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04/04/2023 | FRANCE | N°22/02530

France | France, Cour d'appel de Poitiers, 1ère chambre, 04 avril 2023, 22/02530


ARRET N°162



N° RG 22/02530 - N° Portalis DBV5-V-B7G-GUXT













[Y]

Société JAJULAU

[A]



C/



[N]

[X]

[D]

Société LA MOTTE



















RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE POITIERS



1ère Chambre Civile



ARRÊT DU 04 AVRIL 2023





Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/02530 - N°

Portalis DBV5-V-B7G-GUXT



Décision déférée à la Cour : jugement du 07 avril 2009 rendu par le Tribunal de Grande Instance de POITIERS.





APPELANTS :



Monsieur [F] [Y]

né en à

'[Adresse 13]'

[Localité 10]



Société JAJULAU

'[Adresse 13]'

[Localité 10]



Madame [M] [A]

née en à...

ARRET N°162

N° RG 22/02530 - N° Portalis DBV5-V-B7G-GUXT

[Y]

Société JAJULAU

[A]

C/

[N]

[X]

[D]

Société LA MOTTE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE POITIERS

1ère Chambre Civile

ARRÊT DU 04 AVRIL 2023

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/02530 - N° Portalis DBV5-V-B7G-GUXT

Décision déférée à la Cour : jugement du 07 avril 2009 rendu par le Tribunal de Grande Instance de POITIERS.

APPELANTS :

Monsieur [F] [Y]

né en à

'[Adresse 13]'

[Localité 10]

Société JAJULAU

'[Adresse 13]'

[Localité 10]

Madame [M] [A]

née en à

'[Adresse 13]'

[Localité 10]

ayant tous les trois pour avocat postulant Me Jérôme CLERC de la SELARL LEXAVOUE POITIERS-ORLEANS, avocat au barreau de POITIERS et pour avocat plaidant Me Stéphanie DUBIN-SAUVETRE de la SELARL GASTON - DUBIN SAUVETRE - DE LA ROCCA, avocat au barreau de POITIERS,

INTIMES :

Monsieur [S] [N]

né en à

[Adresse 8]

[Localité 10]

Madame [V] [X] épouse [N]

née en à

[Adresse 8]

[Localité 10]

ayant tous les deux pour avocat Me Frédéric MADY de la SELARL MADY-GILLET-BRIAND-PETILLION, avocat au barreau de POITIERS

Monsieur [M] [R] [R] [D]

né le 26 Mars 1955 à [Localité 11] ROYAUME UNI

[Adresse 13]

[Localité 10]

Société LA MOTTE

[Adresse 1]

[Localité 7]

ayant toutes les deux pour avocat Me Hervé PIELBERG de la SCP KPL AVOCATS, avocat au barreau de POITIERS

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 02 Février 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. Thierry MONGE, Président de Chambre

Monsieur Dominique ORSINI, Conseiller qui a présenté son rapport

Madame Anne VERRIER, Conseiller

qui en ont délibéré

GREFFIER, lors des débats : Mme Elodie TISSERAUD,

ARRÊT :

- Contradictoire

- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- Signé par M. Thierry MONGE, Président de Chambre et par Mme Elodie TISSERAUD, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Les époux [S] [N] et [V] [X] ont acquis par acte des 29 juin et 27 juillet 1990 la propriété de parcelles de terres et d'un ancien moulin désaffecté dénommé '[Adresse 14]', situés à [Localité 10] (Vienne).

Ce moulin, situé sur la parcelle cadastrée section D n° [Cadastre 2], était à l'époque où il fonctionnait alimenté en eau par un bief dérivé de [Localité 12], rivière non domaniale affluent de la rivière [Localité 9].

Par acte du 15 avril 1994, la sci Jajulau a acquis diverses parcelles, dont celles cadastrées section D n° [Cadastre 4] et [Cadastre 6] situées de part et d'autre du bief. La sci Jajulau a par acte du 20 mars 1995 donné les parcelles acquises à bail commercial à [M] [O] (parfois orthographié [A]). [F] [Y] en est le concubin.

Le bief a été obstrué par des barrages permettant aux parcelles de la sci Jajulau de communiquer.

Les époux [S] [N] et [V] [X] ont proposé l'édification d'un pont en remplacement des barrages reliant les parcelles entre elles afin de permettre l'écoulement normal de l'eau.

La mise en demeure en date du 9 avril 2004 de supprimer ces barrages adressée par les époux [S] [N] et [V] [X] à [M] [O] et [F] [Y] est demeurée infructueuse.

Par arrêté du 12 décembre 2002, le préfet de la Vienne a mis en demeure [S] [N] de cesser immédiatement tous travaux au [Adresse 14] à [Localité 10].

Par acte du 29 septembre 2004, les époux [S] [N] et [V] [X] ont assigné [M] [O] et [F] [Y] devant le tribunal de grande instance de Poitiers. Ils ont à titre principal demandé :

- d'enlever ou faire enlever le barrage constitué de terres végétales et de cailloux installé sur le bief reliant les parcelles n° D [Cadastre 6] et D [Cadastre 4] ;

- en tant que de besoin, que soit installée une passerelle permettant de relier les parcelles et à l'eau alimentant le moulin de s'écouler ;

- de rehausser le niveau d'un îlot.

Ils ont fait constater le 17 septembre 2004 la présence d'un barrage.

