ARRÊT N°150
N° RG 21/01067
N° Portalis DBV5-V-B7F-GHQJ
[K]
C/
[G]
[B]
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE POITIERS
1ère Chambre Civile
ARRÊT DU 04 AVRIL 2023
Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 mars 2021 rendu par le Tribunal Judiciaire des SABLES D'OLONNE
APPELANT :
Monsieur [N] [K]
né le 28 Septembre 1936 à [Localité 11]
[Adresse 5]
ayant pour avocat postulant Me Nathalie DETRAIT de la SELAS FIDAL & ASSOCIES, avocat au barreau de LA ROCHE-SUR-YON
ayant pour avocat plaidant Me Pauline SEGHERS, avocat au barreau de la ROCHE SUR YON
INTIMÉS :
Madame [Y] [B] épouse [H]
née le 05 Avril 1964 à [Localité 12] (10)
[Adresse 6]
Monsieur [U] [B]
né le 05 Février 1967 à [Localité 12] (10)
[Adresse 3]
Monsieur [O] [B]
né le 3 octobre 1937 à [Localité 12] (10)
[Adresse 10]
ayant tous les trois pour avocat postulant et plaidant Me Annabelle TEXIER de la SELARL CNTD, avocat au barreau des SABLES D'OLONNE
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des articles 907 et 786 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 30 Janvier 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant :
Madame Anne VERRIER, Conseiller
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Thierry MONGE, Président de Chambre
Madame Anne VERRIER, Conseiller
Monsieur Dominique ORSINI, Conseiller
GREFFIER, lors des débats : Lilian ROBELOT,
ARRÊT :
- CONTRADICTOIRE
- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,
- Signé par Monsieur Thierry MONGE, Président de Chambre, et par Monsieur Lilian ROBELOT, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*****
EXPOSÉ DES FAITS, DE LA PROCÉDURE, DES PRÉTENTIONS
Mme [B] est propriétaire depuis le 22 juillet 1971 d'un terrain sur lequel elle a fait construire une maison en 1973.
Le 22 juillet 1996, Mme [B] a donné la nue propriété de l'immeuble à ses enfants, [Y] et [U] [B].
M. [K] a acquis la propriété voisine par acte en date du 4 décembre 1986.
Son titre précise que la maison achetée a été achevée le 15 avril 1974.
Courant mars 2000, M. [K] a fait remplacer la brande qui était posée entre les poteaux de béton qui servent de limite.
Les 22 juillet 2014, 12 avril 2016, M. [K], puis son conseil, écrivaient aux consorts [B] et leur demandaient de faire couper leurs végétaux, notamment un pin.
Par courrier du 1er août 2014, Mme [B] faisait valoir que la haie de 60 cm de hauteur qui longeait leurs propriétés respectives existait depuis 42 ans, que le pin était à 2,60 m de la limite.
Elle reprochait à M. [K] d'avoir fait disparaître en 2000 la haie arbustive mitoyenne existante et de l'avoir remplacée par une clôture bétonnée qui empiétait selon elle de 25 cm sur son fonds.Elle lui demandait de rétablir la clôture à l'emplacement défini par les plans de lotissement.
Le 14 mars 2017, le conseil de Mme [B] proposait à M.[K] de réaliser un bornage amiable, proposition qu'il refusait le 17 mars 2017.
Par acte du 1er juin 2017, Mme [B] a assigné M. [K] aux fins de bornage judiciaire.
M. [K] a conclu au débouté, formé des demandes reconventionnelles.
Par jugement du 5 février 2019, le tribunal d'instance des Sables d'Olonne a ordonné une mesure d'expertise judiciaire et sursis à statuer sur les demandes reconventionnelles formées par M. [K].
M. [J] a déposé son rapport le 22 avril 2020, proposé un tracé.
Il estimait notamment que la clôture empiétait sur le fonds des consorts [B].
