ARRÊT N°154
N° RG 21/02350
N° Portalis DBV5-V-B7F-GKXS
[W]
C/
MATMUT
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE POITIERS
1ère Chambre Civile
ARRÊT DU 04 AVRIL 2023
Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 février 2021 rendu par le Tribunal Judiciaire de SAINTES
APPELANT :
Monsieur [Y] [N] [W]
né le 02 Septembre 1947 à [Localité 3]
[Adresse 1]
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/2366 du 05/07/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de POITIERS)
ayant pour avocat postulant Me Jérôme CLERC de la SELARL LEXAVOUE POITIERS-ORLEANS, avocat au barreau de POITIERS
INTIMÉE :
MUTUELLE ASSURANCE DES TRAVAILLEURS MUTUALISTES
[Adresse 2]
[Adresse 2]
ayant pour avocat postulant Me Nathalie BOISSEAU de la SCP ROUDET BOISSEAU LEROY DEVAINE MOLLE BOURDEAU, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des articles 907 et 786 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 30 Janvier 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant :
Madame Anne VERRIER, Conseiller
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Thierry MONGE, Président de Chambre
Madame Anne VERRIER, Conseiller
Monsieur Dominique ORSINI, Conseiller
GREFFIER, lors des débats : Lilian ROBELOT, ,
ARRÊT :
- CONTRADICTOIRE
- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,
- Signé par Monsieur Thierry MONGE, Président de Chambre, et par Monsieur Lilian ROBELOT, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*****
EXPOSÉ DES FAITS, DE LA PROCÉDURE, DES PRÉTENTIONS
La société DIAC a acquis un véhicule de marque Dacia moyennant un prix de 8520,76 euros.
M. [Y] [W] a conclu avec la SA Diac un contrat de location avec option d'achat et un contrat d'assurance auprès de la société Matmut, contrat prenant effet au 31 août 2017.
Le 19 septembre 2017, M. [W] déposait plainte pour vol de son véhicule à [Localité 6] et déclarait un sinistre auprès de son assureur.
Le 2 octobre 2017, la société Diac informait la compagnie Matmut que M. [W] lui avait délégué le bénéfice de toute indemnité qui lui serait due à l'occasion de tout sinistre.
L'assureur demandait à l'assuré divers documents et notamment les documents d'admission temporaire du véhicule, l'adresse de son lieu de séjour.
Par courrier du 20 janvier 2018 adressé à l'assureur,M. [W] indiquait avoir remis aux douanes les pièces demandées. Il précisait avoir été hébergé par sa fille et par son gendre à [Localité 6].
La société DIAC a assigné M. [W] devant le tribunal d'instance de Saintes, a mis en demeure le 14 avril 2019 la société Matmut de lui régler l'indemnité.
M. [W] a réitéré sa demande d'indemnisation par courrier du 22 juillet 2019.
Par acte du 18 septembre 2019, M. [W] a fait assigner la compagnie Matmut devant le tribunal judiciaire de Saintes aux fins de garantie.
La compagnie Matmut a conclu au débouté.
Par jugement du 18 février 2021, le tribunal judiciaire de Saintes a débouté M. [W] de ses demandes et l'a condamné aux dépens et à payer une indemnité de procédure à la société Matmut.
Le premier juge a notamment retenu que :
La société Matmut soutient à bon droit que le simple récépissé d'une plainte ne constitue pas la preuve d'un vol.
Si M. [W] a attesté sur l'honneur du vol de son véhicule devant un officier de police le 20 septembre 2017, les circonstances matérielles du vol ne sont pas établies.
M. [W] se refuse à donner des éléments précis sur son séjour au Maroc.
Il n'est plus en possession du document relatif à l'admission temporaire de son véhicule délivré par le service des douanes.
Il n'apporte pas la preuve formelle de son séjour au Maroc, ne démontre pas y avoir pénétré avec son véhicule.
Il ne justifie pas de la réalité du vol dont il se prévaut.
LA COUR
Vu l'appel en date du 23 juillet 2021 interjeté par M. [W]
Vu l'article 954 du code de procédure civile
Aux termes du dispositif de ses dernières conclusions en date du 8 novembre 2022, M. [W] a présenté les demandes suivantes :
Déclarer bien fondé l'appel de Monsieur [Y] [W] à l'encontre d'un jugement rendu le 18 février 2021 par le Tribunal Judiciaire de Saintes.
Y faisant droit,
-Infirmer la décision déférée,
Vu l'article 1104 du Code civil,
-Condamner la MATMUT à payer à Monsieur [W] les sommes suivantes:
- 8.520,76 euros au titre de l'indemnité d'assurance prévue au contrat en cas de vol du véhicule garanti
- 1.000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive.
