ARRET N° 184
N° RG 21/01944 - N° Portalis DBV5-V-B7F-GJVX
[C]
C/
[N]
S.A.R.L. GT SPIRIT
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE POITIERS
1ère Chambre Civile
ARRÊT DU 02 MAI 2023
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/01944 - N° Portalis DBV5-V-B7F-GJVX
Décision déférée à la Cour : jugement du 15 juin 2021 rendu par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de SABLES D'OLONNE.
APPELANT :
Monsieur [T] [C]
né le 18 Octobre 1951 à [Localité 6] (75)
[Adresse 3]
[Adresse 3]
ayant pour avocat postulant Me Emilie CARRE-GUILLOT de la SELARL AVOCATS DU GRAND LARGE, avocat au barreau de POITIERS, et pour avocat plaidant Me Julien VIVES de la SCP CALVAR & ASSOCIES, avocat au barreau de NANTES
INTIMES :
Monsieur [D] [N]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
ayant pour avocat postulant Me Jérôme CLERC de la SELARL LEXAVOUE POITIERS-ORLEANS, avocat au barreau de POITIERS, et pour avocat plaidant Me Jean-denis GALDOS DEL CARPIO de la SELARL GALDOS & BELLON, avocat au barreau de PARIS
S.A.R.L. GT SPIRIT
[Adresse 2]
[Adresse 2]
ayant pour avocat postulant Me Philippe GAND de la SCP GAND-PASCOT, avocat au barreau de POITIERS, et pour avocat plaidant Me Renaud BARIOZ de la SELARL BDL AVOCATS, avocat au barreau de LYON
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des articles 907 et 786 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 20 Février 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant :
Monsieur Philippe MAURY, Conseiller
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. Thierry MONGE, Président de Chambre
Monsieur Dominique ORSINI, Conseiller
Monsieur Philippe MAURY, Conseiller
GREFFIER, lors des débats : Mme Elodie TISSERAUD,
ARRÊT :
- Contradictoire
- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,
- Signé par M. Thierry MONGE, Président de Chambre, et par Mme Elodie TISSERAUD, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Là société GT SPIRIT exerce une activité de dépôt-vente et de vente de véhicules de collection, de sport et de prestige.
Elle a signé le 25 juillet 2014, un contrat de dépôt-vente avec M. [I] [J], portant sur véhicule de marque Ford, modèle Mustang cabriolet immatriculé [Immatriculation 4], dont la date de première immatriculation est le ler janvier 1966.
Lé 11 février 2015, un contrat de vente a été signé avec M. [T] [C] moyennant le prix total de 34 210 euros incluant notamment des frais d'expertise pour établir une attestation de valeur.
M. [N], expert automobile a établi le 22 février 2015 une attestation de valeur du véhicule à la somme de 21 500 euros.
Le certificat de cession à été signé le 7 avril 2015.
Le véhicule a été livré sans réserve lors de sa réception le 07 avril 2015.
M. [C] acquéreur a indiqué avoir rapidement rencontré des problèmes avec le véhicule vendu nécessitant diverses interventions et réparations.
Par acte d'huissier de justice en date du 19 mars 2019, M. [T] [C] a fait assigner la société GT SPIRIT, la société LIBERTY CARS et M. [D] [N], devant le juge des référés du tribunal de grande instance des SABLES D'OLONNE pour voir désigner un expert judiciaire; afin notamment, au visa de l'article 1641 du code civil, de donner son avis sur l'état du véhicule livré par la société GT SPIRIT et sur la valeur du véhicule au regard de son état réel au 7 avril 2015.
Par acte d'huissier de justice en date du 15 avril 2019, la société GT SPIRIT a appelé en intervention forcée M. [I] [J], propriétaire vendeur du véhicule, pour que les opérations d'expertise lui soient déclarées communes et opposables.
Selon ordonnance en date du 20 mai 2019, le juge des référés du tribunal de grande instance des SABLES D'OLONNE a ordonné une mesure d'instruction, confiée à M. [R] [H], remplacé par M. [Y] [E].
L'expert judiciaire a déposé son rapport le 14 janvier 2020.