[M] [O] et [F] [Y] ont à titre principal soulevé l'irrecevabilité de l'action des demandeurs. Ils ont soutenu que le château de Tréguel et ses terres appartenaient à la sci Jajulau et qu'ils leur avaient été donnés à bail commercial.

Par acte du 3 octobre 2005, les époux [S] [N] et [V] [X] ont mis en cause la sci Jajulau.

Ils ont fait dresser le 30 novembre 2005 le constat de l'édification d'un second barrage sur le bief.

Par ordonnance du 15 décembre 2005, le juge de la mise en état a commis [B] [P] en qualité d'expert. Sa mission était notamment de déterminer si le moulin pouvait fonctionner à nouveau et à quelles conditions, de vérifier la propriété des parcelles concernées par le litige, de décrire les travaux réalisés par les parties et de dire si ceux entrepris par les demandeurs avaient pu provoquer l'affaissement de parcelles. Le rapport d'expertise est en date du 20 mai 2007. L'expert a notamment conclu que :

'1. Le [Adresse 14] est un ancien moulin, fondé en titre (d'après les constatations de la DDAF). Il était alimenté en eau à la faveur d'un bief, prenant sa source dans la rivière [Localité 12] et suivant un parcours à peu près parallèle à cette rivière.

2. L'examen des lieux a permis de constater la présence de deux "barrages" obstruant le bief et empêchant l'écoulement des eaux dans le bief à partir de la prise d'eau dans la rivière [Localité 12], vers le moulin [...]

3. En l'état actuel des lieux, ce moulin ne peut donc pas fonctionner, puisque le bief devant l'alimenter en eau, est obstrué.

4. Les 2 "barrages" présents en travers du bief résultent chacun d'un comblement réalisé de main d'homme et non d'une modification naturelle des lieux. Le "barrage" 'A', le plus en amont sur le bief, est le plus ancien. Le "barrage" 'D' est par contre plus récent et certainement postérieur à l'acquisition des terres par la SCI JAJULAU. Le plan de localisation des travaux envisagés par le Syndicat d'Etudes, d'Entretien et de Gestion de l'[Localité 9] et de [Localité 12] permet de supposer que le barrage 'A' est également postérieur à l'acquisition des terres par la SCI JAJULAU.

[...]

5. Pour que le moulin puisse fonctionner à nouveau, il serait nécessaire de procéder :

a. à l'enlèvement des deux "barrages" ;

b. au curage du bief ;

c. à la mise en place d'un seuil de dérivation sur [Localité 12] dans le respect des textes réglementaires.

6. Les travaux de remise en fonctionnement du moulin devront nécessairement faire l'objet d'une demande d'autorisation administrative.

[...]

8. Au cours de la réunion d'expertise, M.[N] a reconnu avoir entrepris des travaux de curage du bief en 2002. Ces travaux (mentionnés également dans le PV de la gendarmerie et réalisés sans autorisation) ont pu provoquer les affaissements de terrain constatés au niveau de la parcelle D[Cadastre 5] (ou accentuer ces affaissements si ceux-ci existaient déjà), dans la mesure où les matériaux présents dans cette partie du terrain sont non-consolidés et instables'.

La sci La Motte est intervenue volontairement à l'instance par conclusions notifiées le 11 février 2008.

Les époux [S] [N] et [V] [X] ont postérieurement demandé à titre principal de :

- déclarer irrecevable l'intervention volontaire de la sci La Motte ;

- condamner in solidum [F] [Y], [M] [O] et la sci Jajulau à leur payer la somme de 26 744.46 € à titre de provision à valoir sur le coût de la remise en état du bief.

[M] [O], [F] [Y] et la sci Jajulau ont conclu au rejet de ces demandes aux motifs que :

- le [Adresse 14] n'était pas fondé en titre et ne bénéficiait d'aucun droit d'eau à caractère imprescriptible ;

- les parcelles revendiquées par les demandeurs étaient la propriété de la sci Jajulau ;

- le moulin n'était plus en eau depuis de nombreuses décennies.

La sci Jajulau a reconventionnellement demandé de condamner les demandeurs au paiement de la somme de 3.753.05 € correspondant au coût de remise en état du bief suite aux travaux qu'ils avaient effectués sur ces parcelles.

La sci La Motte a exposé être propriétaire du château de la Motte classé monument historique et d'un jardin bénéficiant du label 'jardin remarquable', que de cet ensemble dépendaient deux parcelles jouxtant la partie de [Localité 12] située entre les deux extrémités du bief du [Adresse 14] et qu'elle est ainsi voisine des autres parties. Elle a précisé que la parcelle cadastrée section D n° [Cadastre 3] avait été acquise de la sci Jajulau.

Par jugement du 7 avril 2009, le tribunal de grande instance de Poitiers a statué en ces termes :

'Déclare recevable l'action intentée par Monsieur et Madame [N]

Déclare irrecevable l'intervention volontaire de la SCI LA MOTTE

Dit que les époux [N] sont propriétaires par accession du canal d'amenée d'eau prenant son origine dans la rivière " [Localité 12] " et desservant le [Adresse 14]

Dit que les époux [N] bénéficient également d'une servitude dite " de francs bords" le long du canal d'amenée d'eau et du déversoir dont l'assiette et l'exercice sont strictement conditionnées par les seules, nécessités du curage et de l'entretien de ces ouvrages

Déboute Monsieur et Madame [N] de l'ensemble de leurs demandes à l'encontre de Monsieur [Y] et de Madame [A]

