [E] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions.
Reçoit la S.A.R.L. PIERROT TECH en ses demandes reconventionnelles.
Rejette la demande au titre des frais de gardiennage faute d'éléments contractuels.
Condamne M. [V] [E] à payer à la S.A.R.L. PIERROT TECH la somme de 65 euros au titre des frais de diagnostic et d'établissements du devis.
Condamne M. [E] à payer à la S.A.R.L. PIERROT TECH la somme de 3.500 euros titre de dommages et intérêts avec intérêts de droit à compter du 30 juillet 2020 date du premier acte introductif d'instance.
Condamne M. [E] à payer à la S.A.R.L. PIERROT TECH la somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Rappelle que là présente décision est exécutoire à titre provisoire.
Condamne M. [V] [E] en tous les dépens'.
Le premier juge a notamment retenu que :
- sur la recevabilité de l'action de M. [E], la créance indemnitaire alléguée se trouvait soumise à déclaration au passif dans les deux mois de la publication du jugement d'ouverture au Bulletin Officiel des Annonces Civiles et Commerciales (BODACC), ce délai ayant expiré le 22 mars 2016.
Il n'est pas établi ni soutenu que la créance ait été déclarée, M. [E] ayant lui-même indiqué lors de l'audience du 12 octobre 2020 qu'il n'avait pas déclaré celle-ci.
- le jugement d'ouverture interrompt ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance n'est pas mentionnée au I de l'article L.622-17 et tendant à la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent
- M. [E] n'a pas davantage revendiqué la propriété des véhicules déposés au sein de la S.A.R.L. PIERROT TECH dans les délais imposés par les articles L.624-9 et R.624-13 du code de commerce.
- en l'espèce, aucune procédure n'était en cours à la date du 8 mars 2017 date du jugement du plan de redressement.
- l'action de M. [E] sera en conséquence déclarée irrecevable, la mise en cause de la scp [W]-[Y] se trouvant dès lors inutile et injustifiée.
- sur les demandes reconventionnelles, la S.A.R.L. PIERROT TECH ne produit pas le contrat de dépôt justifiant le paiement de la somme journalière de 12,50 euros hors taxes au titre des frais de gardiennage et elle sera déboutée de sa demande de frais de gardiennage.
- ses frais de devis et de diagnostic seront indemnisés.
- sur les dommages et intérêts, la S.A.R.L. PIERROT TECH a subi un préjudice par l'attitude inconséquente et blâmable de M. [E], tant de sa négligence que du long délai, cinq années s'étant écoulé entre la remise du Jet Ski et sa réclamation tendant à la restitution.
La S.A.R.L. PIERROT TECH a subi de nombreux désagréments au regard des circonstances particulières de la cause et sur une très longue durée, et une somme de 3.500 lui sera accordé à titre indemnitaire.
LA COUR
Vu l'appel en date du 24/06/2021 interjeté par M. [V] [E]
Vu l'article 954 du code de procédure civile
Aux termes du dispositif de ses dernières conclusions en date du 23/09/2021, M. [V] [E] a présenté les demandes suivantes :
'Vu le jugement rendu par le tribunal judiciaire des Sables d'Olonne le 17 mai 2021,
Vu les pièces versées aux débats,
Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la S.A.R.L. PIERROT TECH de ses demandes reconventionnelles,
Réformer le jugement en ce qu'il a condamné M. [E] à payer à la S.A.R.L. PIERROT TECH les sommes suivantes :
- 65 € au titre des frais de diagnostic et d'établissement du devis ;
- 3 500 € titre de dommages et intérêts avec intérêts de droit à compter du 30 juillet 2020, date du premier acte introductif d'instance ;
- 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- les dépens.
Statuant à nouveau,
Rejeter purement et simplement les prétentions de la S.A.R.L. PIERROT TECH,
Condamner la S.A.R.L. PIERROT TECH à payer à M. [E] la somme de 5 000 €toutes causes de préjudices confondus au visa des dispositions des articles 1240 et suivants du code civil.