Suivant acte d'huissier de justice en date du 22 juillet 2020, M. [T] [C] a fait assigner la société GT SPIRIT et M. [D] [N] expert automobile devant le tribunal judiciaire des SABLES D'OLONNE pour, vu les articles 1641 et suivants du code civil, 1240 et suivants du code civil, entendre :
- Dire et juger que le véhicule vendu par la société GT SPIRIT le 11 février 2015 était affecté d'un vice caché,
- Ordonner la résolution de la vente du véhiculé de marque Ford modèle Mustang (n° de série 6T08C217591) mis en circulation le ler janvier 1966 immatriculé DH 365 WA,
- Dire et juger que M. [D] [N] a engagé sa responsabilité délictuelle à l'égard de M. [C],
- Condamner la société GT SPIRIT à payer à M. [C] la somme de 34.210 euros correspondant au prix de vente et ses accessoires,
- Condamner solidairement la société GT SPIRIT et M. [N] à payer à M.
[C] la somme de 37 468,41 euros au titre des travaux engagés sur le véhicule,
- Condamner solidairement la société GT SPIRIT et M. [N] à payer à M. [C] la sommé de 8.000 euros à titre de dommages et intérêts au titre du préjudice de jouissance,
- Dire et juger que, après paiement de toutes les sommes dues à M. [C], la
société GT SPIRIT sera tenue sous astreinte de 300 euros par jour, de reprendre possession du véhicule au domicile de M. [C],
- Condamner la société GT SPIRIT et M. [N] à payer à M. [C] la somme de 6.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamner les mêmes aux dépens en ce compris le frais d'expertise judiciaire.
Selon ses dernières conclusions, la société GT SPIRIT demandait au tribunal de, vu l'article 32 du code de procédure civile, vu les articles 1641 et suivants du code civil :
- Dire et juger que la société GT SPIRIT qui a agi en qualité de mandataire ne saurait répondre de la garantie légale des vices cachés qui incombe au vendeur,
- Dire et juger que les demandes formées par M. [T] [C] à l'encontre de la société GT SPIRIT sont irrecevables,
- Condamner M. [T] [C] à payer à la société GT SPIRIT la somme de 3.500 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamner M. [T] [C] en tous les dépens de l'instance.
Bien que régulièrement assigné à sa personne par acte en date du 22 juillet 2020
M. [N] n'a pas constitué avocat.
Par jugement réputé contradictoire en date du 15 juin 2021, le tribunal judiciaire des SABLES D'OLONNE a statué comme suit :
'DÉCLARE M. [T] [C] irrecevable en ses demandes formées contre la société GT SPIRIT ;
DÉBOUTE M. [T] [C] de ses demandes contre M. [D] [N] comme non fondées ;
CONDAMNE M. [T] [C] à payer à la société GT SPIRIT une indemnité de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile;
.DÉBOUTE M. [T] [C] de sa demande d'indemnité pour frais irrépétibles;
CONDAMNE M. [T] [C] aux entiers dépens'.
Le premier juge a notamment retenu que :
- un contrat de dépôt vente a été passé le 24 juillet 2014 entre M. [I] [J] et la société GT SPIRIT portant sur le véhicule objet du litige.
- le contrat de vente du 11 février 2015 portant bon de commande de ce véhicule a été passé par la société GT SPIRIT en sa qualité expressément rappelée de mandataire de M. [I] [J].
- la déclaration de cession du véhicule en date du 07 avril 2015 mentionne le nom du propriétaire de celui-ci, à savoir M. [I] [J].
- M. [C] était bien informé de la qualité de mandataire de la société GT SPIRIT telle que précisée au contrat de vente du 11 février 2015.
- en conséquence, les demandes-formées par M. [C] contre la société GT SPIRIT qui n'est pas propriétaire du véhicule vendu et a agi seulement en qualité de mandataire de M. [I] [J] propriétaire vendeur, en ce qu'elles sont fondées sur les dispositions des articles 1641 et suivants du code civil, seront déclarées irrecevables.
- la demande de résolution échouant, les demandes aux fins de condamnation solidaire avec la société GT SPIRIT au paiement de la somme de 37 210 euros, au titre de la responsabilité délictuelle, formées à l'encontre M. [N] expert seront rejetées, aucune faute lors de l'établissement de l'attestation de valeur en lien avec les préjudices invoqués n'étant de surcroît rapportée contre M. [N], et alors même qu'il est constant que le contrat de vente s'est formé le 11 février 2015 soit antérieurement à l'établissement de l'attestation de valeur du 22 février 2015.