Condamne la SCI JAJULAU à payer la somme de 5.000 euros à Monsieur et Madame [N] en réparation de leur préjudice

Déboute la SCI JAJULAU de sa demande reconventionnelle tendant à la condamnation solidaire de Madame [N] à des dommages et intérêts en réparation des affaissements de terrain

Condamne Monsieur [N] à payer à la SCI JAJULAU la somme de 1.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des affaissements de terrain sur sa propriété

Déboute Monsieur [Y] et Madame [A] de leur demande reconventionnelle de dommages et intérêts à l'encontre de Monsieur et Madame [N]

Rejette toute demande plus ample ou contraire au présent dispositif

Dit n'y avoir lieu à l'exécution provisoire de la présente décision

Condamne in solidum la SCI JAJULAU et la SCI LA MOTTE à payer à Monsieur et Madame [N] la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile

Condamne la SCI JAJULAU aux entiers dépens de l'instance, en application de l'article 696 du code de procédure civile'.

Il a déclaré irrecevable l'intervention volontaire accessoire de la sci La Motte n'ayant pas intérêt à agir puisque propriétaire de parcelles longeant la rivière Vendelogne et non le bief.

Il a considéré que les demandeurs ne justifiaient pas que le moulin était fondé en titre, l'acte notarié de 1738 ayant concerné un bail à ferme, la carte de Cassini produite n'ayant pas fait mention d'un moulin sur les lieux litigieux et les demandeurs ne rapportant pas la preuve de l'existence du moulin antérieurement à 1789.

Il a dit que les demandeurs étaient :

- propriétaires par accession du bief, ouvrage artificiel réalisé pour desservir le moulin ;

- en cette qualité, fondés à curer le bief et à solliciter l'enlèvement des barrages réalisés par la sci Jajulau ou ses auteurs.

Il a estimé à 5.000 € le coût de cet enlèvement.

Il a fait droit à la demande de paiement des frais de remise en état des parcelles de la sci Jajulau dégradées par les travaux des demandeurs qui n'en étaient peut-être pas la seule cause, pour un montant de 1.000 €.

Il a rejeté la demande indemnitaire de [M] [O] et [F] [Y], la preuve du préjudice allégué n'étant pas rapportée.

Par déclaration reçue au greffe le 22 avril 2009, [M] [O], [F] [Y] et la sci Jajulau ont interjeté appel de ce jugement.

La sci Jajulau a fait dresser le 4 mai 2009 le constat des travaux réalisés par les époux [S] [N] et [V] [X], de l'élargissement du bief et de l'affaissement de terrain.

Le 28 juin 2009, les époux [S] [N] et [V] [X] ont demandé au préfet de la Vienne de dire le moulin fondé en titre. Par arrêté du 20 mai 2010, il a été fait droit à cette requête. Cet arrêté a été contesté devant les juridictions administratives.

Par acte du 23 septembre 2011, les époux [S] [N] et [V] [X] ont mis en cause [M] [D] auquel la sci Jajulau avait cédé ses biens immobiliers par acte du 10 septembre 2010. S'agissant de la procédure en cours, il a été stipulé en page 14 de cet acte que : 'Le VENDEUR s'engage en outre à supporter les frais liés à cette procédure ainsi que, le cas échéant, toutes sommes qu'il pourrait être condamné à verser aux époux [N]'.

Par arrêt du 5 juin 2013, la cour a statué en ces termes :

'Déclare recevables les demandes de la SCI Jajulau, [M] [O] et [F] [Y] ;

Réforme le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Poitiers le 7 avril 2009 en ce qu'il déclare irrecevable l'intervention volontaire de la SCI La Motte ;

Statuant à nouveau sur ce chef, déclare recevables les demandes de la SCI La Motte en application de l'article 330 du code de procédure civile ;

Sursoit à statuer sur les autres demandes des parties jusqu'à une décision définitive de la justice administrative sur le recours en annulation contre l'arrêté du préfet de la Vienne en date du 20 mai 2010 ;

Dit que la présente instance sera poursuivie à l'initiative de la partie la plus diligente lorsque cette décision définitive aura été rendue ;

Réserve les dépens'.

Par jugement du 28 novembre 2013, le tribunal administratif de Poitiers a annulé l'arrêté préfectoral du 20 mai 2010. Par arrêt du 21 octobre 2014, la cour administrative d'appel de Bordeaux a confirmé ce jugement. Par arrêt du 23 décembre 2015, le Conseil d'Etat a déclaré le pourvoi non admis.

Le préfet de la Vienne, que les époux [S] [N] et [V] [X] avaient de nouveau sollicité le 17 février 2014, a par arrêté du 26 novembre 2014 dit que le moulin était fondé en titre. Cet arrêté a été contesté devant les juridictions administratives.

Par ordonnance du 5 avril 2017, le conseiller de la mise en état a sursis à statuer sur les demandes respectives des parties jusqu'au prononcé d'une décision définitive sur le recours en annulation de l'arrêté du préfet de la Vienne du 26 novembre 2014.

Par jugement du 27 septembre 2017, le tribunal administratif de Poitiers a annulé cet arrêté.

Par ordonnance du 5 novembre 2019, le conseiller de la mise en état a ordonné d'office la radiation de l'affaire.

Par arrêt du 12 novembre 2019, la cour administrative d'appel de Bordeaux a confirmé le jugement du 27 septembre 2017. Par arrêt du 16 octobre 2020, le Conseil d'Etat a déclaré non admis le pourvoi des époux [S] [N] et [V] [X].

