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30/03/2023 | FRANCE | N°23/00012

France | France, Cour d'appel de Poitiers, Référés premier président, 30 mars 2023, 23/00012


Ordonnance n 15

















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30 Mars 2023

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N° RG : 23/00012 -

N° Portalis : DBV5-V-B7H-GXZA

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S.A.R.L. LJC CONSTRUCTION

C/

[N] [I], [E] [I]

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R E P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE POITIERS



ORDONNANCE DE LA PREMIERE PRÉSIDENTE



RÉF

ÉRÉ









Rendue publiquement le trente mars deux mille vingt trois par Madame Estelle LAFOND, conseillère chargée du secrétariat général de la première présidence déléguée par la première présidente de la cour d'appel de Poitiers...

Ordonnance n 15

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30 Mars 2023

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N° RG : 23/00012 -

N° Portalis : DBV5-V-B7H-GXZA

---------------------------

S.A.R.L. LJC CONSTRUCTION

C/

[N] [I], [E] [I]

---------------------------

R E P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE POITIERS

ORDONNANCE DE LA PREMIERE PRÉSIDENTE

RÉFÉRÉ

Rendue publiquement le trente mars deux mille vingt trois par Madame Estelle LAFOND, conseillère chargée du secrétariat général de la première présidence déléguée par la première présidente de la cour d'appel de Poitiers, assistée de Monsieur Damien LEYMONIS, greffier placé, lors des débats, et de Madame Inès BELLIN, greffière, lors de la mise à disposition,

Dans l'affaire qui a été examinée en audience publique le seize mars deux mille vingt trois, mise en délibéré, par mise à disposition au greffe, au trente mars deux mille vingt trois.

ENTRE :

S.A.R.L. LJC CONSTRUCTION

Société immatriculée au registre du commerce et des sociétés de NIORT

sous le n° 822 952 701

dont le siège social est sis :

[Adresse 1]

[Localité 2]

prise en la personne de son représentant légal domicilié audit siège,

Représentée par Me Emmanuelle MONTERAGIONI-LAMBERT de la SCP ELIGE LA ROCHELLE-ROCHEFORT, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT, substituée par Me Olivier DUNYACH, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT,

DEMANDERESSE en référé,

D'UNE PART,

ET :

Madame [N] [I]

née le 07 décembre 1962 à [Localité 6] (79)

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Jérôme CLERC de la SELARL LEXAVOUE POITIERS-ORLEANS, avocat au barreau de POITIERS

Monsieur [E] [I]

né le 18 décembre 1961 à [Localité 5] (79)

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représenté par Me Jérôme CLERC de la SELARL LEXAVOUE POITIERS-ORLEANS, avocat au barreau de POITIERS

DEFENDEURS en référé,

D'AUTRE PART,

Faits et procédure :

Les époux [I] sont propriétaires d'un bien immobilier situé sur une parcelle voisine de celle appartenant aux époux [W].

Les époux [W] ont confié la construction d'une maison à usage d'habitation à la société LJC CONSTRUCTION.

Les plans d'exécution prévoyaient une construction en limite de propriété.

Les époux [I] ont consenti, aux termes d'une convention signée avec les époux [W], à la démolition du mur mitoyen sur toute la longueur du pignon de la future maison.

Arguant que la convention n'aurait pas été respectée en ce que le mur pignon n'aurait pas été construit en limite de propriété, mais en limite du mur mitoyen, de sorte la propriété ne serait plus close, alors qu'au regard de l'implantation de la maison des époux [W], le mur mitoyen aurait pu être conservé, les époux [I] ont, par exploit en date du 31 août 2022, fait assigner la société LJC CONSTRUCTION devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Niort.

Selon ordonnance en date du 5 janvier 2023, le juge des référés a :

- constaté l'obligation de réparer de la société LJC CONSTRUCTION qui a procédé à une implantation fautive de la construction dont elle avait la charge, l'obligeant à remettre en état le mur démoli au préjudice de Monsieur et Madame [I],

- condamné la société LJC CONSTRUCTION à remonter la partie du mur démolie en continuité et harmonie architecturale et visuelle des parties restées en leur état fonctionnel de clôture et ce dans le délai d'un mois à compter de la signification de la présente décision, sous astreinte provisoire de 300 euros par jour de retard passé ce délai et ce pendant trois mois ;

- s'est réservé le contentieux de liquidation de l'astreinte provisoire ;

- condamné la SARL LJC CONSTRUCTION à payer 4 000 euros solidairement à Monsieur [D] [I] et Madame [N] [I] au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la SARL LJC CONSTRUCTION aux dépens.

La société LJC CONSTRUCTION a interjeté appel de ladite ordonnance selon déclaration enregistrée le 19 janvier 2023.