LA COUR
Vu l'appel en date du 23/06/2021 interjeté par M. [T] [C]
Vu l'article 954 du code de procédure civile
Aux termes du dispositif de ses dernières conclusions en date du 14/12/2022, M. [T] [C] a présenté les demandes suivantes :
'Vu les articles 1190, 1641 et s., 1231 et s. et 1240 du code civil,
- Vu les articles 564 et 910-4 du code de procédure civile,
- Vu les pièces,
Recevoir M. [T] [C] en son appel et le dire bien fondé,
Rejeter l'exception d'irrecevabilité des demandes formulées par M. [C] sur le fondement de la responsabilité contractuelle,
Réformer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 15 juin 2021 par le tribunal judiciaire des SABLES D'OLONNE,
Dire et juger que le véhicule vendu par la société GT SPIRIT à M. [T] [C] le 11 février 2015 était affecté d'un vice caché,
Ordonner la résolution de la vente du véhicule de marque FORD modèle MUSTANG (n° de série 6T08C217591) mis en circulation le 1er janvier 1966, immatriculé DH 365 WA,
Subsidiairement, dire et juger que la société GT SPIRIT a engagé sa responsabilité contractuelle à l'égard de M. [C].
Dire et juger que M. [D] [N] a engagé sa responsabilité délictuelle à l'égard de M. [T] [C]
Et en conséquence, condamner la société GT SPIRIT à payer à M. [T] [C] la somme de 34.210 € correspondant au prix de vente et ses accessoires.
Condamner solidairement la société GT SPIRIT et M. [D] [N] à payer à M. [T] [C] la somme de 37.468,41 € au titre des travaux engagés sur le véhicule,
Condamner solidairement la société GT SPIRIT et M. [D] [N] à payer à M. [T] [C] la somme de 8.000 € au titre de son préjudice de jouissance,
Dire et juger que, après paiement de toutes les sommes dues à M. [T] [C], la société GT SPIRIT sera tenue, sous astreinte de 300 € par jour, de reprendre possession du véhicule au domicile de M. [C],
Condamner la société GT SPIRIT et M. [D] [N] à verser à M. [T] [C] la somme de 6.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamner les mêmes aux entiers dépens, en ce compris les frais d'expertise judiciaire, avec application de l'article 699 du code de procédure civile'.
A l'appui de ses prétentions, M. [T] [C] soutient notamment que :
- M. [C] s'est légitimement interrogé sur l'état réel du véhicule qui lui a été vendu prétendument en bon état par la société GT SPIRIT et sur les conditions dans lesquelles M. [N] a pu apprécier la valeur du véhicule après avoir considéré un « bon état » et « aucune trace visible de chocs antérieurs » en affectant les qualités
- M. [E] déposait son rapport d'expertise le 13 janvier 2020 en considérant que le véhicule présentait un vice caché au jour de sa vente à M. [C] au regard de l'impossibilité de poser une barre anti-rapprochement (barre dite « [Localité 5] CARLO ») qui avait dû être découpée et ressoudée en avril 2015.
- au regard des conclusions de l'expert, il est certain que le véhicule était affecté de vices cachés au jour de sa vente à M. [C] qui est dès lors en droit d'en obtenir la résolution.
La grave anomalie du train a été révélée par le rapport d'expertise. ' GT SPIRIT a vendu un véhicule dont la frappe du numéro de série a été meulée, mastiquée, et refaite à proximité de façon grossière et dont le bloc avant a été accidenté et mal réparé'.
- la société LIBERTY CARS a fait l'objet d'un jugement de liquidation judiciaire en date du 13 décembre 2019, soit au cours des opérations d'expertise judiciaire.
- sur la recevabilité, la société GT SPIRIT est incontestablement intervenue en qualité de vendeur apparent du véhicule et non comme simple dépositaire du véhicule.
Le contrat conclu est qualifié de contrat de vente, les conditions générales mentionnent l'établissement vendeur, personne morale qui bénéficiait d'une clause de réserve de propriété.
- la société GT SPIRIT a signé seule ce contrat de vente sans jamais indiquer, ni même évoquer, l'identité d'une autre partie et la facture a été émise par la société GT SPIRIT qui a encaissé le prix de vente. Elle s'est comportée comme le vendeur du véhicule.