La sci La Motte a postérieurement sollicité le rétablissement de l'affaire.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 17 octobre 2022, [M] [O], [F] [Y] et la sci Jajulau ont demandé de :

'Vu l'article 386 du Code de procédure civile,

Réinscrire au rôle de la troisième chambre civile de la Cour d'appel de Poitiers, l'affaire enregistrée : RG n° 09/1334 ' C3.

Au FOND :

Dire et juger recevables et bien fondés les concluants en leur appel, y faisant droit, réformer la décision entreprise, statuant à nouveau.

Dire et juger irrecevables comme prescrites les époux [N] en l'ensemble de leurs prétentions et les en débouter.

EN TOUTES HYPOTHESES

Vu l'acte notarié de 1738,

Vu les dispositions de l'article 546 du Code Civil,

Vu la Jurisprudence applicable en pareille matière,

A TITRE PRINCIPAL,

Dire et juger que le [Adresse 14] n'est pas fondé en titre,

Dire et juger que le moulin des époux [N] ne bénéficie d'aucun droit d'eau à caractère imprescriptible,

Constater que les parcelles revendiquées par les époux [N] sont la propriété de la SCI JAJULAU.

Constater que le [Adresse 14] n'est plus en eau depuis de nombreuses décennies,

Dire et jugée l'action initiée par les époux [N] comme mal-fondée en Droit,

Dire et juger l'action des époux [N] comme irrecevable,

Débouter les époux [N] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions

EN TOUTES HYPOTHESES ET EGALEMENT A TITRE RECONVENTIONNEL :

Vu l'article 1382 du Code Civil,

Constater que Monsieur [N] a effectué des travaux sur les parcelles de la SCI JAJULAU.

Constater que Monsieur [N] a reconnu avoir effectué des travaux sur lesdites parcelles,

Dire et juger que le comportement des [N] est à l'origine du préjudice subi par Monsieur [Y] et Madame [O],

Constater que l'expert a évalué les travaux de remise en état à la somme de 3753.05 €,

En conséquence, condamner solidairement les époux [N] à payer à la SCI JAJULAU la somme de 3753.05€ au titre des travaux à effectuer pour la remise en état.

Condamner les mêmes solidairement à la somme de 25.000€ toutes causes de préjudices confondus au profit de Monsieur [Y] et Madame [O].

Condamner solidairement les époux [N] à la somme de 7 500€ au titre de l'article 700 du code de procédure civil,

Condamner solidairement les époux [N] à régler les entiers dépens de 1 ère instance et d'appel, y compris les frais d'expertise et dont distraction pour ceux la concernant au profit de la SELARL LEXAVOUE'.

La sci Jajalau a soutenu qu'il n'avait plus été fait mention dans les titres depuis 1950 du moulin et qu'ayant acquis en 1994 des parcelles situées de part et d'autre du bief, elle avait acquis par l'effet de la prescription abrégée de l'article 2272 alinéa 2 du code civil la propriété de cette partie du bief. Les appelants ont pour ces motifs conclu à l'irrecevabilité des demandes des époux [S] [N] et [V] [X].

La sci Jajulau a exposé avoir intérêt et qualité à agir, ayant été propriétaire des parcelles litigieuses à la date du jugement et l'acte de cession ayant stipulé qu'elle supporterait les éventuels condamnations et frais de justice consécutifs au litige. Elle a ajouté avoir intérêt à interjeter appel, n'ayant pas été remplie de ses droits.

Les appelants ont soutenu que l'acte de bail de 1738, antérieur au 4 août 1789, à supposer qu'il concernât le moulin litigieux, qualifié en l'état, avait stipulé que le preneur n'était pas obligé de le faire rétablir. Ils en ont déduit que le moulin n'était pas en fonctionnement en 1789, qu'il ne bénéficiait pas d'une d'une prise d'eau et qu'il n'était dès lors pas fondé en titre. Ils ont fait observer que les cartes dites de Cassini produites par la sci La Motte n'avaient pas fait mention du moulin litigieux.

Selon eux, les époux [S] [N] et [V] [X] ne justifiaient d'aucun droit de propriété sur le bief puisque ne pouvant se prévaloir du droit d'accession de l'article 546 du code civil. Ils ont exposé que pour bénéficier de la présomption simple de ce texte, les époux [S] [N] et [V] [X] devaient justifier du caractère artificiel du bief, que cette preuve n'était pas rapportée en regard du cheminement tortueux du cours d'eau, que le moulin qui avait été depuis longtemps désaffecté avait désormais une fonction d'habitation. Ils ont indiqué que l'acte d'acquisition avait mentionné un ancien moulin, qui n'était plus qu'une ruine, et que le permis de construire avait été délivré en vue de la rénovation de bâtiments afin d'y réaliser quatre logements.

Ils ont rappelé que par application de l'article L 215-2 du code de l'environnement, le lit des cours d'eau non domaniaux appartenait aux propriétaires des deux rives et que le titre prévalait sur le droit d'accession.

Ils ont maintenu que les époux [S] [N] et [V] [X] auraient dû solliciter, outre une autorisation administrative, leur autorisation avant d'effectuer des travaux sur le bief et que ceux-ci, bien qu'interdits par l'administration, avaient été poursuivis.

Ils ont ajouté que l'expert n'avait pas attribué à la sci Jajulau la réalisation des barrages litigieux, constitués de matériaux naturels et selon eux résultés du travail de l'eau et de la nature.