Les consorts [B] ont demandé au tribunal de
-constater que la clôture mise en place par M. [K] ne respectait pas la limite séparative et empiétait sur leur fonds,
-homologuer le rapport d'expertise
-condamner M. [K] à déplacer la clôture sous astreinte.
M. [K] a conclu au débouté, proposé un autre tracé correspondant aux limites existantes.
Il a demandé que les consorts [B] soient condamnés à arracher les végétaux plantés au mépris des distances légales, à l'indemniser de ses préjudices.
Il soutenait que l'expert s'était trompé, que l'empiétement était au plus d'un cm, qu'aucun empiétement ne pouvait être retenu au regard de l'ancienneté des lieux et de la nature du sol.
Par jugement du 15 mars 2021 , le tribunal judiciaire des Sables d'Olonne a statué comme suit :
'
-constate que la clôture mise en place par Monsieur [N] [K] ne respecte pas la limite séparative réelle entre la parcelle AO[Cadastre 8] sise [Adresse 4] et la parcelle AO[Cadastre 7] sise [Adresse 1], [Adresse 2] et qu'elle empiète sur le fonds des consorts [B]-[H] ;
-homologue le rapport d'expertise de Monsieur [N] [J] du 8 avril 2020 en ce qu'il fixe la limite séparative entre la parcelle AO[Cadastre 8] sise [Adresse 4] appartenant à Monsieur [N] [K] d'une part et la parcelle AO[Cadastre 7] sis [Adresse 1], [Adresse 2] appartenant aux consorts [B]-[H], d'autre part, la limite étant définie par des alignements droits entre les sommets P.1 (intersection du mur de clôture de AO220 avec le mur pignon sud du bâtiment de Monsieur [K] édifié sur AO [Cadastre 8]), P.10 (angle sud-est du bâtiment édifié sur AO222. Entre P1 et P10 la limite est matérialisée par le parement extérieur du mur pignon du bâtiment édifié sur AO222), P.2 (sommet défini par le prolongement du parement extérieur du mur de soutènement privatif à AO220 jusqu'au parement extérieur du mur de soutènement privatif à AO302 situé à l'est de la parcelle AO [Cadastre 8] de Monsieur [K] ;
-condamne Monsieur [K] à déplacer la clôture qu'il a mise en place de telle sorte qu'aucun empiétement n'existe et que la limite séparative homologuée soit strictement respectée sous astreinte provisoire journalière de 100 euros durant 30 jours à compter de la signification à intervenir de la présente décision ;
-déboute Monsieur [N] [K] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions
-condamne Monsieur [N] [K] à payer à Madame [X] [B] la somme de 2 000 euros, à Madame [Y] [B] épouse [H] la somme de 2 000 euros, à Monsieur [U] [B] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
-condamne Monsieur [N] [K] aux entiers dépens, en ce compris les frais d'expertise judiciaire confiée à Monsieur [N] [J] ;
-rappelle que la décision était exécutoire de droit à titre provisoire. '
Le premier juge a notamment retenu que :
-sur l'homologation du rapport
L'expert judiciaire retient que la surface d'empiétement de la maison de M. [K] sur la propriété des consorts [B] est de 0,14 m2, que la clôture qu'il a mise en place a abouti à une appropriation de 0,83 m2, soit un total de 0,97 m2.
Il indique qu'il n'est pas possible de dater la clôture composée des poteaux béton, mais qu'elle existait en 1999.
Il a fait une proposition tenant compte des dates d'édification des murs et bâtiments des parties.
La limite est définie par des alignements droits entre les sommets P1,P10 et P2.
La contestation porte sur la fixation du point P.7.
L'expert a retenu à juste titre que ce point ne pouvait être fixé au milieu du mur mitoyen dès lors qu'il se trouve sur la parcelle de M. [K].
C'est lui-même qui avait indiqué à l'expert [J] que le mur au Nord était décalé de 10 cm vers sa propriété.