- le certificat de cession portant le nom de l'ancien propriétaire mais qui n'est pas un titre de propriété a été expédié à M. [C] par courrier postérieurement à la vente et à la livraison du véhicule
- le garagiste, professionnel de l'automobile, a engagé sa responsabilité du fait des vices cachés affectant le véhicule, en dissimulant à l'acquéreur sa qualité de mandataire et en se comportant comme le vendeur du véhicule.
- en l'espèce, l'identité du propriétaire n'a été révélée à l'acheteur que postérieurement à la vente, et en toute hypothèse, le fait pour le mandataire de se comporter comme le vendeur le rend débiteur de la garantie des vices cachés, M. [C] étant recevable à agir à son encontre.
- subsidiairement, la Cour retiendra que la société GT SPIRIT a fait preuve de négligence dans l'examen du véhicule qu'elle a mis en vente en sa qualité de professionnelle et a manqué à son devoir de conseil sur l'état du véhicule, engageant ainsi sa responsabilité contractuelle à l'égard de M. [C]
- la société GT SPIRIT soutient qu'il s'agirait de prétentions nouvelles en appel et qu'elles méconnaîtraient le principe de la concentration des moyens, mais ne formule pas une demande nouvelle la partie qui a sollicité en première instance des dommages et intérêts sur le fondement de la responsabilité délictuelle et formule cette demande en appel, sur le fondement de la responsabilité contractuelle.
Il s'agit ainsi, en réalité, d'un principe de concentration des demandes et non des moyens.
- le véhicule vendu à M. [C] était donc impropre à sa destination dans son état au jour de la livraison.
- l'expert judiciaire a estimé que les travaux réalisés par la société LIBERTY CARS étaient, en leur principe, justifiés quand bien même ils auraient été mal exécutés.
Or, M. [C] a dû verser une somme de 27.482,62 € à la société LIBERTY CARS.
Il est fondé à solliciter la restitution du prix, ainsi que le paiement de la somme de 37.468,41 € correspondant 7.944,29 € au titre des accessoires et améliorations apportés au véhicule, 2.041,50 € au titre de travaux initiés au moment de la réception du véhicule, et 27.482,62 € au titre de l'ensemble des travaux de restauration réalisés par la société LIBERTY CARS.
Une somme de 8000 € est sollicitée au titre de son préjudice de jouissance.
- subsidiairement, la société GT SPIRIT sera condamnée à indemniser le préjudice ainsi subi par M. [C] sur le fondement de l'article 1213-1 du code civil, en raison de sa négligence et du manquement à son devoir de conseil.
- sur les demandes formées à l'encontre de M. [N], le rapport de M. [N] a conforté le choix de M. [C] quant à son souhait de conserver le véhicule de collection et, surtout, à y entreprendre des travaux de rénovation. Or, M. [N] n'a formé aucune réserve sur l'état du véhicule. Il a indiqué le contrôle technique était conforme à la réglementation alors qu'il n'était pas établi au jour de son rapport du 22 février 2015.
Il a en outre omis de mentionner les 11 défauts à corriger, dont 4 avec contre-visite.
L'expert judiciaire a retenu qu'il n'avait relevé la difficulté d'identification du véhicule ni que 'le bloc avant était plié'.
Il a fondé son estimation sur des « travaux effectués » qu'il a listés : « vidange moteur, boîte de vitesses et pont, remplacement batterie, alternateur, allumage, échappement, restauration carrosserie récente » sans que des factures ne soient produites.
M. [N] s'est lourdement fourvoyé dans son estimation et son erreur a déterminé M. [C] a engager des travaux sur le véhicule qu'il se serait abstenu d'engager
Sa responsabilité délictuelle est engagée et M. [N] sera ainsi condamné, solidairement avec la société GT SPIRIT, à payer à M. [C] la somme totale de 37.468,41 €.
- le tribunal ne pouvait pas valablement rejeter la demande de condamnation formulée à l'encontre de M. [N], au motif que la demande de résolution de la vente dirigée contre la société GT SPIRIT aurait été irrecevable, cette irrecevabilité étant sans incidence sur l'action en responsabilité engagée à l'encontre de M. [N].
- l'inexécution imputable à M. [N] étant à l'origine du préjudice, M. [C]
ayant engagé des travaux en pure perte, le tribunal ne pouvait pas davantage se fonder sur le
caractère antérieur de la vente par rapport à l'attestation.