La sci Jajulau a reconventionnellement demandé paiement de la somme de 3.753,05 € correspondant au coût de remise en état du bief. [F] [Y] et [M] [O] ont quant à eux demandé paiement de la somme de 25.000 € en réparation de leur préjudice moral.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 4 janvier 2023, les époux [S] [N] et [V] [X] ont demandé de :

'Vu le bordereau de pièces fondant les prétentions de Monsieur et Madame [N], annexé aux présentes conclusions conformément aux dispositions de l'article 954 du code civil.

Vu les dispositions de l'article 546 du code civil,

Vu les dispositions de l'article 1382 du code civil

Débouter la SCI JAJULAU, Monsieur [F] [Y] et Madame [M] [O] de toutes leurs demandes, fins et conclusions contraires aux présentes.

Débouter la SCI LA MOTTE de toutes ses demandes, fins et conclusions à l'encontre de Monsieur et Madame [N], contraires aux présentes.

EN CONSEQUENCE

Dire et juger en confirmation du jugement du tribunal de grande instance de POITIERS du 7 avril 2009, que :

- Les époux [N] sont propriétaires par accession du canal d'amenée d'eau prenant son origine dans la rivière [Localité 12] et desservant le [Adresse 14]

- Les époux [N] bénéficient également d'une servitude dite de franc bord le long du canal d'amenée d'eau et du réservoir dont l'assiette et l'exercice sont strictement conditionnés par les seules nécessités de curage et de l'entretien de ses ouvrages.

Infirmer le jugement du tribunal de grande instance de POITIERS du 7 avril 2009 en ce qu'il a condamner la SCI JAJULAU à payer la somme de 5 000 € à Monsieur et Madame [N] en réparation de leur préjudice.

Statuant à nouveau,

Condamner la SCI JAJULAU à payer à Monsieur et Madame [S] [N] les sommes respectives de 12 197, 94 € et 14 546,52 €, soit 26 744,46 € TTC à titre de provision à valoir sur le coût de la remise en état du bief suivant les devis produits annexés au rapport d'expertise.

Donner acte à Monsieur et Madame [S] [N] de ce qu'ils se réservent de saisir la juridiction compétente d'une demande en paiement d'une somme complémentaire contre la SCI JAJULAU au cas où ces provisions s'avéraient insuffisantes dans le financement des travaux de remise en état des lieux.

Infirmer le jugement du tribunal de grande instance de POITIERS du 7 avril 2009 en ce qu'il a condamné Monsieur [N] à payer à la SCI JAJULAU la somme de 1 000 € à titre de dommages-intérêts en réparation des affaissements de terrain sur sa propriété.

Confirmer pour le surplus le jugement du tribunal de grande instance de POITIERS du 7 avril 2009.

Condamner la SCI JAJULAU, Monsieur [Y] Madame [O], et la SCI LA MOTTE à payer à Monsieur et Madame [N] une somme complémentaire de 8 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamner les mêmes aux entiers dépens, tant de première instance que d'appel, en ce compris les frais d'expertise, dont distraction pour ce qui la concerne, au profit de la SELARL MADY-GILLET-BRIAND-PETILLION, avocat, qui sera autorisée à les recouvrer dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile'.

Ils ont exposé que l'expert judiciaire avait considéré que le moulin était fondé en titre et décrit les travaux nécessaires pour qu'il puisse de nouveau fonctionner.

Ils ont soutenu que les appelants n'étaient pas fondés à leur opposer la prescription acquisitive abrégée par l'effet d'un juste titre, aucun titre justifiant d'une propriété sur le bief n'ayant été produit, ni à se prévaloir d'un droit d'accession, leurs titres n'ayant pas fait mention du bief.

Ils ont maintenu que le bief et ses francs-bords étaient leur propriété exclusive par l'effet d'un droit d'accession, le moulin ne pouvant pas fonctionner sans être alimenté en eau. Selon eux, les conditions pour en bénéficier étaient réunies : caractère artificiel du bief réalisé dans un intérêt purement privé.

Ils ont en conséquence sollicité l'enlèvement des barrages faisant obstacle à la mise en eau du moulin et paiement du coût des travaux de remise en état. Ils ont pour ces motifs conclu au rejet des demandes formées à leur encontre.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 12 janvier 2003, la sci La Motte a demandé de :

'Ordonner la réinscription au rôle de l'affaire enregistrée sous le numéro 09/01334 Réformer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de POITIERS le 7 avril 2009.

Statuant à nouveau,

Débouter M. et Mme [N] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions.

Y ajoutant,

Déclarer M. et Mme [N] irrecevables en leur demande visant à ce qu'il soit dit et jugé que « le moulin, propriété de Monsieur et Madame [N] est un moulin fondé en titre avec toutes conséquences de droit (propriété du bief et des francs bords) »

En tout état de cause,

Condamner M. et Mme [N] à verser à la SCI LA MOTTE la somme de 6.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, et les condamner aux entiers dépens de

première instance et d'appel'.

Elle a exposé que [S] [N] avait entrepris sans autorisation le curage du bief, qu'il avait pour ces motifs été mis en demeure par l'administration d'y mettre fin et que ces travaux avaient provoqué des affaissements.

Elle a rappelé que la cour avait déclaré recevable son intervention volontaire.