M. [K] ne rapporte pas d'élément probant justifiant la contestation du rapport d'expertise, l'expert ayant répondu à ses dires.
Il ne produit pas non plus le procès-verbal de bornage qui a été réalisé avec M. [V].
Il convient d'ordonner l'homologation de la limite séparative entre les deux fonds telle que représentée dans le rapport selon une ligne reliant les points P1et P2 et passant par P 10.
M. [K] devra en conséquence faire remplacer la clôture sous astreinte afin que l'empiétement cesse.
- sur les demandes reconventionnelles formées par M. [K]
La haie est plantée depuis plus de 30 ans.
Les consorts [B] justifient l'avoir fait élaguer régulièrement.
Le non-respect des distances légales pas plus que les nuisances ne sont établies.
LA COUR
Vu l'appel en date du 1er avril 2021 interjeté par M. [K]
Vu l'article 954 du code de procédure civile
Aux termes du dispositif de ses dernières conclusions en date du 21 novembre 2022, M. [K] a présenté les demandes suivantes :
Vu les articles 671 à 673, 1240 et 2272 du Code civil,
Vu les articles 32-1 et 700 du Code de procédure civile, les pièces,
- Recevoir Monsieur [N] [K] en son appel, ainsi qu'en ses demandes, fins et conclusions déclaré fondé.
Y faisant droit,
- Infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions en ce qu'il a :
-constaté que la clôture mise en place par Monsieur [N] [K] ne respectait pas la limite séparative réelle entre les parcelles voisines des consorts [B] et de Monsieur [N] [K] et qu'elle empiétait sur le fonds des consorts [B] ;
-homologué le rapport d'expertise de Monsieur [N] [J] du 8 avril 2020 ;
-condamné Monsieur [N] [K] à déplacer la clôture qu'il a mise en place de telle sorte qu'aucun empiètement n'existe et que la limite séparative homologuée soit strictement respectée sous astreinte provisoire journalière de 100 euros durant 30 jours à compter de la signification à intervenir de la décision ;
-débouté Monsieur [K] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;
-condamné Monsieur [K] à payer à chacun des consorts [B] la somme de 2 000 sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile;
-condamné Monsieur [K] aux entiers dépens en ce compris les frais de l'expertise judiciaire confiée à Monsieur [J] ;
Et statuant à nouveau,
-Dire n'y avoir lieu à homologation du rapport d'expertise judiciaire ;
Et, en conséquence,
A TITRE PRINCIPAL :
-Juger qu'il ne peut être conclu à aucun empiétement sur la base du rapport d'expertise judiciaire au regard de la prescription trentenaire attachée tant à la maison de Monsieur [K] qu'à la clôture séparant son fonds de celui des consorts [B] ;
- Juger que les limites séparatives des propriétés des parties sont matérialisées par les murs et clôtures actuellement existants et que le bornage des propriétés devra nécessairement reprendre ces limites matérielles le cas échéant ;
A TITRE SUBSIDIAIRE :
-Ordonner avant dire droit une mesure d'expertise judiciaire en désignant tel expert qu'il plaira avec pour mission notamment de définir les limites des propriétés de Monsieur [N] [K] et des consorts [B] et reprenant la mission confiée à Monsieur [J] par le Tribunal d'instance des Sables d'Olonne le 5 février 2019, à savoir :
-Surseoir à statuer dans l'attente du rapport d'expertise définitif
EN TOUT ETAT DE CAUSE,
- Juger que les végétaux des consorts [B] ne respectent pas les dispositions des articles 671 et 673 du Code civil ;
-En conséquence, sur le fondement des articles 671 et 673, condamner in solidum les consorts [B], sous astreinte journalière à raison de 100 € par jour de retard, à élaguer leur pin et couper les branches qui avancent sur la propriété de Monsieur [K] et à déplacer ou arracher les végétaux plantés à moins de 50 cm de son mur ;