Aux termes du dispositif de ses dernières conclusions en date du 14/12/2022, la société S.A.R.L. GT SPIRIT a présenté les demandes suivantes :
'Vu les causes et motifs sus énoncés,
Vu les articles 32, 564 et 910-4 du code de procédure civile,
Vu les articles 1231-1 et 1641 et suivants du code civil,
Juger que la société GT SPIRIT qui a agi en qualité de mandataire ne saurait répondre de la garantie légale des vices cachés qui incombe au vendeur,
Juger que la société GT SPIRIT n'a jamais eu la qualité de vendeur apparent,
Juger que les demandes formées par M. [T] [C] à l'encontre de la société GT SPIRIT sur le fondement des vices cachés sont irrecevables,
Juger que la demande de dommages et intérêts formulée par M. [T] [C] sur le fondement de l'article 1231-1 du code civil constitue une demande nouvelle au sens de l'article 564 du code de procédure civile,
Juger que la présentation dans les secondes conclusions de M. [T] [C] d'une demande de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1231-1 du code civil méconnaît le principe de concentration des moyens posé par l'article 910-4 du code de procédure civile,
En conséquence,
Juger irrecevable la demande de dommages et intérêts formée par M. [T] [C] sur le fondement de l'article 1231-1 du code civil, ainsi que toutes les demandes subséquentes,
En tout état de cause,
Juger que la société GT SPIRIT n'a pas manqué à son obligation de conseil à l'égard de M. [T] [C],
Débouter M. [T] [C] de sa demande de dommages intérêts,
Confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire des Sables-d'Olonne le 15 juin 2021 en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Condamner M. [T] [C] à payer à la société GT SPIRIT la somme de 3.500 € par application de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel,
Condamner M. [T] [C] en tous les dépens de première instance et d'appel'.
A l'appui de ses prétentions, la société S.A.R.L. GT SPIRIT soutient notamment que :
La société GT SPIRIT qui a pour activité le dépôt-vente et la vente de véhicules de collection, de sport et de prestige, a signé le 25 juillet 2014, un contrat de dépôt-vente avec M. [I] [J], qui avait pour objet un véhicule de marque Ford, modèle Mustang cabriolet, immatriculé [Immatriculation 4], dont la date de première immatriculation est le 1er janvier 1966.
- le 11 février 2015, un contrat de vente a été signé avec M. [T]
[C]. Le véhicule a été livré sans que ce dernier n'émette une quelconque réserve lors de sa réception.
- sur la demande principale formée au titre de la, garantie des vices cachés, seul le propriétaire vendeur du véhicule est tenu de cette garantie, l'acquéreur d'un véhicule vendu par le garagiste simple mandataire ne pouvant diriger son action en résolution de la vente qu'à l'encontre de son vendeur.
La société GT SPIRIT n'a agi qu'en qualité d'intermédiaire. M. [T] [C] était donc parfaitement informé de la qualité de mandataire de la société GT SPIRIT.
- la théorie du vendeur apparent ne peut recevoir application en matière de vente de véhicule que lorsque l'intermédiaire se refuse à faire connaître l'identité de son mandant, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.
Sur la demande subsidiaire au titre de la responsabilité contractuelle, elle est irrecevable comme nouvelle en cause d'appel, la demande de première instance tendant à obtenir la résolution de la vente sur le fondement des vices cachés.
- en outre cette demande méconnaît le principe de la concentration des moyens.
- la demande nouvelle de M. [T] [C] est infondée, dès lors que le véhicule présenté lors de l'expertise judiciaire n'était pas dans l'état où il se trouvait lorsqu'il en avait fait l'estimation, et donc lors de la vente. Il y a lieu de s'interroger sur les conditions et les modalités de l'intervention de la société Liberty Cars qui aurait effectué une restauration complète du véhicule pour un montant de 25 000 €. Les multiples interventions entre la date de la vente et celle de l'expertise judiciaire, qui ne permettent donc pas d'établir quel était son état au jour de la cession.
- la société GT SPIRIT avait pris toutes les précautions élémentaires dans le cadre de la vente en soumettant le véhicule à un contrôle technique et à une expertise de valeur par un expert judiciaire. M. [T] [C] n'établit pas qu'elle aurait manqué à son obligation de conseil en sa qualité de vendeur mandataire,M. [C] recherche un bouc émissaire pour contourner l'impasse dans laquelle il se trouve du fait de la liquidation judiciaire de la société Liberty Cars, seule responsable de ses déboires.