Elle expose avoir sollicité, par l'intermédiaire de son conseil, l'accord des époux [I] pour suspendre amiablement l'exécution provisoire concernant la reconstruction du mur et que le conseil des époux [I] aurait, selon courrier officiel, refusé de renoncer amiablement à l'exécution provisoire.

Par exploit en date du 23 février 2023, la société LJC CONSTRUCTION a fait assigner Monsieur et Madame [I] devant la première présidente de la cour d'appel de Poitiers, aux fins d'obtenir, par application des dispositions de l'article 514-3 du code de procédure civile, l'arrêt de l'exécution provisoire assortissant l'ordonnance rendue par le président du tribunal judiciaire de Niort.

L'affaire a été appelée à l'audience du 16 mars 2023.

La société LJC CONSTRUCTION fait valoir que le juge des référés a écarté le fondement du trouble manifestement illicite invoqué par les époux [I] et a fait droit à leur demande en retenant l'existence d'une obligation non sérieusement contestable alors que la demande des époux [I] se heurtait à plusieurs contestations sérieuses et relèverait donc de l'appréciation du juge du fond, de sorte que le juge des référés aurait excédé ses pouvoirs.

La société LJC CONSTRUCTION indique ainsi ne pas être partie à la convention régularisée entre les époux [W] et [I], de sorte qu'elle ne lui serait pas opposable.

Elle soutient avoir implanté la construction en limite de propriété conformément aux plans du permis de construire et aux plans d'exécution et qu'il ne saurait lui être reproché de ne pas avoir « rempli l'espace dégagé par la démolition ».

Elle fait en outre valoir ne pas avoir procédé à la démolition de l'ouvrage litigieux, laquelle aurait été confiée, par les époux [W], à Monsieur [Z] [C], entrepreneur individuel.

La société LJC CONSTRUCTION soutient que l'exécution provisoire entraînerait des conséquences manifestement excessives en ce qu'il ne serait pas certain que la reconstruction du mur à l'identique soit techniquement possible.

Elle fait en outre valoir que la reconstruction de l'ouvrage impliquerait la mise en place d'une étanchéité à la jonction entre le mur pignon et le mur mitoyen, laquelle nécessitera l'accord des époux [W] qui ne sont pas parties à la procédure.

La société LJC CONSTRUCTION indique par ailleurs que le coût de cette intervention se chiffre à une somme de 6 346,65 euros et qu'en cas de réformation de la décision litigieuse, il appartiendra aux époux [I] de prendre en charge le coût de cette reconstruction mais également le coût de la démolition de l'ouvrage.

Elle sollicite la condamnation solidaire des époux [I] à lui payer la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Les époux [I] font valoir que la société LJC CONSTRUCTION ne développe des moyens qu'aux fins d'arrêt de l'exécution provisoire de l'ordonnance dont appel en ce qu'elle l'a condamné « à remonter la partie du mur démolie en continuité en harmonie architecturale et visuelle des parties restées en leur état fonctionnel de clôture et dans le délai d'un mois à compter de la signification de la présente décision, sous une astreinte provisoire de 300 euros par jour de retard passé ce délai et ce pendant trois mois ».

Ils indiquent s'en rapporter à l'appréciation du tribunal s'agissant de l'exécution provisoire de ce chef de la décision critiquée, mais s'opposent à l'arrêt de l'exécution provisoire s'agissant des condamnations de la société LJC CONSTRUCTION à leur verser la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens, faisant valoir que la société ne développe aucune conséquence manifestement excessive que risquerait d'entraîner le règlement desdites sommes.

Les époux [I] sollicitent la condamnation de la société LJC CONSTRUCTION au paiement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et s'opposent à la demande de la société LJC CONSTRUCTION au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Motifs :

L'article 514-3 du code de procédure civile dispose qu'en cas d'appel, le premier président peut être saisi afin d'arrêter l'exécution provisoire de la décision lorsqu'il existe un moyen sérieux d'annulation ou de réformation et que l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives.

Il en découle que l'arrêt de l'exécution provisoire est subordonné à la réalisation des deux conditions, cumulatives, suivantes: la démonstration de l'existence d'un moyen sérieux d'annulation ou de réformation de la décision qui en est assortie, et la justification de ce que l'exécution de cette décision risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives.

Par ordonnance du 5 janvier 2023, le juge des référés du tribunal judiciaire de Niort a :

- constaté l'obligation de réparer de la société LJC CONSTRUCTION qui a procédé à une implantation fautive de la construction dont elle avait la charge, l'obligeant à remettre en état le mur démoli au préjudice de Monsieur et Madame [I],

- condamné la société LJC CONSTRUCTION à remonter la partie du mur démolie en continuité et harmonie architecturale et visuelle des parties restées en leur état fonctionnel de clôture et ce dans le délai d'un mois à compter de la signification de la présente décision, sous astreinte provisoire de 300 euros par jour de retard passé ce délai et ce pendant trois mois ;

- s'est réservé le contentieux de liquidation de l'astreinte provisoire ;

- condamné la SARL LJC CONSTRUCTION à payer 4 000 euros solidairement à Monsieur [D] [I] et Madame [N] [I] au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la SARL LJC CONSTRUCTION aux dépens.