Sur le fondement de l'article 1240 du Code civil, condamner in solidum les consorts [B], à verser à Monsieur [K] la somme de 4 000 € à titre de dommages et intérêts, en réparation du préjudice subi du fait du défaut d'entretien des végétaux ;
Sur le fondement de l'article 32-1 du Code de procédure civile, condamner in solidum les consorts [B] à verser à Monsieur [K] la somme de 10 000 € au titre d'une indemnité pour procédure abusive et dilatoire ;
Sur le fondement de l'article 1240 du Code civil, condamner in solidum les consorts [B] à verser à Monsieur [K] la somme de 17 731,57 € en réparation de son préjudice financier ;
-Sur le fondement de l'article 1240 du Code civil, condamner in solidum les consorts [B] à verser à Monsieur [K] la somme de 10 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral ;
-Sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, condamner in solidum les consorts [B] à verser à Monsieur [K] la somme de 8 000 € ;
-Sur le fondement de l'article 696 du code de procédure civile, condamner in solidum les consorts [B] aux entiers dépens de première instance et d'appel, en ce compris les frais de l'expertise judiciaire ordonnée par le Tribunal d'instance ;
A défaut de règlement spontané des condamnations prononcées dans l'arrêt à intervenir,
-condamner in solidum les consorts [B] à payer à Monsieur [N] [K] le montant des sommes retenues par l'huissier chargé de l'exécution forcée au titre de l'article 10 du décret n° 96-1080 du 12 décembre 1996, modifié par le décret n°2001-212 du 8 mars 2001, en sus de l'application de l'article 700 du code de procédure civile.
A l'appui de ses prétentions, M. [K] soutient en substance que :
-[X] [B] est décédée en décembre 2021.
-Il réside toute l'année dans sa maison.
-Le conflit de voisinage est latent du fait d'un pin planté dans les limites légales mais dont les branches surplombent son toit. Il obstrue ses gouttières, le prive de soleil, cause des reflux de fumée.
sur la limite
-Le rapport de M [J] entraînerait le déplacement du mur séparatif de propriété entre les jardins des parties. Il a fait appel à M. [D].
L'expert judiciaire n'a pas tenu compte de la mitoyenneté du mur opposé à la clôture.
-Il a reporté la cote à partir de l'extrémité extérieure du mur au lieu de fixer le point de départ en son milieu. Le mur a une épaisseur de 16 cm.
Il a produit la convention de mitoyenneté du mur du 28 avril 1988.
Il conteste avoir dit à l'expert que le mur n'était pas mitoyen. La convention s'impose à tous.
-Un plan coté a été établi dans le cadre du bornage réalisé par le voisin commun, M. [V].
Il figurait dans les pièces de l'expert et était intégré dans les conclusions de première instance.
-La clôture existante est construite sur la limité séparative théorique issue du plan de bornage réalisé par le voisin commun aux parties.
-La convention de mitoyenneté et les plans cadastraux identifient le mur comme mitoyen.
-Il conteste l' emplacement du point P.7.La limite séparative Nord passe en milieu du mur.
-La convention de mitoyenneté avait été transmise au tribunal, non à l'expert.
-L' expert [J] avait admis un manque de données fiables, un sol meuble ne permettant pas un strict respect des limites.
-Les consorts [B] l'ont accusé d'avoir fait disparaître la haie arbustive entre leurs propriétés, haie qu'ils considéraient mitoyenne, et d'avoir construit à la place un muret en béton situé en partie sur leur propriété.
-La clôture a dû être réparée du fait de la tempête de 1999.
-Les intimées ne prouvent pas qu'elle était mitoyenne. Il l'a payée seul.
-Il y avait une clôture en brande fixée sur des poteaux en béton. Elle existe toujours, a seulement été remplacée en 1999, a été refaite à l'identique.