Aux termes du dispositif de ses dernières conclusions en date du 16/12/2021, M. [D] [N] a présenté les demandes suivantes :
'' Déclarer M. [C] mal fondé en son appel, l'en débouter,
' Confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a débouté M. [C] des demandes formulées à l'encontre de M. [N],
' Débouter M. [C] de toutes demandes, fins et conclusions,
' Condamner M. [C] au paiement d'une somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de la procédure d'appel
A l'appui de ses prétentions, M. [D] [N] soutient notamment que :
- à la demande de M. [C], agissant en qualité de propriétaire du véhicule qu'il venait d'acquérir, M. [N] a rédigé un rapport constituant une estimation de la valeur de ce
véhicule destinée à servir de base à l'établissement d'une garantie contractuelle.
Après avoir examiné le véhicule, M. [N] a consigné dans son rapport signé le 22 février 2015 ses principales caractéristiques et a estimé que sa valeur était de 31.500 euros.
- M. [N] n'a pas été représenté devant le tribunal.
- M. [C] soutient en appel que le rapport rédigé par M. [N] l'aurait conforté dans son souhait de conserver « le véhicule de collection et surtout à y entreprendre des travaux de rénovation'
- M. [N] a rédigé l'attestation de valeur du véhicule litigieux le 22 février 2015, il a pu examiner le véhicule qui lui était présenté et considérer eu égard à l'état de ce véhicule et notamment au fait que celui-ci avait déjà bénéficié d'une restauration carrosserie récente que la valeur qui pouvait lui être attribuée était de 31.500 euros.
- le véhicule ainsi présenté lors de l'expertise judiciaire se trouve dans un état considérablement différent de celui qui avait en son temps été soumis à l'évaluation de M. [N], au point qu'il soit permis de se demander s'il n'y aurait pas eu une substitution de véhicule, possiblement par la société LIBERTY CARS.
- l'expert judiciaire a indiqué : ' par ailleurs, le rapport de M. [N] ne fait état d'aucune des déformations constatées nécessitant un passage au marbre'.
- M. [C] n'aurait certainement pas acquis un véhicule dans cet état, un simple particulier pouvant parfaitement se rendre compte des défauts majeurs affectant le véhicule notamment par comparaison avec l'état décrit dans le rapport d'estimation.
- il est hautement possible voir probable que le véhicule litigieux a fait l'objet d'une substitution de caisse vraisemblablement à l'époque où il était dans les ateliers de la société LIBERTY CARS.
- la preuve d'une faute qui aurait été commise par M. [N] à l'occasion de la rédaction de son rapport d'estimation de la valeur du véhicule litigieux, n'est en tout cas aucunement rapportée.
- M. [C] est également défaillant dans la démonstration de l'existence d'un lien de causalité entre une éventuelle faute et les préjudices qu'il invoque.
Il n'est pas sérieux de reprocher à M. [N] d'avoir conforté M. [C] dans l'idée qu'il était en possession d'une voiture en bon état tout en sollicitant sa condamnation à prendre en charge les frais d'une restauration coûteuse de ce même véhicule, effectuée au mépris des règles de l'art par la société LIBERTY CARS, allant peut-être jusqu'à échanger la caisse du véhicule acheté par M. [C] avec la caisse endommagée d'un autre véhicule.
- M. [C] se trouve confronté à la déconfiture de la société LIBERTY CARS, seule responsable des préjudices invoqués.
Ainsi, les conditions de la mise en jeu de la responsabilité de M. [N] ne sont pas réunies.
Il convient de se référer aux écritures des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et de leurs moyens.
Vu l'ordonnance de clôture en date du 09/01/2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la recevabilité de l'action engagée à l'encontre de la société GT SPIRIT au titre des vices cachés :
La société GT SPIRIT conteste la recevabilité de la demande formée à son encontre au titre de la garantie des vices cachés qui n'appartient qu'au vendeur, dès lors qu'il n'avait que la qualité de mandataire du vendeur propriétaire du véhicule M. [I] [J].