Ordonner la restitution du jet ski à M. [E].
Condamner la S.A.R.L. PIERROT TECH à payer à M. [E] la somme de 3 300 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens'.
A l'appui de ses prétentions, M. [V] [E] soutient notamment que :
- un devis lui a été présenté par la S.A.R.L. PIERROT TECH. aux fins de remise en état pour un montant de 3 007,24 €.
Toutefois, au regard du coût élevé, M. [E] n'a pas donné son accord expressément pour la réalisation de ces travaux.
Il est ensuite parti à l'étranger pour de nombreux mois.
- de retour en France , il s'est présenté au garage de la S.A.R.L. PIERROT TECH à [Localité 6]... mais l'entreprise était fermée.
Il a pu découvrir à cette occasion que la S.A.R.L. PIERROT TECH était en procédure collective
- Non juriste, il n'a pas régularisé de déclaration de créances, ni engagé une revendication de son jet-ski et de sa remorque.
Au surplus, M. [E] devait repartir à l'étranger.
- début 2019, après divers échanges, la S.A.R.L. PIERROT TECH lui proposait un rendez-vous pour reprendre son jet-ski, abandonnant les frais de gardiennage mais maintenant les frais de diagnostic et d'établissement du devis.
- si M. [E] ne conteste pas d'avoir manqué de diligence, il n'en reste pas moins qu'il n'a jamais eu l'intention d'abandonner son matériel.
Lorsqu'il a pu avoir accès visuellement à son jet ski, il l'a trouvé dans un état dégradé et la remorque avait disparu.
- sur les frais de diagnostic, ni le diagnostic, ni le devis établi en conséquence n'ont fait l'objet d'une information relative à une quelconque facturation à hauteur de 65 €, et ce au jour de la remise du jet-ski.
- sur les dommages et intérêts alloués à la S.A.R.L. PIERROT TECH, il n'y a pas de contrat formalisé en l'espèce, et rien ne prouve que la S.A.R.L. PIERROT TECH avait pris toutes ses dispositions pour procéder aux réparations du jet-ski, la rédaction du devis ne faisant pas présumer de l'aptitude à faire les travaux.
- on ne peut s'étonner de son inertie alors qu'il était parti à l'étranger.
- la S.A.R.L. PIERROT TECH n'a subi en réalité aucun désagrément au regard des circonstances particulières de la cause, alors qu'elle avait la possibilité d'engager une procédure d'abandon du bien en application des dispositions de la loi du 31 décembre 1903.
- la cour réformera le jugement entrepris et rejettera les dommages et intérêts alloués à la S.A.R.L. PIERROT TECH invitant celle-ci à restituer à M. [E] le jet-ski.
- pour ce qui concerne la remorque, le concluant a compris qu'il devait en faire son deuil.
Il n'en reste pas moins que cela lui cause un préjudice indemnisable au sens de l'article 1240 du code civil.
La S.A.R.L. PIERROT TECH sera condamnée à payer à M. [E] la somme de 5 000 € toutes causes de préjudices confondus.
- dans l'hypothèse où un appel incident viendrait à intervenir, notamment concernant les frais de gardiennage, le concluant rappelle que les frais de gardiennage sont attachés à l'exécution d'un contrat d'entreprise formalisé.
Aux termes du dispositif de ses dernières conclusions en date du 19/10/2021, la société S.A.R.L. PIERROT TECH a présenté les demandes suivantes :
'Vu les articles L 622-21, L 622-26, L 624-9 ; L 626-25 et R 624-13 du code de commerce,
Vu les articles 1929 et 1933 du code civil,
Vu les pièces versées aux débats,
Il est demandé à la cour de :
DÉCLARER M. [V] [E] mal fondé en son appel ainsi qu'en toutes ses demandes, fins et conclusions,
L'EN DÉBOUTER purement et simplement,
En conséquence,
CONFIRMER le jugement rendu le 17 mai 2021 par le tribunal judiciaire des SABLES D'OLONNE en toutes ses dispositions,
Et y ajoutant,
CONDAMNER M. [V] [E] à payer à la société PIERROT TECH la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel,
CONDAMNER M. [V] [E] aux entiers dépens de la procédure d'appel'.