-Le règlement de lotissement prévoit que la limite séparative est matérialisée par un treillage métallique sur poteaux métalliques et doublage par une haie vive à l'intérieur du lot.
-Il produit un plan cadastral légendé qui démontre l'existence d'une clôture non mitoyenne.
-Les constructions sont vieilles de plus de 40 ans, ce qui exclut l' empiétement. La maison et la clôture ont été construites en 1972.
-La prescription acquisitive est trentenaire.
-Il réitère ses demandes reconventionnelles.
-Les végétaux non coupés lui causent des nuisances.
Faute d'élagage et d' entretien réguliers, les gouttières sont bouchées.
Le mur est imprégné d'humidité, manque de lumière et de soleil .
-Les arbustes sont plantés à moins de 50 cm du mur.Il a dû faire surélever son conduit de cheminée.
-Il produit un constat d'huissier de justice qui établit que les distances légales ne sont pas respectées.
-Il chiffre son préjudice à la somme de 4000 euros, son préjudice moral à la somme de 10 000 euros . La procédure est abusive. Il demande 10 000 euros à ce titre.
Aux termes du dispositif de leurs dernières conclusions en date du 3 octobre 2022 , les consorts [B] ont présenté les demandes suivantes:
- Vu l'article 646, 671 à 673 du Code civil,
- Vu la théorie jurisprudentielle des troubles anormaux du voisinage,
- Vu les articles 2258 à 2272 du Code civil,
- Vu l'article 700 du Code de procédure civile,
- Vu le rapport d'expertise de Monsieur [N] [J] du 8 avril 2020,
- Vu les autres pièces versées aux débats,
- Vu le jugement rendu le 15 mars 2021
Il est demandé à la Cour de :
-CONFIRMER le jugement rendu par le Tribunal judiciaire des SABLES D'OLONNE le 15 mars 2021 en toutes ses dispositions,
-DEBOUTER Monsieur [K] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,
-CONDAMNER Monsieur [K] à payer à chacun des trois Consorts [B]-[H] la somme de 5.000,00 € sur le fondement de l'article de l'article 700 du Code de Procédure Civile, en cause d'appel, soit la somme totale de 15.000,00 € ;
-CONDAMNER Monsieur [K] aux entiers dépens d'appel,
A l'appui de leurs prétentions, les consorts [B] soutiennent en substance que :
-La demande d'homologation du tracé proposé par l'expert est cohérente avec la demande de bornage judiciaire.
-M. [K] souhaite que le tracé corresponde aux murs et clôtures existants.
-Courant 2000, il a arraché la haie et fait construire une clôture bétonnée, un muret qui empiète.
-Il a refusé le bornage amiable proposé.
-Selon l'expert, la clôture aboutit à une appropriation de 0,83 m2.
-Il n'est pas établi que M. [D] a pris des mesures. Il n'indique pas les pièces sur lesquelles il se fonde.
-C'est M. [K] qui avait indiqué à l' expert que le mur au Nord confrontant la parcelle AO[Cadastre 9] avait été édifié à frais communs avec son voisin, et qu'ils s'étaient aperçus qu'il était décalé de 10 cm environ vers sa propriété.
-Le point P7 ne peut de ce fait être fixé au milieu du mur mitoyen.
-La convention de mitoyenneté n'établit pas l'emplacement exact du mur de clôture.
-La proposition de l'expert judiciaire exclut tout empiétement du bâtiment, est sécurisante pour tous.
-Le règlement du lotissement ne prévoit pas un soubassement en béton qui existe depuis 2000.
-Ils concluent au rejet des demandes reconventionnelles.
-Les végétaux respectent les distances.
-Ils établissent par des témoignages que la haie présente sur la façade Sud existe depuis plus de 30 ans.
-Le constat du 31 octobre 2017 démontre que les distances légales sont respectées.
Ils justifient d'un entretien régulier.