Elle a maintenu :

- que les époux [S] [N] et [V] [X] n'étaient pas fondés à soutenir que le moulin était fondé en titre, le moulin n'étant apparu sur les cartes qu'après 1830 ;

- qu'il n'était pas établi que le moulin avait été reconstruit sur l'emplacement d'un ancien moulin ruiné.

Elle a sollicité la réformation du jugement en ce qu'il avait reconnu aux époux [S] [N] et [V] [X] un droit de propriété sur le bief. Selon elle, le moulin était désaffecté depuis plus de 50 ans lors de son acquisition par ces derniers, le bâtiment était après rénovation affecté à un usage non plus de moulin, mais d'habitation et il n'était pas établi que le bief était artificiel. Elle a ajouté que son titre l'emportait dès lors sur la présomption simple de l'article 646 du code civil.

Selon elle, les travaux sur le bief qui était dans le rayon de visibilité de leur bien, avaient été entrepris sans l'autorisation de l'architecte des bâtiments de France imposée par l'article L 621-31 du code du patrimoine et contrevenaient à la réglementation sur les sites classés.

[M] [D] a constitué avocat. Il n'a pas conclu postérieurement au rétablissement de l'affaire. Les autres parties, qui ne le mentionnent plus comme partie à l'instance, n'ont plus formulé de demandes à son encontre. Par conclusions notifiées par voie électronique le 21 juin 2012, il avait demandé de :

'Vu les articles 783 et 16 du code de procédure civile,

Ecarter des débats l'ensemble des conclusions et pièces signifiées dans l'intérêt de M. et Mme [N] le 19 juin 2012.

Subsidiairement,

Renvoyer la présente procédure à une prochaine audience de la Cour d'Appel de céans.

Subsidiairement,

Confirmer le jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de POITIERS en ce qu'il a rejeté la demande des époux [N] tendant à voir dire que le moulin était fondé en titre.

Réformer en toutes ses autres dispositions le jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de POITIERS le 7 avril 2009.

Statuant à nouveau,

Débouter M. et Mme [N] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions.

En toute hypothèse,

Condamner M. et Mme [N] à verser à M. [D] la somme de 2.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamner M. et Mme [N] aux entiers dépens, avec distraction au profit de la SCP PIELBERG ' KOLENC, en application de l'article 699 du code de procédure civile'.

Il a soutenu que le moulin n'était pas fondé en titre et que les époux [S] [N] et [V] [X] ne justifiaient pas d'un droit de propriété sur le bief. Il a pour ces motifs conclu au rejet des demandes de ces derniers.

L'ordonnance de clôture est du12 janvier 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

SUR UN MOULIN FONDE EN TITRE

L'article 29 de la loi du 16 octobre 1919 relative à l'utilisation de l'énergie hydraulique dispensait les 'usines ayant une existence légale' du régime d'autorisation instauré.

L'article 1er alinéa 2 la loi du n° 92-3 du 3 janvier 1992 sur l'eau dispose que : 'L'usage de l'eau appartient à tous dans le cadre des lois et règlements ainsi que des droits antérieurement établis'.

L'article L 210-1 du code de l'environnement dispose désormais que : 'Dans le cadre des lois et règlements ainsi que des droits antérieurement établis, l'usage de l'eau appartient à tous' et l'article L 214-6 II du même code que : 'Les installations, ouvrages et activités déclarés ou autorisés en application d'une législation ou réglementation relative à l'eau antérieure au 4 janvier 1992 sont réputés déclarés ou autorisés en application des dispositions de la présente section. Il en est de même des installations et ouvrages fondés en titre'.

Les droits fondés en titre sont des droits exclusivement attachés à des ouvrages pour l'usage notamment des moulins. Le droit d'usage de l'eau est exonéré de procédure d'autorisation ou de renouvellement, car antérieur à l'instauration d'un régime d'autorisation. S'agissant des cours d'eau non domaniaux, il s'agit de droits nés sous le régime féodal antérieurement au 4 août 1789 et qui n'ont pas été abolis.

La preuve de l'existence de l'ouvrage avant le 4 août 1789 suffit pour reconnaître le caractère fondé en titre.

Les époux [S] [N] et [V] [X] ne sollicitent plus de la cour qu'elle déclare le moulin fondé en titre. Les autres parties demandent de dire qu'il ne l'est pas.

Il n'est plus soutenu que le moulin objet du bail de 1738 d'une part fonctionnait, d'autre part était le '[Adresse 14]' actuel, ni qu'il figurait sur les cartes dites de Cassini. Le plan le plus ancien mentionnant le '[Adresse 14]', annexé en page 10 du rapport d'expertise judiciaire, est un plan cadastral de 1830.

Le tribunal administratif de Poitiers puis la cour administrative d'appel de Bordeaux par arrêts confirmatifs ont à deux reprises, par décisions désormais irrévocables, annulé les arrêtés préfectoraux ayant déclaré le moulin fondé en titre.

Le jugement sera pour ces motifs confirmé en ce qu'il considéré que le moulin n'était pas fondé en titre et a écarté les prétentions des époux [S] [N] et [V] [X] présentées sur ce fondement.

SUR LA PRESCRIPTION

La sci Jajulau se fonde sur les dispositions de l'article 2272 alinéa 2 du code civil qui dispose que : 'celui qui acquiert de bonne foi et par juste titre un immeuble en prescrit la propriété par dix ans' pour soutenir d'une part que l'action des époux [S] [N] et [V] [X] est prescrite, d'autre part qu'elle aurait acquis par prescription la propriété du bief litigieux.