A l'appui de ses prétentions, la société S.A.R.L. PIERROT TECH soutient notamment que:
- le devis, d'un montant de 2.512,70 € H.T, soit 3.007,24 € T.T.C, a été établi dès le 4 février 2014 et transmis par mail à M. [E] le jour même de sa demande.
N'ayant pas de nouvelles de M. [E], la société PIERROT TECH le relançait par mail le 27 février 2014.
Le lendemain, M. [E] marquait son accord et annonçait l'envoi d'un acompte pour la semaine suivante, ce qu'il ne fera pas.
- la société PIERROT TECH, restée sans aucune nouvelle de M. [E] depuis le 28 février 2014, a eu la surprise de recevoir le 4 mai 2019, soit plus de 5 ans plus tard, un mail de ce dernier sollicitant la restitution de son véhicule.
Par e-mail du même jour, la société PIERROT TECH ne s'opposait pas à la restitution, sous réserve que les frais de gardiennage soient acquittés.
- dans un esprit de conciliation, la société PIERROT TECH indiquait ensuite qu'elle abandonnait les frais de stockage, qu'elle maintenait en revanche les frais de diagnostic de 65 €, et elle mettait ce dernier en demeure de venir récupérer son véhicule le 27 juillet 2019, mais M. [E] ne se présentera pas.
- lasse de ce comportement irrespectueux et désinvolte, la société PIERROT TECH lui indiquait que des frais de gardiennage lui seraient cette fois facturés depuis le 27 juillet 2019 et qu'il appartenait à ce dernier de confirmer sa venue effective pour le 21 décembre 2019.
- au principal, sur l'irrecevabilité de l'action engagée par M. [E], la créance de dommages et intérêts invoquée par M. [E] ne relève pas des dispositions de l'article L 622-17 du Code de Commerce et était donc soumise à déclaration au passif dans les délais requis.
Faute de cette déclaration de créance, il est irrecevable en son action d'autant que la règle de la suspension des poursuites individuelles édictée par l'article L 622-21 du code de commerce le prive de son droit d'agir et de solliciter la condamnation de la société PIERROT TECH au paiement d'une quelconque somme.
- M. [E] n'a pas davantage revendiqué la propriété des véhicules qu'il a délibérément abandonnés au sein des établissements PIERROT TECH dans les délais préfix imposés par les textes précités, de sorte qu'en application d'une jurisprudence constante, lesdits véhicules ont été affectés au gage commun des créanciers de la procédure.
- le jugement doit être confirmé en ce qu'il a déclaré l'action de M. [E] irrecevable et l'a débouté de ses demandes indemnitaires.
- sur les frais de gardiennage et de diagnostic, la société PIERROT TECH n'entend pas maintenir sa demande au titre des frais de gardiennage, la gêne occasionnée par le dépôt du véhicule devant être prise en compte au titre du préjudice subi.
- le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné M. [E] au paiement d'une somme de 65 € au titre des frais de diagnostic.
- sur les dommages et intérêts, l'attitude de M. [E], consistant à abandonner son véhicule durant plus de cinq ans et sans même daigner donner suite aux demandes d'enlèvement qui lui ont été adressées a causé à la société PIERROT TECH un préjudice distinct du simple retard justifiant l'octroi de dommages et intérêts à hauteur de 3500 €, par confirmation du jugement.
Il convient de se référer aux écritures des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et de leurs moyens.
Vu l'ordonnance de clôture en date du 19/12/2022.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la recevabilité de l'action engagée par M. [E] à titre indemnitaire et en restitution :
Selon jugement rendu le 6 janvier 2016 par le tribunal de commerce de LA ROCHE SUR YON, la société S.A.R.L. PIERROT TECH a été placée en redressement judiciaire, la SCP [W]-[Y], en la personne de Maître [B] [Y], étant désignée en qualité de Mandataire Judiciaire.