La société Bideau a attesté le 26 novembre 2020 intervenir régulièrement pour des travaux d'élagage, entretien des haies, enlèvement annuel des nids de chenilles et cela depuis mars 2012. -Les nuisances que les végétaux causeraient à M. [K] ne sont pas établies.
Il convient de se référer aux écritures des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et de leurs moyens.
Vu l'ordonnance de clôture en date du 28 novembre 2022.
SUR CE
- sur l'objet de l'appel
M. [K] demande l'infirmation du jugement qui a homologué le rapport du géomètre-expert, fixé la limite divisoire, l' a condamné à déplacer la clôture, l'a débouté de ses demandes reconventionnelles.
A titre subsidiaire, il demande à la cour d'ordonner une expertise.
Il ne propose pas un tracé différent de celui qui a été proposé par l'expert et retenu par le tribunal.
- sur l'homologation du rapport déposé par M. [J], expert judiciaire
Il résulte du rapport d'expertise judiciaire que l' expert a travaillé à partir d'un plan masse sommaire du lotissement, d'un procès-verbal de bornage d'une parcelle riveraine, d'un document d'arpentage complet du lotissement communal.
Les propositions de l'expert judiciaire ont tenu compte des dires de M. [K] qui lui a déclaré durant les opérations (page 6 du rapport ) que le mur au nord confrontant la parcelle AO[Cadastre 9] avait été édifié à frais communs 'mais, avec mon voisin, on s'est aperçu qu'il était décalé de 10 cm environ vers ma propriété .'
L'expert en a déduit que le mur au Nord d' une épaisseur de 16 cm était situé sur la parcelle de M. [K].
L' expert a par ailleurs été destinataire de photographies de la clôture prises après la tempête de 1999.
Il indique qu'un poteau était tombé, que deux étaient toujours en place.
Il pense que la clôture avec brande existait avant 1999.
C'est également le point de vue de M. [D], expert consulté par M. [K] qui relève que la clôture est rectiligne, qu'elle n'a pu se déplacer.
M. [J] indique avoir essayé, à partir d'un relevé précis de l'état des lieux, d'appliquer les distances indiquées sur le plan parcellaire et les permis.
Il ajoute que cette application s'est révélée très délicate dans la mesure où les points d'appui sont sujets à caution, et où les relevés révèlent des coudes dans les limites, à chaque angle de mur là où logiquement, il ne devrait pas y en avoir.
Ceci s'explique ,indique-t-il, par le fait que les constructions ont été édifiées sur de la dune de sable, un sol instable rendant délicat le respect des limites parcellaires.
Après avoir précisé qu'il manquait de données fiables, il a reconstitué les limites théoriques, ce qui a révélé un empiétement de 0,14 m2 pour la maison, de 0,83 m2 du fait de la clôture.
Il n'a pas appliqué cette limite théorique, a retenu une proposition tenant compte de la date d'édification des murs et bâtiments, soit P1, P10, P2.
M. [D] a pris connaissance du rapport d'expertise judiciaire et s'est déplacé le 12 juin 2020.
Il estime que la démonstration de l'empiétement est délicate dès lors que les limites de propriété originelles ne peuvent être connues.
Sa critique du rapport d'expertise repose en fait sur la qualification du mur situé au Nord de la propriété de M. [K].
Il l'estime mitoyen, fait valoir que la convention de mitoyenneté signée le 28 avril 1988 par M. [K] et M. [L] indique que le mur a été édifié à frais communs.
La limite de propriété est donc, selon lui, située à l'axe de ce mur.
M. [K] a remis la convention de mitoyenneté à M. [D], ne l'avait pas remise à M. [J].
L'expert judiciaire s'est fondé sur les dires de M. [K] pour retenir que le mur Nord était décalé de 10 cm dans sa propriété.
M. [K] prétend n'avoir pas dit à l'expert ce que l'expert a compris et relaté.
Force est de relever qu'il ne lui a pas adressé un dire pour protester de sa méprise.