Ces dispositions relatives à la prescription acquisitive et non extinctive sont sans incidence sur la recevabilité de l'action des époux [S] [N] et [V] [X]. Ceux-ci revendiquent un droit de propriété sur le bief qui ne se perd pas par le non-usage.

Les dispositions de l'article 2272 alinéa 2 précité protègent celui qui a juste titre et bonne foi contre le défaut de propriété de celui dont il tient son droit (acquisition 'a non domino') et est inapplicable à celui qui a acquis son bien du véritable propriétaire. La sci Jajulau a acquis la propriété des parcelles litigieuses de la sci Treguel par acte du 15 avril 1994, postérieur à l'acte d'acquisition de leur bien par les époux [S] [N] et [V] [X] qui ont dès cette acquisition revendiqué la propriété du bief alimentant le moulin qu'ils considéraient fondé en titre. La sci Jajulau ne peut dès lors se prévaloir d'une possession acquisitive du bief, la possession alléguée n'ayant pas satisfait aux conditions de l'article 2261 du code civil disposant que : 'Pour pouvoir prescrire, il faut une possession continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque, et à titre de propriétaire'.

Au surplus, il n'est pas justifié que les titres de propriété de la sci Jajulau ou de ses auteurs qui ne sont pas produits aux débats, mentionnaient le bief et stipulaient que la propriété en était transmise. La sci Jajulau ne peut dès lors pas se prévaloir d'une acquisition 'a non domino'.

Les appelants ne sont pour ces motifs pas fondés en leur prétentions formées de ce chef.

Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a déclaré recevable l'action des époux [S] [N] et [V] [X].

Il y sera ajouté en ce que la demande de la sci Jajulau fondée sur la prescription acquisitive est rejetée, ce moyen n'ayant pas été soutenu devant le premier juge.

SUR L'ACCESSION

L'article 546 du code civil dispose que :

'La propriété d'une chose soit mobilière, soit immobilière, donne droit sur tout ce qu'elle produit, et sur ce qui s'y unit accessoirement soit naturellement, soit artificiellement.

Ce droit s'appelle "droit d'accession".

Le bief est par l'effet des dispositions précitées réputé appartenir en entier au propriétaire du moulin lorsque ce bief d'amenée d'eau est un ouvrage artificiel différent du lit de la rivière, créé dès l'origine à l'usage exclusif du moulin.

Le bief litigieux est distinct de la rivière Vendelogne qui l'alimente. Les plans et les photographies annexés au rapport d'expertise et celles annexées au procès-verbal de constat du 2 janvier 2007 dressé par Maître [J] [H], huissier de justice associé à [Localité 15], établissent que contrairement à celui de la rivière, le tracé du bief n'est pas sinueux. Son caractère artificiel est dès lors établi.

Le rapport d'expertise et les plans y étant annexés établissent que le bief, alimenté en eau en amont du moulin et se déversant en aval du moulin dans la rivière, à une très faible distance de celui-ci, n'avait d'autre finalité que de permettre son fonctionnement.

Le propriétaire du moulin est dès lors présumé être propriétaire par accession du bief et de ses francs-bords.

Les appelants ne rapportent pas la preuve contraire.

Il est indifférent que le moulin n'ait plus été en activité à la date de son acquisition par les époux [S] [N] et [V] [X] et le bief hors d'eau, ce qui n'est pas établi, le droit de propriété ne se perdant pas par le non usage.

Le jugement sera pour ces motifs confirmé en ce qu'il a déclaré les époux [S] [N] et [V] [X] propriétaires par accession du bief.

Par application des articles L 215-14 et suivants du code de l'environnement, le propriétaire du bief a l'obligation d'en assurer l'entretien. Le jugement sera dès lors confirmé en ce qu'il a dit que le fonds des époux [S] [N] et [V] [X] bénéficiait d'une servitude de francs-bords de chaque côté du bief, ce droit de passage étant limité à l'entretien du canal d'amenée d'eau.

SUR L'ENLEVEMENT DES BARRAGES

L'expert judiciaire a constaté :

- la présence de deux barrages sur le bief, qu'il a considérés réalisés par la main de l'homme postérieurement à l'acquisition des terres par la sci Jajulau ;

- que le barrage le plus en amont situé entre les parcelles cadastrées section D n° [Cadastre 6] et n° [Cadastre 4] était le plus ancien, un second barrage étant plus récent.

Le premier juge, sans être contredit sur ce point, a relevé que les deux procès-verbaux de constat dressés par Maître [J] [H] précité les 17 septembre 2004 et 30 novembre 2005 corroboraient les constatations de l'expert et établissaient que le second barrage, absent lors du premier constat, avait été édifié entre septembre 2004 et le 30 novembre 2005.

Ces ouvrages sont implantés sur des rives qui appartenaient alors à la sci Jajulau. Ils permettent la communication entre les parcelles de cette dernière situées de part et d'autre du bief. Ils ont été établis, ainsi que retenu par le premier juge, dans l'intérêt exclusif de cette société ou de ses auteurs.

Cette atteinte au droit de propriété des époux [S] [N] et [V] [X] constitue une faute au sens de l'article 1382 ancien (1240 nouveau) du code civil dont la sci Jajulau doit réparation des conséquences dommageables, à savoir la nécessité de supprimer les barrages litigieux.

Ainsi que retenu par le tribunal, il n'est pas établi que l'édification de ces barrages est imputable à [F] [Y] et [M] [O].