Le 8 mars 2017, le tribunal de commerce arrêtait le plan de redressement par voie de continuation de la société PIERROT TECH, la SCP [W]-[Y], en la personne de Maître [B] [Y], étant désignée en qualité de commissaire à l'exécution du plan.
L'article L 622-21 du code de commerce prévoit que :
« I. - Le jugement d'ouverture «interrompt» ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance «n'est pas mentionnée au I de l'article L. 622-17» et tendant:
1o A la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent;
2o A la résolution d'un contrat pour défaut de paiement d'une somme d'argent.
«II. - Il arrête ou interdit également toute procédure d'exécution de la part de ces créanciers tant sur les meubles que sur les immeubles ainsi que toute procédure de distribution n'ayant pas produit un effet attributif avant le jugement d'ouverture.» - V. art. R. 622-19.
III. - Les délais impartis à peine de déchéance ou de résolution des droits sont en conséquence «interrompus».
L'article L 622-26 du code de commerce prévoit que :
«A défaut de déclaration dans «les délais prévus à l'article L. 622-24», les créanciers ne sont pas admis dans les répartitions et les dividendes à moins que le juge-commissaire ne les relève de leur forclusion s'ils établissent que leur défaillance n'est pas due à leur fait ou qu'elle est due à une omission «volontaire» du débiteur lors de l'établissement de la liste prévue au deuxième alinéa de l'article L. 622-6.
Ils ne peuvent alors concourir que pour les distributions postérieures à leur demande. - V. art. R. 622-24.
«Les créances non déclarées régulièrement dans ces délais sont inopposables au débiteur pendant l'exécution du plan et après cette exécution lorsque les engagements énoncés dans le plan ou décidés par le tribunal ont été tenus. Pendant l'exécution du plan, elles sont également inopposables aux personnes physiques coobligées ou ayant consenti une sûreté personnelle ou ayant affecté ou cédé un bien en garantie.»
L'action en relevé de forclusion ne peut être exercée que dans le délai de six mois. Ce délai court à compter de la publication du jugement d'ouverture ou, pour les institutions mentionnées à l'article L. 143-11-4 du code du travail, de l'expiration du délai pendant lequel les créances résultant du contrat de travail sont garanties par ces institutions.
Pour les créanciers titulaires d'une sûreté publiée ou liés au débiteur par un contrat publié, il court à compter de la réception de l'avis qui leur est donné. «Par exception, si le créancier justifie avoir été placé dans l'impossibilité de connaître l'obligation du débiteur avant l'expiration du délai de six mois, le délai court à compter de la date à laquelle il est établi qu'il ne pouvait ignorer l'existence de sa créance.»
En outre, l'article L 624-9 du code de commerce prévoit que :
«La revendication des meubles ne peut être exercée que dans le délai de trois mois suivant la publication du jugement ouvrant la procédure «de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire immédiate».
«Pour les biens faisant l'objet d'un contrat en cours au jour de l'ouverture de la procédure, le délai court à partir de la résiliation ou du terme du contrat.»
L'article R 624-13 du code de commerce prévoit que :
«La demande en revendication d'un bien est adressée dans le délai prévu à l'article L. 624-9 par lettre recommandée avec demande d'avis de réception à l'administrateur s'il en a été désigné ou, à défaut, au débiteur. Le demandeur en adresse une copie au mandataire judiciaire.
A défaut d'acquiescement dans le délai d'un mois à compter de la réception de la demande, le demandeur doit, sous peine de forclusion, saisir le juge-commissaire au plus tard dans un délai d'un mois à compter de l'expiration du délai de réponse.
Avant de statuer, le juge-commissaire recueille les observations des parties intéressées.
La demande en revendication emporte de plein droit demande en restitution.»
En l'espèce, M. [E] indique par ses écritures que 'non juriste, il n'a pas régularisé de déclaration de créances, ni même fait une revendication de son jet-ski et de sa remorque'.