-Débouter la MATMUT de l'ensemble de ses prétentions, de ses demandes et conclusions plus amples ou contraires.
-CONDAMNER la MATMUT au versement de la somme de 2.500,00 euros à Maître [F] [Z] au titre de l'article 37 de la Loi n°91-647 du 10 juillet 1991, et sous réserve de sa renonciation à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, outre les entiers dépens.
A l'appui de ses prétentions, M. [W] soutient en substance que :
-Les contrats doivent être exécutés de bonne foi.
Le vol figure parmi les événements couverts par la garantie souscrite.
-Il a transmis son dépôt de plainte.
-L'article 27 du contrat lui fait seulement obligation d' aviser immédiatement les autorités locales de police ou de gendarmerie, de fournir tous les renseignements sur l'état du véhicule au jour du vol. Ces deux formalités ont été accomplies.
La garantie vol est acquise en tout lieu sans autre précision.
-Il a été rapatrié aux frais de la société Matmut du Maroc, ce qui prouve qu'il avait séjourné à [Localité 6].
-Il avait conduit à travers l'Espagne jusqu'à Tarifa, puis s'était embarqué pour le Maroc.
-La copie de son passeport a été remise à l'assureur par courrier du 20 janvier 2018.
-Il n'est pas contesté que son passeport est tamponné par les autorités espagnoles et marocaines.
Il avait remis les attestations de carte grise, de séjour temporaire qui étaient jointes au dépôt de plainte. Il conteste toute fraude.
-La société Matmut peut se procurer le justificatif douanier qui manque plus aisément que lui. -Il a remis les clés du véhicule à son retour.
-Sa bonne foi est présumée.
-L'indemnité est égale au prix d'achat du véhicule, le vol étant intervenu moins de six mois après son acquisition.
-Il subit un préjudice, est assigné par la société Diac.
-Il a dû racheter un autre véhicule.
-Le contrat d'assurance est à son nom. Seul l'assuré bénéficiaire désigné peut être indemnisé.
-Ses relations avec la Diac ne concernent pas l'assureur.
Aux termes du dispositif de ses dernières conclusions en date du 24 novembre 2022, la compagnie Matmut a présenté les demandes suivantes :
-Confirmer le jugement de première instance en toutes ses dispositions.
-Débouter en conséquence Monsieur [W] de sa demande tendant à voir condamner la MATMUT à lui régler les sommes suivantes :
-8.520,76 euros au titre de l'indemnité d'assurance prévue au contrat en cas de vol du véhicule garanti
- 1.000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive
- 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
-Confirmer le jugement de première instance en ce qu'il a condamné Monsieur [W] à régler à la MATMUT une somme de 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
-En cause d'appel, condamner Monsieur [W] à régler à la MATMUT une somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile
-Condamner Monsieur [W] aux entiers dépens de première instance et d'appel.
A l'appui de ses prétentions, la compagnie Matmut soutient en substance que:
-Il appartient à l'assuré de prouver la réalité du sinistre, la déclaration de sinistre et la plainte ne constituant pas la preuve du vol.
-Le véhicule acquis le 29 août 2017 a été déclaré volé 19 jours après son acquisition.
-La preuve du vol incombe à M. [W].
Il produit uniquement une attestation de dépôt de plainte effectuée au Maroc le 30 septembre 2017, un récépissé de la déclaration de vol effectuée à [Localité 5].
Il ne justifie pas de l'issue de ses plaintes, notamment d'un classement sans suite.
Il aurait dû faire les démarches nécessaires auprès du parquet.
-Il est incapable de prouver que le véhicule est entré au Maroc.
-Il ne produit pas la déclaration d'admission temporaire (AT) au poste-frontière.
-Les services douaniers délivrent un document imprimé qui doit être présenté à l'occasion de tout contrôle. S'il a remis ces documents aux services de police, il doit en produire une copie. -Il ne prouve pas que le véhicule a été volé sur le territoire marocain, que le véhicule est rentré au Maroc.
-Le contrat d'assistance est indépendant du contrat d'assurance.
-L'article 27 prévoit que l'assuré perd ses droits à indemnité s'il n'apporte pas toutes les informations nécessaires.
-L'article 3 des conditions générales dispose que le bénéficiaire de l'indemnité d'assurance est le propriétaire du bien objet du contrat. La demande est mal fondée.
Il convient de se référer aux écritures des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et de leurs moyens.