M. [D] a été destinataire de la convention de mitoyenneté mais n'a pas vérifié si le mur situé au Nord était effectivement érigé sur la ligne divisoire.
Les éléments avancés par M. [K] ne sont donc pas de nature à remettre en question le tracé retenu par le géomètre-expert.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a entériné la proposition de l'expert.
- sur l'empiétement et le déplacement de la clôture
La demande de déplacement de la clôture a été formée pour la première fois par les consorts [B] après le dépôt des conclusions du géomètre-expert.
Elle se fonde sur l'empiétement décrit par le géomètre-expert.
M. [K] estime qu' une telle action est prescrite.
Il fait valoir que la clôture initiale a été posée par M. [F] premier propriétaire, qu'elle était conforme au plan du lotissement, a fait l'objet d'une demande de permis le 25 avril 1972, a été achevée le 15 avril 1974.
Il assure qu'il l'a remplacée à l'identique en 2000, produit un devis, une facture qui font état de la pose d'une clôture en brande soutenue par des poteaux en béton existants.
Il produit une attestation émanant de Mme [A], épouse [R], dont le père avait fait construire dans le lotissement en 1973. Elle indique le 16 décembre 2020 avoir toujours connu la clôture constituée d'une brande sur semelle en béton entre les propriétés [B] et [K].
L'article 2261 du code civil dispose que pour pouvoir prescrire, il faut une possession continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque, et à titre de propriétaire.
L'article 2272 du code civil dispose que le délai de prescription requis pour acquérir la propriété immobilière est de trente ans.
Toutefois, celui qui acquiert de bonne foi et par juste titre un immeuble en prescrit la propriété par dix ans.
Il n'est pas contesté que M. [K] est devenu propriétaire le 4 décembre 1986.
Il a fait réparer la clôture courant 2000.
Le devis établi à l'occasion de ces travaux fait effectivement référence aux poteaux en béton 'existants'.
M. [K] démontre donc que les travaux réalisés en 2000 n'ont pas modifié l'emplacement de la clôture existante, ce dont l'expert judiciaire [J] était également convaincu.
Dès lors que la clôture a été installée courant 1974, n'a pas été modifiée depuis cette date, M. [K] est fondé à se prévaloir de la possession acquisitive, cette possession ayant été contestée par Mme [B] pour la première fois par un courrier en date du 1er août 2014.
Il convient donc d' infirmer le jugement en ce qu'il a ordonné le déplacement de la clôture sur la base de l'empiétement constaté par le géomètre-expert.
- sur la demande d'expertise
M. [K] a adressé des dires à l'expert judiciaire, dires auxquels il a répondu de manière motivée.
Il a produit un second rapport rédigé par un autre géomètre-expert.
Le fait que les géomètres aient une analyse différente ne justifie pas la réalisation d'une troisième expertise dès lors que les pièces produites permettent à la cour de répondre aux questions qui lui sont posées.
- sur les demandes reconventionnelles de M. [K]
- sur la demande d'élagage, de déplacement, d'arrachage des végétaux
L'article 670 du code civil dispose que chaque propriétaire a le droit d'exiger que les arbres mitoyens soient arrachés.
Selon l'article 671, il n'est permis d'avoir des arbres, arbrisseaux et arbustes près de la limite de la propriété voisine qu'à la distance prescrite par les règlements particuliers actuellement existants, ou par les usages constants et reconnus, et à défaut de règlements et usages, qu'à la distance de deux mètres de la ligne séparative des deux héritages pour les plantations dont la hauteur dépasse deux mètres, et à la distance d'un demi-mètre pour les autres plantations.
Les arbres, arbustes et arbrisseaux de toute espèce peuvent être plantés en espaliers, de chaque côté du mur séparatif, sans que l'on soit tenu d'observer aucune distance, mais ils ne pourront dépasser la crête du mur.
Si le mur n'est pas mitoyen, le propriétaire seul a le droit d'y appuyer ses espaliers.