En l'espèce, la société GT SPIRIT qui a pour activité le dépôt-vente et la vente de véhicules de collection, de sport et de prestige, justifie avoir signé le 25 juillet 2014, un contrat de dépôt-vente avec M. [I] [J], qui avait pour objet un véhicule de marque Ford, modèle Mustang cabriolet, immatriculé [Immatriculation 4], dont la date de première immatriculation est le 1er janvier 1966.
La société mandataire a effectivement établi avec M. [C] le 11 février 2015 un document intitulé 'contrat de vente' relatif au véhicule litigieux, portant une clause de réserve de propriété qui stipule que 'le transfert de proriété du véhicule au profit de l'acquéreur n'aura lieu qu'après le paiement intégral du prix de vente et des éventuels frais additionnels sur devis accepté'.
Ce document est signé par la société GT SPIRIT selon son cachet sous la mention 'le mandataire', même s'il ne porte pas le nom de M. [J] ni la qualité de propriétaire de celui-ci.
Le prix de 31 900 € convenu était versé par M. [C] à la société GT SPIRIT, un premier versement de 17 000 € étant intervenu à la signature du contrat de vente le 11 février 2015.
Toutefois, il ne peut être retenu que la société GT SPIRIT se serait présentée comme le vendeur du véhicule et aurait dissimulé sa qualité de mandataire, alors justement qu'elle a signé le contrat souscrit en précisant expressément cette qualité.
Le fait que la transmission en date du 7 avril 2015 par la société GT SPIRIT des documents de cession, soit la carte grise, le certificat de non gage, le contrôle technique au nom de M. [J] et 3 exemplaires de la déclaration de cession, soit postérieure à la vente intervenue le 11 février 2015 ne retire rien au constat qu'il n'a pas la qualité de propriétaire du véhicule ni ne traduit de sa part une dissimulation de sa qualité, affichée, de mandataire du propriétaire.
Il y a lieu de retenir qu'il appartenait à M. [C] de solliciter au besoin toute information et précision sur l'identité du propriétaire avant toute signature contractuelle, dès lors qu'il était informé de la qualité de mandataire de son interlocuteur.
Il en résulte qu'il ne peut être reproché à la société GT SPIRIT, professionnelle du négoce automobile, d'avoir dissimulé sa qualité de mandataire.
Dès lors qu'il n'est pas retenu que la société GT SPIRIT se serait comportée comme le vendeur du véhicule ou en aurait pris l'apparence, elle n'a pas qualité pour défendre à l'action en résolution de la vente pour vice caché, et M. [C] est irrecevable en ses demandes formées à son encontre sur ce fondement.
Le jugement doit être en conséquence confirmé en qu'il a déclaré M. [C] irrecevable en ses demandes formées à l'encontre de la société GT SPIRIT, au titre des vices cachés qu'il dénonce.
Sur la recevabilité de la demande subsidiaire M. [C] à l'encontre de la société GT SPIRIT au titre de l'engagement de sa responsabilité contractuelle :
L'article 564 du code de procédure civile dispose que 'à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait'.
L'article 565 du même code précise toutefois : ' les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux même fins que celles soumises au premier juge même si leur fondement juridique est différent.'
L'article 566 du même code dispose enfin que 'les parties peuvent aussi expliciter les prétentions qui étaient virtuellement comprises dans les demandes et défenses soumises au premier juge et ajouter à celles-ci toutes les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément'.
En l'espèce, M. [C] présente pour la première fois en cause d'appel à titre subsidiaire une demande indemnitaire tenant à l'engagement de la responsabilité contractuelle de la société GT SPIRIT.
Toutefois, il ne poursuivait en première instance que la résolution de la vente, et cette action, qui tend à l'anéantissement du contrat, ne tend pas aux mêmes fins que l'action en responsabilité, qui laisse subsister le contrat.
Il ne s'agit pas non plus de prétentions qui étaient virtuellement comprises dans les demandes et défenses soumises au premier juge
Il convient en conséquence de retenir l'irrecevabilité en cause d'appel de cette demande subsidiaire et nouvelle de M. [C], formée à l'encontre de la société GT SPIRIT au titre de l'engagement de sa responsabilité contractuelle.
Sur les demandes formées à l'encontre de M. [N] :
M. [C] sollicite qu'il soit retenu que M. [D] [N] a engagé sa responsabilité délictuelle à son égard.
Le paiement de la somme de 37.468,41 € est sollicité au titre du remboursement des travaux engagés sur le véhicule, outre une somme de 8000 € en indemnisation de son préjudice de jouissance.