Au titre des moyens sérieux, la société LJC CONSTRUCTION fait valoir que le juge des référés a écarté le fondement du trouble manifestement illicite invoqué par les époux [I] et a fait droit à leur demande en retenant l'existence d'une obligation non sérieusement contestable.

Elle soutient que la demande des époux [I] se heurterait à plusieurs contestations sérieuses et relèverait donc de l'appréciation du juge du fond, de sorte que le juge des référés aurait excédé ses pouvoirs.

L'article 835 alinéa 2 du code de procédure prévoit que le président du tribunal judiciaire peut dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

Ce texte impose au juge, avant d'ordonner l'exécution d'une obligation de faire, de rechercher si l'obligation n'est pas sérieusement contestable.

Il y a lieu de retenir qu'une contestation sérieuse survient lorsque l'un des moyens de défense opposé aux prétentions du demandeur laisse subsister un doute sur le sens de la décision qui pourrait éventuellement intervenir par la suite sur ce point si les parties entendaient saisir les juges du fond.

En l'espèce, les moyens invoqués par la société LJC CONSTRUCTION tenant à l'inopposabilité de la convention régularisée le 15 novembre 2021 entre les époux [W] et [I] et à l'implantation de la construction en limite de propriété doivent s'analyser comme des contestations sérieuses.

Dès lors, le moyen soulevé doit être considéré comme sérieux au sens des dispositions susvisées.

En l'espèce, la société LJC CONSTRUCTION a notamment été condamnée « à remonter la partie du mur démolie en continuité et harmonie architecturale et visuelle des parties restées en leur état fonctionnel de clôture et ce dans le délai d'un mois à compter de la signification de la présente décision, sous astreinte provisoire de 300 euros par jour de retard passé ce délai et ce pendant trois mois ».

Il y a lieu de constater que l'exécution d'une telle mesure en vertu d'un jugement qui n'est pas définitif emporte, en raison du caractère irréversible de la situation qu'elle créé, des conséquences manifestement excessives.

En conséquence, il y a lieu d'ordonner l'arrêt de l'exécution provisoire de l'ordonnance rendue par le juge des référés du tribunal judiciaire de Niort le 5 janvier 2023 en ce qu'elle a condamné la société LJC CONSTRUCTION à remonter la partie du mur démolie en continuité et harmonie architecturale et visuelle des parties restées en leur état fonctionnel de clôture et ce dans le délai d'un mois à compter de la signification de la présente décision, sous astreinte provisoire de 300 euros par jour de retard passé ce délai et ce pendant trois mois.

La société LJC CONSTRUCTION ne faisant état d'aucune conséquence manifestement excessive que risquerait d'entraîner le règlement de la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les dépens de première instance, il n'y a pas lieu d'ordonner l'arrêt de l'exécution provisoire de la décision litigieuse de ce chef, d'autant qu'il convient de constater que la société LJC CONSTRUCTION justifie du règlement de la somme de 4 140 euros sur le compte CARPA de son conseil en règlement de ces condamnations.

L'équité justifie de laisser à chacune des parties la charge de ses propres frais irrépétibles et dépens.

Décision :

Par ces motifs, nous, Estelle LAFOND, conseillère chargée du secrétariat général de la première présidence déléguée par la première présidente de la cour d'appel de Poitiers, statuant par ordonnance contradictoire :

Ordonnons l'arrêt de l'exécution provisoire de l'ordonnance rendue par le juge des référés du tribunal judiciaire de Niort le 5 janvier 2023 en ce qu'elle a condamné la société LJC CONSTRUCTION à remonter la partie du mur démolie en continuité et harmonie architecturale et visuelle des parties restées en leur état fonctionnel de clôture et ce dans le délai d'un mois à compter de la signification de la présente décision, sous astreinte provisoire de 300 euros par jour de retard passé ce délai et ce pendant trois mois,

Déboutons la société LJC CONSTRUCTION de sa demande d'arrêt de l'exécution provisoire de l'ordonnance rendue par le juge des référés du tribunal judiciaire de Niort le 5 janvier 2023 en ce qu'elle l'a condamnée à payer à Monsieur [D] [I] et Madame [N] [I] la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens ;

Disons n'y avoir lieu à article 700 du code de procédure civile ;

Disons que chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens.

Et nous avons signé la présente ordonnance avec la greffière.

La greffière, La conseillère,

[G] [U] [V] [K]


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Poitiers
Formation : Référés premier président
Numéro d'arrêt : 23/00012
Date de la décision : 30/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-30;23.00012 ?
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