Selon l'article 672, le voisin peut exiger que les arbres, arbrisseaux et arbustes plantés à une distance moindre que la distance légale, soient arrachés ou réduits à la hauteur déterminée dans l'article précédent, à moins qu'il n'y ait titre, destination du père de famille ou prescription trentenaire.
Si les arbres meurent , ou s'ils sont coupés ou arrachés, le voisin ne peut les remplacer qu'en observant les distances légales.
M. [K] soutient que les végétaux ne sont pas entretenus par les voisins, que leur pin n'est pas élagué, que des arbustes ont été plantés à une distance moindre que la distance légale .
Il se prévaut du constat d'huissier en date du 31 octobre 2017 qui avait été réalisé à la demande des consorts [B].
L' huissier de justice indique que les branches du pin ne touchent pas la maison de M. [K], qu'il est planté à plus de 2,97 m de distance.
Il précise que la haie végétale est plantée à plus de 50 cm de distance.
Il a mesuré la distance entre le bigonia, le ciste, le genêt, le grenadier, le chèvrefeuille et le muret voisin, indiquent qu'ils sont tous d'une hauteur de moins de deux mètres.
Il ne résulte pas du constat en date du 31 octobre 2017 que les distances légales soient méconnues.
Il n'est produit aucune pièce depuis 2017 qui soit susceptible d'illustrer les nuisances alléguées.
- sur le préjudice résultant du défaut d'entretien
Les consorts [B] justifient faire réaliser chaque année des travaux d'élagage du pin et d'entretien des haies.
M. [B] sera donc débouté de sa demande d'indemnisation du préjudice subi du fait du défaut d'entretien des végétaux imputé à ses voisins.
- sur la demande d'indemnisation du préjudice subi du fait d'une action abusive et dilatoire
M. [K] sollicite une somme de 10 000 euros de ce chef .
Il résulte du rappel de la procédure que le bornage judiciaire a été rendu nécessaire par le refus par M. [K] d'un bornage amiable.
L'action engagée par les consorts [B] n'est donc en rien fautive.
Il sera donc débouté de sa demande.
- sur les demandes d'indemnisation du préjudice financier, du préjudice moral
M. [K] sollicite les sommes de 17 731,57 euros en réparation de son préjudice financier, de 10 000 euros en réparation de son préjudice moral.
Le préjudice finacier inclut divers frais dont la suréléevation du conduit de cheminée, les honoraires d'expertise, les frais de conciliation, d' avocat.
Il n'est nullement démontré que les travaux de surélévation du conduit de cheminée soient imputables au pin voisin.
En l'absence de démonstration d'une faute imputable à ses voisins, il appartient à M. [K] de supporter les frais qu'il a cru nécessaire d' exposer.
- sur les autres demandes
Il résulte de l'article 696 du code de procédure civile que ' La partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. (...).'
Compte tenu de la solution apportée au présent litige, les dépens d'appel seront fixés à la charge des parties chacune pour moitié.
Il est équitable de laisser à la charge de chacune des parties les frais irrépétibles exposés.
PAR CES MOTIFS :
statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort
-confirme le jugement en ses dispositions soumises à la cour sauf en ce qu'il a :
-condamné Monsieur [K] à déplacer la clôture qu'il a mise en place de telle sorte qu'aucun empiétement n'existe et que la limite séparative homologuée soit strictement respectée sous astreinte provisoire journalière de 100 euros durant 30 jours à compter de la signification à intervenir de la présente décision ;
Statuant de nouveau sur les points infirmés :
-déboute les consorts [B] de leur demande de déplacement de la clôture
Y ajoutant :
-déboute les parties de leurs autres demandes
-condamne M. [K] et les consorts [B] aux dépens d'appel qui seront partagés pour moitié
-laisse à la charge de chacune des parties les frais irrépétibles exposés par elle en appel
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,