L'expert judiciaire a retenu que le véhicule qu'il a expertisé n'était pas 'dans l'état où il se trouvait lors de l'évaluation faite par M. [N], puisque entre temps, il a subi une « restauration » par la société LIBERTY CARS', dont il est dit par M. [E], expert amiable, que 'selon les constatations faites, il est évident que l'absence de résultat par le GARAGE LIBERTY CARS est évidente malgré une facturation supérieure à 30.000 €' il n'en demeure pas moins que les défauts de structure comme d'identification relevée par l'expert judiciaire préexistaient à la vente, même si le contrôle technique remis à l'acquéreur postérieurement à la vente faisait mention d'un problème de train avant.
Il ressort de l'avis de 'valeur à dire d'expert' établi par M. [N] le 22 février 2015 'à la demande de M. [C]' que celui-ci a indiqué :
'carrosserie : bon état, aucune trace visible de chocs antérieurs. Peinture : récente, bel état de présentation'. Il a en outre noté : 'contrôle technique : conforme à la réglementation en vigueur'.
Toutefois, l'expert judiciaire a pu indiquer : 'si... la mission de M. [N] était de déterminer la valeur à dire d'expert, le premier geste à effectuer est l'identification du véhicule, c'est-à -dire la vérification du numéro de série frappé. Par ailleurs, la valeur d'un véhicule ne repose pas uniquement sur son aspect extérieur.
Dans le cas présent, expertise faite véhicule au sol, un simple coup d'oeil, capot levé, aurait permis de constater que la frappe du numéro de série était grossièrement refaite et que le bloc avant était plié.
La valeur déterminée par M. [N] ne correspond pas au véhicule expertisé, qui n'a de valeur que celle des pièces à la revente'.
Au surplus, M. [N] ne pouvait utilement soutenir le 22 février 2015 que le contrôle technique était conforme à la réglementation en vigueur alors que celui-ci ne sera réalisé que les 25 et 31 mars 2015, soit postérieurement à son intervention.
Toutefois, si les lacunes ou omissions de l'avis de M. [N] doivent être retenues, sa responsabilité délictuelle ne peut être engagée qu'à la condition qu'il soit établi par M. [C] que M. [N], par son expertise erronée, l'aurait déterminé à engager des travaux de restauration importants sur le véhicule.
Or, cet avis est intervenu postérieurement à la vente du 11 février 2015, et son impact sur la décision de M. [C] d'engager des travaux conséquents de restauration du véhicule acquis n'est pas démontré au titre de la perte de la chance de ne pas engager de tels travaux.
En effet, ces travaux étaient manifestement nécessaires selon l'expert judiciaire mais ont été confié par M. [C] à la société LYBERTY CARS, ce qui est un élément extérieur à l'intervention pour avis de M. [N], les manquements postérieurs de cette société n'incombant pas à M. [N].
Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté M. [C] de ses demandes formées à l'encontre de M. [N].
Sur les dépens et l'application de l'article 699 du code de procédure civile:
Il résulte de l'article 696 du code de procédure civile que ' La partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. (...).'
Compte tenu de la solution apportée au présent litige, les dépens d'appel seront fixés à la charge de M. [T] [C].
Sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile :
Il est équitable de condamner M. [T] [C] à payer à la société S.A.R.L. GT SPIRIT la somme fixée au dispositif du présent arrêt sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.
M. [D] [N] conservera sans inéquité la charge de ses propres frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS,
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, et en dernier ressort,
DÉCLARE irrecevable l'action engagée par M. [T] [C] à l'encontre de la société GT SPIRIT au titre de la garantie des vices cachés.
DÉCLARE irrecevable comme nouvelle la demande subsidiairement formulée pour la première fois en cause d'appel par M. [T] [C] à l'encontre de la société GT SPIRIT au titre de l'engagement de sa responsabilité contractuelle.
CONFIRME le jugement entrepris.
Y ajoutant,
DÉBOUTE les parties de leurs autres demandes plus amples ou contraires.
CONDAMNE M. [T] [C] à payer à la société S.A.R.L. GT SPIRIT la somme de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.
DÉBOUTE M. [D] [N] de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
CONDAMNE M. [T] [C] aux dépens d'appel, le jugement étant confirmé en ce qui concerne ceux de première instance.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,