Vu l'ordonnance de clôture en date du 28 novembre 2022 .
SUR CE
- sur le droit à garantie
L'article 27 du contrat d'assurance fait obligation à l'assuré 'de déclarer le vol par écrit dès qu'il a connaissance du sinistre dans les deux jours ouvrés maximum.
Il précise : vous pouvez encourir la déchéance de votre droit à garantie en cas de retard dans la déclaration dès lors que ce manquement nous cause un préjudice.
'S'agissant des formalités à respecter et informations à nous délivrer dans les plus brefs délais, il est demandé de transmettre les nom, adresse s'il y a lieu des témoins, nous fournir tous renseignements sur les circonstances du sinistre.
L'assuré doit aviser immédiatement les autorités locales de police ou de gendarmerie, fournir tous renseignements sur l'état du véhicule au jour du vol.
Vous serez déchu de tout droit à garantie si vous faites de fausses déclarations sur la nature, les circonstances, les causes, les conséquences du sinistre ainsi que sur la valeur du véhicule assuré.'
Il est indiqué en outre que l'assuré doit déclarer avec exactitude le kilométrage parcouru au jour du sinistre.
M. [W] estime avoir respecté ses obligations contractuelles.
La société Matmut considère qu'il ne démontre pas avoir été victime d'un vol.
M. [W] a produit une attestation de dépôt de plainte émanant de la Préfecture de police de [Localité 6] qui indique que l'affaire a fait l'objet d'un procès-verbal du 19 septembre 2017, procès-verbal transmis à cette BPJ pour continuation d'enquête.
M. [W] a réitéré son dépôt de plainte en France comme le lui demandait son assureur.
Toutefois, ni l'attestation de dépôt de plainte, ni la réitération de la plainte ne donnent d' indications concrètes sur les circonstances de la disparition du véhicule.
Ces circonstances sont relatées dans un courrier sur papier libre daté du 28 novembre 2017 rédigé par M. [W] et adressé à l'assureur .
Il indique que son véhicule était garé devant le magasin marjanne, [Adresse 4] à [Localité 6], qu'il lui a été volé dans la nuit du 18 au 19 septembre entre 20 heures et le matin 9 heures dans une zone éclairée, qu'il a signalé cette découverte au commissariat du quartier.
Il est impossible de s'assurer que ces informations correspondent à celles qui ont été données lors du dépôt de plainte initial.
Le premier juge a reproché à M. [W] un manque d'information sur ses conditions de séjour.
Force est de relever que M. [W] a déclaré avoir été hébergé par sa fille et son gendre, mais n'a indiqué aucun nom, aucune adresse, aucunes coordonnées téléphoniques.
Il n'explique pas les raisons qui l'avaient conduit à emmener son véhicule au Maroc .
Il ne produit pas non plus un témoignage émanant d'un proche ou d'un tiers confirmant avoir vu le véhicule assuré au Maroc.
S'il n'est pas contesté que M. [W] a séjourné au Maroc, en a été rapatrié, il ne démontre pas être rentré au Maroc avec son véhicule, condition préalable et nécessaire du vol du véhicule à [Localité 6].
Il ne justifie pas avoir tenté de connaître la suite qui a été réservée à sa plainte, ni avoir écrit aux services des Douanes pour tenter d' obtenir une copie de la déclaration d'admission temporaire qu'il soutient avoir restituée.
Il se borne à indiquer que la compagnie Matmut est plus à même que lui d'obtenir ces pièces.
Il appartient pourtant à celui qui demande le bénéfice de la garantie vol de rapporter la preuve de la matérialité du vol.
Il est de jurisprudence confirmée qu'un dépôt de plainte ne suffit pas à établir le vol.
Au regard de l'insuffisance des éléments produits, de l'imprécision des informations données, de l'absence de tout élément de preuve supplémentaire produit en appel, il convient de confirmer le jugement qui a débouté M. [W] de ses demandes dirigées contre la société Matmut, la preuve du vol n'étant pas rapportée.
- sur les autres demandes
Il résulte de l'article 696 du code de procédure civile que ' La partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. (...).'
Compte tenu de la solution apportée au présent litige, les dépens d'appel seront fixés à la charge de l'appelant.
Il est équitable de condamner M. [W] à payer à la société Matmut la somme fixée au dispositif du présent arrêt sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile .
PAR CES MOTIFS :
statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort
-confirme le jugement
Y ajoutant :
-déboute les parties de leurs autres demandes
-condamne M. [W] aux dépens d'appel
-condamne M. [W] à payer à la compagnie Matmut la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,