Faute pour le demandeur d'avoir procédé à la déclaration de sa créance dans les délais légaux, ni revendiqué la propriété des véhicules déposés au sein de la S.A.R.L. PIERROT TECH dans les délais imposés par les articles L.624-9 et R.624-13 du code de commerce, le jugement sera confirmé en ce qu'il a déclaré irrecevable l'action indemnitaire de M. [E], sa demande de restitution du jet ski étant également déclarée irrecevable.
Sur les demandes de la société S.A.R.L. PIERROT TECH :
- Sur la demande formée au titre des frais de devis et de diagnostic :
M. [E] ne disconvient pas dans ses écritures d'avoir confié aux fins de réparation son jet ski à la société S.A.R.L. PIERROT TECH, un devis étant établi à cette fin le 4 février 2014, aux fins de remise en état consécutive à un « problème moteur suite à absorption d'eau par fissure à l'échappement » , pour un montant de 3.007,24 euros toutes taxes comprises, la prestation consistant en une dépose complète du moteur et de la turbine pour le remplacement du vilebrequin, des pistons, du corps de turbine et de l'hélice, cette intervention révélant le mauvais état du véhicule.
Si M. [E] soutient ne pas avoir accepté ce devis en raison du coût des réparations nécessaires, il écrivait néanmoins à la société S.A.R.L. PIERROT TECH le 28 février 2014 après relance de cette dernière ' j'étais absent ; je vous envoie un acompte la semaine prochaine'.
En dépit de ce message, aucun acompte ne sera transmis par M. [E] et les travaux ne seront pas effectués, pas plus que l'appelant ne donnera de nouvelles avant le 4 mai 2019.
Il n'en demeure pas moins que les frais de diagnostic réclamé pour un montant de 65 € sont dus par M. [E] qui a déposé le véhicule entre les mains de la société S.A.R.L. PIERROT TECH qui a oeuvré à cette fin.
Le jugement sera confirmé de ce chef.
- Sur la demande de dommages et intérêts de la société S.A.R.L. PIERROT TECH :
Etant relevé que M. [E] ne conteste pas dans ses écritures avoir manqué de diligence, il ne peut excuser son inertie au motif de son départ à l'étranger.
Il lui appartenait de se préoccuper de la situation de son jetski, celui-ci restant à la charge de la société S.A.R.L. PIERROT TECH sans qu'aucune consigne de son propriétaire n'intervienne entre le mois de février 2014 et le 4 mai 2019, soit plus de 5 ans durant lesquels la société intimée a dû conserver ce véhicule dans ses locaux.
Il résulte de cette charge une sujétion constitutive d'un préjudice indemnisable, le jugement devant être confirmé en ce qu'il a condamné M. [E] à payer à la S.A.R.L. PIERROT TECH la somme de 3.500 euros titre de dommages et intérêts avec intérêts de droit à compter du 30 juillet 2020 date du premier acte introductif d'instance, cette somme étant pleinement justifiée au regard du temps important écoulé.
Sur les dépens et l'application de l'article 699 du code de procédure civile:
Il résulte de l'article 696 du code de procédure civile que ' La partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. (...).'
Compte tenu de la solution apportée au présent litige, les dépens d'appel seront fixés à la charge de M. [V] [E].
Sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile :
Il est équitable de condamner M. [V] [E] à payer à la société S.A.R.L. PIERROT TECH la somme fixée au dispositif du présent arrêt sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.
La somme allouée au titre des frais de première instance a été justement appréciée, le jugement entrepris devant être confirmé sur ce point.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, et en dernier ressort,
DÉCLARE irrecevable l'action en restitution engagée par M. [V] [E].
CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions.
Y ajoutant,
DÉBOUTE les parties de leurs autres demandes plus amples ou contraires.
CONDAMNE M. [V] [E] à payer à la société S.A.R.L. PIERROT TECH la somme de 2 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.
CONDAMNE M. [V] [E] aux dépens d'appel, étant rappelé que les dépens de première instance restent répartis ainsi que décidé par le premier juge.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,