Les devis de travaux de la société Groupement électrique force travaux publics en date des 7 (n° 07-010-0081) et 21 mars 2007 (n° 07-010-0101) ont pour objet la 'remise en état de la prise en charge du moulin', soit la réfection de la totalité du bief et non le seul enlèvement des barrages. Le coût de cet enlèvement a, en regard des termes de ces devis, été exactement apprécié par le premier juge à 5.000 €.

Cette indemnisation purge l'intégralité du préjudice subi par les époux [S] [N] et [V] [X] imputable à la sci Jajulau et n'est dès lors pas provisionnelle.

Le jugement sera confirmé du chef de cette indemnisation.

SUR LES DEMANDES INDEMNITAIRES DES APPELANTS

L'expert a en page 20 de son rapport indiqué que :

'Les affaissements de terrain sont localisés en rive gauche du bief, au niveau de la parcelle D[Cadastre 5]. Voir localisation sur la figure 6.

Ces affaissements sont bien visibles à environ 2 - 3 m de la rive.

L'examen du flanc visible de ces affaissements (Photos 14 et 15) montre que la zone affectée est constituée de blocs calcaires décimétriques enrobés dans une matrice limoneuse.

On constate que l'on retrouve ces mêmes matériaux jusque la berge du bief (Photos 16 et 17). II s'agit de matériaux non-consolidés, donc instables. L'hypothèse la plus probable, compte tenu du caractère non-consolidé et instable de ces matériaux, est que les travaux de curage et de décaissement réalisés dans le bief sont à l'origine de ces affaissements'.

Ainsi que précédemment rappelé, il a conclu en page 26 de son rapport que : 'Ces travaux (mentionnés également dans le PV de la gendarmerie et réalisés sans autorisation) ont pu provoquer les affaissements de terrain constatés au niveau de la parcelle D[Cadastre 5] (ou accentuer ces affaissements si ceux-ci existaient déjà)'.

[S] [N] ne conteste pas avoir réalisé des travaux sur le bief dont l'autorité préfectorale a, semble-t-il en vain, interdit la poursuite.

Il résulte de ces développements que [S] [N] qui a seul effectué ces travaux est, ainsi que retenu par le premier juge, tenu envers la sci Jajulau du coût des réfection des berges.

Le devis annexé au rapport d'expertise a pour objet un 'diagnostic géotechnique sur un glissement de terrain' et non la reprise des glissements de terrain. Ceux-ci, dont les photographies ont été annexées en pages 20 et 21 du rapport d'expertise, sont très limités. Le coût de remise en état des parcelles a été exactement apprécié par le premier juge à 1.000 €.

Les appelants ne justifient d'aucun autre préjudice imputable à faute aux époux [S] [N] et [V] [X] dont la revendication de propriété est fondée. Ils ne sont dès lors pas fondés à solliciter paiement de dommages et intérêts en réparation de préjudices au surplus non démontrés.

Le jugement sera pour ces motifs confirmé de ces chefs.

SUR LA MISE EN CAUSE DE [M] [D]

Celui-ci a été mis en cause en raison de l'acquisition des biens qui appartenaient à la sci Jaulau.

Il ne justifie pas des motifs pour lesquels les pièces produites par les époux [S] [N] et [V] [X] devraient être écartées des débats.

Aucune demande n'a été formée à son encontre.

SUR LES DEMANDES PRESENTEES SUR LE FONDEMENT DE L'ARTICLE 700 DU CODE DE PROCÉDURE CIVILE

Le premier juge a équitablement apprécié l'indemnité due sur ce fondement par la sci Jajulau et la sci La Motte aux époux [S] [N] et [V] [X].

Il serait par ailleurs inéquitable et préjudiciable aux droits de ces derniers de laisser à leur charge les sommes exposées par eux et non comprises dans les dépens d'appel. Il sera pour ce motif fait droit à leur demande formée de ce chef à l'encontre des appelants tenus in solidum, pour le montant ci-après précisé.

Les circonstances de l'espèce ne justifient pas de faire droit aux autres demandes présentées sur ce fondement.

SUR LES DEPENS

La charge des dépens d'appel incombe aux appelants. Ils seront recouvrés par la selarl Mady-Gillet-Briand-Pétillon et la scp Pielberg-Kolenc conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

statuant par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,

vu l'arrêt du 5 juin 2013,

REJETTE la demande de [M] [O], de [F] [Y] et de la sci Jajulau de déclarer prescrite l'action des époux [S] [N] et [V] [X] ;

DEBOUTE la sci Jajulau de ses prétentions fondées sur l'acquisition de la propriété du bief par l'effet d'une prescription abrégée ;

REJETTE la demande de [M] [D] d'écarter des débats les pièces produites par les époux [S] [N] et [V] [X] à l'appui de leurs prétentions ;

CONFIRME le jugement du 7 avril 2009 du tribunal de grande instance de Poitiers ;

CONDAMNE in solidum [M] [O], [F] [Y] et la sci Jajulau à payer en cause d'appel aux époux [S] [N] et [V] [X] pris ensemble la somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

REJETTE les autres demandes présentées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE in solidum [M] [O], [F] [Y] et la sci Jajulau aux dépens d'appel qui seront recouvrés par la selarl Mady-Gillet-Briand-Pétillon et la scp Pielberg-Kolenc conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Poitiers
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22/02530
Date de la décision : 04/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-04;22.02530 ?
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